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importance pour la foi due à l'expédition. Ainsi, la copie tirée avec l'usufruitier ne fait pas foi contre le propriétaire; celle qui est tirée avec le mineur non assisté, ne fait pas contre lui-même, etc. Le motif de cette décision est que, comme on l'a vu dans une précédente note, le consentement de la partie à la délivrance d'une seconde grosse, détruit toutes les présomptions qui auraient pu naître, en sa faveur, de la remise qui lui aurait été faite antérieurement de la première grosse. Or, on sent que, pour pouvoir faire un acte qui ait un pareil résultat, il faut être capable de disposer. D'ailleurs, si le titre original venait à se perdre, cette seconde grosse le remplacerait. Or, comment celui qui n'aurait pu passer le titre original, pourrait-il donner à une copie la force de le remplacer ?

On tenait anciennement à Paris, que celui qui n'avait qu'une seconde grosse, n'avait d'hypothèque que du jour de la délivrance de cette seconde grosse. C'était, disait-on, pour empêcher qu'un créancier remboursé ne s'entendît avec son débiteur, pour faire revivre son hypothèque au préjudice des créanciers postérieurs. Mais il est évident qu'il y avait contradiction dans ce système; car si c'était la pré-somption du paiement qui empêchait de colloquer le créancier à son rang, la même présomption devait empêcher qu'il ne fût colloqué en aucune manière. Aussi paraît-il que le Parlement de Paris était revenu à des principes plus justes, ainsi qu'on peut l'inférer d'un arrêt du 30 août 1768, rapporté dans l'ancien DENISART, verbo GROSSE, n° 16.]

Secondement, les copies tirées depuis la délivrance des premières grosses, sans l'autorité du magistrat et sans le consentement des parties, peuvent, en cas de perte del'original, faire foi, quand elles sont anciennes, c'est-àdire, quand elles sont tirées depuis plus de trente ans, pourvu toutefois qu'elles aient été expédiées sur la minute même de l'acte, par le notaire qui l'a reçu, ou par un de ses successeurs, ou par un officier public, dépositaire légal 1335. des minutes.

[La loi dit sans le consentement des parties, parce

qu'en général, toute personne qui est partie dans un acte, a droit de s'en faire délivrer des copies ou expéditions, tant qu'elle veut, et sans le consentement de qui que ce soit. Ce sont de ces copies qu'il est principalement question ici.

Observez 1o que tout notaire, ou dépositaire quelconque, qui refuse de délivrer expédition ou copie d'un acte, aux parties intéressées en nom direct, héritiers ou ayant-droit, doit y être condamné par corps. (Code de Procédure, art. 839.)

2°. Que celui qui veut se faire délivrer expédition ou extrait d'un acte, dans lequel il n'a pas été partie, doit prendre la voie du compulsoire. (Ibid., art. 846 à 852.)]

Pourquoi ces copies ne font-elles foi que quand elles ont trente ans de date? POTHIER, no 736, donne de cette disposition une raison très-subtile, qu'il a prise dans DUMOULIN, et que nous ne répèterons pas ici, parce qu'il nous semble qu'on peut en donner une meilleure que voici :

J'ai contracté envers vous une obligation de dix mille francs. Vous vous êtes fait délivrer, suivant l'usage, une grosse ou première expédition. Depuis, vous vous en êtes fait délivrer, à mon insu, une simple expédition. Je vous rembourse, et j'exige de vous la restitution de la grosse, au bas de laquelle je vous fais mettre, et sous seing-privé, la quittance du remboursement. Je puis égarer cette grosse. Si votre expédition faisait preuve complète, il s'ensuivrait qu'au bout de quelques années, vous pourriez exiger le paiement une seconde fois. Mais quand cette expédition a trente ans de date, on ne peut présumer que le créancier se soit préparé un moyen de fraude depuis trente ans.

Ces copies peuvent aussi faire foi à défaut de grosses, ou de copies tirées du consentement des parties, ou de l'autorité du Magistrat. Ainsi, voici en résumé l'ordre dans lequel doivent être rangées les copies des titres, qui peuvent faire pleine foi :

1o. Les grosses remplacent en tout point l'original, quand il n'est point représenté..

2o. Il en est de même, à défaut de grosses, des copies tirées en présence et du consentement des parties, ou de

l'autorité du Magistrat, les parties présentes où dûment appelées.

3o. A défaut des deux premières, les copies tirées sans l'autorité du Magistrat, et sans le consentement des parties,. font foi, pourvu qu'elles aient trente ans de date, et qu'elles aient été délivrées par le notaire qui a reçu l'acte. ]

Si ces copies ont moins de trente ans, elles ne peuvent servir que de commencement de preuve par écrit. Il en est de même, quelle que soit leur ancienneté, si elles ont été expédiées, même sur la minute, mais par tout autre que l'un des officiers mentionnés ci-dessus. [POTHIER pensait, d'après DUMOULIN, qu'après trente ans, elles devaient faire foi, comme celles dont il est question dans la note précédente.

On a jugé en Cassation, conformément à cette disposition, le 3 juin 1812, que le greffier est seul dépositaire légal des actes et procès-verbaux faits par le juge, et qu'en conséquence, les copies ou expéditions desdits actes, délivrées par autres que par lesdits greffiers, ne pouvaient servir que de commencement de preuve par écrit. (SIREY, 1813, 1гe partie, page 26.)]

Troisièmement, les copies de copies peuvent, suivant les circonstances, être considérées comme simples renseigne1335. mens. [Mais si la copie dont la copie est représentée, était elle-même une première grosse ou expédition, sa copie serait regardée comme copie de l'original. (Code de Procéd., art. 844.)]

Quatrièmement enfin, la transcription d'un acte sur les registres publics [ tels que ceux de l'enregistrement, de la conservation des hypothèques, etc.], ne peut jamais servir que de commencement de preuve par écrit [laquelle doit être complétée par la preuve testimoniale. En effet, les dépositaires de ces registres peuvent bien attester qu'on leur a présenté un acte; inais ils ne peuvent en attester la véracité. ]; encore faut-il le concours simultané des trois circonstances suivantes :

1o. S'il s'agit d'un acte notarié ;

2o. S'il existe un répertoire, en règle, du notaire, con

statant que l'acte a été fait à la date relatée sur le registre;

3o. S'il est prouvé que toutes les minutes de l'année dans laquelle l'acte paraît avoir été fait, sont perdues, ou au moins que celle de l'acte dont il s'agit, a été perdue par un accident particulier. [Comment se fera cette preuve ? Soit par écrit, soit par témoins. C'est bien là un fait dont il était impossible à la partie de se procurer une preuve par écrit (Art. 1348).]

Dans tous les cas, s'il existe encore des témoins signataires de l'acte, ils doivent être entendus dans l'enquête. 1336.

§ III.

Des Titres Primordiaux et Récognitifs.

Le titre primordial est, comme le mot le fait entendre, le premier qui ait été passé entre les parties.

Le titre récognitif est celui qui a été souscrit depuis, par le débiteur, ses héritiers, ou ayant-cause, pour reconnaître ou confirmer l'obligation contenue dans le titre primordial.

On distingue deux espèces de titres récógnitifs : celui dans lequel la teneur de l'acte primordial est spécialement relatée [C'est ce que les auteurs appellent reconnaissance ex certa scientia, parce qu'elle est présumée faite avec pleine connaissance du titre.]; et celui qui ne rapporte que la substance de l'obligation [ ce qui est appelé, par les auteurs, reconnaissance in formá communi].

Le titre récognitif de la première espèce dispense le créancier de la représentation du titre primordial.

Il n'en est pas de même de ceux de la seconde, qui ne sont présumés faits que pour interrompre la prescription [Aux termes de l'article 2263, après vingt-huit ans de la date du dernier titre, le débiteur d'une rente peut être contraint de fournir, à ses frais, un titre nouvel au créancier. Nous verrons, au Titre de la Prescription, le motif de cette disposition.], et confirmer le titre primordial. Mais comme ils ne peuvent le confirmer qu'autant qu'il a existé, ils

n'en prouvent point par eux-mêmes l'existence, et ne dispensent point le créancier de le rapporter. [Cette disposition, copiée dans DUMOULIN et dans POTHIER, pouvait être très-utile en matière féodale, et lorsqu'il s'agissait de concession de fief, ou de défendre les vassaux contre l'influence et l'usurpation des seigneurs; mais en matière ordinaire, on ne voit pas comment une simple reconnaissance, qui n'est autre chose qu'un aveu par écrit, ne ferait pas pleine foi, d'après l'article 1356. Je pense qu'il n'y a pas d'autre moyen, dans le droit actuel, de concilier la disposition de l'article 1337 avec les véritables principes, que de distinguer entre les personnes auxquelles l'acte récognitif est opposé, et de décider que la reconnaissance, de quelque manière qu'elle soit rédigée, fait foi contre celui de qui elle émane, ainsi que contre ses héritiers, parce que c'est réellement un aveu par écrit ; mais qu'elle ne fait pleine foi à l'égard des tiers, que lorsqu'elle réunit les conditions exigées par l'article 1337. Cette distinction confirme l'interprétation que nous avons donnée de l'article 695.. Ainsi, un créancier a une hypothèque qui remonte à l'an 1780. Un second créancier a pareillement sur le même bien une hypothèque qui remonte à 1785. Le bien hypothéqué est vendu. Le premier créancier produit seulement un titre récognitif. Fera-t-il foi à l'égard du second créancier? Oui, si la teneur du titre primordial y est spécialement relatée. Secùs dans le cas contraire. (Voir ROUSSEAUD DE LA COMBE, verbo RECONNAISSANCE, no 4.)] Si cependant il y avait plusieurs titres conformes, passés successivement, dont l'un eût trente ans de date, et qu'ils fussent soutenus de la possession, le créancier pourrait être dispensé de représenter le titre primordial. [ Cela est facultatif; la dispense n'est pas de droit. ] Au surplus, toutes ces distinctions n'ont lieu que dans le cas où le titre primordial n'est pas représenté. S'il est représenté, ce que le titre récognitif, quel qu'il soit, de la première ou de la seconde espèce, contient de plus ou de différent, est entièrement 1337. nul. [Avec cette distinction, cependant, que si le titre ré

cognitif contient plus que le titre primordial, il est nul

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