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la suite nécessaire du système adopté sur les mariages in extremis: on n'avoit pas voulu les rendre nuls dans le droit*, il ne fallait donc pas les rendre impossibles dans le fait. C'est cependant ce qui seroit arrivé si l'on n'eût regardé comme valables que les mariages célébrés dans la maison commune.

II. SUBDIVISION.

Par qui, dans quel temps, et sous quelles conditions la Nullité peut étre réclamée.

La nullité résultant de l'omission des formalités essentielles, quoique d'un ordre différent des nullités qui naissent des incapacités et des circonstances, et dont il a été traité dans les trois premières parties, est cependant aussi une nullité absolue.

L'action au surplus est ouverte dans le même temps et sous les mêmes conditions que pour les autres nullités absblues.

Ces choses ont été expliquées dans tout le cours de ce chapitre.

Cependant il est nécessaire de s'y arrêter encore un instant, pour rappeler les dispositions qui ont été proposées, et les raisons qui les ont fait rejeter.

La Commission n'accordoit ni aux époux, ni

Voyez pages 282 et 283.

aux tiers le droit d'invoquer la nullité poursimple défaut de formalités; elle autorisoit les époux à réhabiliter leur mariage, les punissoit même par des amendes, quand ils avoient né. gligé ce soin (1), et donnoit à la réhabilitation un effet rétroactif (2).

Les Cours d'appel reprochèrent à la Commission de se contrarier.

D'un côté, elle prescrivoit la publicité du mariage (3) et la présence de l'officier civil compétent (4), et elle attachoit une nullité à l'inobservation de ces formes (5): d'un autre côté, cette nullité n'opéroit jamais la dissolution du contrat; les époux ne pouvoient la demander, les tiers pas davantage, pas même le ministère public: il ne leur étoit permis d'agir que pour faire réhabiliter le mariage (6).

Alors il n'y avoit plus réellement nullité, mais simple irrégularité ↓ (7): ¶ alors la disposition qui ordonnoit les formalités devenoit illusoire, puisque leur violation n'autorisoit personne à demander la nullité ; qu'elle n'exposoit même les époux à aucune peine, s'ils ré

(1) Voyez Projet de Code civil, liv. I., tit. V, art. 40, p. 37. (2) Voyez ibid., art. 41. (3) Voyez ibid., art. 21, p. 32.(4) Voyez ibid., art. 26, page 34. (5) Voyez ibid.,

article 21,

page 32; article 42, page 37. — (6) Voyez ibid., art. 40, page 37. − (7) Observations de la Cour d'appel d'Amiens, page 5.

habilitoient d'eux-mêmes le mariage, et que, dans ce cas, le mariage avoit ses effets depuis le premier moment qu'il avoit été formé ↓ (1).

Cependant « l'ordre public exigeoit que la nullité fût maintenue» (2); et il y avoit d'autant moins de danger à cette considération, que «<les droits de l'époux de bonne foi et de ses enfans sont conservés par les articles 201 et (3).

202 »

Ces raisons ont fait rejeter le système du Projet. «On a régardé la nullité dont il s'agit, comme très-grave; et l'on a décidé qu'elle donneroit une action aux pères et aux mères, aux époux, au ministère public, et à tous ceux qui y ont intérêt. Elle ne peut être couverte par la possession ni par aucun acte exprès ou tacite de la volonté des parties; elle est indéfinie et absolue. Il n'y a pas mariage, mais commerce illicite entre des personnes qui n'ont point formé leur engagement en présence de l'officier civil compétent témoin nécessaire du contrat. Dans notre législation actuelle, le défaut de présence de l'officier civil compétent, a les mêmes effets qu'avoit autrefois le défaut de présence du propre curé. Le mariage étoit radicalement nul, il n'offroit qu'un attentat aux droits de la société,

(1) Observations de la Cour d'appel d'Orléans, page 10. (2) Observations de la Cour d'appel de Bourges, p. 5. - (3) Ibid. Tome 111.

27.

et une infraction manifeste des lois de l'État » (1).

L'action du ministère public est la seule sur laquelle il soit besoin de présenter des observations nouvelles.

A l'égard des règles qui doivent guider le magistrat chargé de l'exercer, elles ont été exposées*.

Mais il s'agit d'examiner quel objet il cenvenoit de donner à ses poursuites.

Prenons garde qu'il n'y a ici qu'un défaut de forme, et que nous ne sommes pas dans l'espèce où, indépendamment de ce vice, il y auroit dans les parties contractantes, incapacité, ou, dans le mariage, quelqu'autre nullité propar les circonstances.

duite

Il en résulte, comme nous le verrons bientôt, que lorsque le mariage a été annulé, il est libre aux parties de le former de nouveau.

Que cette circonstance n'empêche pas les époux et les ascendans d'en faire prononcer la nullité, rien de plus naturel: il leur importe souvent d'anéantir le mariage; aux époux, quand ils ne veulent pas le renouveler; aux ascendans, quand ils espèrent détourner leurs enfans de le renouer.

(1) M. Portalis, Exposé des motifs, Procès-verbal du 19 venLose an 11, tome II, pages 530 et 531.

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* Voyez pages 579 et suiv.; Voyez aussi pages 407 et suiv.

Mais le ministère public, qui ne descend pas dans ces arrangemens de pure convenance, qui n'agit pas pour de semblables intérêts, qui n'en fait pas valoir d'autre que celui qu'a la société à ce que les mariages soient réguliers, ne soient pas entachés de clandestinité, qui n'a plus rien à dire dès que le mal est réparé et le scandale effacé ; le ministère public ne devroitil pas plutôt poursuivre la réhabilitation du mariage que sa dissolution?

Cette idée étoit celle de la Commission. Elle l'avoit exprimée dans l'article suivant: Le mariage auquel on ne peut opposer que l'omission des formalités prescrites, ou de quelqu'une de ces formalités, si d'ailleurs il ne contient aucune contravention aux dispositions contenues dans le chapitre I.er du présent titre, doit étre réhabilité, soit à la réquisition des époux, soit à la diligence de l'officier qui exerce le ministère public près le Tribunal de première instance (1).

La Section inséra cet article dans son Projet (2).

L'auteur de la seconde rédaction et le Conseil d'état le retranchèrent. « En y réfléchissant,

(1) Projet de Code civil, livre I., tit. V, art. 40, page 37. (2) Voyez 1. Rédaction, chapitre III, section II, article 16, Procès-verbal du 5 vendémiaire an 10, tome Fer, page 276.

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