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struiront à la fois, et d'une manière plus précise, de leurs droits et de leurs devoirs.

Rien n'a été négligé pour rendre cet ouvrage digne de l'Ordre illustre auquel il est adressé. Au centre de la vignette placée en tête de l'ouvrage, les membres de la Légion ont le droit de faire imprimer leurs noms, qualités, grades, dates de promotion, etc.; ils apprécieront sans doute l'avantage de ce titre, qui associera par un lien intime chaque Légionnaire à l'histoire de l'Ordre, et donnera à son exemplaire un caractère personnel et spécial. Il en fera, en quelque sorte, un de ces monumens de gloire privée, d'illustration héréditaire, qui trouvent une sauve garde immédiate et naturelle dans le respect religieux et le juste amourpropre des familles.

A. J. DÉNAIN.

HISTOIRE

DE LA

LÉGION-D'HONNEUR.

CHAPITRE I.

Considérations préliminaires sur les anciens ordres de cheva

lerie. Suppression de ces ordres en France.

Constitution

de l'an VIII.

AN VIII-1799.

QUAND les dernières traces de la civilisation grecque et romaine se furent effacées sous les pas des Barbares, une nuit épaisse couvrit le monde, et à peine le flambeau de l'histoire at-il pu jeter quelques lueurs dans ces ténèbres.

Alors les peuples, livrés à la merci de deux fléaux, la féodalité et la superstition unies pour les opprimer, eussent en vain demandé à des royautés souvent esclaves elles-mêmes et presque toujours impuissantes, l'intervention d'un pouvoir tutélaire; alors point d'institutions point de lois pour protéger le faible contre le fort; anarchie et despotisme, esclavage et violence, tel est le tableau qu'offre la société dans ce moyen-âge, que des mensonges intéressés ou poétiques n'ont pu réhabiliter aux yeux de l'humanité et de la philosophie.

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Mais au milieu de ces temps de misère et d'avilissement retentit une voix généreuse: c'est la chevalerie qui s'arme tout à la fois pour la défense de la faiblesse et pour le culte de la beauté institution spontanée, qui vient en aide à la société souffrante, et la protége de sa lourde épée, comme elle polit, adoucit ses mœurs par les exemples et les doctrines de la galanterie et du gai-savoir; singulier et bizarre mélange de grandeur et de ridicule, d'extra

vagance et d'héroïsme, mais que l'immortelle satire de Cervantès n'a pu déshériter de ses titres à la reconnaissance de l'histoire.

en

La chevalerie dut s'affaiblir et disparaître successivement, à mesure qu'elle fut moins nécessaire sa mission aventureuse ne pouvait se continuer devant des lois qui recomposaient l'ordre social, et auxquelles elle avait, quelque sorte, suppléé; mais du moins elle a survécu, pour ainsi dire, à elle-même, dans une glorieuse, une éternelle tradition, qu'on ne saurait séparer de son nom ni de son souvenir, la tradition de l'honneur.

Qu'un scepticisme dédaigneux mette en problème les services de la chevalerie, je le conçois : tous ses grands coups de lance, ses courses militaires, les exploits de sa vie errante ont eu de faibles résultats pour la cause de l'humanité. Il y eut aussi, sans doute, bien des preux infidèles à leur double mission ainsi qu'à leurs sermens; mais le souvenir de la chevalerie n'en est pas moins arrivé jusqu'à

nous, escorté, à travers les siècles, de nobles images, d'honorables devises. L'opinion, ou, si l'on veut, le préjugé populaire de tous les temps, a été unanime dans son respect et dans son culte pour la chevalerie; Bayard, Duguesclin, sont encore, pour le peuple, les types du véritable honneur; Bayard et Duguesclin, vos noms héroïques lui sont familiers, il les répète toujours, et vous ne lui apparaissez jamais, dans ses évocations du passé, que sous la vieille armure des chevaliers français.

On ne doit donc pas s'étonner que cette tradition de l'honneur chevaleresque ait servi de base à la création des distinctions et des ordres destinés à récompenser les différens genres de mérite chez les principaux peuples de l'Europe. Le titre de chevalier rappelle à tous les membres de ces ordres le premier devoir imposé par les statuts de l'antique chevalerie; c'est à elle qu'ils doivent demander de grandes leçons et de nobles exemples.

Montesquieu a déclaré que l'honneur est le

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