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révolutionnaire (en 1795) fut un des motifs de la guerre que l'Angleterre déclara aux Provinces-Unies.

Le congrès tenu à Vienne, en 1815, a déclaré libre, en principe, la navigation des fleuves, et l'article qui renferme cette clause, désigne nommément l'Escaut (voir Livre I, titre II, § 57). Le traité du 19 avril 1839, entre les rois de Belgique et des Pays-Bas, l'a réglée comme il suit :

« Art. VIII. L'écoulement des eaux de Flandres `sera réglé entre la Belgique et la Hollande d'après les stipulations arrêtées â cet égard dans l'art. VI du traité définitif, conclu entre S. M. l'Empereur d'Allemagne et les États-Généraux, le 8 novembre 1785; et, conformément à cet article, des commissaires nommés de part et d'autre s'entendront sur l'application des dispositions qu'il

consacre.

« Art. IX, § 1. Les dispositions des articles CVIII à CXVII inclusivement, de l'acte final du congrès de Vienne, relatives à la libre navigation des fleuves et rivières navigables, seront appliquées aux fleuves et rivières navigables qui séparent ou traversent à la fois le territoire belge et le territoire hollandais:

« § 2. En ce qui concerne spécialement la navigation de l'Escaut et de ses embouchures, il est convenu que le pilotage et le balisage, ainsi que la conservation des passes de l'Escaut, en aval d'Anvers, seront soumis à une surveillance commune, et que cette surveillance commune sera exercée par des commissaires nommés à cet effet de part et d'autre. Des droits de pilotage modérés seront fixés d'un commun accord, et ces droits seront les mêmes pour les navires de toutes les nations.

<«< En attendant, et jusqu'à ce que ces droits soient arrêtés, il ne pourra être perçu des droits de pilotage plus élevés que ceux qui ont été établis par le tarif de 1829, pour les bouches de la Meuse, depuis la pleine mer jusqu'à Helvoet, et de Helvoet jusqu'à Rotterdam, en proportion des distances. Il sera au choix de tout navire se rendant de la pleine mer en Belgique, ou de la Belgique en pleine mer par l'Escaut, de prendre tel pilote qu'il voudra; et il sera loisible, d'après cela, aux deux pays, d'établir, dans tout le cours de l'Escaut et de son embouchure, les services de pilotage qui seront jugés nécessaires pour fournir les pilotes. Tout ce qui est relatif à ces établissements sera déterminé par le réglement à intervenir conformément au § 6 ci-après. Le service de ces établissements sera sous la surveillance commune mentionnée au commencement du présent paragraphe. Les deux gouvernements s'engagent à conserver les passes navigables de l'Escaut et de ses embouchures,

et à y placer et y entretenir les balises et bouées nécessaires, chacun pour sa partie du fleuve.

« § 3. Il sera perçu par le gouvernement des Pays-Bas, sur la navigation de l'Escaut et de ses embouchures, un droit unique de un florin 50 cents par tonneau, savoir un florin 12 cents pour les navires qui, arrivant de la pleine mer, remonteront l'Escaut occidental pour se rendre en Belgique par l'Escaut, ou par le canal de Terneuse; et de 0 florin 38 cents par tonneau, des navires qui, arrivant de la Belgique par l'Escaut, ou par le canal de Terneuse, descendront l'Escaut occidental pour se rendre dans la pleine mer. Et, afin que les dits navires ne puissent être assujettis à aucune visite ni à aucun retard ou entrave quelconque dans les rades hollandaises, soit en remontant l'Escaut de la pleine mer, soit en descendant l'Escaut pour se rendre en pleine mer, il est convenu que la perception du droit susmentionné aura lieu par des agents néerlandais à Anvers et à Terneuse. De même, les navires arrivant de la pleine mer pour se rendre à Anvers par l'Escaut occidental, et venant d'endroits suspects sous le rapport sanitaire, auront la faculté de continuer leur route sans entrave ni retard, accompagnés d'un garde de santé, et de se rendre au lieu de leur destination. Les navires se rendant d'Anvers à Terneuse, et vice versa, ou faisant, dans le fleuve même, le cabotage ou la pêche (ainsi que celle-ci sera réglée en conséquence du § 6 ci-après), ne seront assujettis à aucun droit.

« § 4. La branche de l'Escaut oriental ne servant point, dans l'état actuel des localités, à la navigation de la pleine mer à Anvers et à Terneuse, et vice versa, mais étant employée à la navigation entre Anvers et le Rhin, celle-ci ne pourra être grevée, dans tout son cours, de droits ou de péages plus élevés que ceux qui sont perçus, d'après les tarifs de Mayence, du 31 mars 1831, sur la navigation de Gorcum jusqu'à la pleine mer, en proportion des distances.

« § 5. Il est également convenu que la navigation des eaux intermédiaires entre l'Escaut et le Rhin, pour arriver d'Anvers au Rhin, et vice versa, restera réciproquement libre, et qu'elle ne sera assujettie qu'à des péages modérés, qui seront les mêmes pour le commerce des deux pays.

« § 6. Des commissaires se réuniront, de part et d'autre, à Anvers, dans le délai d'un mois, tant pour arrêter le montant définitif et permanent des péages, qu'afin de convenir d'un réglement général pour l'exécution des dispositions du présent article,

et d'y comprendre l'exercice du droit de pêche et de commerce de pêcherie dans toute l'étendue de l'Escaut, sur le pied d'une parfaite réciprocité et égalité en faveur des sujets des deux pays.>>

En vertu de ce dernier paragraphe, une convention pour le réglement des diverses questions fluviales, a été signée, le 20 maj 1843, entre la Belgique et les Pays-Bas.

§ 2.

Navigation du Mississipi et du St.-Laurent.

Nous ne saurions puiser à une source meilleure que celle que nous présente l'un des ouvrages de M. Henry Wheaton, jurisconsulte, publiciste et diplomate américain, pour placer sous les yeux du lecteur, un résumé sommaire des circonstances relatives à la navigation du Mississipi et du St.-Laurent, ainsi que des difficultés soulevées et des négociations suivies : qu'on nous permette donc d'emprunter, à cet écrivain de mérite, une partie de l'exposé des discussions qui ont eu lieu à l'occasion de ces deux fleuves, entre les États-Unis et l'Espagne, dans le siècle précédent, et, dans l'année 1828, entre la Grande-Bretagne et les États-Unis.

§ 3.

Discussion entre les États-Unis d'Amérique et l'Espagne, au sujet de la navigation du Mississipi.

Les principes soutenus par le congrès de Vienne au sujet de la navigation des grands fleuves de l'Europe, avaient déjà donné lieu à de graves discussions entre le gouvernement des États-Unis de l'Amérique septentrionale et l'Espagne, à l'époque où les deux rives du Mississipi appartenaient encore à cette Puissance.

Par le traité de paix signé à Paris, en 1763, entre la France, l'Espagne et l'Angleterre, traité qui mit fin à la guerre de sept ans (voir chap. IV), le Canada fut cédé à la Grande-Bretagne par la France, et la Floride par l'Espagne; la frontière entre les possessions anglaises et françaises fut alors établies par une ligne imaginaire tracée par le milieu du Mississipi, depuis la source jusqu'à l'Iberville, et à travers ce dernier fleuve et les lacs Maurepas et Pontchartrain jusqu'à la mer. Le droit de libre navigation fut accordé aux Anglais dans toute l'étendue du fleuve, sans qu'ils fussent soumis à aucun payement. (Voir art. IV du traité signé à Paris le 10 février 4763, dans le Recueil de MM. de Martens et de Cussy, tome I, p. 30.)

Peu de temps après, en 1783, par les traités de paix signés à Versailles et à Paris, le 3 septembre, entre la France et l'Angleterre, l'Espagne et l'Angleterre (voir le même tome, p. 301 et suivantes), la Floride fut rendue à l'Espagne.

L'indépendance des États-Unis ayant été reconnue à cette époque, la navigation du Mississipi fut permise à leurs citoyens par le traité conclu entre cette nation et l'Angleterre, le 3 septembre 1783 à Paris; mais l'Espagne qui possédait les deux rives du fleuve à son embouchure, prétendit avoir un droit exclusif à la navigation depuis l'embouchure jusqu'au point où la frontière méridionale des États-Unis touchait le fleuve. Les États-Unis résistèrent à cette prétention, et soutinrent leur droit de participation à la navigation du Mississipi, se fondant pour cela sur les traités de 1763 et de 1783, aussi bien que sur le droit naturel et sur le droit des gens.

Les discussions entre les deux gouvernements furent terminées par le traité conclu, le 27 octobre 1795, à San-Lorenzo-el-Real (lequel fut renouvelé par celui du 22 février 1819, relatif à la cession des Florides.)

Le traité de 1795 porte: « Art. IV. Il est convenu que la limite occidentale des États-Unis qui les sépare de la colonie espagnole de la Louisiane» (que la France avait, depuis 1783, cédée à l'Espagne) « est au milieu du Chenal ou lit de la rivière Mississipi, depuis la limite septentrionale desdits États jusqu'au bout du 31° degré de latitude du Nord de l'Équateur. Et S. M. Catholique a, de même, accordé que la navigation de ladite rivière, depuis sa source jusqu'à l'Océan, sera libre seulement à ses sujets et aux habitants des États-Unis, à moins qu'elle n'étende ce privilège aux sujets d'autres Puissances par une convention particulière. »

Le 22e article de ce traité permit d'ailleurs aux habitants des États-Unis de déposer leurs marchandises dans le port de la Nouvelle-Orléans et de les exporter de ce port, sans payer d'autre droit que le loyer du magasinage.

L'acquisition que les États-Unis firent, dans la suite, de la Louisiane, en 1803, et de la Floride, en 1819, ayant renfermé le fleuve tout entier dans le territoire de la république, et la stipulation du traité de 1783, qui assurait aux sujets de la GrandeBretagne la navigation du Mississipi, n'ayant pas été renouvelée par le traité de Gand, en 1814, le droit de navigation sur le Mississipi appartient maintenant exclusivement aux États-Unis.

CUSSY. II.

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« Le droit qu'avaient les États-Unis », dit M. Henry Wheaton, << de participer avec l'Espagne à la navigation du Mississipi, avant « l'acquisition de la Louisiane, reposait, selon le gouvernement <«< américain, sur un principe profondement gravé dans le cœur << de l'homme, à savoir que l'Océan est ouvert à tous les hommes << et que les fleuves le sont à tous leurs riverains. L'autorité de « ce droit était encore augmentée par le fait qu'il était admis, << par tous les États, de permettre aux habitants étrangers des << rives d'un fleuve qui se trouvait en partie sur leur territoire, « de naviguer librement sur ce fleuve; et, quand il arrivait que << les habitants de la partie inférieure du fleuve s'opposaient à ce « que les habitants de sa partie supérieure y naviguâssent, ce « n'était qu'un triomphe du plus fort sur le plus faible. »

Cette dernière circonstance ne se retrouvait pas dans les rapports qui existaient entre la république des Provinces - Unies et les Pays-Bas autrichiens, en ce qui concernait la navigation de l'Escaut, dont il a été question dans le § 1; là, le droit des Hollandais était fondé sur les traités.

S 4.

Discussions entre les États-Unis et la Grande-Bretagne, en 1828, au sujet de la navigation du Saint-Laurent.

La position des gouvernements anglais et américain au sujet de la navigation des grands lacs et du Saint-Laurent, semble être la même que celle des gouvernements espagnol et américain relativement au Mississipi.

Les États-Unis possèdent les rivages du midi des grands lacs et ceux du Saint-Laurent jusqu'à l'endroit où les frontières septentrionales de la république viennent toucher le fleuve, tandis que l'Angleterre possède les rivages septentrionaux des lacs et du fleuve dans toute son étendue, ainsi que les rives méridionales depuis le 45 degré de latitude jusqu'à son embouchure.

La prétention qu'avançait le gouvernement des États-Unis à la libre navigation du fleuve, depuis sa source jusqu'à la mer, devint, en 4828, le sujet de discussions diplomatiques avec le gouvernement anglais.

Comme dans les discussions relatives à la navigation du Mississipi, le gouvernement américain fonda ses prétentions en ce qui concernait le St.-Laurent, sur le droit naturel et sur la nécessité.

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