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sera commun aux citoyens des deux Républiques. Les bateliers ou manœuvres seront assujettis neanmoins aux règlements de police concernant la navigation intérieure.

Art. 10. Afin d'activer, autant que possible, l'Agriculture, le Commerce, dans toutes les parties des deux territoires, et d'exciter l'industrie des habitants, les deux parties contractantes, pour ne laisser aucun doute sur leur vues bienfaisantes et paternelles à cet égard, sont convenues de ce qui suit:

Les produits du sol et de l'industrie des deux Républiques, passant par les frontières, n'y seront soumis à aucun droit fiscal.

Art. 11. Une concession sera accordée de commune entente par les deux Gouvernements pour l'établissement d'un chemin de fer qui reliera Port-au-Prince à Santo Domingo. Cette entreprise sera subventionnée par les deux Gouvernements.

Art. 12. Comme un témoignage de l'esprit d'harmonie et des sentiments fraternels qui animent les deux Gouvernements, et qui doivent resserrer de plus en plus les liens qui unissent les deux peuples, les hautes parties contractantes ont décidé que, dès qu'il sera permis d'évaluer par la statistique les avantages que la République d'Haïti retire de la liberté du commerce de ses frontières avec celles de la République Dominicaine, un retour de droits de douane sera fait au profit de la dernière, et cela sur le pied de la plus stricte équité.

Pour les mêmes motifs, s'il y avait lieu dans l'avenir, selon que les deux Républiques auront prospéré, le Gouvernement d'Haïti se réserve, par la statistique, le privilège réciproque de réclamer la même faveur d'un retour de droits de douane de la République Dominicaine.

Néanmoins, dès la ratification du présent Traité, la République d'Haïti mettra à la disposition de la République Dominicaine une somme de cent cinquante mille piastres en espèces ou en lettres de change sur l'Europe ou les Antilles, pour les besoins du service public.

Cette somme sera comptée par versement annuel payable d'avance pendant huit ans, durant laquelle période des études statistiques seront faites à la diligence des parties intéressées, dans le but de fixer exactement le chiffre de ce retour, et ce, sans préjudice des avances qui ont pu être faites antérieurement par la République d'Haïti à la République Dominicaine.

Art. 13. Les réclamations qui pourront être faites par l'un ou l'autre des deux Gouvernements en faveur de leurs nationaux, pour ce qui a trait à la restitution des biens immeubles qui pourront exister sur le territoire de l'un ou de l'autre Etat, et qui, au moment de la scission de 1844, constituaient des propriétés individuelles, seront réglées par un traité spécial. Le présent article est subordonné à l'approbation du Gouvernement Dominicain.

Art. 14.

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Il reste convenu que les citoyens des deux nations contractantes peuvent entrer, demeurer, s'établir ou résider dans toutes les parties des deux territoires, et ceux qui désirent s'y livrer à une industrie quelconque, auront droit d'exercer librement leur profession et leur industrie,

sans être assujettis à des droits autres ni plus élevés que ceux qui pèsent sur les nationaux respectifs. Ils pourront aussi se livrer au commerce en gros et en détail, et être consignataires et agents de change ou spéculateurs en remplissant les formalités imposées aux nationaux respectifs.

Art. 15. En conséquence de ce qui est stipule dans l'article précédent, les citoyens de chacune des deux nations contractantes qui se trouveront dans la juridiction de l'autre, auront droit de disposer de leurs biens par vente, donation, testament, ou de toute autre manière, et leurs héritiers ou ayants droit, citoyens de l'autre nation contractante, leur succéderont dans leurs biens avec ou sans testament. Ils pourront en prendre possession, que ce soit par eux-mêmes ou par procuration, et en disposeront en payant seulement les mêmes droits que les citoyens du pays étaient assujettis à payer en pareil cas. A défaut de représentant direct, on gardera ces biens conformément aux lois comme si c'étaient les biens d'un citoyen du pays, en attendant que le légitime propriétaire prenne des mesures pour les garantir. S'il surgit une contestation entre les réclamants sur la légitime propriété des biens, elle sera définitivement jugée par les tribunaux de justice du pays où se trouvent ces biens.

Art. 16. Les deux parties contractantes conviennent que les citoyens des deux Républiques pourront, par eux-mêmes ou par l'intermédiaire de fondés de pouvoir, intenter des actions réciproques devant les tribunaux, en réclamation d'animaux ou d'autres objets enlevés de leurs propriétés, en produisant les preuves nécessaires et en se soumettant à la législation de la localité où s'exerce ce droit.

Art. 17. En vue de resserrer les liens d'amitié qui unissent les deux peuples, et par principe de réciprocité, le Gouvernement Haïtien prend l'engagement de présenter à la prochaine législature du pays un amendement par lequel les natifs dominicains seront admis à acquérir des immeubles en Haïti.

Art. 18. Tout individu qui possède des propriétés, soit urbaines ou rurales, coupées par la ligne frontière, est tenu, dans le courant d'une année à dater du jour où le présent Traité sera ratifié, de déclarer par écrit, par devant le juge de paix de la commune la plus voisine dans le pays qu'il a choisi, l'élection qu'il aura faite de son domicile civil. Quant aux mineurs et autres personnes qui se trouvent sous tutelle ou curatelle, les tuteurs ou curateurs seront tenus de faire, au terme prescrit, la déclaration nécessaire.

Art. 19. ᏚᎥ un individu quelconque, propriétaire mixte, avait négligé, au bout du terme prescrit d'une année, de faire la déclaration de son domicile civil, il sera considéré, pour les effets civils, comme citoyen du pays dans lequel il avait son dernier domicile, son silence, dans ce cas, devant être considéré comme une déclaration tacite. Art. 20. La propriété des navires, quelle que soit leur capacité, est exclusivement réservée aux nationaux respectifs.

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Art. 21. Si un navire de l'une des parties fait naufrage, échoue ou supporte quelque avarie sur les côtes ou dans la juridiction de l'autre

partie, leurs concitoyens respectifs recevront, pour eux, leurs navires et leurs effets, le même secours qui est dû aux habitants du pays où est arrivé l'accident, et auront à payer les mêmes charges et les mêmes droits que ceux-ci auraient à payer en pareil cas. Si les réparations que requiert un navire échoué rendaient nécessaire le déchargement de tout ou partie de la cargaison, il ne sera payé ni droits de douane ni autres taxes, ni honoraires pour la cargaison qui sera débarquée, si ce n'est ceux que les navires nationaux paient dans le même cas.

Il est entendu toutefois que si, pendant que le navire est en réparation, on débarque la cargaison et la dépose dans un endroit destiné à la réception des marchandises pour lesquelles on n'a pas de droit à payer, sa cargaison sera sujette aux charges et honoraires qui sont légalement dues aux propriétaires du magasin où le dépôt se fait.

Art. 22. Les bâtiments de guerre de l'une des deux Républiques pourront entrer dans les ports ouverts de l'autre pour se radouber, se réparer, comme les bâtiments nationaux, en jouissant des mêmes avantages et privilèges dont jouissent ces derniers.

Art. 23. Les citoyens de l'un et de l'autre Etat ne pourront être soumis respectivement à aucune saisie ni retenue sur leurs navires, cargaisons, marchandises et effets commerciaux, pour aucune expédition militaire ni pour usage public, quel qu'il soit, sans une indemnité convenue et fixée préalablement entre les parties intérressées et suffisante pour cet usage et pour les dommages, pertes, retards et préjudices qui naîtront du service auquel on les astreint.

Art. 24. Les citoyens des deux Etats jouiront respectivement d'une entière liberté de conscience, et pourront exercer leur culte de la manière que le permettent la Constitution et les lois du pays où ils se

trouvent.

Art. 25. Pour maintenir et conserver les bonnes relations entre les deux Gouvernements, de même que pour faciliter le commerce des deux pays, les hautes parties contractantes conviennent d'établir des agents diplomatiques, des consuls et des vice-consuls dans les ports et cités qu'on jugera convenable; mais ces agents n'entreront dans l'exercice de leurs fonctions qu'après avoir obtenu du Gouvernement auprès duquel ils sont accrédités leur exequatur. Ces agents jouiront, dans leurs personnes et dans leurs propriétés, des mêmes privilèges, facultés et immunités qui sont accordés à ceux de la même classe de la nation la plus favorisée. Cependant si les consuls et les vice-consuls exercent le commerce, ils seront assujettis, à l'égard de leurs transactions commerciales, aux mêmes lois et coutumes qui régissent les simples citoyens de leur nation, ou les sujets et citoyens de la nation la plus favorisée ou la plus privilégiée.

Art. 26. Les Consuls, Vice-Consuls et Agents commerciaux ne pourront résider que dans les ports ouverts.

Art. 27. Les agents consulaires et leurs chanceliers jouiront des privilèges attachés à leur position, et ne pourront être arrêtés ni emprisonnés, excepté dans le cas de crime atroce, et, s'ils étaient commerçants,

la contrainte par corps ne pourra leur être appliquée que pour des faits de commerce, et non pour des faits civils.

Art. 28.

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Les Consuls et leurs Chanceliers ne pourront être cités à comparaître comme témoins devant les tribunaux. Quand la justice du pays nécessite qu'on prenne d'eux une déclaration judiciaire, on aura à la leur demander par écrit, ou à se transporter chez eux pour la recevoir de vive voix. Enfin ces agents jouiront de tous les autres privilèges, exemptions et immunités qui peuvent être accordés dans le pays où résident les agents de la même catégorie de la nation la plus favorisée.

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Art. 29. Les archives, et en général tous les papiers de chancelleries et secrétaireries des Consulats respectifs, seront inviolables, et, sous aucun prétexte, ni en aucun cas, ils ne pourront être saisis ni visités par l'autorité locale.

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Art. 30. Les Consuls respectifs, en cas de mort d'un de leurs nationaux sans testament ni exécuteur testamentaire, pourront: 1° soit d'office, soit sur requête des parties intéressées apposer les scellés sur les effets meubles et papiers du défunt, en informant préalablement de cette opération l'autorité compétente, qui pourra y assister, et même, si elle le juge convenable, mettre aussi son sceau sur les scellés, et, dès lors, on ne pourra lever les scellés revêtus de ce double sceau que d'un commun accord; 2° faire l'inventaire des biens de la succession en présence de l'autorité du pays, si celle-ci croit devoir concourir à cet acte; 3° faire procéder, conformément à l'usage des lieux, à la vente des biens appartenant à la succession; 4° enfin, administrer et liquider personnellement, ou nommer sous leur responsabilité un agent qui administre et liquide la dite succession, sans que l'autorité locale ait à intervenir dans ces nouvelles opérations, à moins qu'il n'y ait des réclamations contre la succession par tels ou tels citoyens du pays ou tels ou tels citoyens de nation étrangère. Dans ce cas, s'il survient quelque contestation entre les intéressés, elle sera soumise à la décision des tribunaux du territoire; et le consul agira alors comme la partie qui représente la succession. Mais les consuls seront obligés de faire annoncer la mort de l'individu dans un des journaux qui se publient dans l'étendue de leur territoire, et ne pourront livrer les biens du défunt ni leur produit à ses héritiers légitimes ou à ses mandataires, qu'après avoir payé toutes les dettes que le défunt aurait contractées dans le pays, ou après qu'il s'est écoulé un an depuis l'annonce de la mort sans qu'on ait fait aucune réclamation contre la succession.

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Art. 31. Pour ce qui concerne la police des ports, le chargement et le déchargement des navires, la sûreté des marchandises, biens et effets, les citoyens des deux pays seront respectivement assujettis aux lois et statuts locaux; néanmoins les consuls respectifs seront chargés exclusivement du maintien de l'ordre à bord des navires marchands de leur nation, et eux seuls connaîtront des altercations qui auront lieu entre les matelots, le capitaine et les officiers de l'équipage, mais les autorités locales pourront intervenir quand les désordres survenus seront susceptibles de

troubler le repos public sur terre ou en rade, et pourront également connaître de ces altercations quand un individu du pays ou un étranger s'y trouvent mêlés.

Les Consuls respectifs pourront faire arrêter et remettre à bord des navires de leurs nations les matelots déserteurs. Enfin ils se référeront par écrit aux autorités locales compétentes, et justifieront du fait par l'exhibition des registres du navire et du rôle de l'équipage, ou, si le navire était parti, par les copies des pièces justificatives dûment certifiées par eux, constatant que les hommes réclamés appartiennent à l'équipage desdits navires. Leur demande ainsi justifiée, on ne pourra leur refuser la remise des déserteurs; au contraire, on leur donnera tout moyen et secours pour les rechercher ou les arrêter. Les déserteurs seront détenus dans les prisons du pays sur la demande et aux frais des Consuls jusqu'à ce qu'il y ait une occasion pour les faire partir; s'il ne s'en présente pas au bout de trois mois, à partir du jour de l'arrestation, les déserteurs seront mis en liberté et ne pourront être recherchés une autre fois pour la même cause.

Art. 32. Il y aura amnistie pleine, générale et particulière, en faveur de tous les individus, de quelque rang, sexe ou condition qu'ils puissent être, qui auraient pris part aux événements politiques civils et militaires qui ont eu lieu entre les deux peuples. Personne, par conséquent, ne pourra, à l'avenir, être recherché ni inquiété en aucune manière, pour cause quelconque de participation directe ou indirecte, à quelqne époque que ce soit, aux événements précités. Tous les procès, poursuites ou recherches seront regardés comme non avenus.

Art. 33. Le Gouvernement Haïtien et le Gouvernement Dominicain s'engagent réciproquement à ne jamais permettre ni tolérer que, sur leurs territoires respectifs, aucun individu, aucune bande, aucun parti, s'établisse dans le but de troubler, en quoi que ce soit, l'ordre de choses existant dans l'Etat voisin. Ils s'engagent également à éloigner de leurs frontières et même à expulser de leurs territoires respectifs tous les individus qui seraient susceptibles par leur présence d'occasionner dans l'Etat voisin des troubles ou des désordres.

Cet article sera exécutoire contre les individus, les bandes et les partis qui y sont désignés, soit sur la réclamation, dûment justifiée, du Gouvernement menacé, soit sur la connaissance acquise par l'autre des faits qui pourront donner lieu à cette mesure.

Art. 34. La République d'Haïti et la République Dominicaine, sur la réquisition faite en leur nom par l'intermédiaire de leurs Consuls et Agents diplomatiques respectifs, livreront à la Justice les individus de l'une et de l'autre partie qui, étant accusés des crimes énumérés dans l'article suivant, pour les avoir commis sur le territoire de la juridiction de la partie requérante, se seront réfugiés ou seront trouvés sur le territoire de l'autre. Mais cela n'aura lieu que lorsque le fait de la perpétration du crime sera tellement prouvé que, s'il était commis dans le

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