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vase, rapportés par la sonde, et d'autres indices vinrent rassurer Colomb, et, vers la fin de la nuit suivante, à deux heures du matin, il fit voir très distinctement aux officiers de son bord la terre que bientôt les trois bâtiments purent saluer, à une distance de deux lieues au plus.

La côte que les Espagnols avaient devant les yeux, était une des Lucayes situées au nord et à l'ouest des grandes Antilles, et qui se terminent au canal de Bahama. Les sauvages, accourus à la vue des trois caravelles, parurent frappés du plus profond étonnement, en voyant des hommes nouveaux, inconnus, et dont l'air, la couleur, l'habillement et les armes paraissaient si différents des leurs. Naturellement doux, et gagnés d'ailleurs par le don de quelques bagatelles, ils firent aux Espagnols l'accueil le plus hospitalier, remplirent leurs vaisseaux de coton et de perroquets; et montrant le sud, ils leur firent entendre qu'on trouverait en abondance de ce côté, l'or dont ils portaient des plaques aux narines, et qui semblait surtout tenter leurs nouveaux hôtes.

Colomb avait abordé aux îles Lucayes, le 4 octobre 1492, il poursuivit bientôt ses reconnaissances et il se trouva le 5 décembre, à la pointe septentrionale d'Hayti, où il prit terre, le lendemain, à l'abri d'un cap, qui formait un hâvre. En l'honneur du saint dont l'église honore la mémoire en ce jour, Colomb donna à ce lieu le nom

de Saint-Nicolas, que le servé jusqu'aujourd'hui.

le

cap et port ont con

Des Castillans, envoyés à la découverte dans l'intérieur du nouveau continent, firent à leur chef un rapport enchanteur sur le pays qu'ils avaient parcouru et le comparèrent à leur patrie. Colomb, de son côté, avait entendu le chant d'un oiseau, dont les modulations lui rappelèrent les rossignols d'Europe, et quelques matelots avaient pêché sur la côte des poissons assez semblables à ceux que l'on trouve sur le littoral de l'Espagne; on nomma la nouvelle terre, l'ile Espagnole, Hispaniola ou Espagnola.

A la vue des vaisseaux et des guerriers européens, les naturels du pays prirent d'abord la fuite; mais rassurés par les sauvages des Lucayes, qui avaient suivi l'amiral, et que celui-ci envoya vers eux, ils se familiarisèrent bientôt avec la vue de leurs nouveaux hôtes. Colomb remarqua qu'ils étaient un peu plus blancs que les autres insulaires, plus petits, aussi difformes de figure, moins robustes, plus polis, plus doux, et plus traitables. Mais c'était surtout de l'or qu'il cherchait; les rapports qu'il se fit faire lui annonçaient qu'il en trouverait du côté de l'est, à la montagne de Cibao: c'est là que se dirigèrent ses vaisseaux. Pendant la route, il aperçut un port qu'il voulut visiter, et qu'il nomma Valparayso, à présent le Port de Paix. Le 21, il découvrit un autre hâvre qui fut nommé Saint-Tho

mas, le même auquel les Français ont depuis donné le nom de la Baie du Can de Louise, et qui a pris plus récemment celui de l'Acul.

Guacanahari, roi de Marien, qui, comme nous l'avons dit, avait établi sa demeure dans le port du Cap Français, envoya saluer l'amiral, auquel il fit en même temps présenter plusieurs objets en or très fin; il suivit bientôt lui-même les dons qu'il envoyait, et il s'engagea à fournir aux Espagnols autant d'or qu'ils en pourraient désirer.

A l'exemple de leur souverain, les Mariénites prodiguèrent aux Européens les marques de leur attachement; et, pour des épingles, des bonnets rouges, des chapelets, des verres, et d'autres objets d'une faible valeur, les compagnons de Colomb reçurent de ces insulaires tout ce que ceux-ci possédaient du métal si convoité; encore, ces hommes simples étaient tellement charmés de ces échanges, qu'ils s'enfuyaient à toutes jambes après les avoir faits, dans la crainte que les Espagnols ne se dédissent de leur marché.

Au sentiment de l'amitié vint se joindre bientôt celui de la terreur; et l'une, dans l'intérêt des avides Européens devait prolonger les effets de l'autre. Quelques coups de canon tirés en présence des insulaires, les frappèrent tellement de frayeur qu'ils crurent voir la foudre aux mains de leurs hôtes, et ce salutaire effroi fut redoublé quand on les eut rendus témoins des redoutables effets du boulet.

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il

« se retira ce jour-là tout pensif, et, dès lors, n'appela plus les étrangers que les fils du ton

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«nerre. »

Cependant Colomb poussait ses reconnaissances dans l'île, et y élevait un petit fort, avec le secours des insulaires, qui travaillaient gaiement à forger leurs chaînes; le fort reçut le nom de la Nativité (Navedad), en mémoire du jour de Noël, qui avait été celui de la découverte du port où cet ouvrage fut construit. L'amiral y laissa trente-huit de ses compagnons, ceux qu'il estimait les plus sensés entre tous; et il partit pour l'Espagne, emmenant avec lui quelques insulaires, preuves vivantes du succès de son entreprise. Après deux mois et demi de navigation, le vice-roi du Nouveau-Monde, rentra le 15 mars 1493, dans le port de Palos, qu'il avait quitté depuis sept mois et douze jours.

Ferdinand tenait sa cour à Barcelone; Colomb s'y rendit; son entrée fut un triomphe. Parmi les flots d'un peuple innombrable, et d'une foule de courtisans accourus au-devant de lui, il reçut d'abord par l'organe des premiers seigneurs les compliments du roi et de la reine. Les sept Indiens qu'il avait amenés ouvraient la marche; on voyait ensuite des couronnes et des lames d'or; des balles de coton; des caisses d'un poivre réputé au moins égal à celui de l'Orient; des perroquets portés sur des roseaux de vingt-cinq pieds de haut; des dépouilles de caïmans, et de lamentins, qu'on se

plaisait à regarder comme les véritables sirènes des anciens; des quadrupèdes, des oiseaux inconnus, et mille autre curiosités, dont la vue faisait redoubler, à chaque instant, les bruyantes acclamations de la foule.

Reçu par les souverains de l'Espagne, assis en dehors du palais sous un dais magnifique, Colomb fut obligé de se placer lui-même sur un siége préparé à côté du trône, et de raconter à haute voix, et la tête couverte, les principales circonstances de son voyage. Quand il eut finit son récit, le roi et la reine d'abord, et, à leur exemple, les spectateurs s'étant jetés à genoux, la musique de la chapelle exécuta un Te Deum qui termina cette, brillant. cérémonie.

Alors Ferdinand fit remettre au navigateur génois, en son nom royal et en celui d'Isabelle, d'autres lettres-patentes, plus amples et plus flatteuses que les premières; et qu'il faut rapporter ici :

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« Ferdinand et Isabelle, etc,, etc.; Puisqu'il a plu à Dieu que vous, Christophe Colomb, ayez découvert les îles que nous avons nommées dans « nos lettres, nous vous confirmons les priviléges que nous vous y avons accordés ; vous reconnais«sant amiral de l'Océan, depuis les îles Açores jusqu'à celles du Cap Vert, et du septentrion << au midi; vice-roi, et gouverneur perpétuel de « toutes les terres que vous avez découvertes, et que yous découvrirez.

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