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fait dire à S. Pierre Damien : Ce Sacrifice s'offre par tous les fidèles, tant hommes que femmes, quoiqu'il paroisse qu'il ne foit offert que par le feul Prêtre ( 1 ). Et après avoir cité quelques paroles du Canon de la Meffe, il ajoute qu'il en faut conclure néceffairement que le Sacrifice fait fur l'Autel par le Prêtre, eft offert à Dieu par tout le peuple qui y affifte. Qu'on joigne à ces autorités celle du Pape Innocent III, dont voici les paroles dans fon traité de la Meffe (z): Non

(1) Petrus Damian. in Opufculo, cui titulus Dominus vobifcum. cap. VIII. A cunctis Fidelibus, non folùm viris, fed & mulieribus, Sacrificium illud offertur, licet ab uno fpecialiter offerri Sacerdote videatur.

(2) Innocentius III. lib. 3. de Myfteriis Miffa. Non folùm offerunt Sacerdotes, fed & univerfi Fideles. Nam quod fpecialiter adimpletur minifterio Sacerdotum, hoc aniverfaliter agitur reto Fidelium.

feulement l'oblation fe fait par les Prêtres, mais encore par tous les fidèles, parce que les fidèles concourent en général, par leurs prières, à ce qui fe fait fpécialement par le Miniftre. L'Abbé Guéric répète la même pensée (1). Non-feulement, dit-il, le Prêtre facrifie, mais tous les fidèles réunis facrifient avec lui.

La plus grande partie du peuple qui affifte à la Meffe, ne fe feroit peut-être jamais douté d'une vérité auffi effentielle. La raison eft que l'Eglife, dans la fucceffion des temps, a été obligée de faire plufieurs changemens dans fon rit. Dans les premiers fiècles la Meffe fe célébroit en Latin, langage commun à tous les peuples foumis aux Romains dans l'Occident, &

(1) Guerricus in Sermne de Purificatione. Non folùm Sacerdos facrificat, fed totus conventus Fidelium, qui adfunt, cum illo facrificat.

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en langue Grecque, qui étoit celle de toutes les Provinces Romaines de l'Orient & de l'Egypte. Le peuple Romain entendoit alors les belles prières de la Meffe, il répondoit au Prêtre, & ne ceffoit jamais de lui être uni pour glorifier Dieu, & lui rendre des actions de grâces pendant tout le temps du Sacrifice. Peu-à-peu les langues Italienne, Françoife & Efpagnole fe font élevées fur les débris de la langue Latine, qui fe corrompit au point qu'elle ne fut plus enrendue que par les gens lettrés, qui étoient en petit nombre, & qu'elle devint totalement étrangère au peuple. Ceux qui affiftoient à la Meffe, ceffe rent alors de répondre au Prêtre, &. l'Office ne fut plus foutenu dans les Meffes folennelles, que par le choeur des. Eccléfiaftiques, & par un Clere dans les Messes particulières. Ce Clerc répond au nom de tout le peuple

Il est encore des Confréries, des Cou vens & des Univerfités dans lefquels fe conferve l'ancien rit, de répondre avec le Prêtre. Autrefois (comme je le dirai bien-tôt) quiconque parmi le peuple vouloit communier à la Meffe, portoit au Prêtre fon pain & fon vin, afin de l'offrir avec lui au Très-Haut, & qu'il fut confacré par le Miniftre. Quoique la façon de faire cette offrande n'ait plus lieu, l'efprit cependant en fubfifte toujours, puifque le fidèle qui affifte à la Meffe pour y comMesse munier, préfente lui-même ces dons à Dieu après l'Evangile & le Credo, & que tous les affistans, après la Confécration, offrent à Dieu le Père fon divin Fils, caché fous les efpèces du

Sacrement.

Que tout fidèle maintenant qui a coutume d'affifter à la Meffe avec irrévérence ou distraction, s'imagine fi une action auffi redouta

s'il le

peut,

ble n'exige que du Prêtre feul le plus profond refpect. I conclura néceffairement de ce que nous avons dit, qu'il doit être uni au Miniftre de Dieu dans le Sacrifice, c'est-à-dire, partager avec lui toutes les fonctions que l'Eglife impofe pour honorer Dieu, le louer des bienfaits qu'on en a reçus, & lui en demander de nouveaux. Il fentira la néceffité des difpofitions, & le recueillement qu'il doit apporter la Meffe: il ne peut manquer de redoubler de zèle, s'il veut accomplir pour lui. le Sacrifice d'une manière plus utile & plus profitable, en fe préfentant à la fainte Table. Le peuple defire, & à juste titre, de voir les Prêtres pénétrés de leurs auguftes fonctions; & c'eft à tous égards pour eux le plus effentiel des devoirs; mais le peuple, de fon côté, ne doit pas oublier qu'elles exigent de fa part la dévotion la plus vraie, la plus tendre

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