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ges entre oncles et nièces, entre tantes et neveux, seroient prohibés (1).

On a pensé que si la tante n'étoit pas toujours étrangère aux soins de la maternité, l'oncle, de son côté, tient souvent la place du père, et que dès-lors il doit en remplir les devoirs; que les devoirs de l'oncle et les soins de la tante s'accordent également mal avec les procédés moins sérieux qui précèdent le mariage et qui le préparent (2).

II. DIVISION.

Des Dispenses de la Prohibition fondée sur la parenté.

ARTICLE 164.

NÉANMOINS le Gouvernement pourra, pour des causes graves lever les prohibitions portées au précédent article. NUMERO I.er

De l'Origine des Dispenses.

Si les lois de la nature sont inflexibles et invariables, les lois humaines sont susceptibles d'exemptions et de dispenses. Quand on peut le plus, on peut le moins. Un Législateur qui seroit libre de ne pas porter la loi, peut, à plus

(1) Décision, Procès-verbal du 26 fructidor an 9, tome I.er, page 248. (2) M. Portalis, Exposé des motifs, Procès-verbal du 19 ventose an 11, tome II, page 513,

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forte raison, déclarer qu'elle cessera en cer

tains cas.

« Il ne seroit ni sage ni possible que ces cas d'exceptions en toute matière fussent toujours spécifiquement déterminés par le Législateur. La loi ne doit pas faire par elle-même ce qu'elle ne peut pas bien faire par elle-même ; elle doit confier à la sagesse d'autrui ce qu'elle ne sauroit régler d'avance par sa propre sagesse.

» De là l'origine des dispenses en matière de mariage; et l'usage de ces dispenses a été universel, relativement à la prohibition de ma riage entre parens » (1).

NUMERO II.

Quelle Autorité a le droit d'en accorder.

IL résulte de ce qui vient d'être dit de l'origine des dispenses, que le droit de les accorder appartient à l'autorité qui a le pouvoir de créer les empêchemens, parce qu'il n'est que la faculté de faire des exceptions aux règles générales.

C'est sous ce point de vue que la matière doit être envisagée.

Le conflit ne pourroit s'élever qu'entre l'autorité civile et l'autorité ecclésiastique.

(1) M. Portalis, Exposé des motifs, Procès-verbal du 19 venLôse an 11, tome II, page 515.

Tome 111.

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Voici quels sont à cet égard les faits et les principes.

<< Dans l'ancienne jurisprudence, les dispenses étoient accordées par les ministres de l'Église; mais en ce point, comme dans tout ce qui concernoit le contrat, les ministres de l'Eglise n'étoient que les vice-gérans de la puissance temporelle; car, on ne sauroit trop le dire, la religion dirige le mariage par sa morale; elle le sanctifie par ses rits: mais il n'appartient qu'à l'Etat de le régler par des lois dans ses rapports avec l'ordre de la société. Aussi c'est une maxime constante, attestée par tous les hommes instruits, que les empêchemens dirimans ne peuvent être établis que par la puissance qui régit l'État.

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Quand les institutions religieuses et les institutions civiles étoient unies, rien n'empê

choit qu'on abandonnât à l'Eglise le droit d'accorder des dispenses, même pour le contrat; mais ce droit n'existoit que parce qu'il étoit avoué ou toléré par la loi civile.

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» La chose est si évidente, qu'elle résulte de tous les monumens de l'histoire. Nous n'avons qu'à jeter les yeux sur ce qui s'est passé dans les premiers âges du Christianisme. Ce ne sont point les ministres de l'Eglise, mais les Empereurs, qui ont promulgué les premières

prohibitions du mariage entre parens; ce ne sont point les ministres de l'Eglise, mais les empereurs, qui ont d'abord dispensé de ces prohibitions. Nous en avons la preuve dans une loi d'Honorius, par laquelle ce prince défend de solliciter auprès de lui des dispenses pour certains degrés, et annonce qu'il n'en donnera qu'entre cousins germains. Cette loi est au titre X du Code Théodosien.

>> Il est encore parlé des dispenses que les Empereurs donnoient pour mariages, dans une loi de l'Empereur Zénon, et dans une loi de l'Empereur Anastase.

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Cassiodore, sénateur et conseil des Rois Goths, rapporte la formule de dispense que ces Rois donnoient pour mariages.

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D'après le témoignage du père Thomassin, ce n'est que dans le onzième siècle que les pes commencèrent à accorder des dispenses; et nous voyons que dans les temps postérieurs, les Souverains bien avisés continuèrent à user de leurs droits. Ainsi l'Empereur Louis IV, célèbre par ses disputes avec le Saint-Siège, donna, au commencement du quatorzième siècle, des dispenses de parenté à Louis de Brandebourg et à Marguerite, duchesse de Carinthie.

>> La transaction arrêtée à Passau en 1552, et suivie en 1555 de la paix de la religion, re

connoît le droit que les Electeurs et les autres Souverains d'Allemagne avoient d'accorder des dispenses.

» En 1592, le Roi Henri IV, conformément à plusieurs arrêts des Parlemens, fit un réglement général, par lequel les dispenses en toule matière furent attribuées aux évêques nationaux,

» Ce réglement fut exécuté pendant quatre ans. On vit renaître ensuite l'usage de recourir à Rome pour certaines dispenses que l'on réputa plus importantes que d'autres.

>> Mais les droits de la souveraineté sont inaliénables et imprescriptibles. La loi civile peut donc aujourd'hui ce qu'elle pouvoit autrefois; et elle a dû reprendre l'exercice du droit d'accorder des dispenses, depuis que le contrat de mariage a été séparé de tout ce qui concerne le sacrement.

» Si les ministres de l'Eglise peuvent et doivent veiller sur la sainteté du sacrement, la puissance civile est seule en droit de veiller sur la validité du contrat. Les réserves et les précautions dont les ministres de l'Eglise peuvent user pour pourvoir à l'objet religieux, ne peuvent, dans aucun cas ni en aucune manière, influer sur le mariage même, qui en soi est un objet temporel.

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