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non, Seigneur, je n'oublierai plus que vous êtes mon Dieu & mon Sauveur: fi les foins du temps & les befoins de la vie ne me permettent pas de célébrer pour vos bienfaits une Fête continuelle, faites, par votre grace, que j'en conferve du moins l'efprit, que l'ob→ jet en foit fans ceffe préfent à ma reconnoiffance; que je me regarde comme deftiné par ma vocation à chanter avec vos Saints le cantique éternel de l'action de graces, & que mon cœur foit pénétré ici-bas de ce qui en fait la matiere inépuifable dans le Ciel.

POUR LE LUNDI.
DE L'EPITRE..

Transformez-vous par un renouvellement de votre esprit, afin que vous difcerniez ce que Dieu veut de vous, ce qu'il trouve bon, ce qui lui plaît, ce qu'il trouve parfait. S. Paul aux Rom. chap. 12.

L'Elprit de celui qui fort des voies du fié

cle fe donner à une piété folide, prend comme une autre forme : c'eft, s'il eft permis de le dire, une métamorphofe entiere, & chacun peut juger par-là de foi-même, La vie des gens du monde & de ceux qui ont fon efprit, eft une vie toute conduite par les fens: à voir leurs mouvemens, on douteroit fi c'eft un principe intérieur qui les fait agir ; on diroit du moins qu'ils font très perfuadés que

l'ame chez eux n'eft que l'efclave du corps, qu'elle lui doit toutes fes attentions, toute fon induftrie, toutes fes prévoyances. Dans leurs vûes, dans leurs projets, dans leurs actions, ils ne cherchent que ce qui paroît conforme à leurs penchans, que ce qui peut fervir à leurs intérêts préfens ou flatter leur amour propre. L'homme, chez eux, eft hors de lui-même ; il prend les raifons de fa conduite & de fes préférences uniquement dans les objets qui le frappent, & il ne va pas plus loin: c'est le plus ou le moins de plaifir qui le détermine; & voilà ce qu'on appelle la prudence de la chair.

La vie du jufte au contraire, eft une vie toute de retours au-dedans & d'attentions à Dieu: ce ne font plus fes goûts qu'il confulte, ce ne font plus fes cupidités qu'il écoute ; ce n'eft plus ce que la nature demande qui détermine fon choix dans ce qui fe préfente à faires mais ce que Dieu veut de lui, comme le dit ici Saint Paul. Jamais il ne préfére ce qui lui feroit utile ou qui lui paroîtroit tel, à ce que Dieu trouve bon: rien ne lui plaît que ce qui plaît à celui dont la volonté doit être fa régle: & pour achever d'accomplir les paroles de l'Apôtre, s'il délibére fur le bien, ce n'eft que pour préférer le plus au moins parfait. Voilà l'ufage légitime que l'homme puiffe faire de fon efprit ; il ne lui eft donné de connoître fon Auteur, que pour lui

raporter tout

ce qu'il eft & tout ce qu'il fait. Que de ré formes donc à faire dans fes penfées! Que d'abus de la raifon! Quel amas, quelle foulle de connoiffances & de recherches inutiles! Que de follicitudes & de foins il perd! Que d'injustices il commet, en un mot, contre le précepte d'aimer Dieu de tout fon esprit ! .

J

PRIERE.

E me les rapelle en ce moment fous vos yeux, ô mon Dieu ! J'en fuis effrayé, confus, & prefque troublé en votre présence. Que vois-je en effet lorfque je jette quelques regards fur le paffé? Plein de l'envie de me contenter moi-même ou de plaire aux créatures, de frivoles objets ont emporté la plus grande partie de mon application, & à peine ai-je fait vers vous quelques retours paffagers: content d'une fimple routine & de quelques devoirs fuperficiels, je n'ai prefque jamais réfléchi férieufement que vous ne m'aviez rempli d'intelligence, que pour rechercher en tout ce qu'il y a de bon ou de mauvais à vos yeux. Quel fujet n'ai-je pas de craindre, Seigneur, que vous ne me reprochiez un jour d'avoir en vain reçû mon ame? Hélas! puif que vous me laiffez encore cette ame en dépôt, daignez donc m'aider par votre grace à faire en moi cette transformation que votre Apôtre me prefcrit: opérez vous-même, par votre puiflante main, ce renouvellement néceffaire qui rapelle à vous mon efprit tout.

entier, afin que déformais toutes mes lumieres, tous les efforts de ma raison se réuniffent dans l'étude de ce qui eft jufte, de ce qui vous plaît, de ce que vous trouvez bon, de ce qui peut me faire trouver grace devant vous, & me conduire à la perfection que vous exigez de moi.

DE L'EVANGILE.
ANGILE.

L'Enfant Jefus refta dans Jerufalem, fans que fes parens s'en apperçuffent. S. Luc. c. 2.

'Inattention des parens de Jefus-Chrift

L'n'a rien que de très-ordinaire à la foibleffe

humaine; il échape de ces fautes à la vigilance la plus exacte: ce font des oublis plûtôt que des négligences. On aime fes devoirs, on voudroit les remplir tous: mais la multitude des foins partage notre efprit: mille objets qui s'offrent à nos fens, nous occupent malgré nous & diffipent nos penfées. Telle eft la fource de ces inadvertances, où le cœur n'a point de part: Dieu permet que les plus juftes s'y furprennent pour les empêcher de tomber dans l'affoupiffement & pour redoubler leur ferveur. Trop heureux lorfque les abfences d'efprit ne font pas longues, & qu'on reconnoît fes fautes affez-tôt pour les réparer. Un moment qu'on a perdu Jefus-Chrift de vue, coûte trois jours d'une pénible & douloureuse recherche fes parens avoient marché pen

Ον

dant un jour dans la penfée que l'Enfant étoit dans la compagnie de ceux qui faifoient le voyage avec eux; & cette préfomption n'avoit rien que de raifonnable. Souvent ce qui ne paroît pas une faute, a des fujets encore plus triftes.

Il ne faut donc rien négliger quand il s'agit de fes obligations; ne jamais agir fur des incertitudes; ne point fe repofer fur des doutes, ne point compter fur les attentions des autres pour des foins qui n'intéreffent que nous: ce font les inftructions qui naiffent de la conduite de Jofeph & de Marie, à n'y confidérer d'abord que l'événement ; mais Dieu fait fervir encore leur négligence à la manifeftation de fon fils parmi les Docteurs : il fait bien user du mal même: il fait tout coo-pérer au bien de ceux qu'ilaime, jufqu'à leurs propres fautes; mais ils n'en doivent pas être moins attentifs à les éviter. La bonté de Dieu ne juftifie point nos infidélités; il n'y a que lui qui foit affez puiffant pour tirer notre falut de la fource de notre perte: du refte, tout péché jufqu'au plus léger, peut fervir à nous précipiter dans l'abyfme. Que ce foit foibleffe ou malice, tout ce qui peut déshonorer Dieu & nous faire omettre le moindre de nos devoirs, doit nous paroître digne de toute attention.

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