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ordinairement à la puberté, comme celui où il parvient aussi au degré d'intelligence nécessaire pour consentir au mariage, du moins avec discernement, pour exercer les droits et satisfaire aux obligations morales, qui sont la suite de ce contrat.

Elle fixe à un temps plus reculé l'âge où elle le déclare capable de suivre de lui-même, dans sa détermination, les conseils de la prudence, et où dès-lors elle le dispense de recourir à la conduite d'autrui.

L'âge sert donc à déterminer deux choses: l'époque de la puberté, avant laquelle le mariage est absolument interdit ; l'époque de la majorité, avant laquelle on ne peut se marier qu'avec le consentement des personnes sous la conduite desquelles on se trouve placé.

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Voilà les différentes manières de considérer l'âge par rapport à la capacité de se marier.

Il ne s'agit ici que de la première, l'autre est le sujet de la cinquième partie*.

* Voyez page 94.

La règle posée par la législation ancienne étoit

inexacte.

<< DANS les temps qui ont précédé la révolution, les filles pouvoient se marier à douze ans et les garçons à quatorze » (1).

Cette disposition de la loi n'avoit pas passé dans nos mœurs. «On marioit rarement des enfans de treize à quatorze ans ; ou si de grands intérêts déterminaient à former de telles unions, on séparait les époux jusqu'à ce qu'ils eussent atteint la maturité d'un âge plus avancé » (2).

Il est facile de rendre raison de cette discordance entre nos lois et nos usages. «< Dans la fixation de l'âge qui rend propre au mariage, il est des considérations qui naissent de la situation du pays que l'on

gouverne, et qu'aucun Législateur ne peut raisonnablement méconnaître » (3); or les auteurs de nos anciennes lois s'étoient écartés de ce principe, en nous appliquant une législation étrangère, qui ne pouvoit nous convenir.

(1) M. Portalis, Exposé des motifs, Procès-verbal du 19 ventôse an 11, "tome II, page 507. — (2) Le Premier Consul, Procèsverbal du 26 fructidor an 9, tome I.er, page 233. - (3) M. Portalis, Exposé des motifs, Procès-verbal du 19 ventòse, tome II, page 507.

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<< La loi qui suppose la nubilité à douze ans pour les filles, et à quatorze ans pour les måles, a été portée originairement pour Athènes, plus méridionale que Paris d'environ six degrés » (1). Les Romains et les Grecs avoient dû l'adopter. En admettant cette règle, « Les empereurs Justinien et Léon faisoient une chose raisonnable, et obéissoient à la nature, qui, dans les climats brûlans de l'Italie et de la Grèce, de Rome et de Constantinople, rend la puberté très-précoce » (2).

Parmi nous «un tel usage donnait un démenti à la nature : il n'y avoit point de jeunesse pour ceux qui usoient du dangereux privilége que la loi leur accordoit ; ils tomboient dans la ducité au sortir de l'enfance >> (3).

« Cette loi n'auroit jamais dû être reçue en France » (4). « Devions-nous suivre en ce point les lois des Grecs et des Romains, nous habitans des pays froids ou tempérés, où la nature est plus tardive » (5)! « Elles seroient nuisibles

P. 232.

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(1) M. Maleville, Procès-verbal du 26 fructidor an 9, t. I.er, · (2) M. Réal, ibid., page 231. (3) M. Portalis, pose des motifs, Procès-verbal du 19 ventôse an 11, tome II, page 507. (4) M. Maleville, Procès-verbal du 29 fructider an 9, tome I.er, page 232. — (5) M. Réal, ibid., page 231.

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à la France, sur-tout maintenant qu'elle a reculé ses limites au nord. En Prusse, les hommes ne peuvent se marier avant dix-huit ans, et les filles avant quatorze ans accomplis » (1)..

On a donc été obligé de chercher une autre règle.

Le mariage devoit - il étre permis aux máles à quinze ans ou à dix-huit ans, aux Filles à treize ou à quinze?

La loi du 20 septembre 1792 avoit déjà apporté quelques changemens à l'ancien état des choses. Elle avoit fixé l'âge où il seroit permis de se marier à quinze ans pour les mâles, et à treize ans pour les filles.

La commission avoit adopté cette disposition (2).

Son article fut attaqué à la Cour de cassation et par les Cours d'appel de Bourges, de Lyon et de Paris. Elles proposèrent de re། culer le terme du mariage à dix-huit ans pour les mâles, et à quinze ans pour les filles ↑ (3).

P. 232. p. 31.

(1) M. Maleville, Procès-verbal du 29 fructidor an 9, t. I.er, (2) Voyez Projet de Code civil, liv. I.er, tit. V, art. 4, (3) Observations de la Cour de cassation, pages 57 et 58; des Cours d'appel de Bourges, page 4; et 21; de Paris, pages 30 et 31.

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- de Lyon, pages 20

Néanmoins la section du Conseil d'état, pour ne rien innover, présenta l'article de la Commission (1).

Il y avoit donc deux systèmes entre lesquels il falloit choisir.

Pour soutenir le système de la Commission et de la section, on fit valoir la considération qui l'avoit dicté, celle de ne rien innover. << L'article proposé, dit-on, est en harmonie avec les usages reçus » (2).

On observa que « la puberté à laquelle on a toujours attaché la capacité du mariage, est ici principalement à considérer » (3). Or, continuoit-on, « fixer à dix-huit ans pour les mâles l'époque où le mariage leur est permis, c'est en trop reculer le terme; il peut y avoir de justes motifs de le rapprocher, quand d'ailleurs la puberté est certaine » (4). « Il est des individus chez lesquels les développemens dela nature précèdent ceux de la raison et d'un discernement parfait, et il importe de laisser

(1) Voyez 1re. Rédaction, chap. I.er, article 2, Procès-verbal du 26 fructidor an 9, tome I.er, page 231. Procès-verbal du 26 fructidor an 9, tome I.er, p. 232.

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(2) M. Berlier,

(3) Ibid.

-(4) Le Consul Cambacérès, Procès-verbal du 24 frimaire

an 10.

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