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tude fera de mériter des louanges auffi folides que juftes trop heureux d'y pouvoir par: venir ! & je n'aurai de plaifir à les recevoir, que quand elles me viendront de vous-même.

DE L'EVANGILE.

Tout homme verra le falut de Dieu. S. Luc c. 3.

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Out homme voit le falut de Dieu, toutes les fois que Dieu lui préfente quelque moyen de falut. Une œuvre de charité qui s'offre à faire, un malheureux à confoler, un innocent à protéger, un pauvre à fecourir, un ignorant à inftruire, un efprit foible à ménager, un incommode à fouffrir, un mauvais traitement, une injuftice, une humiliation, une perte, ou quelqu'autre privation plus douloureufe encore à fupporter; une épreuve à foutenir pour demeurer fidéle à fes devoirs, une occafion de s'inftruire de quelque vérité néceffaire, de la rappeller vivement, & de fe défabufer d'une prévention dangereufe; une voie pour fortir de quelqu'engagement mauvais; un afyle pour fe mettre à couvert des tentations trop fréquentes du monde. On ne fauroit imaginer fous combien de faces la bonté de Dieu nous montre notre falut, & les différentes formes que prend la grace en notre faveur ; mais fouvent nos yeux y font fermés, ou nous le voyons Tans le voir. Les plus grandes richeffes vien

nent s'offrir à nous ; & je ne fai quelle malheureufe indolence fur notre plus preffant intérêt, nous rend indifférent à ce qui peut en décider. Réveillons-nous; les occafions de faire le bien font toujours précieufes, quelquefois uniques, fouvent irrévocables, & nous les laiffons échaper avec une négligence qui montre affez que nous en fentons peu la perte, & que nous ne la regrettons point. Rien n'eft petit dans ce qui peut nous être un fujet de mérite. Il faut ménager jufqu'aux moindres graces, & nous ne favons pas ufer des plus grands fecours.

Quel fut pour les Juifs le fruit du minif tere de Jefus-Chrift? Ils virent tous le falut de Dieu; ils virent cette grande lumiere que Dieu leur envoyoit ; mais la lumiere fe fit voir en vain dans les ténébres, & les ténébres n'en furent point éclairées. Nous-mêmes, quel avantage, après tout, retirons-nous de la connoiffance de l'Evangile ? Nous jouiffons de fa lumiere comme de celle du jour, fans fonger fouvent pour quel ufage Dieu nous l'a donnée. Seroit-ce inutilement qu'il nous auroit fait connoître par Jefus-Chrift la vraie destinée de l'homme, l'objet éternel de fes defirs, & la voie qui conduit à lui? Ceux qui portent le nom de Crétien, ne fauroient trop fouvent réfléchir fur des bienfaits dont ils fentent fi peu le prix. Serions-nous, en effet, moins infidéles à nous-mêmes, notre

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éternité nous feroit-elle quelquefois plus indifférente, fi elle nous étoit abfolument inconnue? Nous avons été gratuitement préférés à tant de nations infortunées qui vivent encore comme fans Dieu dans le monde, & leurs mœurs font fouvent plus dignes que les nôtres, des connoiffances que la Religion nous donne. Nous avons la foi des vrais biens, & nous ne vivons que pour tout ce que le temps emporte.

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PRIERE.

Uel contrafte, grand Dieu! Qu'aurezvous donc encore à nous montrer? Attendons-nous que vous nous donniez de meilleures efpérances, ou des inftructions plus faintes? Faut-il que vous nous offriez plus de moyens d'apprendre ce que nous ne favons pas, & de pratiquer ce que nous favons? Qu'avez-vous dû faire pour votre vigne que vous n'ayiez pas fait? O Dieu! que vos bontés font ineffables dans leur fource, infinies dans leur effufion, & que l'homme en eft peu digne! Pourquoi, placé dans les fentiers de la juftice, au milieu de tant de richeffes, fous l'ombre de vos aîles, & accablé par le poids de vos bienfaits; pourquoi mon miferable coeur ne s'attendrit-il pas, & ne fe fond-1 pas même tout entier en reconnoiffance? Vous m'avez déja prévenu, Seigneur, en tant de manieres; mais la grace & le bon ufage de la grace, font également vos dons; achevez en

moi votre ouvrage, afin que par une fidélité perfévérante à recueillir le fruit de vos miféricordes, je me rende digne de les chanter à jamais.

JOUR DE NOEL.

RE

EFLEXIONS.

DE L'EPITRE.

Dieu nous a parlé enfin dans ces derniers jours par Jon propre Fils. S. Paul aux Hébreux. chap. 1.

D connoître ce qu'il eft & ce que nous lui

Ieu nous parle par tout ce qui nous fait

devons. La voix feule de la nature rendoit inexcufables ceux qui n'honoroient pas l'Auteur par une vie digne de lui. Le miniftére de Moïfe & des Prophétes étoit un nouveau fujet de condamnation pour les Juifs infidéles: la parole de Dieu dans leur bouche fut inviolable, & toutes les défobéiffances févérement punies. Comment donc, dit l'Apĉéviterions-nous le plus terrible châtiment, fi nous négligeons l'Evangile de falut que Dieu nous a fait annoncer par fon propre Fils? Quiconque méprife ce Fils, quiconque rejette fa parole & la rend inutile, a, dit-il, un Juge qui doit le juger au dernier jour; & ce Juge, c'eft cette parole même prêchée aux hommes par un miniftere fi faint, & digne en

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foi, digne elle feule de tout le refpect qu'on doit à la vérité qu'elle refpire.

Cependant, quelles font nos difpofitions pour elle? De quel ail regardons-nous l'Evangile éternel, & de quel ufage eft-il pour nous dans le détail de la vie? Hélas! les moins coupables, peut-être parmi nous, font ́ ceux qui ne le font que d'une négligence & d'une indifference prefque auffi funefte que le mépris même. Ĉe font, dit Saint Paul, des vales entr'ouverts, d'où l'eau s'écoule & fe perd fans ceffe. Cette parole qui eft la vie des efprits & la nourriture des coeurs, ne trouve dans les uns qu'une foule de diffipations, ou dans les autres une multiplicité de defirs qui l'en font fortir prefque auffi - tôr qu'elle y eft entrée. Cette pluie de grace qui, bien mieux que celle de Moïfe, devroit tom ber chaque jour comme la rofée fur la terre de notre ame, la pénétrer & la rendre fécon de, nous laiffe dans notre premiere ftérilité. Ces maximes faintes, qui font pour les juftes une fource inépuifable de réflexions & de fentimens, deviennent infenfiblement un vain langage dont on fe joue, & avec lequel on fe familiarife fans refpect. On oublie que Dieu nous parle en Jefus Chrift avec un appareil digne de toute Sa Majefté; que jamais fes volontés ne furent révélées par une bouche qui meritât mieux toute notre attention & notre obéiffance: c'eft le verbe lui-même parmi

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