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rieur s'accompliront, la réception du brevet du grade supérieur sera pour eux un ordre de départ. L'exécution de cette disposition de l'ordonnance a été différée, dit-on; mais tant qu'une nouvelle ordonnance ne rapportera pas celle-ci, les amis de la légitimité ne doivent-ils pas craindre de voir ce que nos annales militaires ne nous ont jamais montre, un corps d'officiers renouvelé en masse, en temps de paix, et en un seul instant?

La même ordonnance accorde aux officiers admis dans la Garde royale avant la loi du 10 mars 1818, le brevet du grade supérieur après quatre années de service dans le grade inférieur, et prive de cet avantage les officiers qui y sont entrés et y entreront depuis la promulgation de cette lai. Pourquoi donc avoir établi une différence si grande entre les officiers de la formation de la Garde et ceux qui vont y entrer par la suite? N'a-t-on pas prévu que les priviléges qu'auront eus les uns, et dont seront privés les autres, seront cause, entre officiers du même corps, de jalousies et de duels? Croit-on que la position dans laquelle seront placés ces officiers vis-àvis les uns des autres, n'aura pas quelques suites affligeantes pour l'humanité? Croit-on que la discipline et le service n'en souffriront pas ? A-t-on pensé que l'union régnerait dans des corps où il n'y aurait plus égalité de priviléges et de faveurs? Est-ce dans des régimens que peut exister une classe qui aura été privilégiée, et une autre qui ne le sera pas? Pourquoi les premiers admis auront-ils été traités comme autrefois l'étaient les aînés des familles, et pourquoi ceux qui vont y entrer le seront-ils comme l'étaient des cadets? Pourquoi faire revivre dans les régimens

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ce droit d'aînesse que notre législation nouvelle a détruit? Cet état de choses ne peut durer ; ou il faut que les officiers qui vont entrer dans la Garde jouissent des mêmes avantages que ceux qui y sont depuis sa formation, ou que ces derniers quittent ce corps; sans cela l'union, force première des régimens, ne pourra subsister; la discipline en souffrira; et l'humanité doit être effrayée d'avance des suites de ces divisions entre gens si chatouilleux, et qui possèdent à un si haut degré le sentiment du point d'honneur et des convenances.

(La suite à la livraison prochaine. )

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QUEL triste anniversaire que celui du 21 janvier; de ce jour à jamais exécrable où le meilleur des Princes, le Roi sans tache perdit la vie sur un échafaud!..

Nul Souverain n'avait plus de droits que lui à l'amour, à l'admiration, à la reconnaissance de son peuple; et cependant, après avoir essuyé tous les genres d'outrages, après avoir fait l'épreuve des disgrâces les plus amères, après avoir été soumis aux rigueurs de la plus effrayante captivité, après avoir gémi sur le sort de la fidèle compagne de ses infortunes, de cette auguste fille des Césars, que Marie-Thérèse avait confiée aux vertus hospitalières des Français; sur celui de ses deux enfans, et de celte princesse héroïque (1), sa sœur et sa

(1) On vit madame Elisabeth, dans la journée affreuse du 20

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constante amie; après avoir été réduit à l'humiliation de comparaître dans l'attitude d'un accusé devant des hommes qui étaient redevables de l'autorité dont ils étaient investis, à ce sentiment généreux, à ce premier acte de confiance qui lui avait fait décerner le titre de restaurateur de la liberté française, il a été assassiné; et sa dernière pensée, son dernier vœu ont encore été pour son peuple: Je souhaite que mon sang puisse cimenter le bonheur des Français !

Quel sujet pour l'histoire! quels traits à ajouter au lugubre tableau des vicissitudes humaines! et quel touchant exemple de piété!

Dénonciateurs, accusateurs, bourreaux de LouisSeize! le jour même où vous avez consommé votre crime, le jugement des siècles a commencé pour vous, sans que ni les réflexions tardives, ni les vains regrets, ni les retours inutiles sur le passé puissent vous garantir de ce poids de l'opinion publique, dont la nature est de grossir, de croître êt d'accabler enfin ceux qui l'ont accumulé sur leurs têtes. Vous n'avez pas subi, vous ne subirez jamais le sort des assassins de Charles 1er, parce que votre auguste victime vous a pardonné, et que la bonté, la générosité font l'apanage des Bourbons; mais vous n'échapperez ni aux reproches de la nation, sur le sort de laquelle cet horrible forfait a exercé la plus déplorable influence, ni aux arrêts immuables de la postérité, ni à vos remords; et ces

juin, s'attacher aux pas de son frère lorsqu'il était menacé par les brigands qui avaient violé son palais, et présenter sa poitrine anx poignards de ceux qui demandaient la tête de la Reine, en leur disant avec fermeté : La voici, la Reine!...

remords seront d'autant plus vifs, d'autant plus déchirans, que vous éprouvez les effets d'une clémence dont il est impossible que vous ne vous reconnaissiez pas indignes.

Sans doute il en est parmi vous, et c'est, j'aime à le croire, le plus grand nombre, qui, en votant la mort du plus vertueux des rois, n'ont fait que céder à la crainte; sans doute cet affreux parricide est moins votre ouvrage que celui des membres de la députation et de la commune de Paris; sans doute l'histoire ne jugera pas avec la même rigueur tous ¿ceux qui ont formé la majorité pour la condamnation; car il ne serait pas juste de n'avoir aucun égard à ces listes de proscription et de mort, à ces écrits sanguinaires, à ces clameurs féroces qui durent jeter l'épouvante dans l'âme de plusieurs membres de l'assemblée.

Mais, quelque distinction qu'elle fasse à cet égard, elle demandera compte de leur conduite à ceux qui ont concouru par faiblesse à cette grande calamité, qui a été la source de tant d'autres; elle leur dira, que lorsqu'on accepte des fonctions publiques, il faut avoir un caractère ferme et prononcé; il faut avoir le courage de ne pas dévier de la ligne des principes, méme alors que l'on craint d'être le plus faible; il faut savoir être l'ennemi, le persécuteur des ennemis de sa patrie, quel que soit leur nombre, -quelle que soit leur audace, quels que soient les moyens qu'ils emploient pour l'opprimer et pour l'avilir.

C'est ainsi que l'orateur romain, qui devait être la première victime de Catilina, dont les partisans étaient nombreux, dont l'armée était là, le dénonça

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au sénat, obligea ce traître à s'éloigner de son pays, poursuivit la condamnation de ses complices, et mérita le titre glorieux de SAUVEUR DE ROME, de PERE

DE LA PATRIE.

C'est ainsi que s'immortalisèrent ces vertueux Mandarins qui, loin d'obéir à cet empereur de la Chine qui voulait les forcer de taire à l'histoire ce que leur conscience leur ordonnait d'inscrire dans ses fastes, préférèrent traîner sous ses yeux leur échafaud, que de trahir leurs devoirs.

C'est ainsi que se couvrit de gloire ce courageux maire d'Etampes (M. Simoneau ), qui, le 5 mars 1792', dans une émeute populaire, brava les menaces d'une troupe de factieux, et aima mieux mourir que de déférer à leur sommation de taxer le blé au dessous du prix courant.

C'est ainsi que se distingua M. Richaud, maire de Versailles, au mois de septembre 1792, lorsque la maison d'arrêt étant assiégée par des scélérats qui voulaient assassiner cinquante personnes accusées de fanatisme et de royalisme, il traversa la foule, se plaça sur le seuil de la porte d'entrée, et après y avoir attaché son écharpe, s'écria : Respect à la loi! Les personnes qui sont dans cette maison ne sont convaincues d'aucun crime; on n'y entrera qu'après avoir passé sur mon corps!

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Enfin, c'est ainsi que se conduisit, dans le procès même du Roi-Martyr, le député Duchastel, qui se fit porter mourant, au sein de la Convention nationale, pour y voter en faveur de Louis, quelque assuré qu'il fût que, par cet acte de courage et d'honneur, il votait sa propre mort.

Et vous, Français qui avez compati à tous les mal-
I. 2 LIVRAISON.

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