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j'avais reçu d'elle en récompense de mon attachement à l'emperour, j'avouerai franchement

que je ne le mis pas de côté pour économiser,

mais que je le portai le soir même à une fort jolie petite lingère en chambre, demeurant rue de Paris, qui m'avait promis de mettre un terme à ses rigueurs le jour où je lui ferais cadeau d'un chapeau de castor noir; c'était alors la grande mode; toutes les femmes en portaient. Je pourrais même ajouter que mes camarades, l'un après l'autre, lui faisaient la rente d'un chapeau tous les trois mois, sans doute au même prix que moi cette fois c'était mon tour; je dus en conséquence m'exécuter de bonne grâce. Au reste, je n'eus qu'à me louer de la religieuse exactitude avec laquelle mademoiselle O...... tint son marché, et dans la même soirée je fis ce qu'on appelle d'une pierre deux coups. Mais chut! je me souviens que j'ai promis d'être discret sur le chapitre de mes amours.

Au commencement de cette même année 1810, le prince de Neufchâtel était parti pour Vienne, chargé de la procuration de l'empereur pour célébrer son mariage. Il y reçut la bénédiction nuptiale, d'après l'étiquette et le cérémonial

usités en pareille circonstance entre cours souveraines.

Le général Lauriston, qui avait été aide-decamp de Napoléon et qui jouissait de toute son estime, fut chargé de se rendre dans la capitale de l'Autriche et d'accompagner la nouvelle impératrice jusqu'à Paris, en qualité de capitaine de ses gardes; et, pour honorer la mémoire du maréchal Lannes, il nomma sa veuve (madame la duchesse de Montebello) dame d'honneur de Marie-Louise. Il ne pouvait lui donner une plus grande marque de sa haute estime, car elle n'avait eu jusqu'alors aucun titre pour arriver à une position qui la mettait tout-à-coup à la tête de la maison de l'impératrice.

Il fit partir sa sœur, la reine de Naples, accompagnée de quatre dames, pour aller jusqu'à Braunau à la rencontre de la jeune reine. Braunau était encore, à cette époque, occupé par le corps d'armée du maréchal Davoust, le dernier des troupes françaises dont l'évacuation de l'empire d'Autriche avait été stipulée dans le traité fait précédemment entre cette puissance et l'empereur Napoléon.

C'est dans cette petite ville qu'eut lieu la remise de la nouvelle souveraine. Le cérémonial, fixé pour cette solennité par l'empereur lui-même, est assez intéressant pour que je le donne ici dans son entier.

« La dame d'honneur, les dames et tout le service de S. M., partiront de Braunau, de manière à être arrivés à la baraque à onze heures et demie. Le commissaire de l'empereur et roi, le prince de Neufchâtel, y sera rendu à la même heure. S. M. la reine de Naples sera invitée à être rendue à la baraque à onze heures et demie. Tout ce qui appartient au cortége français entrera par l'avenue française et se placera dans le lieu désigné par le maître des cérémonies. L'écuyer de l'impératrice s'entendra avec lui donner ses ordres.

pour

» Le général Friant donnera des ordres pour placer des sentinelles au dehors et autour des barrières qui entourent la baraque. Il ne doit y avoir, dans la partie autrichienne, que ce qui tient au service autrichien, et dans la partie française, que ce qui tient au service français; du reste, aucun étranger. Un officier supérieur sera chargé de cette police, et il y

aura de petites patrouilles disposées à cet égard.

>> M. de Ségur s'entendra avec M. le général Friant, de manière à avoir quelqu'un pour diriger l'entrée du convoi autrichien, par l'ave

nue autrichienne.

» L'impératrice, à son arrivée à la baraque, descendra à la porte du salon autrichien. Après que S. M. se sera reposée, elle se rendra dans la salle destinée pour la cérémonie de la remise, suivie de son cortége autrichien, et s'assoiera dans un fauteuil, entourée de ses dames, des officiers de sa maison, et ayant à sa gauche le commissaire autrichien chargé de la re

mettre.

>> Le maître des cérémonies de la cour de Vienne, ou l'officier chargé de remplir ces fonctions, ira chercher le commissaire français et les officiers et dames nommés pour servir l'impératrice, qui se seront réunis dans la pièce déclarée française, et se placeront du côté français. La reine de Naples se tiendra dans la pièce française avec le cortége français; elle sera assise sur un fauteuil et entourée de sa maison; elle restera dans cette pièce

pendant tout le temps de la cérémonie de la

remise.

» Le commissaire et le cortége français entreront par la porte française, dans la salle neutre, occupée par l'impératrice. Le cortége s'arrêtera après être entré dans la salle. Le commissaire français seul, accompagné des maîtres des cérémonies autrichien et français, s'a vancera vers l'impératrice, et après lui avoir fait trois révérences, il adressera à S. M. un compliment, dans lequel il lui exposera l'objet de sa mission. Après la réponse de S. M., le maître des cérémonies autrichien indiquera au commissaire français le commissaire autrichien. Les deux commissaires se salueront réciproquement, et se complimenteront. Le premier compliment sera fait par le commissaire autrichien.

» On procédera ensuite à la vérification des pouvoirs; le conseiller d'état autrichien, faisant fonctions de secrétaire, fera lecture des pouvoirs de l'empereur d'Autriche pour son commissaire; et le conseiller d'état français, faisant fonctions de secrétaire, fera celle des pouvoirs donnés par l'empereur des français à son commissaire.

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