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trat de mariage, attendu que rien ne l'aurait empêché de la reprendre postérieurement au mariage, et de se procurer, par là, le moyen de demander la dot une seconde fois. Il paraît que le droit est changé à cet égard, et qu'il faut que l'apport de la femme soit prouvé, soit par la quittance du mari, soit de toute autre manière. Mais l'on ne peut se dissimuler qu'il ne puisse résulter un inconvénient de cette disposition. En effet, ou la femme avait, au moment de la célébration du mariage, ce qui fait l'objet de son apport; et alors le mariage doit valoir quittance : ou elle ne l'avait pas; et alors, c'est faciliter au mari les moyens d'avantager indirectement sa femme pendant le mariage, en reconnaissant qu'elle lui a remis ce qu'il peut fort bien n'avoir pas reçu.

Quid, si l'apport consiste en dettes actives? Il faut distinguer: Si les créances ont été apportées par le mari, il ne peut en reprendre le montant, qu'en prouvant qu'elles ont été payées pendant la communauté; sinon, il n'a droit que de reprendre les contrats. Si elles ont été apportées par la femme, elles sont toujours présumées avoir été payées, tant que le mari ne justifie pas qu'elles ne l'ont pas été, et qu'il a fait toutes les diligences nécessaires pour en procurer le paiement. (Argument tiré des art. 1567 et 1569.)]

Le mari ne pouvant se donner de quittance à lui-même, son apport est suffisamment justifié par la déclaration qu'il fait, au contrat de mariage, que son mobilier est de telle 1502. valeur. [C'est à la femme, ou à sa famille, à constater la vérité de cette déclaration.]

Pour exercer le droit de prélèvement que donne la clause de réalisation, les époux sont obligés de justifier de ce dont le mobilier apporté lors du mariage, ou échu depuis, 1503.excède leur mise en communauté.

Cette preuve, pour le mobilier apporté lors du mariage, se fait ainsi que nous venons de le dire.

Quant à celui qui est échu depuis, il faut également distinguer s'il est échu au mari ou à la femme.

Dans le premier cas, le mari ne peut en exercer la re

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prise, qu'autant que la valeur et la consistance, déduction faite des dettes en sont constatées par un inventaire ou autre titre équivalent [tel qu'un partage, compte de tutelle, etc.].

[En serait-il de même de ses héritiers? Je ne le pense pas: autrement, tous les jours, un mari qui voudrait avantager indirectement sa femme, négligerait exprès de faire faire inventaire du mobilier qui lui écherrait, et dont la communauté profiterait alors, nonobstant toute clause de réalisation. Nec obstat que les héritiers ne doivent pas avoir plus de droit que leur auteur. Il faut, en effet, distinguer avec soin les droits que les héritiers exercent personnellement et de leur chef, de ceux qu'ils exercent du chef de leur auteur, et comme le représentant. C'est à ces derniers seuls que s'applique le principe qui vient d'être opposé; mais il arrive tous les jours que les héritiers ont le droit d'attaquer les actes passés par le défunt, et que - celui-ci n'aurait pu attaquer lui-même. Cela s'applique particulièrement aux actes frauduleux. Celui qui a commis la fraude, aurait été non recevable à venir alléguer sa propre turpitude, pour demander la rescision de l'acte; mais la même fin de non recevoir ne peut être opposée à ses héritiers. Ici le mari n'est pas admissible à venir dire à la justice, qu'il a violé les dispositions de la loi, qui lui enjoignait de faire un inventaire. Les héritiers, au contraire, sont recevables à demander d'être admis à la preuve de la fraude qui a été faite à leurs droits. D'ailleurs, il est bien certain que si ces héritiers étaient des enfans d'un premier lit, ils pourraient, quoiqu'héritiers de leur père, réclamer contre le défaut d'inventaire. (Argument tiré de l'art. 1099.) Donc, la prohibition faite au mari ne pourrait être opposée à ses héritiers. Enfin, quoiqu'on ne puisse pas argumenter beaucoup de la manière dont les articles du Code sont rédigés, cependant l'on ne peut supposer que ce soit sans motifs qu'il est dit dans le premier alinéa de l'article 1504 Le mari, seulement, ne peut en exercer la reprise; et que, dans le second alinéa du même article, il est dit: La femme ou ses héritiers sont admis, etc. L'on peut

donc conclure de là, que l'on n'a pas entendu appliquer aux héritiers du mari la disposition du premier alinéa.]

Mais si le mobilier est échu à la femme, et qu'il n'y ait pas eu d'inventaire, elle ou ses héritiers sont admis à faire preuve de la consistance et de la valeur de ce mobilier, par titres, par témoins, et même par commune 1504. renommée.

[C'est au mari, comme nous l'avons dit, à s'imputer de n'avoir pas fait faire inventaire. ]

SECTION III.

De la Clause d'Ameublissement.

La clause de réalisation tend à restreindre la communauté légale; la clause d'ameublissement, au contraire, tend à lui donner plus d'étendue.

Ameublir un immeuble, c'est en général lui supposer la qualité de meuble, à l'effet de lui appliquer des dispositions dont il ne serait pas susceptible comme immeuble. La clause d'ameublissement, appliquée à la communauté est donc celle par laquelle les parties, ou l'une d'elles font entrer dans la communauté tout ou partie de leurs 1505.immeubles présens ou futurs. [ Mais, bien entendu, acquis à titre gratuit. Les immeubles acquis à titre onéreux pendant la communauté, y tombent de plein droit, comme nous l'avons vu, et sans qu'il soit besoin de stipulation. La clause de communauté à titre universel, dont il est question dans l'article 1526, renferme, comme il est évident, celle d'ameublissement de tous les immeubles présens ou à venir des époux, suivant que cette communauté comprend les biens présens ou à venir de chacun d'eux.

Le mineur peut-il ameublir? La raison de douter se tire de ce qu'en ameublissant, il dispose de l'immeuble. Si c'est le mari, il est censé en donner la moitié à sa femme; il en est de même, si c'est la femme; et elle donne en outre, par là, à son mari, le droit de l'aliéner, ou au moins de l'hypothéquer : tous actes qui excèdent la capacité du

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mineur, même émancipé. Anciennement, la jurisprudence des arrêts avait introduit l'usage que le mineur pouvait ameublir ses immeubles jusqu'à concurrence de la portion nécessaire pour, avec son mobilier, compléter le tiers de ses biens. Cette restriction n'existe même plus aujourd'hui; et, puisque, aux termes de l'article 1095, le mineur autorisé par ceux dont le consentement est nécessaire pour son mariage, pourrait donner tous ses immeubles par contrat de mariage, il n'est pas douteux qu'il ne puisse les ameublir.]

L'ameublissement peut être déterminé ou indéterminé. Il est déterminé, quand l'époux a déclaré ameublir et mettre en communauté un tel immeuble, en totalité. Le Code met également au nombre des ameublissemens déterminés, celui par lequel un immeuble désigné est ameubli jusqu'à concurrence d'une certaine somme. [Quid,si l'époux 1506. avait dit: Je promets d'apporter telle somme, à prendre sur mes meubles et mes immeubles ? POTHIER, no 305, examinant cette question, décide qu'il n'y a point là d'ameublissement, mais une simple convention d'apport, et que ces mots à prendre ne signifient autre chose, sinon que l'époux hypothèque tous ses biens à l'exécution de son obligation, et qu'il consent que, s'il est aliéné, durant la communauté, quelqu'un de ses immeubles, le prix vienne en déduction de la somme promise pour son apport. Cette opinion de POTHIER pouvait être vraie dans l'ancien droit, où l'on reconnaissait l'hypothèque générale conventionnelle, et où l'on n'avait pas imaginé ce mode d'ameublissement indéterminé, établi par les articles 1506 et 1508 du Code et en vertu duquel le mari ne peut, à la vérité, vendre les immeubles ameublis par sa femme, mais peut néanmoins les hypothéquer jusqu'à concurrence d'une certaine somme. Mais actuellement, je ne vois pas pourquoi l'on ne donnerait pas à la clause dont il s'agit, l'effet de l'ameublissement indéterminé, et pourquoi le mari ne pourrait pas en vertu de cette clause, hypothéquer seul, et sans le consentement de la femme, les immeubles de cette dernière, jusqu'à concurrence de la somme promise. C'est,

dit-on, un assignat seulement démonstratif. Mais l'effet de cet assignat n'est-il pas, comme dit POTHIER lui-même, d'après la loi 96, ff. de Legatis, 1o d'indiquer undè commodiùs solvi possit? et si, d'après cet auteur, les immeubles de la femme compris dans l'assignat étaient hypothéqués à l'exécution de l'obligation, pourquoi ne donnerait-on pas au mari le droit de les hypothéquer lui-même, pour se procurer la somme promise? Seulement il pourrait y avoir cette différence entre cette clause, et l'ameublissement indéterminé du Code, 1o que l'action qui en résulterait contre l'époux débiteur, serait purement mobilière, et qu'en conséquence, si l'apport n'était pas effectué au moment de la dissolution de la communauté, il ne serait pas tenu de comprendre des immeubles dans la masse, mais seulement d'y verser soit réellement, soit fictivement et par imputation sur ses reprises, la somme convenue par le contrat; et 2° que la perte de l'immeuble ou des immeubles, compris dans l'assignat, ne libèrerait pas l'époux débiteur de l'obligation de fournir la somme promise. Mais, à ces différences près, je pense que la clause doit avoir absolument le même effet que l'ameublissement indéterminé.

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Observez que l'ameublissement, soit déterminé soit indéterminé, n'a d'effet qu'entre les parties, et dans l'intérêt du mari seulement; mais que les immeubles n'en conservent pas moins leur nature propre ; tellement que, dans le cas de l'ameublissement déterminé, l'immeuble ameubli, qui tomberait dans le lot du mari, serait certainement compris dans le legs d'immeubles qui aurait pu être fait par lui.]

dans le pre

Il y a cependant cette différence, que, mier cas, c'est-à-dire si l'immeuble a été ameubli en totalité, il est censé tout-à-fait meuble à l'égard de la communauté, quien devient propriétaire, et aux risques de laquelle il est, comme tous les autres meubles; en conséquence, si c'est la femme qui a ameubli, le mari peut disposer de l'immeuble, seul et sans son consentement. [L'époux qui a ameubli, est-il tenu de l'éviction? S'il avait promis d'ap

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