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refferret les nœuds, ou nous exposer à de nouveaux engagemens: mais il ne faut ni compter fur fes forces, ni fe décourager de l'inutilité de fes premiers foins. Notre fecours vient d'en haut; & nous ne devons point ceffer de foupirer & de crier, tant que nous ne cefferons point d'être efclaves, & que notre rédemption ne fera pas parfaite: la religion, bien entendue, ne nous apprit jamais d'autres leçons ; & les Saints, par tous leurs exemples, ne nous ont jamais frayé d'autre route.

PRIERE.

Alheureux homme que je fuis! qui me

M délivrera de ce corps de mort où le pé

ebé habite? Qui m'affranchira de ce déplorable afforviffement qui tient mon ame captive fous la loi de la chair & de fes cupidités : Je fens mon infirmité, Seigneur! mais je vois ma reffource: je fuis fans force de mon propre fond, il eft vrai; mais je ne fuis pas fans. efpérance, & je fai que votre grace me fuffit. Qu'elle ne ceffe donc point d'opérer en moi, je vous en conjure par toute l'étendue & la gratuité de votre miséricorde ; qu'elle rompe chaque jour quelqu'un de mes liens ; qu'elle m'arrache à mes attachemens, quoi qu'il puiffe m'en coûter; qu'elle déracine de mon cœur toutes les mauvaises affections; qu'elle en foumette tous les mouvemens à la conduite de votre efprit, afin que, libre de toute autre fervi,

tude, je ne connoiffe de joug que celui d'un parfait affujettiffement à votre loi.

POUR LE LUNDI.

DE L'EPITRE.

Que notre espérance fe foutienne par les motifs de patience & de confolation que les Ecritures nous donnent. Rom. c. 15.

N

2016

Ous efpérons ce que nous ne voyons pas, & nous l'attendons avec patience; mais cette patience n'eft pas moins difficile, à nos yeux, qu'elle eft néceffaire. La vie préfente eft pleine d'amertume pour les plus juftes; & fans compter les combats intérieurs que l'homme de péché les engage à foutenir ici bas, ils y font fouvent, au dehors, en bute à la malice des pécheurs, à leurs contradictions, à leurs mépris, à leurs infultes, à leurs railleries. Les impies fe rient de la fimplicité de leur attente, felon l'oracle de l'écriture ; ils traitent de folie leur maniere de vivre, & la loi qu'ils fe font de rejetter tous les plaifirs que le monde leur offre. 11 faut, en effet qu'ils fe roidiffent contre le penchant de la nature, qu'ils résistent à l'attrait des objets fenfibles: la foi les engage à de grands facrifices, & ne leur montre que de loin leurs dé→ dommagemens : fouvent ils voyent les méchans jouir de toutes les profpérités du fiécle,

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tandis qu'ils font eux-mêmes frappés des plus terribles fléaux. L'innocent & le coupable font confondus dans le châtiment public : & il femble, dit le Roi Prophéte, que ce foit inutilement qu'on prenne foin de conferver fon cœur & fes mains purs. La vertu, en un mot, à qui feule appartient le privilége de rendre l'homme heureux, ne paroît point jouir de fes avantages; & la fidélité ne fait quelquefois que conduire à de nouvelles épreuves.

Mais, avec tant de fujets de découragement, il refte une grande reffource à l'ame fidelle; qu'elle l'apprenne aujourd'hui de la bouche du grand Apôtre; qu'elle ouvre feulement les faintes écritures, avec ces yeux pleins de foi & de refpect, dont elles font fi dignes par tout elle y rencontre des promeffes, des maximes, des exhortations, & des exemples également propres à la ranimer tour à-tour: elle y entend la Vérité éternelle affurer que ce n'eft que par beaucoup de tribulations qu'on arrive au Royaume de Dieu; que c'est par cette voie qu'il a conduit tous fes Elus depuis l'origine du monde; mais qu'après tout, il y a plus de fageffe que de févérité dans les privations qu'il nous fait fouffrir: elle y voit que les biens du temps font plus dangereux que défirables ; que les délices de la vie corrompent ceux qu'elles enchantent; que les grands ne font élevés un

moment, que pour être précipités dans de plus profonds abyfmes; que le plaifir du crime eft toujours court & funefte; qu'il vaut beaucoup mieux être affligé avec les Saints, que de jouïr, pour quelques années, des douceurs meurtrieres du péché ; qu'enfin, la perte du monde entier ne doit point toucher une ame dont notre Dieu veut bien être la récompenfe, & qu'il ne nous éprouve que pour nous rendre dignes de lui. Quel motif plus capable de foutenir l'efpérance d'un cœur chrétien, & de le remplir, dès ici bas même, des plus folides confolations!

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PRIERE. I

Oyez donc mille & mille fois béni, Seigneur, du don que vous m'avez fait des livres faints. Eh! puis-je élever vers vous des mains trop reconnoiffantes, tandis que vous les avez comblées de tant de richeffes? Puisje trop eftimer ce tréfor, où je trouve des reffources dans toutes les difgraces de la vie, & dans toutes les épreuves de la foi? Que ne mérité-je d'avoir ce volume facré fans ceffe entre mes mains ou fous mes yeux ! Pourquoi les vérités s'en effacent-elles fi promptement de ma mémoire ? Que votre doigt, mon Dieu! les écrive donc lui-même ; que votre Efprit les grave profondément dans mon cœur, afin que dans toutes mes perplexités, dans toutes mes alarmes & dans toutes mes

peines, il foit toujours prêt à me donner des réponfes de falut.

-DE L'EVANGILE.

Allez dire à Jean ce que vous avez entendu & ce que vous avez vû: Les aveugles ·recouvrent la vûe. Matth. c. II.

L

A Vérité a plus d'une route pour paffer de notre efprit dans notre cœur, fi nous l'aimions affez pour l'écouter dans les différentes occafions où elle nous parle. Ce n'eft pas toujours par des inftructions publiques ou par des infpirations fecrettes, que Dieu nous avertit de nos égaremens, & nous invite de retourner à lui. Les œuvres ont pour nous leur langage, & fouvent plus énergique & plus fort que celui de la parole. Le changement qui s'opére dans ceux qui nous reffemblent, eft une voix puiffante qui nous crie, qu'avec la même fidélité, nous pourrions prétendre aux mêmes efpérances. Il fe convertit des pécheurs de toutes les efpéces, & il fe fauve des ames de tout caractére, afin que notre impénitence & notre lâcheté foit fans excufe. Ce que Jefus-Chrift fait dire à Saint Jean, c'eft ce que nous apprendrions fi nous lifions avec une férieufe affiduité l'Evangile & les faintes hiftoires, fi nous daignions feulement nous faire inftruire de ce qui ne ceffe point d'arriver dans l'Eglife. Mille bouches nous annonceroient que les aveugles voyent, que les boiteux marchent, que les lépreux font guéris, que les fourds entendent, que

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