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» vera les titre et rang d'impératrice et reine >> couronnée.

>> ART. 3. Son douaire est fixé à une rente >> annuelle de deux millions de francs sur le » trésor de l'Etat.

» ART. 4. Toutes les dispositions qui pour>> ront être faites par l'empereur Napoléon en » faveur de l'impératrice Joséphine, sur les >> fonds de la liste civile, seront obligatoires » pour ses successeurs.

» ART. 5. Le présent sénatus-consulte sera » transmis, par un message, à S. M. l'impéra>>trice et reine. » Et l'orateur continua de développer ainsi qu'il suit les motifs de ce projet.

<< Monseigneur, Sénateurs, dit-il, l'acte so» lennel rapporté en entier dans le sénatus>> consulte que vous venez d'entendre en con>>> tient seul tous les motifs.

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>>

Que pourrions-nous ajouter? quelles pa» roles pourrions-nous adresser au sénat français qui ne fussent bien au-dessous des paroles >> touchantes recueillies de la bouche des deux » augustes époux, dont votre délibération va >> consacrer les généreuses résolutions?

>>> Leurs cœurs se sont entendus pour

faire au

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plus grand des interêts le plus noble des sa>>> crifices; ils se sont entendus pour faire parler » à la politique et au sentiment le langage le

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plus vrai, le plus persuasif, le plus parfait » pour convaincre et pour émouvoir.

>> Comme souverains et comme époux, l'em» pereur et l'impératrice ont tout fait, ils ont >> tout dit.

» Il ne nous reste qu'à les aimer, les bénir, >> les admirer. >>

Après ce discours, qui ne laissa de pas produire une profonde impression sur tous ceux qui l'avaient écouté, Eugène Beauharnais prit à son tour la parole en ces termes :

<< Princes et Sénateurs,

>> Vous venez d'entendre la lecture du pro>> jet du sénatus-consulte soumis à votre délibé>> ration; je crois devoir dans cette circonstance >> manifester les sentimens dont ma famille est >> animée.

» Ma mère, ma sœur et moi, nous devons » tout à l'empereur. Il a été pour nous un vé>> ritable père; il trouvera en nous, dans tous » les temps, des enfans dévoués et des sujets

» soumis.

» Il importe au bonheur de la France que » le fondateur de cette quatrième dynastie >> vieillisse environné d'une descendance directe >> qui soit notre garantie à tous, comme le » de la gloire et de la patrie.

gage

» Lorsque ma mère fut couronnée devant >> toute la nation par les mains de son au>> guste époux, elle contracta l'obligation de >> sacrifier toutes ses affections aux intérêts de » la France. Elle a rempli avec courage, no» blesse et dignité, ce premier des devoirs. Son » âme a été souvent attendrie en voyant en >> butte à de pénibles combats le cœur d'un >> homme accoutumé à maîtriser la fortune et à >> marcher toujours d'un pas ferme à l'accom» plissement de ses grands desseins. Les larmes

>>

qu'a coûtées cette résolution à l'empereur » suffisent à la gloire de ma mère. Dans la si» tuation où elle va se trouver, elle ne sera pas

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étrangère par ses vœux et par ses sentimens

>> aux nouvelles prospérités qui nous attendent, >> et ce sera avec une satisfaction mêlée d'orgueil

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qu'elle verra tout ce que ces sacrifices au>> ront produit d'heureux pour sa patrie et pour » son empereur. »

Telles furent les premières formalités auxquelles ce grand acte politique donna lieu. L'empereur avait bien pensé à faire lui-même une première communication à l'impératrice, mais il n'osa jamais; il craignait les suites de sa sensibilité : les larmes d'une femme trouvaient toujours le chemin de son cœur. C'était à Fontainebleau, comme je l'ai dit plus haut, qu'il avait cru rencontrer une occasion favorable; on sait la cause qui provoqua cette espèce de scène de ménage, et comment elle se terminą. L'empereur résolut de ne pas s'expliquer d'une manière précise avant l'arrivée du vice-roi, auquel il avait déjà fait dire de se rendre à Paris. Ce fut Eugène qui le premier parla à sa mère et l'amena peu à peu à ce grand sacrifice; il se conduisit dans cette occasion en bon fils et en homme reconnaissant et dévoué à son bienfaiteur, en lui évitant des explications douloureuses avec une compagne dont l'éloignement était un sacrifice aussi pénible pour l'un que pour l'autre.

L'empereur ayant réglé tout ce qui était relatif au sort de l'impératrice qu'il établit d'une manière grande et généreuse, pressa le moment

de la séparation qui devait avoir lieu, sans doute parce qu'il souffrait de l'état dans lequel était l'impératrice elle-même, forcée de dîner tous les jours et de passer la soirée avec les personnes témoins des derniers instans de sa royauté.

il

Le lendemain du jour où le message de l'empereur avait été porté, lu et développé au sénat, y eut le soir, dans les grands appartemens, une réunion de hauts personnages dont l'entremise était nécessaire dans cette circonstance. On y remarquait Eugène Beauharnais, l'archi-chancelier, M. Regnault de Saint-Jeand'Angély, toute la famille impériale et la plupart des grands dignitaires et officiers de la couronne. Là l'empereur fit à haute voix la déclaration du projet qu'il avait formé de rompre son mariage avec Joséphine, qui était présente, et l'impératrice, de son côté, fit la même déclaration en fondant en larmes. Le prince archi-chancelier, ayant fait donner par un secrétaire d'état lecture de l'article du code, en fit l'application au cas présent et déclara le mariage dissous.

Pendant ce temps, nous étions dans le salon de service à attendre, non sans impatience, l'is

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