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quet célefte; elle gémit le refte de la journée de ne pouvoir confacrer à des œuvres de piété, un temps que les autres n'emploient qu'en plaifirs ou diffipations. Un pareille femme a fait plus de progrès dans la dévotion & la piété, que tant de perfonnes qui, menant par état une vie auftère & jamais mortifiée, prouvent par leur conduite diffipée,com

bien elles font attachées à un monde auquel elles ont renoncé. Ne nous arrêtons donc point à l'extérieur pour être fûrs de la vraie & folide piété. Elle habite le cœur de ces Chrétiens, qui, marchant en présence de Dieu avec fincérité & fimplicité, béniffent l'état où la Providence les a placés, enchaînent leur pour ne faire que ce que Dieu exige d'eux, & s'éloignent avec horreur de tout ce que réprouve leur divin Maîrre. Il ne faut pas s'imaginer que les perfonnes les plus religieufes foient cel

volonté

les qui, maîtreffes de leur temps, fréquentent le plus fouvent les Eglifes, & difent le plus de prières; fi leur cœur eft partagé entre Dieu & le monde, fi en nourriffant dans leur ame des haines fecrettes, des femences d'orgueil, ou d'autres paffions condamnables, elles veulent à la fois fervir deux maîtres auffi oppofés, leur piété n'eft qu'un mafque faux & trompeur, qui n'offre aucun trait du Chrétien.

Ne nous flattons pas; notre grande étude doit être d'acquérir cette folide & vraie dévotion, dont nous voyons le tableau dans les faintes Ecritures; c'est celle que nous ont prêchée les Pères de l'Eglife, & qu'ont pratiquée les Saints de tous les fiécles. Nous voyons s'établir journellement des dévotions nouvelles, c'est-à-dire, de nouveaux moyens d'exercer notre piété, (plût à Dieu qu'elles fuffent toutes propres à nous faire acquérir celle dont nous avons parlé !

malheureusement c'est ce qui n'eft pas. ) Dès qu'elles n'ont pour but que les biens ou les avantages du fiécle, dès qu'elles ne tendent qu'à nous délivrer des maux & des chagrins, dont eft femée la vie : peuvent-elles alors mériter le nom de dévotion? Tant qu'elles ne produiront pas en nous l'amour de Dieu & du prochain, & qu'elles ne feront pas unfrein pour nos paffions, ce ne font que des dévotions imaginaires & fans réa lité. Telle eft la pierre de touche pour connoître toutes les dévotions anciennes ou modernes. En vérité nous fommes dans une erreur bien groffière, & nous devons nous attendre à être cruellement détrompés à l'instant de la mort, fi, au lieu de prendre la vie de J. C. crucifié pour modèle de la nôtre, nous penfons être juftifiés en marmotant des prières, en portant des fcapulaires & des reliques, ou en nous faifant enterrer dans l'habit d'un Pénitent,lorfque nous aurons

paffé toute notre vie dans le défordre; ce ne font pas, nous le répétons, les habits de la vertu qui nous fauveront, mais. les œuvres qu'elle nous aura fait produire.

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Il est encore des dévotions qui, quoi-. que bonnes en elles-mêmes, peuvent devenir blâmables & fuperftitieufes, par.. l'abus qu'en fait l'ignorance & la malice. La folie & la méchanceté des hommes a fouvent corrompu les inftitutions les plus fages & les plus faintes; ne s'eft-on pas fervi des Sacremens mêmes pour autorifer des crimes ou des fuperftitions? Ce que doit faire alors un Chrétien prudent, eft d'examiner avec attention fi c'est l'Eglife ellemême qui a établi pareille dévotion, & fi au contraire la malice & l'ignorance n'auroit pas mêlé l'ivraie avec le bon grain. Lorfque les dévotions ne font pas autorifées par l'Eglife, mais établies feulement par des perfonnes pieuses &

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fans miffion, on eft alors en droit de douter de leur bonté, & conféquemment de ne les pas fuivre, parce qu'elles n'ont pas le fceau de celui que Dieu a établi, fur terre pour veiller à la fois fur la Religion & nos confciences. Ecoutons S. Auguftin: » Je ne puis approu» ver, dit-il, certaines chofes oppofées » aux ufages de l'Eglife, & qu'on nous » exhorte à fuivre, comme s'il s'agiffoit » de quelque Sacrement; fije n'ofe pas ou» vertement les condamner, ce n'eft que dans la crainte de fcandalifer des per»fonnes foibles, ou de fâcher celles qui font aifées à irriter ». Il n'eft pas

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rare de trouver de nos jours de ces caractères, qui s'inquiétent aisément lorfqu'on veut leur prouver les excès & les abus qui fe font gliffés dans la Religion; comme fi le plus grand de nos intérêts n'étoit pas de la dégager de tout ce qui peut en ternir la pureté. Le S. Docteur continue: Je fens un vérita

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