Page images
PDF
EPUB

ce, mais en Europe, cherchent sans relâche par quels moyens efficaces les peuples, lorsqu'ils seront parvenus à se soustraire aux excès de la compression militaire, pourront échapper aux périls de l'explosion révolutionnaire et fonder irrévocablement la liberté, telle que nous l'entendons: non la liberté qui est un mot, mais la liberté qui est un fait; non la liberté qui est une autre forme de la tyrannie, mais la liberté qui est l'abolition de la tyrannie sous toutes les formes et sous tous les noms.

1851.

PAIX AUX PEUPLES, GUERRE A LA MISÈRE.

"Tant qu'on se battra en Europe, cela sera une guerre ⚫ivile. "

L'EMPEREUR NAPOLÉON.
OEuvres de L.-N. Bonaparte.

8 mars 1851.

Si la Russie, tète de coalition, déclarait la guerre à la France, et que cette guerre exigeât que la France, pour sauver l'indépendance nationale, dépensât un milliard, deux milliards, trois milliards, la France les trouverait-elle ?

- Assurément oui, puisque la Grande-Bretagne les a bien su trouver pour soulever et ameuter l'Europe contre la Révolution, l'empereur et l'Empire (1).

[blocks in formation]

Eh bien! ce que nous ferions contre la Russie, pourquoi ne pas l'entreprendre contre cette puissance barbare qu'on appelle la Misère?

Si pour la vaincre il faut un milliard, deux milliards, trois milliards, sachons les trouver.

Seulement, au lieu de dépenser ces milliards à forger des fusils, employons-les à laminer des rails; au lieu de dépenser les milliards à creuser des fossés autour des villes, employons-les à achever nos canaux interrompus; au lieu de dépenser les milliards à construire des bastions, employons-les à démolir les quartiers insalubres, afin d'assainir les villes; au lieu de dépenser les milliards à nourrir des soldats oisifs, employons-les à faire travailler ces mêmes soldats, rendus au libre exercice de leur profession; au lieu de dépenser les milliards à construire par vingt-quatrièmes des vaisseaux de guerre, employons-les à diminuer le prix de revient de nos navires marchands.

[blocks in formation]

Total.

12,032,705,000 fr., qui, aux taux auxquels les emprunts avaient été faits, portaient la dette souscrite à leur occasion à 20,316,460,053 fr.

Et quand l'Angleterre faisait ces efforts gigantesques, grâce au concours de sa Banque, elle était moins riche et plus obérée que nous ne le sommes! Dans l'impossibilité de payer ses armées en marchandises et condamnée à porter tout son numéraire sur le continent, elle abaissait les coupures de ses billets jusqu'à 1 liv. st. (25 fr.), et elle étendait les émissions de la Banque d'Angleterre seule jusqu'à 700 millions, et la circulation des billets de Banque du pays entier à un milliard et demi.

[merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][subsumed][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors]

Guerre à la Misère !

Sainte guerre! car celle-ci n'exigera pas qu'il soit versé une seule goutte de sang. Pour que cette sainte guerre se termine par une glorieuse victoire, il lui suffira de laisser sur le champ de bataille toutes les dépenses inutiles créées pour un temps qui n'est plus et qui ne saurait revenir. Donc, de toutes parts, que ce cri se fasse unanimement entendre Guerre à la misère !

Ajoutons-y Paix aux peuples!

Paix aux peuples, car il n'est pas un peuple, pas un seul en Europe, qui ait le plus faible intérêt à quelque guerre que ce soit.

La Prusse s'étendit-elle aux dépens de l'Autriche ou l'Autriche aux dépens de la Prusse, le sol sur lequel vivent les populations de ces deux États rivaux en serait-il plus fertile ou moins fécond?

La France fût-elle plus petite encore que ne l'ont faite les traités de 1815, l'Europe en serait-elle plus grande? Non. Toute guerre est du sang répandu, du temps perdu, de la force enlevée au travail, de l'argent dérobé au bien-être.

De monarque à monarque, la guerre pouvait s'expliquer, car ce qui affaiblissait la puissance de l'un profitait à la grandeur de l'autre; mais de peuple à peuple, la guerre ne saurait se comprendre, car tous les peuples sont solidaires, tous ont le même droit, le droit de vivre en travaillant; tous ont le même ennemi : la Misère!

Qu'ils travaillent donc tous et ne se battent plus aucun ; qu'au lieu d'échanger des protocoles, ils échangent des produits; que partout enfin la guerre se transforme en concurrence, et en même temps que disparaîtra la Guerre disparaîtra la Misère.

Le lendemain du désarmement universel sera la veille du bien-être universel.

La paix armée, c'est la misère invétérée. Guerre à la Misère! Cette guerre qui moissonne le pauvre et qui menace le riche est la seule que devrait admettre désormais l'Eu

rope, si les hommes d'État qui la gouvernent n'étaient pas en retard d'un tiers de siècle.

A la place de ces mots :- Paix armée, hâtons-nous d'inscrire ceux-ci : Paix assurée.

Ce n'est pas seulement la liberté en danger qui l'exige, c'est aussi la civilisation en péril!

Aux noms de la civilisation et de la liberté, répétons donc encore ce cri de ralliement et de salut :

Paix aux peuples! Guerre à la Misère !

II.

9 mars 1851.

Avec la moitié de ce que coûte la guerre, en Europe, on y ferait disparaître la Misère.

Vouloir la paix universelle, c'est donc vouloir le bienêtre universel.

On dit que c'est une idée chimérique.

C'est le nom qu'on a commencé par donner à toute tentative d'amélioration avant qu'elle devint un progrès accompli.

Est-il donc utile, nécessaire, indispensable que les hommes s'entretuent?

Ne serait-il pas plus raisonnable qu'il cessassent de se mitrailler?

Raisonnable et chimérique sont-ils donc deux mots synonymes?

Cent mille hommes tués sur un champ de bataille ont-ils jamais prouvé que le droit fût du côté de la victoire?

Se compter ne vaut-il pas mieux que se battre?
Discuter ne vaut-il pas mieux que se canonner?
Que gagnent les morts à la bataille gagnée ?

A quelque point de vue qu'on l'envisage, la guerre est absurde;

Elle abâtardit les populations;

Elle appauvrit les États;

« PreviousContinue »