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DE L'EVANGILE.

Femme, qu'y a-t-il entre vous & moi? Mon heure'n'est point encore venue. S. Jean. c. 2. Ous avons déja remarqué en parcourant

Nles circonftances de l'Evangile, qu'il n'y

coup

avoit aucune faute dans cette action de la Sainte Vierge, où il paroît au contraire beaucoup de charité pour le prochain, & beaude foi en la puiffance de fon Fils à qui elle favoit que tout étoit poffible. La réponse de Jefus Chrift n'eft donc pas une correction pour elle, mais une inftruction pour nous, par laquelle elle nous apprend à bannir tous les égards humairs dans les fonctions qui regar dent le fervice & la gloire de Dieu. JefusChrift devoit faire ce miracle non par l'infirmité humaine qu'il avoit reçûe de fa Mere, mais par la puissance divine qu'il avoit reçûe de fon Pere, pour la gloire & felon les ordres duquel il devoit exercer toutes les fon&tions de fon miniftere il n'avoit point encore fait de miracle, il ne devoit pas les commencer par les ordres de fa Mere temporelle: & felon la chair, mais uniquement par ceux de fon Pere célefte & éternel; c'eft donc comme s'il eût dit à la Sainte Vierge : Craignez-vous que celui qui m'a envoyé ne fache pas me marquer le moment où il faudra que je manifefte fa gloire & la mienne? Ne crovez vous pas que le feul ordre de fa Providence

me fait encore tenir cette gloire cachée, & que le feul ordre de la Providence & non le vôtre, me doit faire changer de conduite?.

Mais comment accorder ce qu'il dit, Mon heure n'eft pas encore venue, avec ce qu'il fait auffi-tôt après, & qui montre que fon heure eft véritablement venue? eft-ce que le defir de fa Mere lui fait prévenir la volonté de fon Pere éternel? A Dieu ne plaile que nous ayions cette penfée! Mais c'eft que la volonté de fon Pere eft qu'il ne commence à manifef ter fa gloire par ce premier miracle, qu'après avoir fait à fa Mere une réponse qui doit fervir d'inftruction à tous les Chrétiens, pour leur apprendre à attendre humblement les momens de Dieu, foit pour faire ce qu'il commande, foit pour recevoir ce qu'il veut donner. L'heure n'étoit donc pas venue de faire ce miracle, parce que la Sainte Vierge le demandoit,& elle vint auffi-tôt après de le faire, parce que Dieu l'avoit ordonné ; & la Sainte Vierge même trouva dans ce qui ne fut fait que par l'ordre de Dieu, l'accompliffement des defirs que fa charité lui avoit infpirés.

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PRIERE.

Énétrez-nous donc de plus en plus, ô mon Dieu! de cette vérité capitale d'où dépend tout le fuccès de l'ouvrage du falut: faites-nous bien comprendre que, n'étant point à nous, mais à vous feul, ce n'eft pas à nous à difpofer de nous-mêmes, mais à fui

vre uniquement les ordres de celui à qui nous appartenons en tant de manieres, comme fes créatures & comme achetés par le prix de fon fang. Notre principal devoir, Seigneur, c'eft de vous confulter pour favoir où vous voulez nous mettre, & de vous appeller enfuite à notre fecours dans les fonctions de l'état où yous nous avez mis. On vous invite aifément aux feftins des nôces, dans les affaires publiques ou domeftiques, civiles ou eccléfiaftiques, d'étude ou de charité, quand on y eft foi-même appellé de votre part: on ne fait rien fans votre préfence, quand on n'entreprend rien que par vos ordres ; & vous ne manquez jamais de répandre votre bénédiction par tout où vous vous trouvéz, mais vous ne vous trouvez avec nous que dans les lieux & dans les œuvres où vous nous avez vousmêmes conduits. Conduifez-nous donc par tout, ô mon Dieu! Souverain Pafteur & Conducteur d'Ifraël! Ne permettez pas que nous nous féparions jamais de vous, & demeurez avec nous dans ce trifte exil jufqu'à ce que vous daigniez nous confommer en vous dans le féjour de votre gloire.

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TROISIEME SEMAINE
après l'Epiphanie.

REFLEXIONS POUR LE DIMANCHE.
DE L'EPITRE.

Faites ce qui dépend de vous, pour conferver la paix avec tout le monde, 'il eft poffible. S. Paul aux Rom. chap. 12.

I A paix eft un bien dont le defir ne doit L

jamais mourir dans notre cœur. Les hommes font faits les uns pour les autres, nous ne faurions trop nous rappeller cette vérité primitive: la nature les avoit unis par des noeuds fi doux, qu'on ne peut trop déplorer les fujets de divifion que le péché mit de tout temps entr'eux ; mais tandis qu'ils feront conduits par des inclinations & par des intérêts auffi contraires, quoiqu'il faille toujours les aimer fans réserve, il n'eft pas poffible, il n'eft pas même permis de conferver la paix avec tous:

il

y en a dont il faut fuir le commerce; il y en a dont il faut réprimer les paffions, dont il faut corriger les défordres, dont il faut combattre les injuftices, dont il faut même méprifer les ordres; & toutes ces conduites leur donnent néceffairement pour nous de la froideur, de l'éloignement ou de la haine: toute paix avec eux feroit criminelle ou dan

R iiij.

gereuse on eft réduit à la defirer fans ofer le la promettre, à moins qu'ils ne changent.

Mais avec combien d'autres devrions-nous & pourrions-nous la conferver, fi nous commencions par changer nous-mêmes ? Réduifons-nous à faire & à fouffrir tout ce qui ne bleffe ni la verité ni la juftice; fachons nous la rendre les premiers, & rendons-la fur-tout à ceux avec qui nous vivons. Ce font nos fenfibilités entretenues par notre orgueil, nos impatiences, nos vivacités, nos indifcrétions, nos manieres hautes, nos réponses dures, nos foupçons injuftes, nos difcours imprudens,. nos légeretés, nos inquiétudes à nous mêler de ce qui ne nous convient pas ; c'est notre indifférence & notre infenfibilité fur les maux & fur les intérêts du prochain; c'est l'attachement à nos propres fentimens ; c'eft l'envie de dominer & de nous fatisfaire aux dépens de tout, qui altére la paix & qui trouble notre repòs en troublant celui des autres. Préve nons fans nous trop écouter, retranchons fans ménagement toutes les fources de diffentions, de haine, d'averfion, de méfintelligence; fouffrons de la part de nos freres ce qu'ils ont à fouffrir de nous ; ayons plus d'indulgence pour les hommes dans les termes que la Religion l'entend; vivons avec plus de ménagemens, avec plus d'égards; n'ayons rien à nous reprocher; alors nous aurons la paix avec eux, parce que nous aurons la charité, ou

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