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alors cette caution ne peut être exigée que pour la part que le mari prend dans les objets qui composent le préciput, et qui est ordinairement moitié. L'article ne doit donc être entendu d'une manière générale et absolue, que pour le cas où la femme a renoncé, et où le préciput a été stipulé à son profit, même en renonçant; car le mari restant alors maître de toute la communauté, gardera également les objets qui composent le préciput, en donnant caution.]

Avant partage, parce que le préciput, proprement dit, ne s'exerce jamais que sur la masse partageable. Il ne peut donc être demandé, qu'autant qu'il y a lieu à partage; et par conséquent, la femme ne peut y avoir de droit, qu'autant qu'elle accepte la communauté.

1515.

Si cependant il avait été stipulé par le contrat de mariage, que le prélèvement aurait lieu au profit de la femme, même en renonçant, la clause devrait être exécutée; et le droit de la femme, que l'on appelle aussi, dans ce cas, improprement préciput, serait alors exercé, tant sur les biens de la communauté, que sur les biens personnels du mari. Ibid. [Le préciput est ce qui se prend avant partage. Ici il n'y a point de partage: il ne peut donc y avoir de préciput; c'est donc plutôt une véritable donation à prendre sur les biens du mari.]

La clause de préciput n'ôte pas aux créanciers de la communauté, le droit de faire vendre les objets qui y sont compris [Le préciput, soit qu'il doive être pris sur la communauté, ou sur les biens du mari, est, dans tous les cas, une véritable donation de biens à venir, sujette, conséquemment, à l'action des créanciers. (Article 1083.)], sauf le recours de l'époux survivant sur les autres biens de la communauté, et même sur les biens personnels du conjoint prédécédé, si le préciput a été stipulé au profit de la femme, et pour le cas de renonciation.

1519.

Le préciput n'est point regardé comme un avantage sujet aux formalités des donations, mais comme une convention de mariage. [ Aux formalités seulement; mais, 1516 quant au fond, c'est comme nous venons de le dire, une donation, même quand il est réciproque ; et ce qui le prouve,

c'est que, aux termes de l'article 1518, le défendeur en divorce ou en séparation de corps, en ést privé; à plus forte raison est-il donation, quand il est stipulé en faveur de la femme renonçant. ]

SECTION VIII.

De la Clause qui assigne aux Conjoints des parts inégales dans la Communauté.

De droit commun, comme nous l'avons vu, le partage de la communauté, après sa dissolution, se fait par moitié entre les conjoints ou leurs héritiers, sans aucun égard à ce que chacun d'eux y a apporté; mais cette égalité dans le partage n'étant pas d'ordre public, les époux peuvent y déroger par leur contrat de mariage, et cela de trois manières : 1o. En assignant à l'un d'eux une part moindre que la moitié;

2o. En stipulant que l'un d'eux, ou le survivant, ou les héritiers du premier mourant, seront obligés de se contenter d'une somme fixe, pour tout droit de communauté. C'est cette clause que l'on nomme forfait de communauté ; 5o. Enfin , en stipulant que la communauté entière appartiendra à l'un des deux époux, ou à celui des deux 1520. qui survivra.

Lorsqu'il a été assigné à l'un des époux, ou à ses héritiers, une part moindre que la moitié, cette stipulation l'assujétit à payer une part proportionnée dans les dettes. Il ne peut s'obliger à en payer une plus forte, comme il ne peut stipuler qu'il en paiera une moindre. Toute con1521.vention contraire serait nulle. [ Parce qu'autrement il

dépendrait des époux de s'avantager l'un aux dépens de l'autre. Si la femme avait le tiers de la communauté, et était chargée de la moitié des dettes, le mari achèterait beaucoup d'immeubles; il ferait des emprunts pour les payer la femme paierait la moitié des emprunts, et n'aurait que le tiers des acquisitions. Le mari s'avantagerait donc au préjudice de la femme.

Vice versa, si la femme avait la moitié de la commu

nauté, et n'était tenue que du tiers des dettes, le mari pourrait faire la même opération, et avantager, par là, lá femme à ses dépens, puisqu'elle ne paierait que le tiers des emprunts, et qu'elle aurait la moitié des acquisitions. L'article dit que la convention est nulle. Mais cette nullité tombe-t-elle sur la convention totale, ou sur la partie qui oblige l'époux à payer une part disproportionnée dans les dettes? En un mot, s'il était convenu que l'un des époux aura le tiers de l'actif, et ne supportera que le quart du passif, décidera-t-on qu'il devra toujours avoir le tiers de l'actif, en supportant le tiers du passif? Ou bien regardera-t-on la convention comme totalement nulle, et rentrera-t-on dans le droit commun, d'après lequel chaque époux doit avoir la moitié dans l'actif, et supporter moitié dans le passif ?

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Je crois cette dernière opinion préférable. D'abord, elle me paraît fondée sur l'équité. L'on peut présumer que l'époux n'a consenti à ne prendre que le tiers de la communauté, que parce qu'il croyait n'être tenu que du quart des dettes. Elle me semble également fondée sur le texte. En effet, l'article 1521 est divisé en deux parties. Dans la première, il est dit que, lorsqu'il a été stipulé que l'époux n'aura qu'une part dans la communauté, moindre la moitié, il ne doit supporter les dettes que proporque tionnément à la même part; et dans la deuxième, la convention est nulle, si elle oblige, etc. Or, de quelle convention entend-on parler? Ce ne peut être que celle dont il vient d'être question, c'est-à-dire de celle qui donne à l'époux une part moindre que la moitié. Donc c'est cette convention qui est nulle; donc les époux rentrent dans le droit commun, et doivent avoir chacun moitié.

Au surplus, la nullité générale prononcée par cet article vient encore à l'appui de l'opinion que nous avons embrassée, en soutenant que l'on ne doit pas pouvoir faire indirectement et par des voies obliques, ce qu'on aurait pu faire directement et ostensiblement. Car autrement il eût fallu restreindre la nullité à ce qui eût excédé la portion disponible. ]

Lorsqu'il y a forfait de communauté, il faut distinguer, si c'est au mari ou à la femme qu'est imposée l'obligation de se contenter d'une certaine somme pour tout droit de communauté.

Si c'est à la femme, le mari ne peut, dans aucun cas [Pourvu toutefois que la clause ne soit pas conçue en termes facultatifs; car s'il était dit, par exemple: le survivant pourra prendre toute la communauté, en payant telle somme, il est évident que ce serait une faculté accordée au survivant, soit le mari, soit la femme, qui pourrait, en conséquence, en user, ou n'en pas user à sa volonté. ], se dispenser de payer la somme convenue, quelle que soit la situation de la communauté ; et il est seul tenu de toutes les dettes, sans que les créanciers de la communauté, envers lesquels la femme n'est pas personnellement obligée, aient aucune action contre elle ou ses héritiers. [ Quant aux dettes auxquelles la femme est personnellement obligée, mais qui doivent tomber dans la communauté, elle en est tenue à l'égard des créanciers; mais elle a son recours pour le total, et indépendamment de la somme convenue pour le forfait, contre le mari ou 'ses héritiers.

Quid, à l'égard des dettes personnelles de la femme, antérieures au mariage? Elles sont également à la charge du mari, à moins qu'elles ne fussent de nature à ne pas tomber dans la communauté, ou qu'elles n'en aient été exclues par la clause de séparation des dettes. Il en est de même des dettes des successions mobilières qui sont échues à la femme. La communauté a profité de tout le mobilier que la femme avait au moment du mariage, ou qui lui est échu depuis: elle doit donc supporter toutes les dettes.

Réciproquement, le mari peut déduire de la somme stipulée pour le forfait, toutes les créances que la communauté a droit d'exercer contre la femme, à titre de récompense ou autrement.]

[En ce qui concerne l'action des créanciers de la communauté contre la femme ou ses héritiers, la femme est censée reconçant quoiqu'elle recoive le prix de sa renon

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ciation : elle aura donc droit de faire tous les prélèvemens qu'elle aurait droit de faire en cas de renonciation, tels que la reprise de l'apport, le préciput en renonçant etc.

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Il en serait autrement, si, après la dissolution, la femme ou ses héritiers avaient reçu du mari une somme pour renoncer à la communauté. L'on devrait, dans ce cas appliquer l'article 780, et regarder cela comme une acceptation tacite. La raison de différence, c'est que, comme nous l'avons vu, la femme ne peut accepter la communauté, qu'après qu'elle est dissoute. Dans la première espèce, la convention avait été faite avant le mariage c'est-à-dire à une époque à laquelle la communauté n'existait pas encore. On ne pouvait donc la regarder comme une acceptation: Secùs, dans la deuxième espèce. ]

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Mais si c'est au mari, comme la femme ne peut s'interdire, par aucune convention, la faculté de renoncer à la communauté, elle conserve toujours le choix, ou de payer la somme fixée au mari ou à ses héritiers en demeurant obligée à toutes les dettes, ou de renoncer à la communauté, et de se décharger par là du paiement, 1522. non-seulement des dettes, mais encore de la somme con- 1524. venue. [Mais sans que cela puisse préjudicier en aucune manière aux actions que les créanciers de la communauté ont contre le mari, qui est toujours personnellement leur obligé, et contre lequel ils auront toujours le droit résultant des articles 1484 et 1485, sauf son recours contre la femme ou ses héritiers, pour être indemnisé de tout ce qu'il a payé. ]

On peut stipuler le forfait, seulement à l'égard des héritiers de l'un des époux ; auquel cas, si cet époux survit, la clause est anéantie, et la communauté se partage comme à l'ordinaire. [Il suffit qu'il survive à la disso-1523. lution de la communauté. Il n'est pas nécessaire qu'il survive à l'autre époux. Si, donc, la communauté est dissoute par la séparation de corps ou de biens, le partage a lieu par moitié, quand même l'époux, à l'égard des héritiers duquel le forfait a été établi, viendrait à mourir

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