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délits. On s'est conformé pour cela aux dispositions des lois Romaines relatives au pécule profectice. Le fils de famille, ou l'esclave qui en avait la libre administration, pouvait contracter sur ce pécule toutes sortes d'obligations quelconques, excepté pour cause de délit et quasi-délit (L. 58, ff. de Regulis juris); Quià peculium dabatur ad contrahendum, non ad delinquendum. Au reste, ce n'est pas là le seul point de ressemblance que la communauté a avec le pécule. Le privilége qu'a la femme, même en acceptant la communauté, de n'être tenue que jusqu'à concurrence de l'émolument, conformément à l'article 1483, a une grande analogie avec le privilége qu'avait le père, de n'être tenu par l'action du pécule que intrà vires peculii. Il ne serait donc pas étonnant que l'on trouvât dans des lois Romaines relatives au pécule profectice, des décisions applicables à des questions de communauté : ce qui prouve combien il peut être utile de connaître ces lois, même dans les parties qui paraissent le plus étrangères à notre droit.]

En conséquence du principe ci-dessus, le paiement des amendes encourues par le mari, peut bien, comme celui de toutes ses autres dettes, être poursuivi sur les biens de la communauté, lorsque le délit n'emporte pas mort civile ; mais la femme, ou ses héritiers, ont droit d'en demander 1424. récompense, lors de la dissolution. [Je crois qu'il en faut dire autant des réparations civiles; et cela d'après les principes contenus dans la note précédente. Dès que la femme n'est pas censée participer aux obligations que son mari peut contracter par délit, elle ne peut pas être plus responsable des réparations civiles, que des amendes.

Lorsqu'il y a mort civile, il n'y a plus de mariage (sauf peut-être le cas de contumace), et conséquemment plus de communauté ; et l'amende ne peut être poursuivie que sur la part du mari, comme nous allons le voir tout-àl'heure.]

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5°. Que le droit du mari sur les biens de la communauté se borne, en général, aux dispositions à titre onéreux, sauf les exceptions suivantes :

Le mari peut disposer, comme il le juge convenable,

même entre vifs, et à titre gratuit, des biens de la communauté, pour l'établissement des enfans communs; et, 1422. dans le cas où la communauté a été acceptée par la femmé, elle doit supporter la moitié de la dot, à moins que le mari n'ait déclaré expressément qu'il s'en chargeait pour le tout, ou pour une portion plus forte que la moitié ; auquel cas, la femme ne supporte que l'excédant.

Mais à l'égard de toutes personnes, autres que les enfans communs, le mari ne peut disposer gratuitement que des effets mobiliers de la communauté, et encore seulement à titre particulier, et pourvu qu'il ne s'en réserve pas l'usufruit.

[Je dis que le mari ne peut disposer gratuitement, SEUL. Car je pense qu'il pourrait, avec sa femme, disposer gratuitement des biens de la communauté, quels qu'ils soient. L'incapacité du mari n'est établie que dans l'intérêt de la femme. Dès qu'elle a donné avec son mari, elle ne peut plus demander la nullité de la donation. Il en serait de même, quand elle n'aurait pas donné, si elle avait simplement consenti à ce que son mari donnât, sauf, dans ce cas, son recours contre le mari, s'il y a lieu.

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Autrefois, comme nous l'avons déjà fait observer, le mari pouvait disposer à titre gratuit, de tous les biens de la communauté, en faveur de qui que ce fût, pourvu, comme disait l'article 225 de la Coutume de Paris, que ce fût à personnes capables et sans fraude; c'est-à-dire pourvu qu'il ne s'enrichît pas, lui ou les siens.

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Quid, si le mari a donné seul, et que la femme renonce à la communauté? Je pense que, dans ce cas, la donation est valable, dans le sens qu'elle ne peut être attaquée par qui que ce soit. En effet, par qui pourrait-elle l'être? Ce n'est pas par la femme; elle n'a pas d'intérêt. Ce ne peut être par le mari; il ne peut pas se faire un titre de sa propre contravention: Nemo auditur suam turpitudinem allegans. Mais si la femme accepte la communauté, la donation n'est-elle pas valable au moins pour moitié ? Cela peut souffrir difficulté. En effet, il n'est pas douteux que, pour la liquidation et le partage, les immeubles

1439.

1422.

donnés ne doivent être réunis à la masse, que la femme n'ait le droit d'en poursuivre la licitation, etc. Et quand l'on supposerait que le partage a eu lieu en nature, donnera-t-on aux donataires une action pour se faire restituer, soit les immeubles même, s'ils sont tombés dans le lot du mari, soit leur valeur, dans le cas contraire? Je ne le pense pas. Il y a contravention à la loi, tant de la part du donateur que du donataire; par conséquent, l'on doit appliquer la disposition de la loi 8, ff. de Condict. ob turpem causam, c'est-à-dire que, si le donataire est en possession, le donateur ne peut le forcer à restituer, mais que, réciproquement, s'il n'y est pas, il ne peut rien demander au donateur, quià, in pari causá, melior est conditio possidentis. (L. eddem.) Donc, quand les objets ont été une fois réunis dans la masse pour la liquidation et le partage, les donataires n'ont pas le droit d'en exiger la restitution.

Quand je dis que le mari ne peut disposer qu'à titre particulier, c'est qu'il ne peut donner une quote du mobilier, le tiers, le quart, par exemple; mais il peut donner un objet particulier. Cependant il est possible que tel objet particulier vaille plus, à lui seul, que la moitié du mobilier. D'un autre côté, il me semble qu'il eût été convenable d'interdire au mari toute donation au profit de certaines personnes, surtout de celles dont il est présomplif héritier: la clause par laquelle ce qui advient par succession, même en mobilier, est stipulé propre aux époux, est devenue maintenant presque de style dans les contrats de mariage. L'on sent, d'après cela, que de pareilles donations fourniraient au mari un moyen facile de s'enrichir aux dépens de la communauté. Mais quoique le Code n'en parle pas, je pense que, le dol ou la fraude étant toujours un moyen de nullité, les tribunaux n'hésiteraient pas à annuler une donation qui serait fondée sur de pareils motifs et que l'on appliquerait, sans difficulté, la disposition des articles g11 et 1099.

J'ajoute Et pourvu qu'il ne s'en réserve pas l'usufruit. On ne veut pas, en effet, qu'il puisse nuire à la communauté, sans se nuire à lui-même. POTHIER, no 480,

était d'avis contraire, attendu, disait-il, que cela ne nuit point à la femme, puisque l'usufruit tombe dans la communauté. Mais il y a une autre raison qui justifie la disposition du Code; c'est que le mari se porterait bien plus facilement à donner, s'il pouvait se réserver l'usufruit; et par là il priverait sa femme, non pas, à la vérité de l'usufruit, mais de la propriété de l'objet, au moins pour moitié.

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Quid, s'il a réservé l'usufruit à lui et à sa femme? Si la femme accepte la réserve, elle est censée approuver la donation, et elle est non recevable à l'attaquer. Secùs, dans le cas contraire. ]

Quant aux dispositions testamentaires, ou aux donations de biens à venir, comme elles ne peuvent avoir d'effet qu'à une époque où la communauté est dissoute, il est évident qu'elles ne peuvent excéder ce qui adviendra au mari, dans ladite communauté, par l'effet du partage, ou de la rénonciation de la femme. Si cependant le mari a légué, à titre particulier, un effet de la communauté, le légataire a toujours le droit de le réclamer en totalité, savoir: en nature, si l'objet, par l'événement du partage, tombe au lot des héritiers du mari; ou, dans le cas contraire, en argent, à prendre non-seulement sur la part desdits héritiers dans les biens de la communauté, mais encore sur les biens personnels du mari. [On a admis 1423. spécialement dans cette circonstance, la disposition du droit Romain, relativement au legs de la chose d'autrui ; mais on l'a fait pour empêcher la fraude. Les héritiers du mari auraient pu s'entendre avec la femme, pour que la chose léguée ne tombât pas dans leur lot, et pour rendre, par là, le legs inutile.

Je pense, au surplus, que cette disposition s'appliquerait également au legs fait par la femme. Il y a parité de raison.]

Par suite du même principe, les condamnations prononcées contre le mari, pour crime emportant mort civile, ne pouvant être exécutées qu'après la dissolution de la communauté, ne frappent que sa part dans la com

1425.munauté, et ses biens personnels. [ Quid, si la condamnation, emportant mort civile, n'est prononcée que par contumace? Dans ce cas, comme le mariage continue, et par conséquent la communauté, celle-ci est tenue de payer la totalité, sauf récompense. Si, cependant, la femme demandait la séparation de biens, alors on appliquerait la disposition de l'article 1425. (Voyez au 2o vol., page 50.)]

S II.

Des Droits de la femme sur les biens de la Communauté.

Il résulte également des deux premières règles ci-dessus, que la femme n'a réellement, par elle-même, aucun droit sur les biens de la communauté, pendant sa durée. [Ou plutôt son droit se réduit à une simple espérance, celle de partager les biens qui se trouveront composer la communauté au moment de sa dissolution, espérance qui peut même ne jamais se réaliser, dans le cas, par exemple, où elle renoncerait à la communauté. ] Tout acte fait par elle, sans le consentement exprès ou présumé de son mari, n'engage donc en aucune manière les 1426. biens de cette communauté. [ A moins que cet acte n'ait

apporté quelque profit à la communauté, auquel cas, ainsi qu'on va le voir, l'action de in rem verso, aura lieu contre la communauté, et conséquemment contre le mari, jusqu'à concurrence de ce dont la communauté a profité.

Il y a consentement présumé, quand la femme est marchande publique. Le mari, comme nous l'avons dit au Livre ler, en l'autorisant à faire le commerce, est censé l'avoir autorisée pour tous les actes relatifs à ce commerce.]

L'autorisation même de justice, suffisante pour la rendre habile à disposer de ses propres biens, ne peut lui donner la capacité nécessaire pour disposer de ceux de la communauté, excepté dans des cas de la plus grande

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