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Nous copions ces deux lignes dans le discours de M. Passy, ministre des finances, qui précède le budget de 1849.

Ainsi, deux seules dépenses s'élèvent à près d'un milliard, et peut-être même le dépasseront-elles par suite des crédits extraordinaires, supplémentaires et complémentaires dont l'usage et l'abus ont survécu à la chute de la monarchie. Ou la banqueroute,

Ou le désarmement !

La France, mal administrée, mal gouvernée, ne peut pas porter la charge accablante d'un budget qui dépasse dixhuit cent millions (1) sans recourir à de nouveaux impôts directs, qui auraient pour effet d'opérer un vide dans le trésor en même temps qu'ils y opéreraient une rentrée, car l'impôt direct, dès qu'il dépasse une certaine proportion,

(1) Commençons par remettre sous vos yeux l'État au vrai du budget de 1848; les dépenses votées, tant par le budget que par des décrets spéciaux, s'élèvent à la somme de 1,823,070,370 fr. »

(Discours de M. Passy, ministre des financos.

tarit aussitôt les ressources de l'impôt indirect. Ce que le fisc gagne d'un côté, il le perd de l'autre.

Tout accroissement de l'emprunt direct prélevé sur la production se traduit par un abaissement équivalent dans les revenus de l'impôt indirect prélevé sur la consommation; c'est là une conséquence infiniment grave, dont peutêtre on ne s'est pas toujours rendu assez exactement compte; mais, si grave que soit cette conséquence, elle est à peine secondaire quand on la rapproche de la conséquence qui résulte d'un budget de dix-huit cent vingt-cinq millions prélevé sur dix millions de contribuables électeurs.

Ou il faut réduire le budget,

Ou il faut supprimer le suffrage universel.

Mais comment le supprimer?

Eh bien qu'on retienne ces paroles, qui nous coûtent à dire Si l'on ne supprime pas le suffrage universel, et si l'on maintient le chiffre excessif du budget, de ce monstrueux accouplement naîtra immanquablement une révolution sociale.

On retombe insoucieusement dans les funestes errements de la dette flottante. On continue, comme avant le 24 février, à émettre imprudemment, criminellement, des bons du Trésor. Mais, avant le 24 février, on avait une excuse qu'aujourd'hui l'on n'a plus ! Avant le 24 février, on pouvait croire à la durée d'un gouvernement qui avait pour fondement le principe de l'hérédité et non le principe de l'élection! Avant le 24 février, on n'avait pas remis aux mains de dix millions de contribuabies-électeurs cette arme redoutable qui s'appelle le suffrage universel, et qui, d'un seul revers de vote, peut changer toute la face de la politique!

Le discours du ministre des finances, imprimé en tête du budget de 1849, évalue l'insuffisance des ressources à 530,548,758 fr. (CINQ CENT TRENTE MILLIONS cinq cent quarante-huit mille francs!) A la vérité, il exprime l'espérance qu'au moyen de nouvelles taxes demandées, du rehaussement dans le produit des impôts et des revenus indirects, et enfin des réductions opérées dans les dépenses, cette

insuffisance disparaîtra en grande partie. Au nombre des réductions importantes de dépenses, il fait entrer celles qui résulteront du plan de réorganisation de l'armée conçu par le général de Lamoricière.

Qu'est devenu ce plan?-Il est à l'état de rapport et paraît devoir être abandonné.

Que sont devenus tous les projets d'impôts: sur les créances hypothécaires, sur les défrichements, sur les successions, etc., etc.? Ils ont été écartés; le seul projet qui ait été repris à MM. Goudchaux et Trouvé-Chauvel par M. Passy, c'est l'impôt sur le revenu; mais quelles résistances ne soulèvera pas la création de cette taxe nouvelle ?

Depuis la présentation du budget de 1849, nous voyons bien que l'impôt du sel a été réduit, mais c'est en vain que nous cherchons une dépense qui ait été diminuée, une réforme qui ait été entreprise, une économie importante qui ait été opérée !

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- pour un

Lorsque l'Assemblée législative aura rétabli tous les impôts que l'Assemblée constituante a prématurément supprimés, un immense découvert subsistera encore. Comment le comblera-t-on? C'est la question que nous posons à la Sentinelle de l'Armée, qui, sous prétexte que nous lui offrons la bataille, nous déclare la guerre en ces termes : « Encore une illusion qui tombe avec les autres. Nous avions pris M. Émile de Girardin pour un écrivain sérieux et convaincu, adversaire intelligent et ferme, mais, en même temps, juste et consciencieux. Nous devons avouer que nous nous sommes trompé... Que M. de Girardin soutienne une guerre acharnée contre l'armée, nous comprenons jusqu'à un certain point le charme qu'il peut éprouver à faire admirer les tours de force de son esprit intelligent et délié. Mais est-il juste, est-il convenable, est-il prudent, de faire si bon marché de l'armée dans les circonstances exceptionnelles et périlleuses où se trouve la France? M. de Girardin a-t-il la conscience tranquille lorsqu'il ose parler de ce qu'il appelle esclavage militaire, à propos d'une pétition sur l'abolition du mode actuel de recrutement ?

» Nous, des esclaves!...

» Vous nous offrez la bataille.-Nous l'acceptons. Nous n'avons pas votre talent, mais lorsqu'il s'agit de répondre à d'incessantes provocations, il ne faut pas se demander si l'on sait se battre, il faut se demander si l'on a du cœur. »

--

Laquelle choisir entre ces deux alternatives: la banqueroute de l'État annoncée par M. Odilon Barrot, le 14 novembre 1848, ou la réduction de l'armée que nous demandons d'accord avec MM. Passy, Dumon, Benoît d'Azy, général Oudinot, Ferdinand de Lasteyrie, Bureaux de Puzy, Benjamin Delessert, Achille Fould, Odilon Barrot et Bineau (1)?

La Sentinelle de l'Armée ne veut pas qu'on réduise le budget de la guerre, elle veut donc qu'on renouvelle la banqueroute des deux tiers!

(1)« Les armées sont aujourd'hui le fardeau qui pèse le plus sur les grands États, dont elles épuisent les ressources. »

PASSY.

(Rapport du 13 septembre 1831.)

« De 1841 à 1847, les dépenses se sont augmentées de 254,009,424 fr. » En voici le détail :

Augmentation de la dette publique.

de la dette flotttante.

Administration centrale (personnel).

(matériel)

Services généraux du budget....

Service de l'Algérie..
Service colonial..

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50,000,000 soit 21 0/0

11,000,000 soit 61 0/0

1,880,000 soit 15 0/0

1,400,000 soit 55 0/0

75,000,000 soit 14 0/0

42,000,000 soit 117 0/0

15,000,000 soit 192 0/0

19,000,000 soit 23 0/0

25,000,000 soit 20 0/0

14,000,000 soit 23 0/0

» C'est au compte du ministère de la guerre et du ministère de la marine qu'il faudrait aller chercher le véritable accroissement que nos dé. penses ont éprouvé. »

A. DUMON,

ministre des finances.
(Moniteur 1847, p. 1684.)

«On vous a parlé de la diminution de l'effectif militaire. Il est évident qu'il faut qu'on réduise l'état militaire de la France, si l'on veut arriver à mettre de l'ordre dans les finances... Il faut arriver nécessairement à une réduction.

A. DENIS, BENOIST D'AZY.
(Moniteur 1847, p. 1696.)

« Le chiffre des non-valeurs est excessif. Il y a nécessité de le réduire. » Quant à moi, je crois que nos institutions militaires sont susceptibles de grandes améliorations. J'ai dit qu'il était utile, indispensable de réduire les non-valeurs, afin d'accroître le nombre des combattants et des forces vives du pays.

» J'ai signalé, en outre, l'urgence d'une meilleure répartition de nos troupes sur le territoire. Quand cette répartition sera faite, que le service sera mieux réglé, il vous sera possible de diminuer sérieusement l'effectif actuel de l'armée et d'alléger les charges du service militaire.

» On a parlé en particulier du nombre des factionnaires et des postes à fournir dans la ville de Paris. Chacun de nous est à même de voir tous

Que la Sentinelle de l'Armée s'explique! Qu'elle nous fasse connaître les moyens qu'elle possède de prélever sur la

les jours quel abus on en fait. On a cité, je crois. l'obélisque. Il n'est pas un de nous qui, en passant sur la place Louis XV, ne soit étonné de voir un grenadier ou un soldat de la garde municipale, garder quoi? L'OBÉLISQUE... Je pourrais citer beaucoup d'autres exemples. »

GÉNÉRAL OUDINOT.

(Moniteur 1847, p. 369.)

« Quel est l'emploi de ces forces dans beaucoup de cas? C'est un luxe militaire contre lequel, pour ma part, je ne puis trop protester. Je veux parler d'un luxe de factionnaires que nous trouvons à chaque pas, de ces factionnaires chargés de ne rien garder, de garder des monuments de granit qui n'ont aucun danger à courir de la libre circulation à leurs abords. Je parle surtout du luxe des doubles factionnaires... Ce que je critique, c'est qu'on en place à des portes où il n'y a rien à garder et aucun honneur à rendre. Ainsi, au Louvre, il y a deux factionnaires à chaque porte; eh bien! ces factionnaires, d'après la proportion établic par M. le rapporteur lui-même, représentent à eux seuls un effectif de deux cents

hommes,"

FERDINAND DE LASTEYRIE.

(Moniteur 1847).

Il reste établi que nous avons maintenant, pour les divisions de l'intérieur, 67,000 hommes de plus que la Restauration, en 1828, pour les mêmes divisions de l'intérieur.

>> Permettez moi d'examiner un instant ce qu'était la Restauration, et dans quelles circonstances elle se trouvait.

» La Restauration n'avait pas, comme vous l'avez aujourd'hui, des gardes nationales répandues sur toute la surface du royaume. La Restauration n'avait pas ce que vous avez maintenant, des chemins de fer qui vous permettent de porter en quelques heures des bataillons et même des escadrons, puisque vous en avez eu un exemple dernièrement de Lille à Tours. Et assurément, il n'est pas un homme, militaire ou non, qui ne conçoive que l'extrême mobilité d'un corps de troupes supplée en grande partie à sa force numérique.

» Ainsi done, la Restauration n'avait ni les gardes nationales dont vous pouvez disposer, ni les chemins de fer, qui sont un puissant moyen de multiplication de vos troupes...., et cependant elle maintenait l'ordre avec 67,000 hommes de moins que vous n'en avez maintenant. »

BUREAUX DE PUZY.

(Moniteur 1847.)

«Quant à la réduction des dépenses, une seule bien importante est possible: LA DIMINUTION DES FORCES DE TERRE ET DE MER. Cette diminution semble tellement conforme aux principes qui devraient diriger nos relations extérieures, qu'elle servirait autant notre politique que nos finances. Loin de menacer la Constitution que la France s'est donnée, l'Europe entière, ébranlée jusque dans ses fondements, est occupée à détourner l'orage qui menace tous les gouvernements; les nations sont déchirées par la guerre civile, ou bien, menacés par les progrès du libéralisme, les trônes chancelants ont trop de peine à se soutenir pour songer à renouveler la coalition de 93. Loin de nous appeler, les nationalités qui ressusci tent nous supplient de leur laisser à elles-mêmes l'honneur de triompher et de se débarrasser des langes de l'oppression étrangère. Quelle est donc cette fatale politique qui, présidant depuis deux mois aux conseils du

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