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d'Honneur ne porte plus le sceptre; son bienfaiteur descend du trône et se condamne à un volontaire exil, pour faire place à l'ancienne dynastie qui reparaît en France, et dont les premières paroles sont des promesses de réconciliation entre le passé et le présent. Bientôt Louis XVIII octroie une Charte constitutionnelle, dont l'article 72 est ainsi conçu : La Légion-d'Honneur est maintenue; le roi déterminera les réglemens intérieurs et la décoration.

Placée ainsi sous l'égide d'un pacte solennel, inhérente, en quelque sorte, à la loi fondamentale de l'Etat, l'institution de la Légiond'Honneur pouvait se reposer sur cette auguste garantie de l'avenir. Sans doute elle ne vit pas avec indifférence le renversement d'un ordre de choses auquel elle devait son existence, et qui lui avait prodigué ses bienfaits; elle ne put répudier son illustre origine, et séparer son berceau de celui du grand Empire, dont elle était peut-être le plus bel ouvrage.

Mais, soumise et résignée aux destinées de la patrie, elle en partagea le deuil, comme elle en avait partagé la gloire. Elle avait foi, d'ailleurs, aux sermens du pouvoir nouveau, qui pouvait trouver en elle un appui, en respectant ses priviléges et ses attributions, surtout en ne lui opposant pas la rivalité d'autres Ordres exhumés du tombeau de l'ancien régime.

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CHAPITRE VII.

Fautes du gouvernement royal.—Suspension provisoire du traitement des membres de la Légion-d'Honneur. -- Suppression de la maison d'Écouen. Retour de Napoléon en France. Seconde restauration. ― Réduction provisoire du traitement des Légionnaires. Nouvelle loi en leur faveur.-Règne de Charles X.

1814-1830.

La restauration se trouvait placée dans une situation critique; elle avait des devoirs de différente nature à remplir: il lui fallait concilier à la fois les intérêts d'une nation jalouse de ses droits, et les intérêts de ceux qui l'avaient combattue pendant vingt-cinq ans sous les drapeaux de l'étranger. La noblesse, qui était res

tée fidèle aux Bourbons, réclamait des récompenses: impérieuse dans ses exigences, elle assiégeait le trône de ses doléances et de ses récriminations; elle reprochait à Louis XVIII, comme un crime, et la Charte constitutionnelle qu'il avait donnée à la France, et les concessions qu'il avait faites à la révolution de 89, dont elle consacrait presque tous les principes. D'un autre côté, la France attentive observait dans le silence la direction imprimée aux affaires ; elle ne pensait pas que ses droits dussent être sacrifiés à la reconnaissance personnelle d'une famille, envers une poignée de nobles devenus étrangers à la patrie. Il était donc bien difficile que la restauration ne fit pas des fautes. Ses fautes furent nombreuses et quand elle les reconnut, il n'était plus temps de les réparer.

Un acte qui révolta la France, et qui contribua le plus, peut-être, au succès de l'entreprise de Napoléon, lorsqu'il vint pour reconquérir son trône, fut l'atteinte portée à l'insti

tution de la Légion-d'Honneur, qui comptait dans son sein l'élite de l'armée et même de la nation, par l'ordonnance du 19 juillet 1814 1. Le traitement affecté à la décoration offrait une honorable ressource au soldat devenu vieux et souvent couvert de blessures; l'ordonnance déshérita son avenir de cette espérance, et frappa des droits acquis, des titres sacrés, d'une prescription illégale.

Ce n'était pas cependant la première fois que le pouvoir violait la Charte; l'ordonnance du 19 juillet 1814 avait donné la mesure de ce qu'il pourrait oser contre elle. Mais combien ces illégalités étaient imprudentes, lorsque déjà

I

« Le droit attaché aux membres de la Légion d'Hon de faire partie des colléges électoraux, cessera d'être exercé.

neur,

>> Les traitemens affectés à chaque grade de la Légiond'Honneur sont maintenus, et les titulairés actuels continueront d'en jouir dans la proportion de la rente dont la Légion-d'Honneur a la jouissance,

» A l'avenir, et jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, leur nomination ou promotion dans la Légiond'Honneur ne donneront droit à aucun traitement. »

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