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former les fentimens, à régler les mœurs, à découvrir l'intention, & à fuivre l'efprit de la Loi fous la lettre du précepte. Il faut s'affujettir fans répugnance aux commandemens qui nous font faits ; & le défordre de la fauffe piété, c'eft de négliger ce qui vient de l'inftitution de Dieu pour s'attacher à fes propres inventions. Un culte imaginé par l'intérêt, ou fuggéré par la fuperftition, les dévotions arbitraires, où la connoiffance & l'amour de Jefus-Chrift n'entrent pour rien, & qui n'ont pour fondement que l'erreur populaire, font quelquefois plus avidement courues que celles qui font tirées du fond de la Religion même, ou dirigées par fon efprit. On eft fcrupuleux fur des exercices de choix & d'habitude; & tandis qu'on croit aller audelà de fes devoirs, on ne prend pas garde qu'on manque en effet aux premiers & plus effentiels engagemens.

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PRIERE.

Élas! que de voies obliques! que de pas perdus qu'on prend pour les vraies routes de falut! & à combien d'illufions la piété, fi on n'y fait attention, n'eft-elle pas fujette tous les jours! Quoi, mon Dieu! l'homme vous défobéit réellement, & croit vous en fervir plus parfaitement? La méprise feroit ici trop funefte. Le fond de toute ma juftice, c'eft de travailler avec votre grace à devenir ce que vous voulez que je fois, &

d'accomplir exactement ce que vous m'or donnez ce doit donc être auffi l'objet de tout mon zéle, & je voudrois toujours être moi-même ma loi, ma régle, mon juge, & l'arbitre de tout le bien que je fais ou que je dois faire. Je voudrois que mon propre choix décidât du mérite de més oeuvres ; que ce qui me plairoid le plus fût ce qui me rendît plus agréable à vos yeux. Non, encore une fois, Seigneur, c'eft à vous de commander, & c'est à votre ferviteur d'obéir : comman dez-moi donc, mais donnez-moi l'obéiffance; & perfuadé que je ne puis vous être agréable qu'autant que je vous ferai foumis, je ne cefferai de vous faire cette priere avec votre Prophete: Apprenez-moi, Seigneur, à faire votre volonté, parce que vous êtes mon Dieu.

POUR LE CINQUIÈME JOUR op de Janvier.

DELETTRE

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Offrez vos corps à Dieu comme une Hoftie vivante, fainte, agréable à fes yeux. S.Paul aux Rom. chap. 12.

N ne comprendroit pas aifément pourNne quoi Dieu exigeoit que l'on lui immolât de vils animaux, filé Sacrifice de JefusChrist dont ceux de la Loi n'étoient que la figure, n'en devenoit le parfait dénouement

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Ce n'étoit pas en effet dans le prix des victimes qu'il falloit chercher le mérite de ces facrifices, l'écriture s'en explique affez clairement: mais que fur le modéle de la victime fans tache qui étoit figurée, l'homme régle toujours fa conduite, & que tout en lui foit foumis aux Loix du Créateur; qu'il affujettiffe fes fens à la raifon, qu'il les fafle tous fervir aux ufages de la justice; qu'il fache régler fes appétits, ufer avec modération des créatures, immoler, en un mot, toutes les paffions à fes devoirs : à tous fes traits, on connoît qu'il devient une victime digne de Dieu; fa volonté fur nous c'eft que nous foyons faints, c'est-à-dire, que tout en nous lui foit confacré, que tout lui foit offert & mérite de l'être. Il n'eft donc pas une action dans la vie, pas un mouvement, pas une fituation dont nous ne devions lui faire un facrifice; & c'eftlà ce que l'Apôtre demande de nous. Soit que nous mangions, dit-il, foit que nous buvions, quoi que ce folt que nous faffions, il veut que nous le faffions pour la gloire de Dieu par-la rien n'eft perdu pour nous ; tout nous devient un fujet de mérite, parce que tout entre dans l'hommage de notre recon-noiffance, & que nous rendons tout à celui de qui nous avons tout reçû.

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Telle eft l'étendue de fes droits fur nous & de nos devoirs envers lui; mais qu'il s'en faut bien que cesne foit celle de notre fidé

lité! A quelle fin rapportons-nous nos veilles, nos peines, nos forces & notre industrie? Travaillons-nous véritablement pour Dieu ? Les différentes portions de notre vie formentelles une Hoftie fainte, vivante & agréable à fes yeux? Eft-ce fur tout pour lui que nous fouffrons, & fommes-nous plus à lui dans la maladie que dans la fanté? La vie & la mort nous devroient être indifférentes, à les regarder comme des facrifices tels qu'elles doivent être de notre part; nous n'y devrions chercher que les difpofitions de la volonté de Dieu fur nous, & le droit fouverain qu'il a de fe faire honorer par nous en la maniere qui lui plaît: cependant nous ne fongeons prefque jamais qu'à vivre pour quelque chofe qui tient au monde ; & fouvent, quand nous nous fommes épuisés pour lui, c'eft contre Dieu que nous murmurons: ainfi nous ne voulons être fes victimes ni pour vivre ni pour mourir.

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PRIERE.

On Dieu ! que d'infidélités je vous fais, & que d'occafions précieuses de mériter je perds! Vous voulez que mon corps foit votre autel, votre temple, votre victime, je puis vous y faire tous les jours mille petits facrifices agréables à vos yeux, vous dévouer tous mes mouvemens, vous confacrer mon travail, mon repos, m'affujettir pour vous aux néceffités de la vie, vous en rapporter les Flaifirs & les peines, vous offrir mes priva

tions & mes maux ; & je néglige tous ces moyens de vous plaire & de vous rendre une partie de ce que je vous dois: vous pourriez exiger que je vous immolaffe chaque jour, s'il étoit poffible, ma vie même ; & ce n'eft qu'au péché que vous voulez que je meure. Ah, Seigneur mon Dieu! faites donc que déformais tout foit mort en moi pour l'injuftice, & c'en eft une de vous refuser la moindre partie de moi-même. Accordez moi donc de vivre comme votre victime, & que je croye ne vivre plus, dès que je ne vivrai pas pour vous.

DE L'EVANGILE.

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L'Enfant croiffoit, & Je fortifioit en efprit ; il étoit plein de fagefle, & la grace de Dieu étoit en lui. S. Luc. chap. 2.

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Es opérations de la grace imitent en nous celles de la nature : nous ne naiffons pas hommes faits, il faut du tems pour croître & pour arriver à la maturité de l'âge ; ainfi les premiers dons que Dieu répand dans notre ame, ne font que comme le germe de l'homme nouveau qui doit fe former en nous par un renouvellement parfait de l'efprit & du cœur. On commence à connoître fes devoirs, on effaye de les remplir, on entre dans la voie du falut ; mais ce ne font encore là que des efforts & des démarches d'enfant : il faut que par des progrès fucceffifs, nos lumieres

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