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rappelait, dans de plus grandes proportions, celles établies au quai aux Fleurs, dont l'utilité était si incontestable.

MARCHÉ AU LINGE. - Parmi les travaux d'utilité publique et d'embellissement ordonnés dans Paris, on annonçait, pour un temps très-rapproché, le déblaiement de la place où est située la tour Saint-Jacquesla-Boucherie. Les maisons environnantes devaient être alignées : le marché au Linge et aux Habits, qui se tient en cet endroit, devait être transporté sur un autre point, et ce vieux reste d'architecture chrétienne de la renaissance, entièrement dégagé, allait paraître dans toute sa beautė.

La tour Saint-Jacques-la-Boucherie était simplement adossée à l'église de ce nom, comme cela se voit en France, et surtout en Italie, dans une foule d'anciennes églises. Les premières cloches, dont l'invention est attribuée à saint Philippe, évêque de Nôle, étaient toutes placées sur un monument élevé sur une tour séparée de la basilique.

Dans une bulle du pape Calixte II, en 1119, il est fait, pour la première fois, mention de l'église Saint-Jacques-la-Boucherie. Ce nom de la Boucherie lui venait de son voisinage de la porte du Châtelet, où était la boucherie la plus importante de la ville. Cette église n'avait, par elle-même, rien de bien remarquable. Elle avait été rebâtie sous Philippe-Auguste, dans un style gothique très-ordinaire. C'était un des édifices religieux qui avaient droit d'asile. Ce droit n'a pas toujours été respecté.

En 1358, sous le roi Charles V, un changeur ayant assassiné Jean Baillet, contrôleur des finances, s'y réfugia; mais le dauphin, depuis Charles VI, l'en fit arracher de vive force, et le fit étrangler. L'évêque de Paris crut devoir, en cette circonstance, interdire l'église. Il fit décrocher le cadavre du meurtrier, et lui fit faire de magnifiques obsèques. Parmi les personnages célèbres en tout temps enterrés à Saint-Jacques-la-Boucherie, il faut citer Nicolas Flamel, sous Charles VI et Charles VII, pauvre écrivain, devenu si colossalement riche en peu de temps, qu'on lui attribuait la trouvaille de la pierre philosophale; puis, Jean Fernel, médecin d'Henri II, et accoucheur de la reine Catherine de Médicis. C'était un si habile homme, qu'à chacune de ses couches, Catherine lui donnait la somme, alors considérable, de 12,000 écus d'or,

Quant à la tour, elle date de 1508-1522. Elle fut bâtie de l'argent que l'on confisqua aux juifs, lorsqu'ils furent chassés de Paris.

En 1790, l'église Saint-Jacques-la-Boucherie fut supprimée. Devenue propriété nationale, elle fut vendue en l'an V (1797), et démolie peu de temps après. La tour avait été comprise dans cette vente, et aucune clause n'imposait à l'acquéreur l'obligation de la conserver; toutefois cet acquéreur, nommé Dubois, ne l'abattit point. Ses héritiers, le 27 août 1836, la vendirent à la ville de Paris, moyennant la somme de 250,000 fr.

Le marché, situé au pied de la tour, et qui couvre l'emplacement de l'ancienne église, occupe une superficie de quatorze cents mètres on pourra donc faire là une place spacieuse, et qui embellira le quartier, l'un des plus sombres et des plus sales de Paris.

Egouts.

Dans une ville comme Paris, la construction des égouts doit être placée au premier rang parmi les travaux qui tiennent à la salubrité, soit par la circulation souterraine des eaux ménagères ou pluviales, soit par leur conduite dans la Seine, au-delà des limites où s'alimentent certaines fontaines publiques.

Les fossés qui, dans l'origine, furent creusés autour de Paris, servirent d'égouts. C'est à partir de 1370, que les rigoles, qui recevaient les eaux, furent en partie couvertes en maçonnerie; mais l'important de ces travaux n'était pas seulement de recevoir toutes les eaux, il fallait encore qu'elles les transportassent dans la Seine. Pour la partie septentrionale, un premier égout, dit de ceinture, fut construit à partir de l'endroit où se trouve le bassin de la Villette jusqu'au boulevard des Batignolles, d'où elles étaient envoyées à l'avenue des ChampsElysées. Bientôt cet égout devint insuffisant, à cause des constructions qui s'élevèrent sur des emplacements naguère à nu, et qui absorbaient les eaux du ciel en grande partie. Un autre égout, dit également de ceinture, fut établi à partir du quai des Ormes, et vint se décharger au quai de Billy, au-delà de la pompe à feu.

Sans vouloir suivre cet immense réservoir dans ses embranchements, nous dirons seulement que, pour faire disparaître toutes les causes d'insalubrité résultant de l'envoi des égouts dans la Seine, un

grand égout, parallèle au fleuve, a été commencé et se continue, en ce moment, dans la rue de Rivoli. Les anciens embranchements seront néanmoins conservés pour le cas où l'abondance des eaux pluviales demanderait un écoulement exceptionnel. Sur la rive gauche, le grand égout parallèle suivra la berge.

Très-certainement il viendra un temps où toutes les principales rues de la capitale auront un égout qui communiquera avec le grand égout parallèle. Ces conduits souterrains ont aujourd'hui une étendue de cent quarante mille mètres. Au commencement de 1830, on n'en comptait guère que quarante mille mètres; à la fin de 1852, on estime que les égouts présenteronl une ligne d'environ cent cinquante mille mètres:

Le grand égout, parallèle à la Seine, est construit dans des conditions toutes particulières. On peut y circuler comme au-dessus du sol, et un chemin de fer y est pratiqué pour conduire à son extrémité les immondices dont l'encombrement pourrait nuire à la libre et complète circulation des eaux.

EGOUTS LATÉRAUX.-De tous les grands travaux d'utilité publique entrepris à cette époque par la ville de Paris, un des plus considérables et des plus urgents, au point de vue de l'hygiène publique, était l'exécution d'un égout sur tout le parcours de la rue de Rivoli prolongée jusqu'à l'Hôtel de Ville.

Voici les détails de cette opération, que l'administration municipale devait entreprendre.

Il existait, à l'état de projet, un travail qui consistait à établir, sur les deux rives de la Seine, deux grands égouts latéraux, traversant Paris dans toute sa longueur, et allant déverser, en aval de la ville, les eaux et les résidus provenant de tous les égouts secondaires.

Une partie de ce travail avait eu un commencement d'exécution. En effet, depuis le pont de la Tournelle jusqu'au quai Malaquais, on avait construit, concurremment avec les nouveaux quais, un égout sur lequel était établi le chemin de halage. Cet égout devait être pro longé au fur et à mesure que devaient être rectifiés et améliorés les abords de la Seine. Voilà pour la rive gauche.

Il s'agissait ensuite de faire quelque chose pour la rive droite, et

le projet en question allait doter cette partie de la capitale d'une artère hydraulique qui devait assainir la cité et le fleuve.

Cet égout devait prendre naissance à l'extrémité du quai de la Conférence, qui, comme on sait, va du pont de la Concorde à l'allée des Veuves, un peu au-dessous de l'embouchure de l'égout de ceinture. Il devait longer le quai, s'infléchir sur la place de la Concorde, qu'il traversait en ligne droite du sud au nord. Parvenu au Garde-Meuble, il devait suivre directement la rue de Rivoli jusqu'à l'Hôtel de Ville. Sa longueur devait être approximativement de quatre mille cinq cents mètres sa largeur devait être suffisante pour recevoir les eaux ménagères et pluviales. En cas de grandes pluies, les eaux auraient trouvé à une certaine hauteur des issues par lesquelles s'échapperait le trop plein que des embranchements auraient porté à la Seine. La masse des résidus et des matières déversés dans ce grand égout aurait présenté pour le curage des difficultés que le projet avait prévues, et dont il triomphait en établissant des banquettes dans le souterrain, sur lesquelles devait être un rail en fer pouvant porter un chariot traîné soit par des hommes, soit par des chevaux, et qui, muni d'un appareil à balayer, aurait entraîné avec facilité les boues et les autres matières déposées dans le fond de l'égout.

Ce grand travail, appliqué à la rue de Rivoli, devait être, plus tard, continué, et l'artère devait parcourir la rue Saint-Antoine, la place de la Bastille, et se prolonger jusqu'au canal Saint-Martin. La section de cet égout, depuis le quai de la Conférence jusqu'à l'Hôtel de Ville, coûtera plus de 800,000 fr.

Dans des fouilles que l'on fit à ce sujet à la place Saint-Jean, en creusant le sol à trois mètres de profondeur, on trouva une trèsgrande quantité d'ossements de toutes sortes, tibias, fémurs, omoplates, côtes, puis des crânes ayant conservé toutes leurs dents. On se trouvait, en effet, sur l'emplacement occupé par l'ancien cimetière Saint-Jean, supprimé en 1772. Ces ossements, quoique bien conservés, remontent donc à plus de quatre-vingts ans. A une époque beaucoup plus reculée, sous Philippe le Hardi, il existait déjà un cimetière sur ce point, ainsi qu'une petite place dont des constructions successives diminuèrent peu à peu l'étendue.

En 1280 et en 1300, on l'appelait place du Vieux-Cimetière. En 1331,

elle servait à un marché que le rôle de taxe de cette année appelle marciai Sainct-Jean.

Les biens de Pierre de Craon, assassin du connétable de Clisson, ayant été confisqués, son hôtel, situé au coin de la rue de la Verrerie, fut abattu en 1392. L'église Saint-Jean parvint à obtenir de Charles VII l'emplacement que la démolition de cet hôtel laissa vide.

Dans les lettres d'amortissement qui furent données à ce sujet, le 16 mai 1393, il est dit : « Que le roi a ordonné que cet hôtel fût démoli, et que l'emplacement en fût donné (excepté les vergers et jardins), aux marguilliers de Saint-Jean, pour faire un cimetière neuf, qui serait appelé le cimetière neuf de Saint-Jean. »

Ces lettres furent enregistrées à la Chambre des comptes, le 21 août 1393, et depuis ce temps cet emplacement, qui était de 815 mètres, réuni à l'ancien marché, fut destiné à un cimetière que les titres et les plans appelaient le Cimetière-Vert.

Casernes.

CASERNE RIVOLI. L'expérience avait fait connaître la nécessité d'opérer d'une manière complète le dégagement de l'Hôtel de Ville, trop resserré à l'est, et en même temps de défendre l'accès du monument sur le point où il peut être le plus facilement attaqué.

Un décret, du 23 mai 1850, déclare d'utilité publique le projet d'isolement de l'Hôtel de Ville, avec réserve, sur les terrains devenus libres, de l'emplacement qui serait jugé nécessaire pour la construction d'une caserne.

Depuis cette époque, le gouvernement ayant résolu d'exécuter cette construction aux frais de l'Etat, demanda à la ville de Paris la cession de terrains compris entre les rues Lobau, François-Miron, du Pourtour -Saint-Gervais, la place Baudoyer et la rue de la Tixeranderie.

Le conseil municipal, saisi de cette question par M. le préfet de la Seine, décida, le 12 mars 1852, qu'il y avait lieu de remettre au département de la guerre le terrain laissé libre derrière l'Hôtel de Ville, sons la réserve que la concession dont il s'agit n'ôterait pas à ce terrain son caractère municipal, et qu'en conséquence il ferait retour à la ville si, à une époque quelconque, le gouvernement renonçait à la caserne. Il réserva également l'examen, par l'administra46

T. VII.

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