Page images
PDF
EPUB

n'est imputable à celui qui les a tirées, l'incendie qu'il a accidentellement allumé ne constitue aucun délit.

Telles sont les quatre fautes qui, réunies au fait de l'incendie, peuvent constituer le délit prévu par l'art. 458. La loi ne demande point ici une intention de nuire, elle n'exige même pas la volonté d'incendie; elle suppose que l'incendie est purement involontaire, mais elle punit l'imprudence ou la négligence qui l'a occasionné : c'est cette faute qui constitue la moralité du délit.

CHAPITRE XCII.

DES ÉPIZOOTIES.

(Commentaire des art. 459, 460 et 461 du C. pén.)

2664. Dispositions réglementaires relatives aux épizooties. Anciens règlements. Arr. 27 messidor an v. Ord. 17 janv. 1815.

2665. Si ces dispositions sont encore applicables, et dans quels cas.

2666. Leur application consacrée par la jurisprudence.

2667. L'arrêt du conseil du 1er novembre 1775 n'est plus en vigueur.

2668. Application des règlements aux bestiaux non originaires des lieux infectés. 2669. De quelles peines sont passibles les contraventions aux anciens règlements et aux arrêtés des préfets.

2670. De quelles peines sont passibles les faux certificats des vétérinaires, experts et officiers municipaux.

2671. Double infraction ces règlements qualifiée délit par l'art. 459. Éléments de ce délit. Motifs des art. 459, 460 et 461.

2672. Éléments de la contravention prévue par l'art. 459.

2673. Double fait prévu par la loi : avertissement et empêchement de toute communication.

2674. Communication faite au mépris des défenses (art. 460).

2675. Aggravation du délit résultant de la contagion communiquée (art. 461). 2676. Contravention résultant de ce qu'un troupeau infecté serait sorti des terres de parcours qui lui ont été désignées.

2664. Les épizooties sont de véritables calamités qui ont dû exciter toute la sollicitude du législateur. Il a cherché par des précautions multipliées à en combattre les funestes effets; et comme la plus légère infraction à ces mesures peut avoir des résultats désastreux, il a attaché une peine à chacune d'elles.

Il importe de rapporter d'abord les textes des anciens règlements rendus sur cette matière.

Arrêt du conseil du 10 avril 1714: Ordonne que tous les propriétaires des bœufs, vaches, moutons, brebis, agneaux, chèvres, boucs et autres bestiaux qui viendront à mourir, seront tenus de les faire mettre sur-le-champ dans la terre jusqu'à trois pieds de profondeur, sans pouvoir en prendre ni enlever les peaux, à peine de cent livres d'amende pour chaque contravention. ›

Arrêt du parlement de Paris du 24 mars 1745 : « Art. 1o. Ordonne que dans les lieux où la maladie des boeufs, vaches et veaux a commencé de se faire sentir, les officiers auxquels la police appartient, chacun dans son territoire, seront tenus de prendre des déclarations et actes des bœufs, vaches et veaux de chaque particulier, et de les faire visiter par personnes à ce intelligentes, deux fois la semaine au moins, le tout sans frais, pour connaître s'il n'y a pas de bêtes infectées de maladie; enjoint à tous ceux qui ont ou qui auront du bétail malade, de le déclarer incontinent auxdits officiers, à peine de cent livres d'amende contre chaque contrevenant, pour être, les bêtes malades, séparées de celles qui seront saines. Art. 2. Ordonnons qu'aussitôt que les bêtes infectées seront mortes, les propriétaires et les fermiers seront tenus de les enterrer avec leurs peaux, lesdites bêtes préalablement coupées par quartiers, dans des fosses de huit à dix pieds de profondeur pour chaque bête, de jeter dessus de la chaux vive, etc. »

[ocr errors]

Arrêt du conseil du 19 juillet 1746: « Art. 1er. Tous propriétaires de bêtes à cornes dont les bestiaux seront malades ou soupçonnés de maladie, seront tenus d'en avertir dans le moment le principal officier de police, sous peine de cent livres d'amende, à l'effet par ledit officier de police de faire marquer en sa présence lesdits bestiaux malades ou soupçonnés avec un fer chaud d'une marque portant la lettre M et de constater que lesdites bêtes malades ou soupçonnées de maladie ont été séparées des bestiaux sains, ou enfermées dans des endroits d'où elles ne puissent communiquer avec lesdits bestiaux sains. Art. 2. Ne pourront lesdits propriétaires, sous quelque prétexte que ce soit, faire conduire dans les pâturages ni aux abreuvoirs lesdits bestiaux attaqués ou soupçonnés de maladie et seront tenus de les nourrir dans les lieux où ils auront été renfermées sous la même peine de cent livres d'amende. — Art. 3. Les syndics des paroisses dans lesquelles il y aura des bestiaux malades ou soupçonnés de maladie, seront tenus, sous peine de cinquante livres d'amende, d'en avertir, dans le jour, le subdélégué du département et de lui déclarer le nombre de bestiaux qui seront malades ou soupçonnés et qu'ils auront fait marquer, les noms des propriétaires. Art. 5. Fait S. M. très-expresses inhibitions et défenses aux habitants des villes et paroisses de la campagne, dans lesquelles la maladie se sera manifestée, de vendre aucun bœuf, vache ou veau, et à tous particuliers des autres paroisses ou étrangers d'en acheter sous peine de cent livres d'amende, tant contre le vendeur que contre l'acheteur. Art. 6. Fait pareillement S. M. défenses à tous particuliers de conduire aucuns des bestiaux, sains ou malades, des villes ou paroisses de la campagne où la maladie se sera manifestée dans aucunes foires ou marchés, et ce sous peine de cinq cents livres d'amende pour chaque contravention. Art. 7. Permet S. M. à tous particuliers, qui rencontreront, soit dans les pâturages publics, soit aux abreuvoirs, soit sur les grands chemins, soit aux foires ou marchés, des bêtes à cornes marquées de la lettre M de les conduire

[ocr errors]

devant le plus prochain juge royal ou seigneurial, lequel les fera tuer sur-lechamp en sa présence. Art. 8. Pourront néanmoins, les propriétaires des bêtes à cornes qui auront des bestiaux sains et non soupçonnés de maladie, dans un lieu où quelques-uns des bestiaux auront été attaqués, vendre lesdits bestiaux sains et non soupçonnés de maladie aux bouchers qui voudront les acheter, mais à la charge qu'ils seront tués dans les vingt-quatre heures de la vente, à peine de deux cents livres d'amende. »

Arrêt du conseil du 18 décembre 1774. Art. 1er. « Toutes les villes, bourgs et villages, voisins de ceux où la contagion est présentement établie, seront visités par les artistes vétérinaires ou autres experts qui auront été pour ce commis par les intendants desdites provinces, à l'effet de reconnaître et de constater l'état de santé ou de maladie de toutes les bêtes à cornes dans lesdits villages ou bourgs. Art. 2. Dans le cas où quelques animaux se trouveraient attaqués de la maladie contagieuse, il en sera dressé procès-verbal........ - Art. 3. Aussitôt après la confection desdits procès-verbaux, lesdites bêtes malades seront tuées et enterrées avec leurs cuirs... Art. 6. Fait S. M. très-expresses inhibitions et défenses à tous propriétaires de bestiaux de cacher ou récéler aucune bête saine ou malade, lors des visites, à peine de 50) livres d'amende. »

Arrêt du conseil du 30 janvier 1775: Ordonne que l'arrêt du 18 décembre 1774 sera exécuté selon sa forme et teneur... Ordonne que les cuirs desdits animaux seront tailladés de manière qu'on ne puisse plus en faire usage: fait S. M. très-expresses inhibitions et défenses à toutes personnes de conserver aucuns cuirs provenant d'animaux suspects de ladite maladie, de les préparer, transporter, vendre ou acheter, sous peine de 500 livres d'amende.

[ocr errors]

Arrêt du conseil du 1er novembre 1775 ... Art. 8. Il est pareillement fait défenses à tous propriétaires de bestiaux ou autres de conduire d'un lieu à un autre ou de transporter des peaux ou des cuirs ou autres matières capables de répandre la contagion, qu'ils ne soient porteurs de permissions par écrit, ni de contrevenir à aucune des ordonnances qui seront données par les commandants ou intendants, à peine de 500 livres d'amende, ou de toute autre peine par lesdites ordonnances. »

Arrêt du conseil du 16 juillet 1784: «Art. 1er. Toutes personnes, de quelque qualité et condition qu'elles soient, qui auront des chevaux ou bestiaux atteints ou soupçonnés de la morve ou de toute autre maladie contagieuse, telles que le charbon, la gale, la clavelée, le farcin et la rage, seront tenues, à peine de 500 livres d'amende, d'en faire sur-le-champ leur déclaration aux maires, échevins ou syndics des villes, bourgs et paroisses de leur résidence, pour être, lesdits chevaux et bestiaux, vus et visités sans délai.... - Art. 2. Autorise S. M. les intendants à nommer autant d'experts qu'ils le jugeront à propos pour lesdites visites. - Art. 3. Seront tenus, lesdits experts, de prêter leur ministère toutes fois et quantes ils seront requis. Fait défenses S. M. à toutes personnes de refuser l'entrée de leurs écuries, étables et bergeries auxdits experts (assistés d'un officier municipal) et d'apporter aucun obstacle à ce qu'il soit procédé auxdites visites dont il sera dressé procès-verbal, lors duquel, en cas de difficultés, les parties

[ocr errors]

intéressées pourront faire tels dires et réquisitions qu'elles aviseront et il y sera statue provisoirement et sans aucun délai par le juge qui aura autorisé la visite.......– Art. 4. Défenses sont faites de traiter aucun animal attaqué de la maladie contagieuse sans en avoir fait la déclaration... Art. 5. Les bestiaux dont la maladie contagieuse aura été reconnue incurable par les experts, seront abattus sans délai... - Art. 6. Les chevaux et bestiaux morts et abattus pour cause de maladie contagieuse seront enterrés dans des fosses de dix pieds de profondeur et les peaux en seront tailladées... Art. 7. Défenses de vendre ou exposer en vente des chevaux ou bestiaux att-ints ou suspectés de morve ou de maladies contagieuses...

[ocr errors]

2665. Tous ces règlements, sauf l'arrêt du conseil du 1er novembre 1775 (V. n. 2668), sont encore en vigueur, au moins dans celles de leurs dispositions qui prescrivent des mesures de précaution et de surveillance. Cela résulte 1o de l'art. 484, qui maintient les règlements dans toutes les matières non réglées par le Code, et l'exposé des motifs de cet article désigne parmi ces matières les épizooties et contagions; 2o de l'arrêté du Directoire exécutif du 27 messidor an v, qui déclare que ces règlements n'ont point été abrogés et en ordonne l'application; 3o enfin de l'ordonnance du 27 janvier 1815, qui porte, art. 1o : << Dans tous les lieux où a pénétré l'épizootie et dans ceux où elle pénétrera par la suite, les préfets continueront de faire exécuter strictement les dispositions des arrêts des 10 avril 1714, 24 mars 1745, 19 juillet 1746, 18 décembre 1774, 30 janvier 1775 et 16 juillet 1784, et de l'arrêté du 27 messidor an v. »

er

Cela résulte surtout des termes mêmes de l'art. 461, qui, après avoir prévu une circonstance aggravante des deux contraventions spécialement réprimées par les art. 439 et 460, ajoute: «Le tout sans préjudice de l'exécution des lois et règlements relatifs aux maladies épizootiques et de l'application des peines y portées. » L'exposé des motifs de ces articles, que nous rapporterons tout à l'heure, confirme dans les termes les plus exprès cette application.

2666. Elle a été consacrée par la Cour de cassation. La Cour d'appel de Dijon avait refusé d'appliquer les anciens règlements à un fait de transport de cuirs provenant d'animaux non atteints par la contagion dans une contrée infectée. Le pourvoi a été rejeté par les motifs suivants : « Attendu que le Code pénal de 1810, s'étant borné à définir et réprimer deux cas spéciaux, et

« PreviousContinue »