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qu'ils n'avoient pas réclamé, ou avoient par donné l'injure » (1).

On disoit que « cette disposition seroit préférable à celle qui fixeroit un délai pour la ré clamation. Ce délai, quel qu'il soit, peut être trop court dans certaines circonstances: il vaut donc mieux que les circonstances soient pesées par le juge, et qu'il se décide d'après les preu ves qui en résultent » (2).

Ces raisons étoient sans réponse à l'égard de l'approbation indirecte qui résulte de faits particuliers: mais sous le rapport de celle qui résulte du silence, la disposition entraînoit un inconvénient dont on avoit déjà parlé et qu'on cherchoit à prévenir; elle jetoit sur le sort du mariage une incertitude sans terme; elle pouvoit pendant une longue suite d'années inquiéter les époux et leurs enfans: or il avoit été précédemment observé « qu'il seroit trop dur de donner à ces sortes de nullités une durée indéfinie; qu'il conviendroit donc de les circonscrire par un délai » (3); et cette opinion a prévalu.

Mais quel seroit le délai?

¶ Le borneroit-on à un mois ↓ (4) ?

(1) Le Consul Cambacérés, Procès-verbal du 5 vendémiaire an 10, t. I.er, page 273. (2) M. Tronchet, ibid. Premier Consul, ibid., page 272. — (4) Ibid., page 273.

(3) Le

« C'eût été lui donner une durée trop courte, et affoiblir la puissance paternelle, dont l'intérêt se lie avec celui des moeurs. Il est une foule de moyens et de ruses pour soustraire à la connaissance du père et de la famille le mariage du mineur : l'argent surtout peut beaucoup dans cette occasion; car, avec ce secours, on parvient à faire dresser un procès-verbal d'affiche, quoiqu'il n'y ait pas eu d'affiches » (1).

Porteroit-on le délai à deux ans, comme le vouloit la Cour de cassation *?

C'étoit se jeter dans l'autre extrême, laisser les époux dans de trop longues angoisses, et s'exposer à compromettre le sort de plusieurs enfans.

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On proposa done d'assigner à la réclamation du père et de la famille le terme d'un an, à compter du jour où ils ont eu connoissance, du mariage >> (2).

Cette proposition a été adoptée par l'article 183.

II. SUBDIVISION.

De la Ratification de l'Époux, résultant de son silence depuis sa majorité.

Le Conseil d'état n'a pas fait difficulté d'ad

(1) M. Tronchet, Procès-verbal du 5 vendémiaire an 10, t. I.",\ page 273. — (2) Ibid.

* Voyez page 346.

mettre ce principe de la Section, que la nullité dont il s'agit ici est couverte par l'évènement de la majorité de l'époux.

Mais, dans le système de la Section, cette fin de non-recevoir ne pouvoit être invoquée que contre les ascendans et contre la famille, et non contre l'époux*.

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Dans celui de l'article 183, au contraire, elle ne peut être opposée qu'à l'époux, et non aux ascendans ni à la famille.

Examinons quelles raisons ont fait prévaloir ce second système.

NUMÉRO I.er

L'Exception de la majorité peut étre opposée à L'Époux.

LA Section ne refusoit la fin de non-recevoir contre l'époux, que parce qu'elle ne lui permettoit pas de faire valoir la nullité; mais du moment qu'on lui accordoit le droit d'attaquer son mariage **, il n'y avoit plus de raison pour le soustraire à la fin de non-recevoir, résultant de son silence depuis sa majorité. Il est évident que lorsque devenu maître de sa destinée, il ne se plaint pas d'abord du mariage qu'il a contracté étant mineur, ses réclamations tardives

⭑ Voyez pages 346 et 347.

** Voyez pages 311 et suiv.

ne doivent plus être écoutées; elles ne peuvent procéder que de légéreté et d'inconstance; et si on les accueilloit, on donneroit à l'époux, dans ce cas particulier, un véritable droit de répudiation.

Cependant le Conseil d'état avoit, comme la Section, borné la disposition aux pères et mères et à la famille.

Le Tribunat proposa de l'étendre à l'époux, et de n'admettre cependant la fin de non-recevoir qu'après un délai depuis sa majorité. Il observa que « lorsque l'enfant est parvenu à l'âge compétent pour se marier, et qu'il a laissé une année s'écouler sans réclamer contre le défaut de consentement, il paroît juste qu'il ne soit plus reçu dans la réclamation qu'il voudroit faire; son silence, pendant ce laps de temps, doit équivaloir à une approbation » (1). Cette proposition a été adoptée (2).

le

Il étoit juste néanmoins d'accorder à l'époux temps de réfléchir et de se pourvoir, et de ne pas admettre la fin de non-recevoir contre lui, parce qu'il n'auroit pas réclamé dès le premier instant de sa majorité. Il falloit donc déterminer un délai après lequel la réclamation seroit réputée tardive. L'article 183 le fixe à un'an.

(1) Observations du Tribunat. (2) Voyez Rédaction définitive, art. 34, Procès-verbal du 6 brumaire an 11, t. II, p. 104. Tome 111.

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NUMÉRO II.

L'Exception de la majorité de l'Époux ne peut être opposée ni aux Ascendans, ni à la Famille.

Le système de la Section qui réputoit la fin de non-recevoir, acquise contre les tiers par le seul événement de la majorité *, parut n'être pas sans difficultés; il pouvoit, en certains cas, paralyser dans les ascendans et dans la famille la faculté de réclamer.

En effet, si l'on permettoit à ceux qui ne seroient mariés que quelques jours avant leur majorité, d'invoquer la fin de non-recevoir, il deviendroit communément impossible aux ascendans et à la famille de réclamer contre le mariage dans un si court intervalle(1); » bien souvent ils n'en seroient pas même instruits. Cependant, pour de très-importantes raisons, la loi a voulu que des mineurs ne pussent se marier sans le consentement de leurs ascendans ou de leur famille, et que tout mariage contracté sans ce consentement jusqu'au dernier jour de la minorité, fût nul. Il seroit donc inconséquent, disoit-on, d'établir la règle que le projet présente » (2).

(1) M. Maleville, Procès-verbal du 5 vendémiaire an 10, t.I.", page 272, (2) Ibid, page 272 et 273.

* Voyez pages 346 et 347.

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