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sommes fermement convaincu que l'attaque serait moins fréquente, moins facile et moins forte, si l'assaillant savait d'avance qu'après la victoire il sera obligé de pensionner les « victimes de la ༥.

guerre, » et de supporter les charges de ses « conquêtes! »

CONCLUSION

En résumé, lorsqu'il s'agit de protéger l'enfance, le Code contient des dispositions sévères : le législateur sévit, avec une juste rigueur, contre ces odieux attentats qui blessent la candeur angélique des enfants et souillent, d'une manière abjecte, leur naïve innocence.

Lorsqu'il s'agit de réprimer les abus de la violence physique, les excès de la force brutale, le législateur intervient encore avec une imposante énergie.

Mais lorsqu'il s'agit de mettre la vertu des adolescentes à l'abri des violences morales et de protéger contre les périls de la séduction l'inexpérience des jeunes filles mineures, la loi retire, avec indifférence, son palladium tutélaire.

S'agit-il, par exemple, de sauvegarder quelques

intérêts pécuniaires? Oh! alors le Code déploie une prudence admirable! Il prend les plus minutieuses précautions; il met les mineurs en tutelle; il les entoure d'un tuteur, d'un subrogé-tuteur, d'un conseil de famille ! La loi les considère comme INCAPABLES, incapables de contracter, incapables d'administrer leurs biens, incapables d'emprunter, incapables d'aliéner ou hypothéquer leurs immeubles, incapables de disposer par testament de toute leur fortune, incapables d'accepter une donation, incapables, à fortiori, de se défendre contre les ruses des filous!...

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Si quelqu'un abuse de la « confiance des « besoins, des faiblesses» ou des passions» des mineurs, pour leur faire souscrire, à leur préjudice, une quittance ou un billet, quel attentat, grand Dieu! et quel délit! Vite le législateur s'alarme; il punit d'un emprisonnement et d'une amende l'audacieux fripon!

Mais quand il s'agit - non plus d'une quittance ou d'un billet à ordre! mais de la vertu d'une jeune fille mineure, le législateur ne dit mot et consent à voir commettre impunément un tel abus de confiance !... Il estime, dans sa sagesse, que les mineures, incapables d'accomplir l'acte le plus vulgaire de la vie civile, sont fort capables de garder toutes seules et de protéger ellesmêmes ce trésor inappréciable qu'on appelle l'honneur ou la virginité. Ces mineures - doublement

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faibles, à cause de leur sexe, à cause de leur âge, -il les laisse agir sans lisières, il les abandonne aux lubriques fourberies du sexe fort. Il laisse les jeunes filles libres de se faire duper, tromper, déshonorer par tous les escrocs du libertinage; il les livre, sans défense, à toutes les attaques des séducteurs, et il tolère, en silence, tous ces coupables attentats!

Eh bien l'inertie des lois amène, d'ordinaire, le relâchement des mœurs. L'indifférence du législateur, pour la vertu des jeunes filles, a porté des fruits, et ces fruits ne sont pas, hélas ! sans amertume. Aux derniers siècles, la séduction appartenait essentiellement aux mœurs de la Cour et des seigneurs, qui avaient même le privilege de la débauche! - Aujourd'hui, la séduction s'est propagée, comme une maladie épidémique, dans la masse de la nation. Partout la corruption se manifeste: ici, c'est un riche libertin qui débauche de jeunes ouvrières, pour satisfaire gaiement ses passions personnelles; » là, c'est un maître qui séduit sa servante et la renvoie quand elle est grosse. Dans les manufactures, à Paris, à Lyon, à Lille, quelques chefs d'industrie ne craignent pas de séduire eux-mêmes leurs ouvrières (1); des contre-maîtres chassent de l'atelier ou persécutent journellement les jeunes filles qui ne veulent pas

(1) Histoire morale des femmes, p. 69.

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