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La condition d'un consentement libre de la part des contractans.

Le mariage est un contrat civil:

Il suppose donc l'existence et les droits civils dans celui qui veut le former.

Le mariage est une sorte d'aliénation de la personne :

De là, dans nos moeurs, l'empêchement résultant des liens d'un premier mariage qui subsiste, et par lequel un individu a déjà disposé de lui;

De là, l'obligation imposée au fils de famille majeur, de prendre l'avis de ceux auxquels il doit le jour.

Cette obligation est encore fondée sur deux autres caractères du mariage :

1o. Cet engagement ente une famille nouvelle sur celle qui existe déjà; il donne des brus, des gendres, des enfans et des héritiers aux pères et aux aïeux; il est donc juste qu'ils soient mis à portée de défendre leurs plus chers intérêts, et de détourner, du moins par de sages conseils, une union qu'ils prévoiroient ne devoir leur préparer que des peines.

2o. Cet engagement est de tous les engagemens celui qui influe le plus sur le bonheur ou le malheur de la vie ; c'est aussi de tous, celui où l'illusion est le plus à craindre, à quelqu'âge qu'on soit arrivé : la prudence du Législateur a donc dû aller jusqu'à forcer même le majeur qui veut se marier, à écouter les conseils impartiaux de l'expérience et de la tendresse.

Le mariage forme entre les époux une union d'identité. Il les rend égaux dans cette société, dont à la vérité le mari est le chef, parce que rien ne peut se mouvoir ni marcher que par la disposition d'une volonté unique, mais où il n'a qu'un pouvoir de gouvernement, pour l'intérêt commun sur sa compagne et sur son égale, et non la supériorité d'un maître sur une inférieure et sur une esclave:

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De là, l'empêchement de la parenté et de l'affinité dans les lignes ascendantes et descendantes, soit directes, soit collatérales : une liaison qui fait des égaux ne peut se concilier avec des liaisons qui établissent entre ceux qu'elles unissent des rapports de suprématie et d'infériorité.

Le mariage est institué pour multiplier les liaisons entre les hommes :

De là, la prohibition du mariage entre les frères et soeurs, déjà si étroitement unis par leur origine commune.

'Toutes ces vérités, que je n'ai fait qu'indiquer, recevront leur développement dans la discussion des divers articles de ce chapitre, auxquels elles servent de base.

A quelle autorité appartient-il d'établir les Conditions du Màriage?

MAIS remontons à l'origine de toutes ces conditions.

De quelle autorité peuvent-elles émaner? Il est trois espèces de lois, sur le pouvoir desquelles on est obligé de fixer ses idées. La loi naturelle,

La loi civile,

La loi ecclésiastique.

Il suffit de se reporter à ce qui a été dit aux Notions générales * *, pour comprendre dans quelle mesure chacune de ces autorités influe en général sur les réglemens relatifs au mariage. Les principes qui ont été établis reçoivent leur

* Voyez Notions générales, pages 11 et suiv.

application au sujet particulier des prohibitions et des empêchemens.

C'est de la loi naturelle que nous vient le mariage. D'après la doctrine développée dans les chapitres XI, XII et XIII de l'introduction *, le Législateur civil n'a eu qu'à élaborer cette institution, pour l'adapter à l'état social. Il a pu ajouter aux conditions prescrites par la loi naturelle, mais il a dû respecter celles qu'elle avait établies. Aussi venons-nous de voir qu'il s'est scrupuleusement conformé à ce principe, que la plupart des conditions exigées par le droit civil sont empruntées du droit naturel, et dérivent de l'essence et des caractères du mariage.

L'autorité ecclésiastique n'intervient que pour bénir le contrat et y ajouter le sacrement (du moins dans la religion catholique); mais elle ne le forme pas, elle le prend au contraire tout formé, et en fait la matière de ses bénédictions. Ainsi, ce n'est point à elle qu'il appartien d'instituer les conditions du mariage, ni d'en dispenser.

Ce principe, auquel on a toujours rendu

* Voyez tome I.er, Introduction, pages 43 et suiv.

hommage en France, a été rappelé dans la discussion, et l'on a en même-temps déterminé, sous ce rapport, l'autorité de loi civile.

:

« Les prohibitions, a-t-on dit, ne viennent pas des lois ecclésiastiques; on retrouve les plus anciennes dans les lois grecques et romaines celle du mariage entre la tante et le neveu a été faite par Théodose. Les lois ecclésiastiques ne les ont adoptées que fort tard, et quand elles se mêlèrent des mariages: jusques-là les souverains seuls en accordoient les dispenses. La première dispense qui a été donnée par l'autorité ecclésiastique, fut celle que Pascal II accorda au Roi de France sur la fin du onzième siècle. Les Princes n'eurent recours au Pape que parce qu'il leur parut inconvenant de se dispenser eux-mêmes des lois qu'ils avoient établies; mais ils n'en conservèrent pas moins leurs droits. On trouve encore dans Cassiodore et dans Marculfe, les formules dont ils se servoient. Les prohibitions et les dispenses appartiennent donc en entier au droit civil » (1).

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(1) M. Portalis, Procès-verbal du 26 fructidor an 9, tome I.* page 245.

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