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Mais il s'agissoit de déterminer comment la famille exerceroit son droit.

La Section avoit cru devoir distinguer. Avant le mariage elle donnoit le droit d'opposition aux parens individuellement, parce qu'il s'agit alors d'empêcher le mal; après le mariage, la Section n'accordoit la réclamation qu'à la famille en corps, parce qu'alors il s'agit de dissoudre un mariage formé » (1).

La première rédaction énonçoit en conséquence que l'action en nullité ne pouvoit être exercée que par le conseil de famille (2). La seconde rédaction n'étoit pas tout-à-fait aussi précise; elle portoit : Le mariage contracté sans le consentement des père et mère, des ascendans ou de la famille, dans les cas où ce consentement pouvoit étre nécessaire, ne peut être attaqué que PAR CEUX DONT LE CONSENTEMENT ÉTOIT REQUIS, ou par celui des deux époux qui avoit besoin de ce consentement (3).

On objecta contre cette rédaction ¶ qu'elle sembloit accorder à chacun des individus de la famille le droit d'attaquer le mariage (4).

(1) M. Réal, Procès-verbal du 6 brumaire an 10. - (2) Voyez 1.1e Rédaction, chap. III, sect. II, article 9, Procès-verbal du 5 vendémiaire an 10, tome 11, page 275. · (3) Rédaction présentée par M. Tronchet, chap. III, sect. II, art. 4, Procèsverbal du 6 brumaire an 10.

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(4) M. Réal, ibid.

Il fut répondu « que l'article ne supposoit pas que toute la famille eût ce droit, puisqu'il n'accordoit cette faculté qu'à ceux dont le consentement étoit nécessaire; et qu'à défaut d'ascendans, c'est le consentement du corps de la famille qui est exigé par la loi. D'ailleurs il ne faut pas oublier, ajoutoit-on, que dans la suite il se trouve des dispositions qui ne permettent pas aux collatéraux pris individuellement d'attaquer le mariage du vivant des époux *. Ce n'est qu'après la mort de ceux-ci, c'est-à-dire, lorsque les collatéraux ont des droits successifs actuellement acquis, que cette faculté leur est accordée; car il ne seroit pas juste qu'alors ils ne pussent pas les faire valoir, parce que le conseil de famille refuseroit d'agir contre le mariage »> (1).

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Néanmoins le Conseil d'état, pour ne laisser subsister aucune équivoque, retrancha ces mots de la famille, et y substitua ceux-ci : du conseil de famille (2).

NUMERO II,

De l'Époux.

L'AUTEUR de la seconde rédaction s'écartant

(1) M. Tronchet, Procès-verbal du 6 brumaire an 10.cision, ibid.

* Voyez l'article 187, page 395.

(2) De

des principes de la Section, qui n'accordoit le droit de réclamer qu'aux ascendans et à la famille *, proposoit dans l'article qui vient d'être rapporté, de donner à l'époux mineur luimême la faculté de faire valoir là nullité.

La Section, de son côté, rappela son système et en expliqua les motifs.

Elle dit «< qu'elle avoit cru devoir refuser à l'époux ce droit, parce qu'il lui avoit semblé juste qu'il ne pût se prévaloir de sa propre faute, et arguer du défaut d'un consentement que la loi l'obligeoit de prendre » (1). En général «< un défaut de formalité ne doit pas, sur la demande de l'époux qui a violé la loi, faire rompre un mariage consommé » (2).

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La minorité n'est pas un motif de déroger à ces principes: « si la loi vient au secours du mineur, c'est parce qu'elle entend le protéger lorsque sa faiblesse l'a fait tomber dans l'erreur; mais cette protection cesse comme n'ayant plus d'objet, lorsque le mineur a contracté un mariage raisonnable: or, il est réputé n'avoir pas été déçu, quand ses parens n'attaquent pas son mariage » (3).

(1) M. Réal, Procès-verbal du 6 brumaire an 10. (2) Le Ministre de la justice, ibid. (3) M. Ræderer, ibid. * Voyez page 340.

Il fut répondu « que la disposition qu'on attaquoit est favorable à la puissance paternelle » (1);

Qu'elle est dans l'esprit de la loi « qui exige le consentement du père, par la raison qu'elle prend le mineur sous sa protection, et qu'elle le déclare incapable de contracter seul un mariage » (2); que « l'indifférence de la famille ne doit pas priver les mineurs du bénéfice de la loi » (3).

A ces raisons il faut ajouter « qu'en général il est permis à tous ceux qui ont contracté une obligation nulle et vicieuse, de réclamer contre leur engagement, et surtout lorsqu'ils l'ont contracté pendant leur minorité. L'intérêt des parties est la mesure de leur action. Si on reçoit favorablement les plaintes d'un mineur qui prétend avoir été surpris dans une convention peu importante, on doit, avec plus de justice, lui accorder la même faveur, lorsqu'il demande à être restitué contre l'aliénation qu'il a faite de tous ses biens et de sa personne » (4). La disposition a donc été adoptée (5).

(1) Le Consul Cambacérés, Procès-verbal du 6 brumaire an 10. ~ (2) M. Tronchet, ibid. (3) M. Regnier, ibid. —(4) M. Portalis, Exposé des motifs, Procès-verbal du 19 ventôse an 11, tome II, pages 527 et 528. (5) Décision, Procès-verbal du 6 brumaire an 10.

II. SUBDIVISION.

De ceux qui ne peuvent demander la nullité du Mariage.

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NUMÉRO 1.er

Des Collatéraux.

paru naturel d'interdire aux collatéraux une action qui ne peut compéter qu'aux parens dont le consentement est nécessaire. Ceuxci vengent leur propre injure en exerçant cette action; ils font plus, ils remplissent un devoir. La loi requéroit leur intervention dans le mariage, pour l'utilité même des époux : ils satisfont au voeu de la loi; ils répondent à sa confiance, en cherchant à réparer, par la voie de la cassation, le mal qu'ils n'ont pú prévenir par les voies plus douces d'une tendre surveillance. Que deviendroit la loi qui exige le consentement des parens, si ceux-ci ne pouvoient la réclamer quand elle est violée » * * (1)?

(1) M. Portalis, Exposé des motifs, Procès-verbal du 19 ver-tôse an 11, tome II, page 527

Voyez l'article 187, p. 395.

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