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sans même faire de distinction entre le père et la mère *.

L'article 206 les cmbrasse toutes deux: d'une part, on y a compris le cas du convol en secondes noces, en faisant toutefois, entre le beau-père et la belle-mère, la distinction qui est dans la nature des choses; de l'autre, on a eu soin de pourvoir à ce que « le beau-père ne pût demander d'alimens à son gendre que pendant la vie de la femme de ce dernier, et celle des enfans nés de leur mariage» (1).

II. SUBDIVISION.

De la Réciprocité de l'Obligation entre les alliés qui s'y trouvent soumis.

ARTICLE 207.

LES obligations résultant de ces dispositions sont réciproques.

LA Section avoit cru ne devoir pas rendre l'obligation réciproque ; elle l'imposoit au gendre et à la belle-fille, et en affranchissoit le beau-père et la belle-mère. Son motif étoit «que la situation n'est pas la même; qu'il faut des alimens à un vieillard; mais qu'un gendre est d'un âge qui lui permet de pourvoir, par son travail, à sa subsistance » (2).

(1) Le Consul Cambacérés, Procès-verbal du 5 vendém. an 10, t. I.er, p. 285; -Décision, ibid. — (2) M. Réal, ibid., p. 283. Voyez page 474.

On répondit que « les alimens ne sont dus qu'à celui qui ne peut gagner sa vie» (1): que « ce n'est aussi que dans ce cas que l'obligation seroit réciproque» (2).

D'ailleurs, comme je l'ai dit*, la réciprocité est de l'essence de ces sortes d'obligations: si les rapports qui unissent les parties sont de nature à soumettre celles-ci à des devoirs d'affection envers celles-là, il est impossible que, changeant tout-à-coup dans leur essence même, ils ne produisent pas le même effet dans le cas où les besoins et les facultés ont les uns et les autres changé de côté.

II. PARTIE.

DES CIRCONSTANCES ET DE LA MESURE DANS LES

QUELLES LES ALIMENS SONT DUS. ( Articles 208 ›

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(1) M. Maleville, Procès-verbal du 5 vendémiaire au 10, t. I.er, page 283. — (2) Le Consul Cambacérés, ibid.

* Voyez page 456.

Ire DIVISION.

Des Cas et de l'Étendue dans lesquels l'obligation de fournir des Alimens existe.

ARTICLE 208.

LES alimens ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit.

L'ARTICLE veut que pour juger si l'obligation existe, on ait égard à deux circonstances : les besoins de celui qui demande; les facultés de celui qui doit secourir.

Où il n'y a pas de besoins, il n'y a pas de droit; celui qui est alimenté par sa fortune, ou qui peut l'être par son travail, doit se suffire et ne recourir à personne. La loi n'entend favoriser ni la paresse, ni l'avarice: elle n'impose ni aux pères ni aux enfans une charge inutile.

Mais elle ne leur impose pas non plus une charge impossible : le besoin ne peut secourir le besoin ; là où il n'y a pas de facultés, il n'y a pas le devoir de prêter aux autres une assistance qui seroit nécessaire à soi-même.

Quant à l'étendue que l'obligation comporte, elle est également mesurée sur les besoins et sur les facultés. « Les alimens comprennent tout ce qui est nécessaire; mais il faut distinguer deux sortes de nécessaire l'absolu et le

relatif. L'absolu est réglé par les besoins indispensables de la vie; le relatif, par l'état et les circonstances. Le nécessaire relatif n'est donc pas égal pour tous les hommes ; l'absolu même ne l'est pas. La vieillesse a plus de besoins que l'enfance; le mariage, que le célibat; la foiblesse, que la force; la maladie, que la santé.

» Les bornes du nécessaire absolu sont fort étroites. Un peu de justice et de bonne foi suffit pour les connoître. A l'égard du nécessaire relatif, il est à l'arbitrage de l'opinion et de l'équité» (1).

Voilà les seules règles qu'on puisse offrir au juge dans une matière où tout dépend de circonstances difficiles à vérifier; les appliquer est sans doute pour lui un devoir embarrassant: ici tout est simulation entre des êtres qui, ne craignant pas de trahir la nature, craignent encore moins de tromper la justice; l'un exagère ses besoins, l'autre sa détresse ; et le magistrat révolté, mais incertain, appréhende également de condamner la vérité, ou de faire triompher le mensonge.

Mais il est au-dessus du pouvoir de la loi de lui épargner ces perplexités.

(1) M. Portalis, Exposé des motifs, Procès-verbal da tose an 11, tome II, page 534.

19 ven

Tome III.

3r

Ile. DIVISION.

Quelles Causes diminuent ou anéantissent PObligation.

ARTICLE 209.

LORSQUE celui qui fournit ou celui qui reçoit des alimens est replacé dans un état tel, que l'on ne puisse plus en donner, ou que l'autre n'en ait plus besoin en tout ou en partie, la décharge ou réduction peut en être demandée.

L'EFFET doit cesser avec sa cause. Il est donc

évident que quand les besoins de celui qui reçoit des alimens ou les facultés de celui qui les donne, décroissent, le droit de l'un, l'obligation de l'autre décroissent dans la même proportion; que si les besoins ou les facultés disparoissent entièrement, l'obligation ne subsiste plus.

Il eût été inutile d'exprimer cette conséquence nécessaire de l'article précédent ¡¡(1), s'il n'avoit fallu autoriser formellement les Tribunaux à détruire le jugement par lequel les alimens ont été adjugés (2); car, de droit commun, il ne leur appartient pas de revenir sur ce qu'ils ont prononcé.

(1) M. Boulay, Procès-verbal du 5 vendémiaire an 10, t. l.", page 286. (2) M. Réal, ibid.

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