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sens qu'elle peut être couverte par la ratification des parties, sauf ce qui est dit à l'égard des donations entre vifs, nulles dans la forme, et qui, aux termes des articles 1339 et 1340, ne peuvent être ratifiées valablement que par les héritiers du donateur, et non par le donateur lui-même.]

Nous avons traité au commencement de ce Titre, des sept premières causes. Quant au défaut de formalités, nous avons vu et nous verrons par la suite, sous chaque Titre, dans quels cas ce défaut entraîne la nullité de l'acte et des conventions ou obligations qu'il renferme. Il reste donc seulement à exposer, dans ce paragraphe, les principes relatifs aux obligations contractées par les mineurs, les interdits, et par les femmes mariées non autorisées.

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L'incapacité du mineur et de l'interdit étant établie uniquement dans leur intérêt, elle ne peut être opposée que par eux ou leurs héritiers. En conséquence, la partie capable qui a traité avec le mineur ou l'interdit, non-seulement ne peut argumenter de l'incapacité de ces derniers; 1125. mais encore elle ne peut, dans le cas où la nullité ou la rescision est demandée ou opposée par le mineur ou l'interdit, réclamer le remboursement de ce qu'elle a payé en vertu de l'engagement, pendant la minorité ou l'interdiction, à moins qu'elle ne prouve que ce qui a été payé, a tourné au profit de celui qui demande la rescision. 1312. [Pour savoir quand l'incapable est censé avoir profité, voyez ci-dessus la neuvième note du § II, chap. 5.] Les mêmes dispositions s'appliquent à la femme mariée qui a contracté sans être autorisée. [On tenait anciennement que, dans ce cas, la nullité était absolue, et pouvait être demandée, même par ceux qui avaient traité avec la femme non autorisée. Cela était peut-être plus conforme à la rigueur des principes sur lesquels est fondée la puissance maritale, et que nous avons développés dans le premier volume (pag. 395), et même à ceux que le Code a suivis. Nous voyons, en effet, que l'article 1388 déclare nulles toutes les conventions matrimoniales qui dérogeraient à la puissance maritale; et cette nullité serait, sans contredit, une nullité absolue. Or, si le Code déclare nulle, et de

nullité absolue, la seule convention qui permet d'enfreindre la puissance maritale, même avant que cette convention ait été suivie d'aucune exécution, l'on ne voit pas comment le même principe ne serait pas applicable aux actes particuliers que la femme peut faire au mépris de cette même puissance. L'on peut dire cependant, pour justifier la disposition du Code, que celui qui traite avec une femme mariée et non autorisée, lui facilite les moyens de violer l'obéissance qu'elle doit à son mari, et qu'il doit être conséquemment non recevable à demander lui-même la nullité de l'obligation, d'après la maxime; nemo ex delicto suo debet consequi actionem. Mais j'avoue que, d'après cette maxime, et d'après les dispositions du Code, il eût été plus conséquent de refuser à la femme le droit de demander la nullité. Dès que cette nullité n'est plus absolue, il semble que, si le droit de la demander doit être refusé à quelqu'un, c'est surtout à celle qui s'est rendue coupable précisément de l'infraction qui donne lieu à la nullité. C'est bien le cas d'appliquer la maxime : nemo ex improbitate sua debet consequi actionem.] La rescision peut être demandée, non-seulement par la femme et ses héritiers, 225. mais encore par son mari, et par les héritiers de celui-ci. [Mais, dans ce cas, le droit de demander la rescision de l'acte varie, soit à raison des personnes qui l'exercent, soit à raison des circonstances dans lesquelles il est exercé. Ainsi, pendant le mariage, le mari peut attaquer l'acte, quand même il ne lui préjudicierait en aucune manière, et seulement dans l'intérêt de la puissance maritale qui a été violée. Après la dissolution du mariage, le mari ou ses héritiers ne peuvent demander la rescision, qu'autant que l'acte leur préjudicie. De là, il résulte que, si la nullité a été prononcée pendant le mariage, quoique sur la demande du mari seul, l'acte est annulé omni modo, et à l'égard de tous. Mais si l'acte n'a été annulé qu'après le mariage, sur la demande du mari ou de ses héritiers, le jugement ne profite qu'à ceux qui y ont été parties.

Quant à la femme ou à ses héritiers, ils ont droit de demander la rescision, par cela seul que l'autorisation n'a

pas eu lieu, tant qu'ils sont dans le délai fixé par l'article 1304.]

Il y a néanmoins cette différence entre l'incapacité de l'interdit et celle du mineur, que la première étant fondée sur l'impossibilité légale dans laquelle se trouve l'interdit, d'émettre un consentement valable, toute obligation contractée par lui peut être annulée, par cela seul qu'elle est postérieure à son interdiction. [Il en faut dire autant de celui 502. à qui il a été donné un conseil, pour les actes qu'il ne peut faire sans l'assistance de ce conseil. Mais cependant il peut toujours être poursuivi en vertu de ces actes, si et quatenùs locupletior factus est. Il en est de même de l'interdit.

Quid des contrats passés dans l'ivresse ? Le Code ne s'est pas expliqué à ce sujet. Stricto jure, l'ivresse étant ordinairement la suite d'une faute de la part de l'homme ivre, il ne devrait pas avoir le droit d'en exciper, pour demander la rescision de l'obligation qu'il a contractée. Mais comme, d'un autre côté, il y a probablement dol de la part de celui qui a traité avec un homme dans cet état, et que le dol est plus condamnable que la simple faute, il y aurait injustice à accorder une action efficace à celui qui l'a commis. D'ailleurs, en les supposant également coupables, ce qui n'est pas, in pari causá melior est conditio possidentis; et par conséquent, l'action du créancier doit pouvoir être repoussée par l'exception tirée de l'ivresse. Mais si l'acte a été exécuté dans l'ivresse, de manière que le créancier n'ait plus rien à demander, l'autre partie pourrait-elle demander la rescision, à l'effet de se faire restituer ce qu'elle a payé? D'après ce que nous venons de dire, s'il y a dol de la part de celui qui a abusé de l'état d'ivresse dans lequel était une personne, pour lui faire contracter et exécuter un engagement préjudiciable, et s'il y a simplement faute, de la part de cette dernière, de s'être mise dans un semblable état, il semble que celle-ci devrait être préférée, et que par conséquent l'action en rescision lui doit être accordée. ] L'incapacité du mineur n'étant, au contraire, fondée que sur la faiblesse présumée de son jugement, il ne peut attaquer les actes desquels résulte la

présomption contraire, c'est-à-dire ceux qui ne lui étaient pas préjudiciables au moment où ils ont été passés, quand même, par l'effet d'un événement casuel et imprévu, ils lui seraient 1306. devenus désavantageux par la suite. [Par exemple: un mineur a acheté une maison : le marché était avantageux; depuis, cette maison a été consumée par un incendie; il ne pourra faire rescinder le contrat de vente.] En un mot, l'interdit est restitué comme interdit, au lieu que le mineur n'est pas relevé simplement comme mineur. [Le Code n'a pas déterminé l'âge auquel un mineur est capable d'agir, au moins dans son intérêt. Chez les Romains, le mineur infans était censé incapable d'agir; et il était infans jusqu'à sept ans. Le Code Prussien a adopté les mêmes dispositions. Chez nous, cela serait laissé, sans doute, à l'arbitrage du juge.] Il n'y a que la lésion résultant du contrat, qui puisse donner lieu à la rescision en sa faveur. [Quid, s'il a été vendu un immeuble appartenant à un mineur, sans observer les formalités requises pour ces sortes d'actes, mais à un prix avantageux ? Il peut toujours demander la rescision; d'abord, parce qu'il y a violation de la loi prohibitive. Le tuteur ne peut, dit l'article 457. ( Voir au second volume, pag. 214.) D'ailleurs, il y a lésion pour le mineur, par cela seul qu'il a été vendu un de ses immeubles sans nécessité; il vaut mieux, pour lui, avoir des fonds que de l'argent, qui peut être dissipé par le tuteur. (LL. 2 et 11, Cod. de Prædiis et aliis rebus minorum, etc.) Le mineur pourra donc toujours revendiquer, sans être tenu même de rendre le prix, à moins que l'acquéreur ne prouve qu'il en a profité. (Voyez ci-dessus la note neuvième, SII, chap. 5.)

On a critiqué cette décision, et on a prétendu que les art. 1305 et 1306 étaient applicables même aux aliénations d'immeubles, faites par le mineur sans l'observation des formalités, et qu'en conséquence il ne peut demander la restitution de l'immeuble, qu'en prouvant une lésion résultant du contrat même. Mais, d'abord, l'on peut dire qu'il

y a lésion par le contrat même, par cela seul que des deniers ont été substitués à un immeuble. Mais allons plus

loin, et supposons une hypothèse encore plus favorable, celle de l'échange d'un immeuble contre un autre immeuble d'une valeur égale, mais qui a été ensuite déprécié et détérioré par un cas fortuit. Or, je ne vois pas pourquoi ce cas ne serait pas assimilé à celui du paiement. Il résulte de l'art. 1241, et de la note neuvième précitée, que le paiement fait à celui qui est incapable de recevoir, est nul, à moins que le débiteur ne prouve que ce paiement a profité à l'incapable, et que, pour déterminer cette circonstance, il faut considérer l'époque à laquelle le 2o paiement est demandé, ou l'époque de la majorité, si la demande est faite par un mineur devenu majeur. Donc, à pari, pour juger si l'échange a été avantageux au mineur, il faut considérer les mêmes époques; et comme nous supposons que l'immeuble reçu par lui en échange, se trouve alors déprécié et détérioré, nul doute qu'il ne puisse provoquer la restitution de celui qu'il a donné, en offrant de rendre celui qu'il a reçu.

Quant au motif pour lequel les art. 1305 et 1306 ne sont applicables au paiement reçu par le mineur, ni à l'aliénation de ses immeubles, faite par lui seul et sans formalités, il consiste en ce que ces actes sont nuls, comme faits contre la prohibition de la loi, tandis que les autres sont simplement rescindables. De là il s'ensuit que le mineur n'a pas besoin de se faire restituer contre les premiers, et qu'il peut se contenter de demander une seconde fois son paiement dans le premier cas, ou de réclamer la restitution de son immeuble dans le second, tandis qu'à l'égard de tous les autres actes, il est obligé de demander la rescision, ce qu'il ne peut faire qu'en prouvant la lésion; cela résulte évidemment de la comparaison des articles 1241 et 1305, où l'on voit que, dans l'article 1241, c'est au débiteur à prouver que le paiement à profité à l'incapable, tandis que dans l'article 1305, c'est au mineur à prouver la lésion différence qui ne peut provenir que de ce que, dans l'art. 1305, le mineur demande la rescision qu'il ne peut obtenir qu'en prouvant la lésion, et qu'il n'a pas besoin de la demander dans l'art. 1241.

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