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des arrondissements forestiers fut fixé à vingt (ord. 22 nov.1820). 112. Depuis cette époque jusqu'en 1827, date de la promulgation du code forestier, nous n'avons à enregistrer qu'un petit nombre d'actes relatifs aux forêts. Citons cependant : 1o L'ordonnance relative à l'emploi des fonds provenant des coupes extraordinaires exécutées dans les bois communaux et d'établissements publics (ord. 5-29 sept. 1821)(1); -2° L'ordonnance qui permet aux hommes infirmes, aux femmes et aux enfants des communes riveraines de ramasser du bois dans les forêts de la couronne "ord. 12 oct. 1821).—Cette faculté a été quelquefois étendue, à itre de tolérance, aux forêts de l'État; mais, quant à ces derAières, elle n'a jamais été autorisée par ordonnance. Ces tolérance ont d'ailleurs cessé depuis longtemps.

113. La loi du 28 juillet 1824 sur les chemins vicinaux contenait, relativement aux forêts, la disposition suivante: «Toutes les fois qu'un chemin sera habituellement et temporairement dégradé par des exploitations de... forêts....., il pourra y avoir lieu à obliger les entrepreneurs ou propriétaires à des subventions particulières... Les propriétés de l'État et de la couronne contri

nement en inscriptions de rentes sur le grand-livre, dans les proportions ci-après, savoir-les conservateurs, 600 fr.; les inspecteurs, 300; les sous-inspecteurs, 200; les arpenteurs, 150; les gardes généraux, 100; les gardes à cheval, 50; les gardes à pied, 10.

13. Les coupures d'inscription qui seront fournies par les gardes à pied seront réunies en une inscription collective, dont les arrérages leur seront payés en raison de leur droit dans l'inscription générale.

14. Les cautionnements seront versés à la caisse des dépôts et consignations, qui en percevra les arrérages pour le compte des titulaires, auxquels il seront payés par chaque scmestre.-Les cautionnements ne seront restitués qu'un an après la cessation des fonctions de l'agent qui les aura fournis, et sur un certificat de l'administration forestière constatant que l'État n'a aucune répétition à faire contre cet agent pour raison de sa gestion.

15. Les dispositions des art. 12, 13 et 14 ci-dessus ne recevront leur exécution qu'après que le cautionnement en rentes, ordonné par l'art. 12, aura été autorisé par une loi.

(1) 5-29 sept. 1821.-Ordonnance du roi relative à l'emploi des fonds provenant des coupes extraordinaires des bois des communes, des hôpitaux et des établissements publics, dont l'adjudication n'excédera pas la somme de 1,000 fr.

-

LOUIS, etc.; Voulant rendre plus facile pour les communes et établissements publics l'emploi des fonds provenant des coupes extraordinaires des bois qui leur appartiennent, et modifier, à cet effet, les règles établies par notre ordonnance du 7 mars 1817; -Sur l'avis de notre ministre secrétaire d'État au département des finances, et le rapport de notre ministre secrétaire d'Etat au département de l'intérieur; notre conseil entendu, nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :

Art. 1. Les fonds provenant de coupes extraordinaires de bois des communes, des hôpitaux et des établissements publics, dont l'adjudication a'excédera pas la somme de 1,000 fr., ne seront plus versés à la caisse des dépôts et consignations. Les receveurs généraux des finances en feront le recouvrement à titre de placement en compte courant au trésor royal, pour être tenus, avec les intérêts qui en proviendront, à la disposition des établissements propriétaires, sur la simple autorisation des préfets.

2. Les receveurs généraux des finances recevront, sous les mêmes conditions et aux mêmes titres : -1° La somme de 1,000 fr. sur les coupes extraordinaires dont la vente n'excédera pas 5,000 fr.;- 2o Le cinquième du produit des coupes dont l'adjudication excédera 5,000 fr.: le surplus continuera d'être versé à la caisse des dépôts et consignations.

(2) 26 août-1er sept. 1824. Ordonnance du roi contenant une nouvelle organisation de l'administration des forêts.

Art. 1. Les eaux et forêts de notre royaume, en ce qui concerne la che, la conservation, l'exploitation et l'amélioration des bois, et la surveillance, à exercer sur les forêts appartenant aux communes et établissements publics, seront administrées par un directeur général, nommé par nous, sur la présentation de notre ministre secrétaire d'État des finances.

Les soins qui tiennent à la propriété des eaux et forêts, soit qu'il s'agisse de revendiquer, de défendre ou d'aliéner, demeurent exclusivement attribués à l'administration des domaines.

2. Il y aura près de notre directeur général des forêts trois administrateurs.Les places de secrétaire général et d'inspecteurs généraux des forêts sont supprimées.

3. Le directeur général dirige et surveille, sous les ordres de notre ministre des finances, toutes les opérations relatives au service;-Il travaille seal avec le ministre des finances; Il correspond seul avec les diverses autorités;-Il a seul le droit de recevoir et d'ouvrir la correspondance;

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bueront aux dépenses des chemins communaux, etc. » (V. Volrie). Cette loi a été remplacée par celle du 21 mai 1836 qui contient aussi (art. 14 à 17) des dispositions relatives aux dé| gradations extraordinaires occasionnées aux chemins vicinaux par les exploitations des forêts.-V. Voirie.

114. L'administration des forêts fut de nouveau réorganisée par une ordonnance du 26 août 1824 (2).— Deux autres ordonnances, des 26 août 1824 et 27 sept. 1826, créèrent et organisèrent à Nancy une école royale forestière. Les dispositions de cette ordonnance ont été refondues dans celle du 1er août 1827, rendue pour l'exécution du code forestier.-V. plus bas cette dernière ordonnance.

En 1825, il a été rendu : 1o une ordonnance déclarant qué celle du 12 oct. 1821 ne préjudiciait pas aux droits de jouissance établis sur des titres (ord. 2 fév.1825);-2o une ordonnance indiquant le mode de placement du prix des coupes faites dans les bois des communes et des établissements publics, lorsque ce prix excède la somme de 5,000 fr. (ord. 31 mars 1825) (3). 115. En 1827, une ordonnance a réglé la manière dont a

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-Il signe tous les ordres généraux de service; nistre de tous les résultats de son administration. 4. Notre ministre déterminera les parties de service dont la suite sera attribuée à chaque administrateur. Les administrateurs pourront être chargés de missions temporaires dans les départements, avec l'approbation du ministre des finances.

5. Les administrateurs et les conservateurs seront nommés par nous, sur le rapport de notre ministre des finances. — Notre ministre des finances nommera aux places d'inspecteur et de sous-inspecteur. Le directeur général nommera à tous les autres emplois, en se conformant à l'ordre hiérarchique des grades.

6. Les administrateurs se réunissent en conseil d'administration, sous la présidence du directeur général. Le conseil d'administration est nécessairement consulté sur toutes les matières contentieuses, sur les destitutions et révocations des agents forestiers, sur les dépenses à faire, demandes en remise, modération d'amendes et remboursements pour moins de mesure, soit que la décision de ces affaires appartienne au directeur général, ou qu'elle soit réservée au ministre. Le directeur général des forêts devra, en outre, faire délibérer le conseil d'administration sur tous les objets qu'il doit soumettre à l'approbation du ministre des finances, et dont la nomenclature suit : Le budget général; dispositions de service qui donneraient lieu à une dépense au-dessus de 500 fr.; changements dans la circonscription des arrondissements forestiers; suppression d'agents supérieurs; questions douteuses dans tous les cas d'application des lois, ordonnances et règlements, dans tous ceux qui ne sont pas prévus ou qui ne sont pas suffisamment définis par lesdites lois, ordonnances et règlements, et sur les instructions générales relatives à leur exécution; pourvois au conseil d'État; poursuites et appels devant les tribunaux; coupes extraordinaires dans les bois de l'Étal, des communes et a élablissements publics; cahier des charges pour les adjudications en copes annuelles; projets d'aménagement ou échanges; demandes en remise ou modération d'amendes et remboursements pour moins de mesure qui ex. céderont 500 fr.; demandes en autorisation de défricher des bois ou portions de bois d'une contenance au-dessus d'un hectare; extraction de minerai ou de matériaux dans les forêts; constructions à proximité des forêts; liquidation des pensions; mises en jugement; réclamation de toute nature contre les décisions émanées du directeur général.

7. Il sera par le directeur général, statué sur les affaires qui sont du ressort de l'administration des forêts, autres que celles mentionnées à l'article précédent, sauf le recours des parties devant notre ministre des finances.

8. Il sera établi près de l'administration des forêts, et sous la surveillance du directeur général, une école dans laquelle seront enseignées toutes les parties de l'histoire naturelle, des mathématiques et de la jurisprudence, qui ont plus spécialement rapport avec les bois et forêts. — 1 choix des professeurs, les règlements relatifs à l'organisation de l'écolt forestière, au nombre et à l'admission des élèves, au système et à la durée des études, seront approuvées par le ministre, sur le rapport du directeur général, et après avoir été délibérés dans le conseil d'administration. quelle proportion les élèves, après avoir achevé leurs cours d'étude, conLe ministre déterminera également par des règlements dans courront aux places vacantes de gardes généraux des forêts.

9. Notre ordonnance du 11 oct. 1820 continuera de recevoir son exőcution en tout ce qui n'est pas contraire aux dispositions contenues dans la présente.

(3) 31 mars-28 avril 1825. Ordonnance du roi relative au reconvrement, à titre de placement en compte courant au trésor royal, du quart du produit des coupes extraordinaires des bois des communes et établissements publics, dont l'adjudication excédera 5,000 fr.

dû se percevoir, jusqu'en 1829, l'indemnité due au gouvernement | elle-même, était composée de MM. Chauvet, Marcotte, Raison et pour frais d'administration des bois des communes (ord. 6 juin31 juill. 1827) (1).

116. Peu de temps après avoir reconstitué l'administration des eaux et forêts par l'ordonnance du 11 oct. 1820, on songea à former un code complet des diverses lois forestières alors en vigueur, mais si différentes de temps et d'origine. Tout en admirant la célèbre ordonnance de 1669, on regrettait généralement la sévérité de ses dispositions pénales, dont plusieurs avaient déjà été effacées de notre législation; quant à la loi du 29 sept. 1791, elle présentait un inconvénient grave. Elle réglementait tout à la fois l'organisation générale de la conservation des forêts et les rapports de ses fonctionnaires entre eux, ainsi qu'avec les autorités chargées de l'exécution de la loi. Il en résultait que des dispositions purement administratives se trouvaient confondues avec celles dont le seul but était de déterminer le mode de poursuite des actions. D'ailleurs cette loi, à peine ébauchée par l'assemblée constituante, n'avait jamais été considérée que comme un provisoire, une transition entre l'ancienne législation et la nouvelle. On n'y trouvait aucune disposition relative aux aménagements, ni aux règles d'administration des bois communaux, non plus qu'à la pénalité. Son article final annonçait qu'il serait statué par une loi sur ces points importants. Mais en attendant, l'ord. de 1669 et les autres règlements en vigueur devaient continuer à être exécutés, en tout ce qui n'était pas abrogé par les décrets de l'assemblée nationale. Les lois et les décrets postérieurs rapportés ci-dessus avaient eu pour objet de modifier et de compléter la loi; ce provisoire dura jusqu'en 1827.

117. Cet état de choses, qui excitait depuis longtemps les justes réclamations des magistrats et des fonctionnaires, devait enfin cesser. Le ministre des finances, par un arrêté du 20 sept. 1822, avait chargé une commission de rédiger un projet de code forestier. Cette commission, prise au sein de l'administration

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CHARLES, etc.; Sur le rapport de notre ministre de l'intérieur; Vu l'ordonnance du 5 sept. 1821, concernant le recouvrement du produit des coupes extraordinaires des bois des communes et des établissements publics; Celle du 23 avril 1823, en ce qui concerne les modifications apportées dans la comptabilité administrative; D'après l'avis de notre ministre secrétaire d'État au département des finances; Notre conseil d'État entendu, Nous avons, etc. Art. 1. Les receveurs généraux des finances feront le recouvrement, à titre de placement en compte courant au trésor royal, du quart du produit des coupes extraordinaires des bois des communes et établissements publics, dont l'adjudication excédera 5,000 fr., pour être tenu, avec les intérêts qui en proviendront, à la disposition de ces établissements sur la simple autorisation des préfets. Le surplus continuera d'être versé à la caisse des dépôts. En conséquence, celle des dispositions de l'art. 2 de lord. du 5 sep. 1821, qui prescrit le versement au trésor du cinquième du produit desdites coupes, est rapportée.

(1)€ juin-31 juill. 1827. - Loi qui proroge jusqu'au 1er janv. 1829 l'exécution des dispositions des art. 106 et 107 c. for.

Article unique. Les perceptions autorisées pour indemniser le gouvernement des frais d'administration des bois des communes ou établissements publics, sous la dénomination de droit de vacation, de décime, d'arpentage, de réarpentage, ainsi que le remboursement des frais d'instances avancés par l'administration des forêts, continueront de s'opérer comme par le passé jusqu'au 1er janv. 1829.- En conséquence, les dispositions contenues aux art. 106 et 107 c. for. ne seront exécutoires qu'à partir de ladite époque du 1er janv. 1829.

(2) Exposé des motifs du code forestier présenté à la chambre des députés par M. le vicomte de Martignac, ministre d'État, commissaire du roi (séance du 29 déc. 1826).

1. Messieurs, le roi a ordonné de vous apporter un projet de code forestier.

La conservation des forêts est l'un des premiers intérêts des sociétés, et, par conséquent, l'un des premiers devoirs des gouvernements. Tous les besoins de la vie se lient à cette conservation; l'agriculture, l'archiLecture, presque toutes les industries y cherchent des aliments et des ressources que rien ne pourrait remplacer. Nécessaires aux individus les forėts ne le sont pas moins aux Etats: c'est dans leur sein que le commerce trouve ses moyens de transports et d'échange, c'est à elles que les gouvernements demandent des éléments de protection, de sûreté et de gloire. Ce n'est pas seulement par les richesses qu'offre l'exploitation des forêts sagement combinée qu'il faut juger de leur utilité leur existence même est un bienfait inappréciable pour les pays qui les possèdent; soit qu'elles protègent et alimentent les sources et las rivières, soit qu'elles

Duteil, administrateurs des forêts; Dubois, inspecteur général; Doniol et Baudrillart, chefs de division. Les instructions du ministre indiquaient, comme bases du travail, les dispositions des lois en vigueur. Les matières susceptibles d'être réglées administrativement devaient être exclues du projet. La commission avait d'ailleurs pour mission d'indiquer toutes les modifications dont les lois existantes lui paraissaient susceptibles. Elle se livra pendant plus d'une année à ce travail.

118. Terminé en janvier 1823, ce premier projet fut sonmis à une nouvelle commission, composée d'administrateurs des forêts, de membres du conseil d'État et d'agents de la marine. M. Bertin de Vaux était le président de cette nouvelle commission, dont le premier soin fut de retrancher du projet tout ce qui pouvait appartenir à une ordonnance réglementaire, ainsi que les titres sur la chasse et sur la pêche réservés pour des lois spéciales. V. Chasse et Pêche.

La nouvelle rédaction de cette seconde commission fut encore revisée par une troisième commission, présidée par M. de Martignac, et composée de magistrats, de jurisconsultes et d'administrateurs. Le projet de code forestier fut alors provisoirement arrêté, imprimé à la fin de 1825 et distribué à la cour de cassation, aux cours royales, aux conseils généraux, aux préfets et aux conservateurs, afin que la loi fût en harmonie avec les usages et les besoins locaux. Les observations nouvelles ainsi recueillies dans toutes les parties de la France furent classées, divisées, appliquées à chaque partie du projet, et une quatrième rédaction fut enfin arrêtée, en présence de Charles X lui-même, qui manifesta le désir d'assister à la lecture du travail à présenter aux chambres. M. de Martignac, ministre d'État, fut chargé de soutenir le projet en qualité de commissaire du gouvernement. Ce fut également M. de Martignac qui rédigea l'exposé des motifs lu par lui à la chambre des députés le 29 déc. 1826 (2). Le mi

soutiennent et rafermissent le sol des montagnes, soit qu'elles exercent sur l'atmosphère une heureuse et salutaire influence. La destruction des forêts est souvent devenue, pour les pays qui en furent frappés, une véritable calamité, et une cause prochaine de décadence et de ruine. Leur dégradation, leur réduction au dessous des besoins présents ou à venir, est un de ces malheurs qu'il faut prévenir, une de ces fautes que rien ne saurait excuser, et qui ne se réparent que par des siècles de persévérance et de privation.-Pénétrés de cette vérité, les législateurs de tous les âges ont fait de la conservation des forêts l'objet de leur sollicitade particulière. Malheureusement les intérêts privés, c'est-à-dire ceux dont l'action directe et immédiate se fait sentir avec le plus de puissance et d'empire, sont fréquemment en opposition avec ce grand intérêt du pays, et les lois qui le protègent sont trop souvent impuissantes.

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2. Pendant plusieurs siècles, les efforts de nos rois luttèrent contre les abus auxquels les forêts de l'État étaient exposées, et contre les spéculations imprudentes de la propriété privée; mais ces efforts ne furent pas constamment heureux. Le désordre toujours croissant, et la nécessité d'y porter un prompt remède, fixèrent l'attention de Louis XIV; et l'ordonnance de 1669, fruit d'un long travail et des méditations de conseillers habiles, prit rang parmi les monuments d'un règne illustré par tous les genres de gloire. Les éloges qui ont été donnés à ce code étaient justes et mérités ses dispositions furent sagement et judicieusement combinées, pour satisfaire à la fois aux besoins des forêts et à ceux de la société, telle qu'elle se présentait alors aux regards du roi législateur. Les règles qu'il traçait étaient sévères; mais celle sévérité était devenue une nécessité absolue et l'expérience l'a longtemps justifiée. Quelquesunes des dispositions adoptées étaient trop restrictives de l'exercice du droit de propriété; mais à l'époque où elles furent publiées, il était permis au gouvernement de croire qu'il servait l'intérêt des particuliers euxmêmes, en les astreignant à profiter des lumières qu'il avait acquises, et à marcher avec lui dans une voie de conservation et de prospérité. temps et les événements ont fait prendre à l'industrie, à l'agriculture, à l'économie publique, un aspert tout different; ils ont, dans l'intervallo éconté, rendu difficile et embarrassée l'application à notre pays d'uno grande partie du système de gêne et de probibition etabli par l'ordonnance. Cette difficulté s'est fait ressentir successivement dans un grand nombre de ses dispositions. Les peines qu'elle prononce ont cessé d'être en proportion avec les délits qu'elles étaient destinées à punir, et en barmonie avec nos mœurs: il a dû en résulter souvent une déplorable impunité. 3. Ces inconvénients se faisaient déjà sentir avant la révolution; et la législation forestière réclamait, dès cette époque, de nombreuses modifications: elle ne tarda pas à étre frappée dans sa base. La loi du 25 déc. 1790 supprima la juridiction des eaux et forêts, et renvoya devant les ibunaux ordinaires toutes les actions introduites dans cette matière.

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nistre fait sentir l'insuffisance de la législation forestière, qui

Vous savez, messieurs, que l'ordonnance de 1669 avait lié ensemble l'administration et la juridiction; que ses dispositions de police, de répression et de conservation, avaient pour base l'existence des maîtrises qu'elle employait à la fois, et comme tribunaux judiciaires, et comme inBtruments administratifs. La suppression de la juridiction laissait l'organisation incomplète, et l'action sans force et sans lien. Le système tout entier se trouva ainsi détruit et anéanti. On reconnut aisément ce résultat de la loi du 25 déc. 1790, et on essaya de donner à l'administration des forêts, avec une organisation nouvelle, une force et une activité dont de graves et fréquents désordres faisaient reconnaître la nécessité.

La loi du 29 sept, 1791 établit quelques règles générales sur le régime des bois de l'État, quelques dispositions timides et incomplètes sur ceux des communes et des établissements publics; elle créa une administration nouvelle et détermina le mode des poursuites à exercer pour les délits forrestiers. Celle organisation, quoique faite avec soin, était néanmoins imparfaite; elle ne pouvait être que le prélude d'une législation forestière. Ses auteurs le reconnurent; car ils annoncèrent, dans le dernier article, qu'il serait fait incessamment une loi sur les aménagements, ainsi que pour fixer les règles de l'administration, et que jusque-là, l'ordonnance de 1669 et les règlements en vigueur continueraient d'être exécutés en tout ce à quoi il n'était pas dérogé. - Cette loi promise ne fut point donnée; il n'est intervenu, depuis cette époque, que des règlements partiels sur des objets spéciaux. Nous nous trouvons donc aujourd'hui entre les restes incohérents d'une ancienne législation dont la base a été renversée, et les commencements d'une législation nouvelle qui en est restée à son ébauche et n'a jamais reçu son complément. L'administration à qui est confiée notre richesse forestière a fait ses efforts pour la conserver et l'ac croitre, et pour y maintenir l'ordre et les règles. Elle espère que les détails qu'elle aura occasion de vous fournir pendant la durée de la discussion qui se prépare, vous convaincront que ses efforts n'ont pas été infructueux, et que souvent, affaiblie et désarmée en présence d'une législation en débris, elle a fait tout ce qu'on était en droit d'attendre et d'exiger d'elle.L'administration a été puissamment secondée par la sagesse éclairée des tribunaux, et particulièrement de la cour de cassation, qui n'a négligé, pour réprimer la licence, aucune des ressources que laissent au juge les Ces dispositions éparses et incohérentes des anciennes ordonnances. ressources sont aujourd'hui tout à fait insuffisantes; d'ailleurs, et, sous d'autres rapports, un tel état de choses ne peut pas durer, parce qu'il n'est nullement conforme à l'esprit de nos institutions. Il faut pour nous des dispositions précises et formelles; il faut que la loi commande dans des termes positifs et qui soient entendus de tous; que chacun connaisse clairement ce qui lui est permis, ce qui lui est défendu, et quelles sont les peines que duit appeler sur lui l'infraction des règles qui lui sont prescrites.

4. Un code forestier était donc devenu une nécessité qu'il fallait satisfaire, et on a dû s'occuper avec un soin particulier de la préparation d'un travail qui offrait des difficultés sérieuses, et qui demandait de longues méditations. Rien n'a été oublié de ce qui pouvait fournir au gouvernement d'utiles lumières. Dès 1823, des essais furent préparés dans le sein de l'administration forestière par des hommes en qui on était sûr de trouver la connaissance des besoins et des règles, et l'expérience des faits. Des membres du conseil d'État et des agents de la marine furent appelés à concourir avec l'administration à ce travail préparatoire. — Plus tard, ce premier essai fut soumis à une commission composé de magistrats, de jurisconsultes et d'administrateurs. Cette commission se livra à l'accomplissement de sa mission avec zèle et avec persévérance. Elle comprit qu'elle devait concilier les besoins de tous avec les droits de chacun; qu'il lui fallait assurer, par des mesures fortes et sages, la conservation de notre richesse forestière, premier objet de sa sollicitude, et ne soumettre toutefois l'indépendance de la propriété privée qu'à des restrictions commandées par un interèt général évident, et dont chacun pût être le juge. Après un long examen, et une discussion renouvelée à plusieurs reprises, le projet de code fut provisoirement arrêté. Mais cette première garantie ne suffit point et ne devait point suffire. On voulut appeler tous les avis, entendre tous les intérêts, provoquer toutes les critiques.

Le projet fut imprimé à la fin de la session de 1825, il fut remis à chacun de vous, messieurs, ainsi qu'à MM. les membres de la chambre héréditaire. Il fut adressé à la cour de cassation, à toutes les cours du royaume, aux conseils généraux des départements, aux préfets et aux conservateurs des forêts. Des observations furent sollicitées et accueillies avec empressement. Les cours de justice furent invitées à se réunir pour délibérer sur la communication qui leur avait été donnée, et pour rédiger leur avis. Les procès-verbaux de la cour de cassation et des cours royales ont été transmis à la commission. Cette immense collection de matériaux a été classée, divisée, appliquée à chaque partie du code projeté; une nouvelle discussion s'est établie sur chacune de ces dispositions, et d'importantes modifications ont été faites au premier projet. La rédaction nouvelle, soumise ensuite à des conseils nombreux, a subi à son tour l'épreuve des plus graves débats, el a reçu encore des modifications essentielles. - C'est ainsi qu'a été exécuté le travail

n'offrait plus au juge, pour réprimer la licence, que les dispost

qui vous est aujourd'hui présenté. Rien ne devait être négligé, mais rien ne l'a été en effet pour faciliter vos délibérations et pour vous offrir un ouvrage complet et régulier sur cette matière importante et hérissée de difficultés.

5. Le projet qui vous est présenté ne contient, ainsi que vous le concevez aisément, aucune des dispositions réglementaires et de pure admi❤ nistration qui sont du domaine de l'ordonnance. — Un grand nombre de dispositions de cette nature se trouvent dans l'ordonnance de 1669, et même dans la loi du 29 sept. 1791, mais il est facile d'en reconnaître les causes.- En 1669, le pouvoir législatif et la haute administration de l'État étaient réunis dans la personne du roi. Au mois de septembre 1791, l'assemblée législative avait déjà usurpé une partie considérable du pouvoir exécutif au préjudice de l'autorité royale. Il était simple et naturel alors que, dans ces deux actes, les dispositions législatives fussent confondues avec les mesures administratives et de pure exécution. — Aujourd'hui, il n'en peut être ainsi : la limite est clairement tracée entre les pouvoirs par nos institutions. La loi devra intervenir partout où il s'agit de la propriété appartenant à l'État et qui ne peut être aliénée sans elle. Elle sera nécessaire partout où il y aura des intérêts particuliers à régler, des prohibitions à établir, des peines à prononcer, une procéduro à suivre, partout enfin où des tiers se trouveront en point de contact avec l'administration.

Tout le reste, tout ce qui touche au mode de régie des bois de l'État, à la police intérieure de leur administration, à leur exploitation, à leur aménagement, forme la matière d'une ordonnance déjà préparée et qui doit compléter, avec la loi, le système forestier du royaume. Cette division, qui est commandée par nos lois fondamentales, a ici cet avanlage particulier qu'en donnant à ce qui doit être stable et permanent le caractère stable et permanent de la loi, elle laisse au gouvernement la faculté de modifier et d'améliorer l'administration intérieure des forêts ? et de profiter ainsi chaque jour des utiles leçons de l'expérience.

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6. Vous remarquerez encore, messieurs, que le projet de code ne contient aucune disposition relative au régime des eaux et aucun titre qui concerne la chasse. Peu de mots suffiront pour expliquer la cause de ces deux omissions. Les règles sur le régime des eaux ou la pêche ont pu et dû se trouver dans l'ordonnance de 1669. L'ordonnance avait créé ou conservé une juridiction spéciale qui s'étendait sur le sol entier de la France. Elle attribua à cette juridiction le régime des eaux, en même temps que celui des forêts; et dès lors, les règles relatives à ces deux régimes divers purent et durent être confondues dans la même loi. — La même raison ne se retrouve plus aujourd'hui. D'une part, il n'existe plus de tribunal d'exception. Les actions judiciaires relatives à la pêche, comme celles qui concernent les forêts, sont portées devant les tribunaux ordinaires. De l'autre, l'administration des forêts n'agit pour la police des eaux, que dans les lieux où elle a des agents: il existe un grand nombre de départements dépourvus de forêts et d'agents forestiers, et dans ceuxlà, la police des eaux est exercée par les autorités locales. Il n'y a donc aujourd'hui entre les règles applicables aux deux régimes aucune connexité nécessaire ni naturelle, et il a paru convenable de les séparer. Les dispositions relatives à la pêche fluviale sont l'objet d'une loi particulière qui vous sera proposée plus tard.

Des raisons plus graves encore ont empêché de considérer les règles sur la chasse comme formant aujourd'hui une dépendance naturelle du code forestier. Les points que doit résoudre une loi sur la chasse touchent aux plus grandes questions sociales, au droit de propriété et aux facultés qui en résultent, à l'intérêt de l'agriculture, à la sécurité publique elle-même. De pareilles questions, qui sont d'un ordre général, et qui ressortissent de la haute administration de l'État, ne pouvaient être traitées accessoirement à l'occasion d'un code tout à fait spécial préparé pour une administration forestière. Quelle que soit la loi particulière qui pourra régir la chasse et le port d'armes, les gardes forestiers devront veiller à son exécution dans les bois : c'est là tout ce qui peut leur être attribué; et cette attribution est de plein droit, puisqu'ils y exercent les fonctions d'officier de police judiciaire.

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Le projet de code se renferme donc dans les matières qu'indique son titre il ne s'applique qu'aux forêts, à leur conservation, à leur police, aux mesures qui peuvent en éviter la destruction ou la dégradation, aux délits et aux contraventions commis à leur préjudice.

7. Nous ne fatiguerons pas inutilement votre attention, messieurs, en faisant passer sous vos yeux les dispositions nombreuses dont a dû se composer un travail complet sur cette matière: ces détails ne pourraient être clairement reproduits dans une analyse rapide. Nous nous bornerons à vous en faire connaître l'esprit, et à vous en exposer le plan et la division. Nous vous indiquerons seulement ses dispositions principales, moins pour vous donner à leur égard des explications étendues qui seront plus utilement placées dans la discussion, que pour appeler votre attention particulière sur les points qui nous paraissent les plus dignes de la fixer.

Les forêts, soit à cause de leur importance, soit à cause de l'extrême facilité des délits dont elles ont à souffrir, ont besoin d'une protection particulière et de mesurépressives plus actives et plus efficaces que

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tions éparses et incohérentes des anciennes ordonnances; il fait les autres natures de propriété. Aussi leur a-t-on appliqué en tout temps une législation exceptionnelle et spéciale. Un coup d'œil sur notre situation forestière en fera connaître aujourd'hui l'absolue nécessité. Malgré la sévérité des anciens règlements, les forêts n'ont cessé en France de perdre de leur étendue, parce que l'augmentation de la population tend constamment à les resserrer dans des limites plus étroites. A cette cause, toujours agissante, se sont jointes, depuis quarante ans, d'autres causes dont la puissance était au moins égale. Les ordonnances antérieures à la révolution avaient porté trop loin la gêne imposée à la propriété particulière. Les lois nouvelles tombèrent brusquement dans l'abus contraire, et rendirent aux propriétaires la libre et absolue disposition de leurs bois. -Une destruction considérable fut la suite de cette imprudente transition de l'excès de la gène à l'excès de la liberté. Cet abus déplorable, dont on fut effrayé, ne fut tardivement arrêté ou suspendu que quelques années après.

Pendant que les bois des particuliers étaient ainsi sacrifiés, les communes profitèrent de leur côté des désordres de la révolution et de l'insuffisance d'une législation irrégulière, pour anticiper les coupes de leurs bois, pour les livrer aux désastreux abus du pâturage, et pour effectuer aussi de nombreux défrichements. Les bois de l'Etat eux-mêmes n'ont pas été préservés de toute atteinte. Des circonstances extraordinaires ont fait ordonner des coupes extraordinaires, et des besoins impérieux ont obligé à des aliénations.

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Dans ce moment, messieurs, le sol forestier du royaume se compose d'environ 6,500,000 hectares de bois. Cette étendue paraît considérable, mais elle doit éprouver une forte réduction si l'on en ôle les landes, les bruyères et les terrains depouillés qui s'y trouvent renfermés; et, au surplus, pour être fixé sur les ressources réelles qu'on doit attendre de cette masse de propriétés forestières, il faut en connaître la distribution. 1,100,000 hectares seulement appartiennent à l'État ou à la couronne. 1,900,000 hectares forment la propriété des communes et établissements publics. Le reste, c'est-à-dire plus de la moitié, est possédé par des particuliers. Cette dernière partie ne peut être considérée comme offrant pour le présent, et encore moins pour l'avenir, des ressources assurées à a consommation et surtout aux constructions navales.

Les bois des particuliers sont divisés en un grand nombre de parcelles. Leur aménagement n'est, ni ne peut être, sans porter une atteinte grave au droit de propriété, assujetti à aucune règle générale. Leurs coupes sont et doivent être libres: aussi sont-elles babituellement très-rapprechées. Ce système d'exploitation convient mieux à l'intérêt particulier et aux besoins renaissants des familles; mais il est en opposition manifeste avec l'intérêt général de la consommation, et cela se conçoit aisément, puisqu'il n'offre aucune ressource utile aux besoins maritimes, et qu'il ne donne que des produits bien inférieurs en quantité et en qualité à ceux qu'on obtiendrait d'un aménagement mieux entendu.

Il faut donc tenir pour certain que la division actuelle de la propriété forestière en France ne permet pas d'y trouver des ressources comparables à celles que pourrait offrir une masse égale, si elle était possédée, soit par le gouvernement, soit par de grands propriétaires, parce qu'ils sont les seuls qui peuvent différer les coupes jusqu'au moment où les arbres ont alteint le maximum de leur croissance.

8. C'est dans une pareille situation, messieurs, que le projet de code a dû être préparé, et il n'etait pas inutile de vous la faire connaître pour vous mettre en mesure d'apprécier justement les dispositions proposées. - Le premier soin des rédacteurs a été de tracer une profonde ligne de démarcation entre les bois qui doivent être soumis d'une manière plus ou moins absolue au régime forestier, et ceux qui, appartenant à des particuliers, ne peuvent être assujettis qu'à des restrictions peu nombreuses et compatibles avec l'exercice du droit de propriété. Les bois soumis au régime forestier, et dont la jouissance doit être réglée par l'administration, conformément aux dispositions de la loi, sont classés dans l'ordre suivant: 1o Les bois et forêts qui font partie du domaine de l'État; 2o Ceux qui dependent du domaine de la couronne; ·5° Ceux qui sont possédés à titre d'apanage; - 4° Les bois et forêts des communes et des établissements publics; 5° Enfin, ceux dans lesquels l'État, la couronne, les communes ou les établissements publics ont des droits de propriété indivis avec des particuliers (art. 1).

9. Après cette indication nécessaire des bois soumis à l'action de l'administration forestière, le projet s'occupe de cette administration elle même, mais seulement sous le rapport des garanties que ces agents doivent Brir, et des conditions de leur capacité. Ainsi, il détermine l'âge auquel n emploi forestier peut être exercé, l'incompatibilité de cet emploi avec Soute autre fonction, les formalités qui doivent assurer la publicité du caractère des agents, la responsabilité qui pèse sur eux lorsqu'ils ne constalent pas les délits pour la poursuite desquels ils sont institués. Au surplus, le projet ne règle rien et ne doit rien régler pour l'organisation: elle appartient tout entière à l'autorité royale (art. 3, 4, 5 et 6).

10. Le titre 3 s'applique aux bois et forêts qui font partie des domaines de l'État, et qui sont dès lors soumis à la plénitude du régime forestier. Il est nécessaire de vous en exposer rapidement les parties principales.

TOME XXV.

connaître les efforts tentés par l'administration pour arriver à

La loi règle d'abord les opérations relatives à la délimitation et au bornage. Ces opérations sont importantes, parce qu'elles touchent par tous les points à la propriété de l'État par opposition avec celle des particuliers. Toutes les précautions sont prises pour assurer les droits et les intérêts de chacun; mais si ces précautions paraissent insuffisantes aux particuliers, s'ils jugent leurs droits méconnus, tout rentre sous l'empire da droit commun, et c'est devant les tribunaux que leurs prétentions seront portées (art. 8 à 14).

Après la délimitation, on s'est occupé de l'aménagement, des adjudications des coupes, des exploitations des coupes adjugées et des réarpentages et récolements. - Ces dispositions combinées forment un ensemble qui s'explique avec facilité.

La loi déclare que les bois et forêts de l'État sont assujettis à un aménagement; elle ne règle pas cet aménagement, parce que ce règlement est un acte matériel d'administration qui n'est pas du domaine de la loi, mais elle prononce qu'il sera déterminé par une ordonnance royale (art. 15 et 16).

Les coupes dont l'aménagement permet l'exploitation doivent être adjugées. Ces coupes sont une branche importante des revenus publics: il était du plus grand intérêt de les placer à l'abri de la fraude, de la connivence et même de l'erreur. C'est ce qu'on a cherché à faire. Les mesures les plus sévères sont prises pour assurer la publicité des adjudications, la concurrence et la liberté des enchères (art. 17 à 28). - Par ce moyen, on a la certitude d'obtenir, pour l'adjudication des coupes, des produits égaux à la valeur réelle des bois adjugés.

Il faut, outre ces premières précautions, s'assurer, dans l'intérêt de la conservation des bois, que les exploitations seront régulièrement faites, qu'elles ne deviendront pas un prétexte ou un moyen pour commettre avec facilité des abus et des délits; il faut s'assurer encore que ces exploitations n'auront compris que les coupes adjugées et ne se seront pas étendues au delà (art. 29). — Le projet parait pourvoir avec prudence à toutes ces necessités. On a conservé dans l'ensemble des mesures adoptées ce que l'ordonnance de 1669 contenait de bon, d'utile et d'éprouvé, et on y a ajouté ce que l'expérience a fait juger propre à remédier aux inconvénients reconnus (art. 30 à 52).

Le même soin a été apporté pour ce qui concerne les adjudications do glandée et de panage qui présentent bien moins d'importance par ellesmêmes, mais qui peuvent devenir, si elles ne sont entourées de sages précautions, une source grave d'abus et de dommages (art. 55 à 57).

11. Il reste pour compléter le titre relatif au régime forestier, appliqué aux bois de l'État, deux sections particulières, et celles-là méritent une attention spéciale et exigent quelques explications (art. 58 à 60). — La première traite des affectations, et la deuxième des droits d'usage.

Vous savez, messieurs, que dans diverses provinces de France et dans les anciens États des ducs de Lorraine, il a été fait en faveur de certains établissements industriels des concessions de bois. Ces concessions, connues sous le nom d'affectations, consistaient dans des livraisons annuelles d'une quantité déterminée de bois, moyennant une rétribution qui n'était en aucune proportion réelle avec la valeur des matières livrées. - Quelques-unes de ces concessions contenaient la stipulation d'un terme : mais la durée des autres est indéterminée ou stipulée à perpétuité.

Il a paru indispensable de régler par la loi le sort des actes de cette nature qui touchent à la propriété de l'État, et à une de ses propriétés les plus précieuses. Pour arriver à ce règlement d'une manière juste et légale, il a suffi de leur appliquer les principes de notre législation forestière et domaniale.

L'ordonnance de 1669 contient une disposition dont voici les termes : -« Ne sera fait à l'avenir aucun don ni attribution de chauffage, pour quelque cause que ce soit, et si, par importunité ou autrement, aucunes lettres ou brevets en avaient été accordés et expédiés, défendons à nos cours de parlement, chambres des comptes, grands maîtres et officiers, d'y avoir égard. - Jamais le langage de la loi ne fut plus clair et plus énergique; jamais disposition probibitive ne fut conçue dans des termes plus absolus et plus sévères, et il parait impossible de ne pas reconnaître la nullité d'une concession qui aurait été faite au mépris de cette prohibition.

Sous un autre rapport, la nullité des actes dont il s'agit paraît encore évidente. Les affectations sans terme sont de véritables aliénations, car c'est bien incontestablement aliéner un immeuble que d'en céder les produits à perpétuité. Or, depuis le quatorzième siècle, le domaine royal était inaliénable en France, et l'ordonnance de 1566 contenait à ce sujet la disposition la plus expresse. Le même principe était établi en Lorraine; il était consacré dans les termes les plus formeis par l'édit du 21 déc. 1446, et par plusieurs édits postérieurs. Les affectations actuellement existantes ne peuvent donc être valables si on les considère comme accordées à perpétuité. Dans ce cas leur nullité serait évidente, car elles auraient été concédées en violation des dispositions prohibitives, qui formaient le droit commun. Elles ne peuvent avoir de validité et d'effet que si l'on reconnaît que le souverain en les accordant, sans en déterminer la dureo, se réservait le droit d'en fixer le terme et d'en modifier les conditions. 10

formuler un code complet de la législation forestière, et les diffé

Après avoir consulté les principes, on a dû considérer les inconvénients graves qui devaient résulter du maintien prolongé de cet état de choses. Ces inconvénients sont de diverses natures. D'abord le prix stipulé, qui ne représentait dans l'origine qu'une très-faible portion de la valeur réelle, est tombé aujourd'hui, par l'élévation progressive du prix des bois, dans une disproportion déraisonnable. - D'un autre côté, il résulte de ces livraisons forcées et sans prix réel, faites ainsi chaque année, d'une grande quantité de bois à certains établissements industriels, un véritable privilége inconciliable avec cette libre concurrence qui enrichit le pays, et que toutes les industries pareilles ont en France le droit de réclamer et d'attendre.

Il était donc juste et nécessaire de mettre un terme à un état de choses évidemment abusif. Il fallait, toutefois, apporter dans les dispositions à intervenir des menagements conformes à l'équité. Il eût été d'une rigueur qui cut touché à l'injustice d'enlever tout à coup à des établissements importants et dignes d'intérêt un de leurs principaux éléments de prospérité. L'équité voulait qu'on leur accordât le temps nécessaire pour se préparer à ce grand changement. C'est, Messieurs, ce qui est fait par le projet de loi. Il porte que les affectations concédées nonobstant les dispositions prohibitives des ordonnances et lois continueront d'être exécutées jusqu'au 1er sept. 1837, et cesseront d'avoir leur effet à l'expiration de ce terme. C'est une prorogation de dix ans que la loi accorde aux concessionnaires.

Telle est la règle que le projet contient; mais ses auteurs ont senti que vous ne pouviez voter que sur des dispositions législatives et non statuer sur des titres particuliers; ils vous ont donc proposé d'ajouter que ceux des concessionnaires qui prétendront que les actes dont ils sont porteurs ne sont pas atteints par les prohibitions rappelées et leur confèrent des droits irrévocables, pourront se pourvoir, dans les six mois, par-devant les tribunaux pour en réclamer l'exécution, en renonçant toutefois au bénéfice du délai de dix ans que le projet accorde. Ainsi, Messieurs, vous aurez accompli votre devoir de législateurs en posant des principes et des règles, et en laissant aux tribunaux le soin de les appliquer aux acles.

12. Après les affectations viennent les droits d'usage de toute espèce, exercés dans les bois de l'État, soit par les communes, soit par les particuliers. Ces droits forment, pour la propriété publique comme pour la propriété privée, le plus redoutable des dangers et la source la plus féconde de dommages et d'abus. De nombreux et puissants efforts ont été faits pour les supprimer ou pour les réduire : mais ces efforts n'ont produit que de bien faibles résultats (art. 61 et 62).

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L'ordonnance de 1669 avait abrogé la plus grande partie des droits d'usage, et avait ordonné le remboursement en argent de ceux qu'elle n'abrogeait pas; elle avait ensuite interdit pour l'avenir, dans les termes généraux et prohibitifs que vous venez de voir, toute concession pareille pour quelque cause que ce fût. Malgré l'étendue et la sévérité de ces mesures, les droits d'usage se sont maintenus; d'une part, la liquidation n'a pas été opérée; de l'autre, l'Etat a acquis des bois grevés de ces dévorantes servitudes; enfin, les abus attaqués par l'ordonnance se sont reproduits avec une force nouvelle à l'époque des désordres enfantés par la révolution. Des usurpations sans nombre vinrent se joindre alors à des titres irréguliers ou annulés, et les forêts de l'État furent menacées d'une dévastation complète.

Lorsque l'ordre commença à renaître, on sentit le besoin de mettre un terme à d'aussi funestes abus. Une loi du 19 mars 1803 (28 vent. an 11) ordonna à tous les usagers de produire leurs titres devant l'administration dans un délai déterminé, qui fut prorogé par une seconde loi du 5 mars 1804 (14 vent. an 12). Cette dernière loi déclarait déchus de tout droit d'usage ceux qui n'auraient pas produit leurs titres avant l'expiration du délai fixé. L'exécution de cette mesure a été à peu près arbitraire. Un grand nombre d'usagers, et surtout de communes, ont négligé de se présenter pendant la durée du delai. Tantôt la déchéance a été rigoureusement appliquée, tantôt il a été accordé des relevés de déchéance et des autorisations de produire. Plusieurs instances administratives et judiciaires existent encore aujourd'hui.

Il fallait prendre un parti et substituer un ordre régulier et positif à cet état d'incertitude et d'arbitraire. Celui qui a été adopté et qui vous est proposé consiste à respecter la chose jugée, à maintenir les droits actuellement reconnus et acquis, et à ordonner que les instances encore pendantes seront jugées conformément aux règles prescrites par l'ordonnance de 1669, et par les deux lois que nous avons rappelées. Cette proposition, qui paraît tout concilier, aura sans doute votre assentiment.

Obligée de respecter les droits existants, la loi a dû en régler l'exercice et concilier, autant que les choses le permettent, la conservation des forêts et les justes prétentions des usagers (art. 63). Ainsi pour l'usage en bois, le projet autorise le gouvernement à affranchir la forêt, moyennant un cantonuement; mais il décide que ce cantonnement sera réglé de gré à gré, et, en cas de contestation, par les tribunaux.

En matière de pâturage, il n'admet pas le cantonnement parce que le cantonuement ne pourrait qu'être préjudiciable à l'usager; l'État peut

rents travaux auxquels ce code a donné lieu; il donne enfix

seulement racheter la servitude moyennant une indemnité, et cette indemnité doit être également ou convenue ou fixée par les tribunau (art. 64).

Le projet détermine les époques où les droits pourront être exercés, et il les soumet à ce principe qui n'a jamais été contesté, que l'exercice en doit être réduit suivant l'état et la possibilité des forêts (art. 65). — }| détermine, en outre, le mode d'exercice des diverses espèces d'usage dont les bois sont grevés, la répression des abus et des contraventions qui peuvent être commis par les usagers, et enfin les peines qui devront être appliquées à ces abus et à ces contraventions (art. 66 à 85).

Tel est, Messieurs, l'aperçu sommaire des règles tracées par le code pour la régie et l'exploitation des bois de l'Etat soumis pleinement au régime forestier et à l'action immédiate et complète de l'administration chargée de la mise à exécution de ce régime.

15. Les bois de la couronne sont assujettis aux mêmes règles que les bois de l'Etat; mais leur administration appartient uniquement au ministre de la maison du roi, et les agents et gardes institués par ce ministre y exercent les droits et les fonctions qui appartiennent aux agents de l'administration forestière dans les bois de l'État. Ce principe est déjà consacré par la loi du 8 nov. 1814 (art. 86 à 88).

Le régime forestier porte également sur les bois constitués à titre d'apanage, mais seulement, ainsi que vous le pressentez, en ce qui touche la propriété. La propriété des forêts apanagères devant passer entière au prince appelé à la recueillir, et étant d'ailleurs éventuellement reversible l'État, la loi doit régler tout ce qui s'y rapporte: ainsi les dispositions relatives à la délimitation, au bornage, à l'aménagement, à la prohibition de grever le sol d'aucun droit d'usage, sont déclarées applicables et seules applicables aux bois possédés à titre d'apanage. C'est par ce moyen que, sans porter atteinte au droit du prince apanagé, la conservation de la propriété intacte demeure assurée (art. 89).

14. Plusieurs dispositions du régime forestier s'appliquent aussi aux bois des communes et des établissements publics. La surveillance et la régie de ces bois sont attribuées à l'administration forestière (art. 90 à 93).

L'État ne peut espérer de ressources pour ses constructions de tout genre que dans ses propriétés, dont l'insuffisance est manifeste, et dans celles des communes. D'un autre côté, la bonne administration des bois des communes, et un aménagement régulier qui en assure la conservation et en élève les produits, sont du plus grand intérêt pour les communes elles-mêmes.

Le projet a donc dû maintenir sur ce point le principe actuellement existant, mais il fait à son application toutes les modifications que le bien des communes pouvait réclamer. - D'abord, on ne comprend dans l'application de la règle que les bois taillis et futaies susceptibles d'une exploitation régulière; on en affranchit par conséquent les arbres épars, ceux des promenades et des places publiques. On appelle les administrateurs des communes et des établissements à toutes les opérations qui les intéressent ils choisissent leurs gardes; ils nomment leurs experts; ils assistent aux adjudications; ils délibèrent sur les travaux extraordinaires (art. 94 à 105).

Le projet ne réserve au gouvernement qu'une administration de précaution et de garantie, qui ne doit être exercée que pour le compte et au profit des communes. Il conserve pour l'indemnité des frais de cette administration la perception autorisée aujourd'hui sur le prix des coupes; mais, au moyen de cette perception, l'État doit supporter toutes les dépenses, dont une partie assez considérable est actuellement à la charge des communes (art. 106 à 112).

En examinant avec attention les divers articles dont celte section so compose, vous reconnaitrez, nous l'espérons, que la loi proposée améliore sensiblement la situation des communes et laisse néanmoins au gouvernement les garanties que, dans l'état des choses, il ne pourrait abandonner sans se rendre coupable d'une inexcusable imprévoyance.

15. Des différentes classes de bois, indiqués par la première disposition du projet comme soumis au régime forestier, il ne nous reste plus que les bois indivis entre des particuliers, d'une part; l'État, la couronne et les communes, de l'autre (art. 113 à 116).

Il fallait nécessairement qu'un mode uniforme de régie fût établi pour les bois ainsi possédés par indivision. Il était impossible d'assujettir l'État, la couronne et les communes à la volonté des particuliers copropriétaires, ni de laisser entre eux une cause toujours renaissante de discussion. Il á paru plus naturel et plus sage d'adopter pour leur intérêt commun le mode déjà réglé pour les possesseurs de l'une des parties. Le copropriétaire ne peut s'en plaindre, puisqu'aux termes de l'art. S15 c. civ., il est toujours libre de faire cesser l'indivision en requérant le partage.

16. Nous arrivons ainsi, messieurs, à des questions d'un autre ordre et auxquelles se rattache un intérêt plus pressant. Nous voulons parler des bois des particuliers. Ici, la loi doit intervenir dans la propriété privée, et nous sentons, comme vous, qu'elle ne peut le faire qu'avec de grands ménagements et uniquement dans cet intérêt de conservation qui est le lien commun de l'Etat et du propriétaire (art. 117).

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