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PORTUGAL.

La législation portugaise se compose de la loi du 8 juillet 1851; la réforme en est projetée (1).

Le Portugal a conclu une convention avec la France, le 12 avril 1851.

DÉCRET DU 8 JUILLET 1851, RELATIF AUX DROITS DE PROPRIÉTÉ LITTÉRAIRE ET ARTISTIQUE EN PORTUGAL.

TITRE PREMIER.

Des droits des auteurs.

Art. 1er. Le droit de publier ou d'autoriser la publication ou la reproduction d'un ouvrage en tout ou en partie par la typographie, par la gravure, par la lithographie ou par tout autre moyen, appartient exclusivement à l'auteur pendant sa vie.

Sont exceptés de la disposition précédente, les citations extraites d'un livre et insérées, soit dans un autre livre, soit dans un journal politique ou littéraire, ainsi que les articles de journaux reproduits par d'autres journaux, pourvu que ces diverses reproductions indiquent le livre ou le journal d'où la citation a été tirée.

Art. 2. Après la mort de l'auteur, le droit ci-dessus indiqué subsiste encore, pendant trente ans, au profit de ses héritiers ou de ceux qui le représentent, suivant les règles ordinaires du droit.

Art. 3. L'auteur pourra toujours, et dans tous les cas, disposer librement par donations entre-vifs, par testament ou par tout autre mode de transmission, de cette propriété, laquelle sera considérée comme un véritable pécule quasi castrense (2).

Art. 4. Le propriétaire, par succession ou autrement, d'une œuvre posthume jouira du droit exclusif de la publier ou d'en autoriser la publication pendant une durée de trente ans.

Art. 5. L'auteur pourra céder le droit exclusif de publier son œuvre, soit pour tout le temps accordé par les articles précédents à lui et à ses ayants cause, soit pour une partie de ce temps.

Dans le dernier cas, les ayants cause de l'auteur jouiront de ce

(1) Voir page 179 du tome 1er.

(2) Le pécule quasi-castrense consiste dans les biens acquis par un emploi public de l'ordre civil,par opposition au pécule castrense, c'est-à-dire acquis dans le service militaire ou à son occasion.

droit seulement pendant l'espace de temps dont il n'aura pas été disposé.

Art. 6. Le droit exclusif de l'État sur les ouvrages de science, de littérature ou d'art publiés par son ordre, et à ses frais, sera de trente ans, qui compteront à partir de la publication complète de l'œuvre.

Le droit des académies et des autres corps littéraires ou scientifiques sur les ouvrages publiés en leur nom et par leurs soins durera trente ans, à partir de la publication du volume qui complète l'ouvrage. S'il s'agit de collections de mémoires sur divers sujets ou d'écrits formant collection, les trente ans seront comptés à partir de la publication de chaque volume.

Art. 7. L'éditeur d'une œuvre posthume antérieure au XVIIIe siècle, dont le propriétaire ne serait point connu ou ne se ferait point connaître légalement, jouira du même privilége pendant trente ans, à partir de la publication complète de l'ouvrage.

Le premier éditeur de chants nationaux, de proverbes, de fables, de contes, ou de tous autres monuments d'antiquité nationale, conservés uniquement par la tradition orale, jouira également du même privilége pendant trente ans.

Art. 8. L'éditeur d'un ouvrage anonyme jouira, pendant trente ans, du droit exclusif de le publier.

Toutefois, si le nom de l'auteur est déclaré dans une édition subséquente, ou s'il est légalement prouvé, le propriétaire de l'œuvre rentrera dans l'exercice des droits fixés par les art. 1, 2 et 3 de la présente loi.

Art. 9. La loi ne garantit la propriété, ni des œuvres obscènes, ni des libelles diffamatoires, ni de toutes autres compositions impures et d'une tendance manifestement immorale.

TITRE II.

Des œuvres dramatiques.

Art. 10. Les œuvres dramatiques des auteurs vivants ne pourront être représentées sur aucun théâtre public, où l'entrée se paye, sans le consentement par écrit desdits auteurs.

§ 1er. Les œuvres dramatiques posthumes ne pourront être représentées sans l'autorisation par écrit de leurs propriétaires.

§ 2. Le droit des propriétaires d'un ouvrage dramatique posthume durera trente années, à partir de la première représentation de l'œuvre. On entend par œuvre dramatique posthume, celle qui n'a jamais été représentée sur un théâtre public, où les spectateurs payent leur entrée, durant la vie de l'auteur, encore bien que, de son vivant, ladite pièce ait été rendue publique par l'impression.

Art. 11. Sur le produit de chaque représentation, déduction faite d'un tiers affecté aux dépenses de la soirée, l'auteur d'une pièce originale en cinq actes percevra le huitième des deux tiers restants; il percevra le dixième si la pièce est en quatre actes, le douzième si elle est en trois actes, le quatorzième si elle est en deux actes, le seizième si elle est en un acte. Art. 12. L'auteur d'une pièce originale a ses entrées libres au théâtre, aussitôt que commenceront les répétitions de son œuvre. Il jouira du même droit si la pièce est conservée au théâtre pendant dix années, à partir de la première représentation, pour une pièce en cinq ou en quatre actes; pendant deux années pour une pièce en trois actes: pendant une année pour une pièce en un ou deux actes.

On entend par « pièce conservée au théâtre » celle qui a été représentée plus de trois fois.

Art. 13. Pour les pièces traduites, les entrepreneurs ou directeurs de théâtres payeront les quotes-parts fixées dans l'art. 11, avec cette différence, toutefois, qu'un tiers de la somme sera remis au traducteur, et que les deux autres tiers seront perçus par le Conservatoire royal, un tiers étant destiné à former des prix pour les auteurs d'ouvrages originaux, et l'autre tiers devant servir à l'institution d'un mont-de-piété d'une caisse dramatique et musicale au bénéfice des veuves et orphelins des artistes et des auteurs d'œuvres dramatiques et musicales.

Le gouvernement est chargé de dresser sans retard les règlements, et de provoquer la formation d'une commission arbitrale pour ledit mont-de-piété, auquel seront admis tous les auteurs, traducteurs, professeurs et artistes qui voudront concourir à une souscription préalablement déterminée.

Art. 14. Le Conservatoire percevra également pour la représentation des anciennes pièces originales ou traduites qui, conformément à l'art. 10, auraient cessé d'être la propriété de l'auteur ou de ses ayants cause, la moitié de la quote-part établie dans l'art. 11 pour les pièces originales.

Art. 15. Le payement de tous ces honoraires sera fait le soir même de la représentation, et les intéressés pourront examiner les registres et autres documents constatant les perceptions d'entrée, les abonnements et tous autres moyens de recette, lesquels leur seront présentés sur-lechamp.

Art. 16. Après la mort d'un auteur dramatique, s'il n'y a point de stipulations particulières faites avec lui ou avec ses ayants cause, toute entreprise théâtrale dûment établie pourra représenter les pièces non posthumes dudit auteur, à la condition de payer à ses ayants cause une 'rétribution égale à celle que l'auteur eût été en droit de percevoir au moment de son décès.

§ 1er. Le droit à cette rétribution durera trente ans, à partir de la mort de l'auteur.

§ 2. Les dispositions du présent article ne dispensent, en aucune manière, les entreprises théâtrales du payement des quotes-parts dues au Conservatoire royal, conformément aux articles 13 et 14 de la présente

loi.

Art. 17. Les dispositions des articles précédents ne subiront aucune modification par l'impression d'une œuvre dramatique.

Pour ce qui concerne la publication par la voie de la presse des œuvres dramatiques, les droits des auteurs et de leurs ayants cause sont réglés par le titre Ier de la présente loi.

TITRE III.

Des œuvres d'art.

Art. 18. L'auteur d'un dessin, d'un tableau, d'une œuvre de sculpture, d'architecture ou de toute autre œuvre analogue, aura le droit exclusif de la reproduire ou d'en autoriser la reproduction par la gravure, par le dessin, par le moulage ou par tout autre moyen.

L'auteur jouira de ce droit pendant toute sa vie. Après son décès, ses héritiers ou ayants cause jouiront du même privilége, conformément aux règles établies par le titre ler de la présente loi.

Art. 19. Les auteurs des œuvres mentionnées dans l'article précédent, ou leurs ayants cause, pourront céder le droit qui leur est garanti, tout en se réservant la propriété de leur oeuvre; mais s'ils vendent ladite œuvre originale, ou s'ils en disposent de toute autre manière, le droit exclusif d'en autoriser la reproduction, par la gravure, par le moulage ou par tout autre procédé passera à l'acquéreur, sauf le cas où le contraire aurait été expressément stipulé.

Art. 20. Est également reconnue et garantie la propriété des dessins et patrons des fabricants, qui, toutefois, sera réglée par une loi spéciale.

TITRE IV.

Des compositions musicales.

Art. 21. Les auteurs d'oeuvres musicales et leurs ayants cause jouiront quant à la publication desdites œuvres par quelque moyen de reproduction que ce soit, des droits établis au titre Ier de cette loi, et, quant à leur exécution dans les théâtres ou autres lieux publics, des droits établis au titre II.

TONE II.

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TITRE V.

Dispositions générales.

Art. 22. Dans le cas où le droit dont il est parlé dans la présente viendrait à faire partie d'une succession vacante, le fisc n'y pourra prétendre, et la publication, la réimpression ou la représentation seront libres, sans préjudice, toutefois, des droits des créanciers, et sauf ce qui est déterminé par les articles 7 et 10 ci-dessus.

Art. 23. Pour être admis à jouir du bénéfice de la présente loi, l'auteur ou le propriétaire de l'œuvre reproduite par la typographie, la lithographie, la gravure, le moulage, ou d'une œuvre d'art non encore reproduite, est tenu de la faire enregistrer de la manière et dans les lieux spécifiés par les paragraphes suivants :

§ 1er. Avant que la publication d'une œuvre ait été légalement accomplie par la distribution des exemplaires, suivant ce qui est ordonné dans la loi sur la répression des abus de la presse, six exemplaires complets de ladite œuvre seront déposés à la bibliothèque publique de Lisbonne, si l'œuvre n'est ni dramatique, ni musicale, ni relative aux arts du dessin, ni production d'aucun d'eux. Le bibliothécaire donnera immédiatement un reçu du dépôt et inscrira le titre de l'œuvre, avec la mention du dépôt sur un registre spécial destiné à cet effet dans la bibliothèque. Cette formalité donnera lieu au payement d'une somme de 200 reis, et le même droit sera exigible pour chaque extrait dudit registre dont la demande serait faite.

§ 2. Si l'œuvre est dramatique ou musicale, ou relative à la littérature dramatique et à l'art musical, l'enregistrement en sera fait au Conservatoire royal dans la même forme et aux mêmes conditions que celles qui sont établies dans le paragraphe précédent.

§ 3. Si l'œuvre est une production des arts du dessin, ou si elle s'y rapporte, l'enregistrement en sera fait à l'académie des beaux-arts de Lisbonne, dans la même forme et aux mêmes conditions que celles qui sont établies dans le § 1er de cet article.

§ 4. Les extraits de ces registres serviront de titres légaux pour prouver la propriété d'une œuvre publiée et pour poursuivre en justice les contrefacteurs.

§ 5. Les auteurs qui, ne voulant point publier leurs œuvres par la typographie, la gravure, la lithographie, le moulage, désireraient toutefois en constater la propriété, devront les présenter dans les établissements respectifs pour les y faire enregistrer et pour obtenir des extraits certifiés dudit registre, lesquels seront délivrés dans la même forme et

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