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D'UN

COUP D'ÉTAT

(DÉCEMBRE 1851)

D'APRÈS LES DOCUMENTS AUTHENTIQUES, LFS PIÈCES OFFICIELLES
ET LES RENSEIGNEMENTS INTIMES,

PAR M. PAUL BELOUINO

Précédée d'une Introduction et suivie d'une Conclusion sur les causes et les conséquences
de cette révolution

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LUDOVIC BRUNET et C, ÉDITEURS, RUE DE SÈVRES, 37.

1852.

ДС 274 345

60-73076

INTRODUCTION.

Ceux qui ne voient que le fait extérieur et matériel de l'immense révolution que Louis-Napoléon vient d'accomplir, avec la rapidité de la foudre et l'audace de l'aigle, circonscrivent les causes et les effets de cette révolution dans le cercle étroit d'un duel acharné entre le parti de l'Ordre social et le parti de la Démagogie socialiste. Mais ceux dont le regard pénètre dans les profondeurs de la situation politique et dans les entrailles de la société civile aperçoivent au-dessus et au delà des questions d'un jour, des débats d'une heure, que ce duel a soulevés, depuis la terrible et soudaine explosion de février, des problèmes autrement élevés, des conflits autrement vastes.

Le

coup d'État de Décembre a fait marcher à grands

pas la France moderne vers la solution de ces problèmes et le dénoûment de ces conflits. Mais ce serait une grande illusion et une profonde erreur de croire que tout est dit, parce que sur le champ de bataille où l'Anarchie et l'Autorité viennent de se rencontrer face à face, Dieu a donné la victoire au parti de l'Ordre social sur le parti de la Démagogie socialiste. Cette victoire n'a terminé que la lutte des idées; la lutte des intérêts continue. La guerre ne cesse pas; elle se déplace et se transforme.

L'Ordre social n'a pas seulement triomphé de la Démagogie socialiste le jour où le coup d'État de Dé– cembre est venu enlever à l'improviste les chances de 1852 aux bandes de pillards, d'incendiaires et d'égorgeurs qui se disposaient à fondre sur la France comme une nuée d'oiseaux de proie. Ce jour-là, Louis-Napoléon a été entre les mains de Dieu l'instrument de salut d'une riche et puissante nation, que des ambitieux et des intrigants avaient rapetissée au niveau de leurs passions sans grandeur, et que des cupides et des pervers voulaient refaire à l'image de leurs vices sans éclat. La patrie de Charlemagne et de Bonaparte allait s'abîmer dans des océans de flamme et de sang, lorsque Louis-Napoléon, se levant dans sa force et son patriotisme, a marché sur le fantôme blanc du Passé et sur le spectre rouge de l'Avenir.

Mais Louis-Napoléon n'a ni combattu sous le drapeau des vieux intérêts ni vaincu avec l'arme des anciens partis, qui le poursuivaient naguère de leur mal

veillance et de leur colère, qui le poursuivent encore de leur persiflage et de leur dédain. Insensés, qui ne comprennent pas que leur impopularité les rendait impuissants pour se sauver eux-mêmes! Ingrats, qui oublient qu'ils doivent au neveu de l'Empereur la conservation de leur fortune et de leur vie! Comme autrefois Octave, venant réclamer à Rome l'héritage de César, eut, à l'exemple de son grand oncle, pour auxiliaires dévoués, les sentiments démocratiques et militaires contre les passions aristocratiques et démagogiques, Louis-Napoléon a combattu pour le Peuple et vaincu par l'Armée.

Si ces deux noms se retrouvent ici sous notre plume, associés l'un à l'autre, c'est que, dans notre esprit, à deux mille ans d'intervalle, ils représentent la même idée, c'est que le règne du second sera pour son siècle et son pays ce que le règne du premier a été pour son époque et sa patrie.

L'histoire ne se répète ni dans les faits ni dans les hommes. Mais cependant lorsqu'on l'étudie avec le flambeau de la philosophie, on retrouve entre des époques diverses de forme d'intimes analogies; entre des situations différentes de physionomie de profondes ressemblances; entre des hommes opposés de caractère des rapports étranges. Ainsi les destinées de la nation romaine et les destinées de la nation française, qui paraissent si dissemblables, lorsqu'on s'arrête à la surface des événements, sont identiques, dès qu'en allant au fond des choses, on compare la mission de l'une et de

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