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postérieures doivent être prouvées entièrement

par écrit

et que, par conséquent, ce ne serait pas le cas d'appliquer l'exception de l'article 1347. ]

[Il paraîtrait résulter de ces mots que, quand même il existerait un commencement de preuve par écrit d'une ou de plusieurs de ces demandes, la disposition de l'article 1346 devrait être appliquée; et cependant l'article 1347 dit formellement que les règles ci-dessus, ce qui comprend bien formellement celle de l'article 1346, reçoivent exception, lorsqu'il existe un commencement de preuve par écrit. Je pense que les articles d'une loi devant être entendus tous les uns par les autres, il faut entendre par ces mots de l'article 1347, les règles ci-dessus, celles qui sont contenues dans les articles 1341, 42, 43, 44 et 45: autrement, il faudrait supposer que le législateur s'est contredit dans deux articles qui se suivent immédiatement; ce qui n'est pas admissible. ]

Si cependant ces dettes n'ont pas été contractées envers le demandeur lui-même, mais qu'elles lui soient advenues du chef de différentes personnes, par succession, donation, ou autrement, chacune d'elles pourrait être constatée par 1345. le genre de preuve dont elle serait susceptible. [ On ne peut, dans ce cas, appliquer au créancier les raisons alléguées dans les deux précédentes notes. ]

De ce que la loi exige impérieusement qu'il soit passé. acte pour toutes choses excédant 150 francs, il en résulte : Premièrement, que l'on ne peut admettre la preuve, par témoins, d'une obligation qui aurait excédé cette somme dans le principe, quand même la demande se trouverait être moindre [ Il suffit que la loi qui ordonne de passer un acte, ait été violée dans le principe. Le créancier ne peut se faire un titre de cette violation, pour demander à être admis à la preuve testimoniale. ]; ce qui peut arriver dans deux cas lorsque la somme demandée est déclarée 1344. être le solde, ou faire partie d'une créance excédant 150 fr., et non prouvée par écrit; ou lorsque la partie restreint ellemême à 150 fr., une demande plus forte, qu'elle avait 1343. primitivement formée;

Et secondement, que le créancier peut être admis à la preuve testimoniale, même pour une somme excédant 150 fr., lorsqu'il a été fait un acte dans le principe, mais que cet acte se trouve perdu par suite d'un cas fortuit, imprévu, et résultant d'une force majeure.

Les principes que nous venons d'établir, admettent cependant plusieurs exceptions. Ainsi, la preuve testimoniale peut être admise pour toutes sommes ou valeurs :

1o. En matière de commerce;

1348.

Com.

109.

2o. Lorsqu'il existe un commencement de preuve par écrit, c'est-à-dire un acte émané du défendeur, ou de celui qu'il représente [ ou qui le représente; putà, de son man- 1347. dataire, surtout si le mandat était spécial pour l'objet dont il s'agit. Sic jugé à Riom, le 10 juin 1817. (SIREY, 1818, 2o partie, page 135.)], et qui, sans prouver totalement la demande, la rend cependant vraisemblable. [Voir des 1347. exemples dans Pothier, nos 767, 768, 770, 771, etc. ]

3o. Enfin, lorsqu'il n'a pas été possible au créancier de se procurer une preuve écrite. [ Cela doit-il s'entendre d'une impossibilité absolue, ou seulement d'une impossibilité morale? Jugé dans ce dernier sens, à Paris, le 9 avril 1821. (SIREY, 1822, 2o partie, page 166.)] Cette dernière exception s'applique aux faits de dol ou de violence, aux obligations provenant des quasi-contrats. [Cependant cela doit être admis avec quelque distinction, et en se référant à ce qui est dit au commencement de l'article 1548, que l'exception ne doit avoir lieu que dans le cas où il n'a pas été possible au créancier de se procurer une preuve par écrit. Ainsi, celui qui réclamerait une chose de valeur de plus de cent cinquante francs, comme l'ayant payée indûment, ne pourrait être admis à prouver le paiement par témoins ; il pouvait se procurer une preuve écrite du paiement, en se faisant donner quittance. D'ailleurs, il faudrait également admettre celui qui a reçu, à prouver par témoins que la chose était due; ce qui est contre les principes. Secùs, dans la gestion d'affaires. Il n'a pas été possible à celui dont on a géré les affaires pendant son absence, de se procurer une preuve par écrit. ] Cette exception s'applique aussi aux

obligations provenant de délits ou de quasi-délits. [ C'est d'après cette disposition qu'il a été jugé, avec raison, à Limoges, le 2 juin 1819, que l'on pouvait prouver par témoins, qu'une créance provenait d'une dette de jeu. (SIREY, 1821, 2o partie, page 17. )] Elle s'applique, en outre, aux obligations qui sont contractées en cas d'accidens imprévus, tels que les dépôts nécessaires [ qui ont lieu en cas d'incendie, ruine, tumulte ou naufrage, ainsi que celui des effets apportés par le voyageur dans l'hôtellerie où il loge. Il est à-peu-près impossible de se procurer des preuves écrites de ces sortes de dépôts.]; et autres semblables, eu égard toutefois à la qualité des personnes et aux cir1348. constances du fait; [c'est-à-dire que l'on n'admettra, même dans ce cas, la preuve testimoniale, qu'avec connaissance de cause. Si, par exemple, il a été volé à un individu le porte-manteau qu'il avait apporté dans une auberge, et qu'il demande à prouver qu'il y avait dans ce porte-manteau une somme de six mille francs, les juges examineront si, d'après la qualité, les relations de cette personne, et les affaires qui occasionaient son voyage, il est possible que cela soit vrai. ]

SECTION III.

Des Présomptions.

Les présomptions sont des conséquences que la loi ou le 1349. magistrat tire d'un fait connu à un fait inconnu. [ Ainsi, lorsqu'il s'agit de la légitimité des enfans, le fait connu, c'est le mariage de la mère; le fait inconnu, c'est la pater ́nité; et de ce que la mère est mariée, et de ce qu'on ne doit pas présumer le crime, on en conclut que le mari est le père de l'enfant. ]

La loi ou le magistrat : De là deux espèces de présomp1350. tions: celles qui sont établies par la loi, et celles qui sont 1353. abandonnées à la prudence du juge.

§ Ier.

Des Présomptions Légales.

L'on distingue deux sortes de présomptions légales : les unes dites juris, et les autres juris et de jure. Elles ont cela de commun, qu'elles dispensent de toute autre preuve celui qui peut les alléguer en sa faveur; mais elles diffè- 1352. rent, en ce que celles qui sont dites juris et de jure, excluent toute preuve contraire. Telle est la présomption résultant de la chose jugée. [ Les jugemens passés en force de chose jugée, sont ceux contre lesquels il ne reste aucun moyen ordinaire de se pourvoir. Les moyens ordinaires sont l'opposition et l'appel; les moyens extraordinaires sont la tierce-opposition, la requête civile, la cassation. Ces derniers n'ôtent pas au jugement, tant qu'il subsiste, l'autorité de la chose jugée. Mais tout jugement qui peut être attaqué par la voie de l'opposition ou de l'appel, ne peut être dit passé en force de chose jugée.

L'autorité de la chose jugée est telle, que, lors même que la partie condamnée retrouverait, après le jugement, les titres les plus clairs et les plus décisifs en sa faveur elle n'en serait pas moins tenue d'exécuter le jugement, à moins qu'elle ne pût prouver que ces titres étaient retenus par la partie adverse; auquel cas, elle pourrait attaquer le jugement par la voie de la requête civile.] Mais il faut observer que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'a l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut donc que la chose demandée soit la même; que la demande soit fondée sur la même cause. [ Ainsi, je vous ai demandé 1351. douze cents francs, pour argent prêté; j'ai perdu mon procès: je ne puis vous demander la même somme, comme ayant été touchée par vous, par suite de la gestion de mes affaires. De même, c'est avec raison qu'on a jugé en Cassation, le 1er mai 1815, que celui qui a contesté l'existence d'une hypothèque, et qui a perdu son procès, peut ensuite en contester le rang (SIREY, 1815, 1re partie,

page 277); et le 5 juin 1821 (ibid., 1821, page 341), que celui qui a été débouté d'une demande en nullité d'une donation, peut ensuite en demander la réduction pour le complément de sa réserve.

Un immeuble avait été vendu, et il avait été procédé à l'ordre. L'adjudicataire ne payant pas, l'immeuble est revendu à sa fólle-enchère, 8,000 francs de moins. Un créancier qui se trouvait colloqué utilement d'après le prix d e la première adjudication, et qui, en conséquence, n'avait pas contesté l'ordre, peut-il le contester ensuite, sur le motif que, d'après la diminution du prix, les fonds se trouvent manquer sur lui ? Jugé la négative, en Cassation, le 22 novembre 1821. (SIREY, 1822, 1re partie, page 73.) Je ne suis pas de l'avis de cet arrêt. Et en effet, que serait-il arrivé, si le créancier eût primitivement contesté? Ou, ce qui est probable, il aurait été déclaré non-recevable pour défaut d'intérêt; et, dès lors, on ne peut lui reprocher de n'avoir pas intenté une action qui devait nécessairement l'exposer à une condamnation de dépens, et qui, d'ailleurs, eût eu le même résultat, puisqu'on aurait pu ensuite lui opposer également l'exception de la chose jugée : ou l'on aurait admis la demande ; et alors c'est ouvrir la porte à une infinité de procès, puisqu'il n'y a pas de créancier qui, quoique utilement colloqué, ne vienne prétendre devoir être admis à contester l'ordre, sous le prétexte qu'il peut arriver que les fonds viennent à manquer sur lui, par l'effet d'une folleenchère. Je pense donc que, dans l'espèce, l'exception de la chose jugée ne pouvait être opposée. ] Il faut que la de1351. mande ait lieu entre les mêmes parties. [ J'ai été assigné en

revendication d'une maison par Pierre; j'ai été renvoyé de la demande : je puis être assigné par Paul en revendication de la même maison. De ce que Pierre n'était pas propriétaire, il ne s'ensuit pas que Paul ne le soit pas. ] Il faut aussi qu'elle soit formée par elles, et contre elles, en la 1351. même qualité. [ J'ai poursuivi Paul en mon nom pour une somme de 1200 francs, et j'ai perdu: je puis l'assigner pour la même somme et pour la même cause, du chef de Pierre dont je suis héritier. ]

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