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La Cour d'appel de Paris les attaqua tous les deux.

Elle observa sur le premier, que « si la loi ne considère le mariage que sous ses rapports civils et politiques, ce n'est pas en vertu d'une disposition qui lui soit particulière, c'est par une conséquence nécessaire du pacte social, qui, n'excluant pas de culte, n'en reconnoît cependant aucun *. Le Code Napoléon ne peut donc considérer, en effet, le mariage sous des rapports religieux; et l'on affoibliroit cette importante vérité, si l'on croyoit nécessaire d'en faire un article dans un Code dont les dispositions peuvent être changées» (1).

La Section de législation, en admettant les principes de la Cour d'appel de Paris, en avoit cependant rejeté les conséquences. Elle pensoit que l'article de la Commission renfermoit une déclaration solennelle, qu'il était encore

* Cette maxime a besoin d'explication. Elle seroit démentie par la loi du 18 germinal an 10 sur l'organisation des cultes, si elle étoit proposée dans sa généralité : mais la Cour d'appel de Paris vouloit seulement exprimer cette idée, que la législation avoit été sécularisée, et que les lois d'une religion quelconque ne dominoient plus la législation politique et civile. Dans ces limites, la maxime est exacte. On trouvera au surplus, au titre du Divorce, le développement du principe de la liberté des cultes. (1) Observations de la Cour d'appel de Paris, page 30.

Tome III.

utile de proclamer ↑ (1). Elle proposoit donc d'adopter l'article (2).

Le conseil d'état fut d'une opinion différente. On dit ¶ qu'il étoit tellement évident que ་ le Code civil ne considère le mariage que sous ses rapports civils, qu'il n'étoit pas nécessaire de s'en expliquer ↑ (3).

L'article fut retranché (4).

A l'égard de l'autre article, la définition qu'il donnoit ne paroissoit pas complète à la Cour d'appel de Paris. « Il est bien vrai, disoitelle, que la durée du mariage, est, dans l'intention des contractans, celle de la vie de l'un d'eux; mais il a cela de commun avec d'autres contrats, et ce caractère ne le distingue pas suffisamment. Ce qui distingue en effet le mariage, c'est qu'il a pour objet de perpétuer les familles par une postérité légitime. En vain diroit-on qu'il se contracte des mariages sans espoir de postérité; ces mariages, heureusement peu communs, tolérés plutôt que permis, n'empêchent pas que le but principal du mariage soit tel qu'on vient de l'annoncer » (5).

(1) M. Réal, Procès-verbal du 26 fructidor an 9, tome I.er, page 231. (2) 1. Rédaction (article 1.er), ibid., page 230. (3) Le Consul Cambacérès, ibid., page 231. (4) Décision, (5) Observations de la Cour d'appel de Paris, page 30.

ibid.

-

Ces raisons, que la Section rappela au Conseil d'état (1), l'avaient décidée à supprimer l'article.

Elle ajouta « qu'en thèse générale, elle respectoit la règle, Omnis definitio in jure periculosa; et que dans l'espèce particulière, elle àvoit cru que la définition n'étoit pas d'absolue nécessité » (2).

Le Conseil d'état partagea cette opinion, et, sans donner la définition du mariage, il s'est occupé des dispositions nécessaires pour le régler.

Il importe d'en faire connoître précisément la matière.

Quelle est la Matière de ce Titre ?

TROIS sortes de dispositions sont nécessaires relativement au mariage.

Il faut régler,

1o. Ce qui n'est qu'extrinsèque, c'est-à-dire, ses formes et celles des titres qui le constatent; 2o. Ce qui tient à l'essence du mariage, savoir : les conditions sous lesquelles il est valablement contracté, ses effets pendant sa durée,

(1) M. Réal, Procès-verbal du 26 fructidor an 9, tome I., P. 250. (2) Ibid.

les obligations qui en naissent, les droits qu'il donne, les devoirs qu'il impose, les causes qui le dissolvent, et les suites de cette dissolution;

3°. Les conséquences du mariage par rapport aux biens. Elles ne doivent pas être confondues avec ses effets essentiels et naturels. Le mariage est une société des personnes; ses effets essentiels sont donc limités aux personnes qu'il unit ́intimément ; et ces personnes sont, les époux d'abord, ensuite les époux et leurs enfans. La société ne s'étend pas nécessairement aux biens. Il est possible que le mariage subsiste sans qu'il y ait communauté de fortunes. Nous avions même autrefois en France des contrées entières où l'usage de la communauté étoit inconnu. Ļa coutume de Normandie alloit jusqu'à la défendre. Notre Code suppose aussi qu'elle pourra ne pas exister.

Ainsi, les conséquences que le mariage peut avoir par rapport aux biens des époux, ne sont que des accessoires de ce contrat.

Mais ces accessoires il a fallu les régler, soit en décidant quelles conventions matrimoniales seroient permisės, soit en fixant le droit lorsqu'il n'y aurait pas de conventions particulières.

Les disposions du premier ordre sont comprises dans le titre II du livre I.er *;

Celles du troisième ordre dans le titre V du livre III.

Les autres sont la matière du présent titre. Voici dans quel esprit elles ont été combinées: «En respectant les principes de la raison naturelle, on a cherché à faire le bien des familles particulières et celui de la grande famille, qui les comprend toutes (1).

Il ne reste plus qu'à rendre raison du plan Sous lequel les diverses parties de la matière. ont été distribuées.

Plan et Divisions du Titre.

« On a suivi l'ordre naturel des choses.

>> On s'est d'abord arrêté au moment où les époux s'unissent. On a examiné ce qui est nécessaire pour préparer leur union et en garantir la validité; on a passé ensuite aux principaux effets que cette union produit au moment où on la contracte et pendant sa durée; enfin on a indiqué quand et comment elle se

tôse

Voyez tome II, pages 105 et suiv.

(1) M. Portalis, Exposé des motifs, Procès-verbal du 19. venan 11 • tome II, page 516.

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