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Traité des Hypothèques, chapitre III: Si l'acte était rescindable, la ratification ne pourra préjudicier au droit des tiers intéressés à le faire rescinder, et qui pourront, en conséquence, proposer contre cet acte tous les moyens et exceptions que le mineur eût pu proposer lui-même, s'il n'eût pas ratifié; mais si l'acte n'était pas rescindable dans l'intérêt du mineur, il ne l'est pas davantage dans l'intérêt des tiers, même de ses créanciers. La ratification n'a eu d'autre effet que de dispenser celui qui a traité avec le mineur, de l'obligation de prouver que l'acte n'a pas préjudicié à ce dernier. Il sera toujours obligé de faire cette preuve à l'égard des tiers; mais s'il parvient à la faire, il en résultera que le mineur, même avant d'avoir ratifié, n'aurait pu demander la nullité de l'acte, et que, par conséquent, les tiers, quels qu'ils soient, ne le peuvent davantage. Ainsi jugé par arrêt du Parlement de Paris, rapporté au Journal du Palais, en date du 23 juillet 1667. On a également jugé en la même Cour, le 20 août 1689, que si, de deux contrats passés en minorité, et emportant tous deux hypothèque, le mineur a ratifié expressément le second, immédiatement après sa majorité, et a laissé seulement passer les dix ans accordés par la loi pour attaquer le premier, celui-ci doit être préféré. (BASNAGE, des Hypothèques, partie 1re, chapitre III.)

Ainsi ces termes de l'article 1338, sans préjudice néanmoins du droit des tiers, doivent être entendus dans le sens, que la ratification faite par l'incapable, devenu capable, emporte renonciation, de la part de celui qui ratifie aux moyens et exceptions qu'il aurait pu opposer contre cet acte; mais qu'elle n'ôte pas aux tiers, qui ont intérêt, le droit de proposer contre l'acte ratifié tous les moyens de rescision dont il était susceptible. Donc, dans l'espèce proposée, le premier créancier sera tenu, nonobstant toute ratification, de prouver que l'emprunt a été avantageux au mineur, qu'il en a profité, etc. Mais s'il fait cette preuve, il sera préféré, sans difficulté, au second créancier. D'ailleurs, un exemple va faire sentir combien la doctrine contraire serait inique. Supposons qu'avec les deniers pro

venant de l'emprunt dont il s'agit, le mineur ait acheté une maison qui se trouve encore dans ses biens, au moment où s'engage la question de priorité : ne serait-il pas souverainement injuste, que les créanciers, dont le gage se trouve augmenté de la valeur de cette maison, eussent le droit de contester l'hypothèque de celui, sans les fonds duquel cette même maison ne se trouverait pas dans les biens de leur débiteur ?

que

Quid, dans le cas suivant? Une femme mariée a contracté deux obligations hypothécaires : la première saus autorisation, et la seconde avec autorisation; le mari ratifie ensuite la première, laquelle sera préférée ? Je pense qu'il faut distinguer : Si la première obligation était telle l'exécution pût en être poursuivie, même indépendamment de l'autorisation; putà, si les époux sont communs en bien, et s'il est prouvé que l'obligation a tourné au profit de la communauté, je pense qu'elle doit être préférée. Secùs, dans le cas contraire. C'est toujours d'après le même principe. La première obligation, dans le premier cas, n'avait pas besoin de ratification pour être valable. Secùs, dans le second.

Nous discuterons, au Titre des Hypothéques, l'objection que l'on pourrait tirer contre ces décisions, de la disposition des articles 2124 et 2126.

Quid, dans l'espèce suivante? Une personne qui n'est point mon mandataire, mais se portant fort pour moi, hypothèque une maison qui m'appartient: le créancier s'inscrit. J'hypothèque la même maison à un second créancier, 'qui s'inscrit postérieurement; ensuite je ratifie le premier acte: quel sera le créancier préféré ? BASNAGE, loco citato, et POTHIER, de l'Hypothèque, chapitre Ier, décident avec raison que ce doit être le second. La différence de ce cas avec celui du mineur, c'est que le contrat du mineur n'était pas nul; il était seulement rescindable, si le mineur prouvait la lésion donc, s'il n'y avait pas de lésion, l'acte ne pouvait être rescindé. Il était donc valable. Mais ici l'acte constitutif de l'hypothèque n'était pas seulement rescindable avant la ratification; il était nul. Le second créancier

avait donc bien certainement la priorité. Le débiteur a-t-il pu, par un acte qu'il était entièrement le maître de faire ou de ne pas faire, le priver d'un droit qui lui était acquis? Non, sans doute. Donc, etc. Nec obstat la maxime: Rati habitio mandato æquiparatur. Car cela n'est vrai qu'à l'égard des parties, et de celui qui a ratifié; mais non au préjudice des tiers. La ratification équivaut au mandat, dans le sens que celui qui ratifie, n'a pas besoin de passer un second acte pareil au premier. Ainsi, dans l'espèce, celui pour qui l'on s'est porté fort, ne sera pas obligé de passer au créancier un acte constitutif d'hypothèque. Mais elle n'équivaut pas au mandat, dans le sens qu'elle puisse, au préjudice des tiers, faire remonter l'effet de l'acte ratifié, au jour où il a été passé. Cela est si vrai, que, si l'acte devait être fait dans un délai fatal, et que la ratification n'ait eu lieu qu'après le délai, l'acte, quoique passé avant l'expiration du délai, serait nul. Cela est décidé formellement par la loi 24, ff. Ratam rem haberi. Ainsi, dans notre droit, le désaveu d'un enfant doit être fait dans un délai fatal. Si nous supposons. qu'une personne se portant fort pour le mari, a fait, dans le délai, un acte extrajudiciaire contenant le désaveu, cet acte sera certainement nul, et le mari déchu du désaveu, s'il n'a pas ratifié avant l'expiration du délai. Donc, etc.

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C'est d'après ces principes qu'un arrêt du Parlement de Paris, du 28 février 1726, rapporté par POULLAIN DU PARC, Principes du Droit Français, liv. 3, chap. 18, § 13, a jugé qu'un frère, ayant stipulé, par le contrat de mariage de sa socur une donation de biens présens et futurs au nom et comme se portant fort pour une autre soeur dont il n'avait point de procuration, cette donation, quoique ratifiée depuis par la donatrice, mais après le mariage, était inutile; et le motif de la décision a été que la donation faite par un tiers, sans procuration de la donatrice, étant nulle, il n'y avait de titre de donation que par l'acte de ratification; et comme cet acte était postérieur au mariage, c'est-à-dire à l'époque où la donation devait être faite, pour être valable, il en résultait qu'il était également nul, et qu'il n'avait pu conséquemment produire aucun effet.]

REMARQUES SUR LE CHAPITRE PRÉCÉDENT.

La matière qu'il contient correspond à une loi du 2 mars 1825, formant le titre 4e du 3e livre du Code civil des Pays-Bas. En voici le texte :

ART. I. Les obligations s'éteignent :

Par le paiement,

Par les offres réelles, suivies de consignation,

Par la novation,

Par la compensation,

Par la confusion,

Par la remise de la dette,

Par la perte de la chose due,

Par la nullité ou la rescision,

Par l'effet de la condition résolutoire, qui a été expliquée au titre 1er du présent livre, et

Par la prescription, qui est l'objet d'un titre particulier.

SECTION PREMIÈRE.

Du paiement.

II. Une obligation peut être acquittée par toute personne qui y est intéressée, telle qu'un co-obligé ou une caution.

L'obligation peut même être acquittée par un tiers qui n'y est point intéressé, pourvu que ce tiers agisse au nom et en l'acquit du débiteur, ou que, s'il agit en son nom propre, il ne soit pas subrogé aux droits du créancier.

III. L'obligation de faire ne peut être acquittée par un tiers contre le gré du créancier, lorsque ce dernier a intérêt qu'elle soit remplie par le débiteur lui-même.

IV. Pour payer valablement, il faut être propriétaire de la chose donnée en paiement, et capable de l'aliéner.

Néanmoins, le paiement d'une somme en argent, ou autre chose qui se consomme par l'usage, ne peut être répété contre le créancier qui l'a consommée de bonne foi, quoique le paiement en ait été fait par celui qui n'en était pas propriétaire, ou qui n'était pas capable de l'aliéner.

V. Le paiement doit être fait au créancier ou à quelqu'un ayant pouvoir de lui, ou qui soit autorisé, par justice ou par la loi, à recevoir pour lui.

Le paiement fait à celui qui n'aurait pas pouvoir de recevoir pour le créancier, est valable, si celui-ci le ratifie ou s'il en a profité.

VI. Le paiement fait de bonne foi à celui qui est en possession de la créance, est valable, encore que le possesseur en soit, par la suite, évincé.

VII. Le paiement fait au créancier n'est point valable, s'il était incapable de le recevoir, à moins que le débiteur ne prouve que la chose payée a tourné au profit du créancier.

VIII. Le paiement fait par le débiteur à son créancier, au préjudice d'une saisie ou d'une opposition, n'est pas valable à l'égard des créanciers saisissans ou opposans. Ceux-ci peuvent, selon leur droit, le contraindre à payer de nouveau, sauf, en ce cas seulement, son recours contre le

créancier.

IX. Le créancier ne peut être contraint de recevoir une autre chose que celle qui lui est due, quoique la valeur de la chose offerte soit égale ou même plus grande.

X. Le débiteur ne peut point forcer le créancier à recevoir, en partie, le paiement d'une dette même divisible.

XI. Le débiteur d'un corps certain et déterminé, est libéré par la ́remise de la chose en l'état où elle se trouve lors de la livraison, pourvu que les détériorations qui y sont survenues, ne viennent point de son fait ou de sa faute, ni de celle des personnes dont il est responsable, ou qu'avant ces détériorations il ne fût pas en demeure.

XII. Si la dette est d'une chose qui ne soit déterminée que par son espèce, le débiteur ne sera pas tenu, pour être libéré, de la donner de la meilleure espèce, mais il ne pourra l'offrir de la plus mauvaise.

XIII. Le paiement doit être exécuté dans le lieu désigné par la convention; si le lieu n'y est pas désigné, le paiement, lorsqu'il s'agit d'un corps certain et déterminé, doit être fait dans le lieu où était au temps de l'obligation la chose qui en fait l'objet.

Hors ces deux cas, le paiement doit être fait au domicile du créancier, tant qu'il continue d'habiter la commune où il demeurait au temps du contrat, sinon au domicile du débiteur.

XIV. Lorsqu'il s'agit des loyers, fermages, pensions alimentaires, rentes perpétuelles ou viagères, intérêts de sommes prêtées, et généralement de tout ce qui est payable par année, ou à des termes périodiques plus courts, trois quittances, qui constatent le paiement de trois échéances successives, établissent la présomption que les échéances antérieures ont été acquittées; sauf la preuve contraire.

XV. Les frais du paiement sont à la charge du débiteur.

XVI. Le débiteur de plusieurs dettes a le droit de déclarer, lorsqu'il paie, sur quelle dette il entend faire l'imputation du paiement.

XVII. Le débiteur d'une dette qui porte intérêt, ou produit des arrérages, ne peut point, sans le consentement du créancier, imputer le paiement qu'il fait sur le capital par préférence aux arrérages ou intérêts.

Le paiement fait sur le capital et intérêts, mais qui n'est point intégral, s'impute d'abord sur les intérêts.

XVIII. Lorsque le débiteur de diverses dettes a accepté une quittance par laquelle le créancier a imputé ce qu'il a reçu sur l'une de ces dettes spécialement, le débiteur ne peut plus demander l'imputation sur une dette différente, à moins qu'il n'y ait eu dol ou surprise de la part du créancier.

XIX. Lorsque la quittance ne porte aucune imputation, le paiement doit être imputé sur la dette que le débiteur avait pour lors le plus d'intérêt d'acquitter entre celles qui sont pareillement échues; si les dettes ne sont

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