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l'appel du jugement qui aurait apprécié cette
exception, demander la nullité d'un exploit
d'ajournement, parce qu'il est nécessaire que
la question de compétence soit définitivement
fixée, pour que le tribunal puisse juger même
une question de forme. Ainsi l'ont décidé, avec
raison, les cours de Paris, 28 nov. 1811, et de
Brux., 6 déc. 1830 (Sirey, t. 31, 2o, p. 58). On❘
peut citer, néanmoins, un arrêt contraire,
rendu par la cour d'Orléans, le 20 juillet 1827
(Sirey, t. 28, p. 166).

Mais, dans ce cas, la cour peut-elle évoquer? (F. nos questions sur l'art. 473.)]

c'est que la loi désigne spécialement la compensation, ce qui eût été inutile si elle ne l'avait pas distinguée des moyens de défense ordinaires, qu'elle comprend tous dans une dénomination générale. En autorisant, sans distinction, les demandes en compensation, elle fait suffisamment sentir que ces demandes sont admissibles dans leur entier, soit qu'elles demeurent purement défensives, soit qu'elles prennent un caractère agressif. La cour de cassation a jugé, le 17 août 1814 (Sirey, t. 15, p. 18), qu'en première instance on pourrait accueillir une demande en compensation supérieure à la demande principale, quoiqu'elle

[1674 bis. De quelle compensation entend n'eût pas subi l'épreuve de la conciliation. La

parler l'art. 464?

La compensation peut être opposée, pour la première fois, en appel : ainsi l'a jugé la cour de cass., le 4 août 1806, et c'est d'ailleurs la disposition formelle de l'art. 464.

Mais plusieurs auteurs ont voulu introduire une distinction. Les uns pensent qu'il s'agit uniquement de la compensation dont le titre existait avant le jugement, et que les parties ont omis de faire valoir en première instance; d'autres enseignent qu'il faut que la compensation ne soit devenue possible que depuis le jugement mais ces distinctions ne sont fondées sur aucun texte; la loi ne nous semble point l'admettre, et Favard, t. 1, p. 185, no 6, le reconnaît. Cependant, si le titre sur lequel on fonde la compensation était contesté, il est évident que, sur le premier procès, on en enterait un second bien different; les actions premières seraient complétement dénaturées. Nous croyons donc que l'art. 464 entend parler de la compensation non contestée. On conçoit alors que ce mode d'extinction est la réponse péremptoire à la demande en accomplissement d'une obligation; si l'emploi de ce moyen n'était pas admis en cause d'appel, le procès suivrait inutilement son cours.

Du reste, la compensation ordonnée par un jugement d'ordre, et non contestée en première instance, ne peut l'ètre pour la première fois en appel. (Paris, 2 mai 1807; Sirey, t. 7, p. 1077.)]

[1674 ter. Si la créance opposée en compensation est supérieure a celle à laquelle on l'oppose, le tribunal d'appel pourra-t-il connaitre de plano de la totalité ?

décision que nous venons de donner pour les instances d'appel, est une conséquence nécessaire de celle-ci.

Il est bien naturel d'ailleurs que, si le tribunal d'appel a apprécié le mérite de la créance opposée en compensation, et en a fait la base d'une condamnation, cette condamnation s'applique à toute la créance, que celle-ci ne se trouve pas définitivement appréciée pour partie, et soumise à une nouvelle appréciation, en ce qui touche l'autre partie. Le titre est indivisible, il ne peut pas être bon et mauvais tout à la fois; la division que l'on propose serait un non-sens, et aboutirait, d'ailleurs, à mettre les tribunaux dans une fausse position, puisque les juges de première instance, saisis d'appel auraient prononcé sur la valeur qui de la demande pour l'excédant, après que ceux entrait en compensation, seraient dans l'alternative, ou de subir l'influence du préjugé, ou de décider contrairement à un arrêt souverain.

Aussi Boitard, sur l'art. 464, et Talandier, n° 357, n'hésitent-ils pas à résoudre par l'affirmative la question posée en tète de ce nutraitée avec beaucoup de développements dans méro. Il en est de même de Merlin, qui l'a les Quest., vo Appel, § 14, art. 1er, no 16, 9o et 10o.

Ce dernier auteur étend le même système au cas où, d'un fait allégué comme exception en première instance, on voudrait, sur l'appel, tirer encore un moyen de condamnation. Il ne voit aucune difficulté à ce que le defendeur agisse de la sorte: car si, du fait une fois établi, la condamnation s'evince aussi bien et de la même manière que l'exception, la requérir n'est pas former une nouvelle demande. Les conclusions qui y tendent ne sont, dit Merlin, que le corollaire inévitable et forcé de l'exception opposée devant les premiers juges. ] [1674 quater. Une cour d'appel peut-elle

La raison de douter vient de ce que la demande en condamnation, pour l'excédant, ne pouvant être considérée comme une défense à l'action principale, semble rentrer dans la catégorie des demandes nouvelles, prohibées par l'art. 464. Mais, à cela on répond, que ce n'est pas exclusivement à son caractère de défense ou d'exception que la compensation doit d'avoir été admise en cause d'appel, et la preuve, | pel, § 14, art. 1er, no 21, fait observer, avec

connaitre d'une action principale qui n'a pas subi le premier degré de juridiction? Non certainement; et Merlin, Quest., vo Ap

beaucoup de raison, que cette solution est une conséquence nécessaire des règles qui, hors les cas d'exception signalés par les art. 464 et 473, interdisent aux tribunaux supérieurs les demandes nouvelles qu'on voudrait enter sur l'appel d'une demande principale, et d'évoquer le fond sur l'appel d'un jugement relatif à un simple incident.

Si l'importance des deux degrés de juridiction est telle qu'elle ne cède pas même à l'avantage de faire juger toute la cause par le tribunal supérieur saisi d'une partie de cette même cause, à plus forte raison est-il impossible d'admettre qu'on puisse être amené directement, par un ajournement introductif, devant la cour d'appel, pour y voir juger une contestation dont les premiers juges n'ont jamais connu ni de près, ni de loin.

Merlin appuie son opinion de l'autorité de Henrion, Traité de l'autorité judiciaire, ch. 29, et d'un arrêt du conseil, du 24 octobre 1777. (V. nos Quest. 1654 et 1676.) (1).] [1674 quinquies. La demande de dommagesintérêts formée en cause d'appel est-elle une demande nouvelle?

Puisque l'art. 464 contient une disposition formelle pour excepter de la prohibition géné. rale les demandes en dommages-intérêts relatives au préjudice souffert depuis le jugement, il s'ensuit qu'il laisse sous l'application de cette prohibition les demandes en dommages-inté rêts qui auraient pour objet un préjudice antérieur.

la démolition d'une construction élevée, dans le cours de l'instance, sur le terrain dont celle-ci tendrait à obtenir le délaissement?

La disposition de l'art. 464, qui autorise à demander, en appel, les intérêts, arrérages et autres accessoires échus depuis le jugement, ainsi que les dommages-intérêts pour le préju dice souffert, nous semble légitimer la solution affirmative que la cour de cassation a donnée à cette question le 2 déc. 1828.

En effet, l'on ne peut contester que cette addition à la demande originaire n'en soit un accessoire inséparable, comme le serait toute demande en réparation d'un nouveau trouble commis, d'une nouvelle entreprise formée sur l'objet litigieux, laquelle ne pourrait, sans difficulté, être portée, par la voie du changement de conclusion, devant le tribunal saisi de la première. (Cass., 21 avril 1834; Sirey, t. 35, p. 524.-V. la Quest. 1677 quinquies.] 1675. Des provisions non demandées en première instance peuvent-elles l'étre en cause d'appel?

Par arrêt du 14 ventôse an vi, la cour de cassation a décidé que l'on ne pouvait, en cause d'appel, former une demande en provision qui n'avait pas été proposée devant les premiers juges. La troisième chambre de la cour de Rennes a aussi décidé, le 18 mars 1809 (Dalloz, t. 2, p. 198), que l'intimé qui prenait des conclusions tendantes à obtenir une provision, jusqu'à la reddition d'un compte qu'il prétendait lui être dû par l'appelant, était non recevable en cette demande, attendu qu'il ne l'avait pas formée devant les premiers juges.

Mais il faut remarquer que ces deux arrêts n'ont prononcé de la sorte, que par le motif que la cause sur laquelle la demande en provision pouvait être fondée, existait avant le ju

Aussi sont-elles déclarées non recevables en cause d'appel par les arrêts de la cour de cass., des 1er mars et 31 août 1850, des cours de Rennes, 10 oct. 1817 et 6 juin 1833, de Rouen, 21 avril 1820, et de Brux., 28 déc. 1836 (J. de B.. 1837, p. 60); à moins qu'elles n'aient pour but d'obtenir la réparation du dommage souffert depuis le jugement (Rennes, 11 mai 1815), ou depuis un arrêt interlocu-gement de première instance. Nous croyons toire. (Cass., 12 avril 1817; Sirey, t. 17, p. 264.) Dans ces deux cas, c'est à la cour elle-même qu'il appartient de les liquider; elle ne doit point renvoyer pour cela devant les juges dont le jugement est attaqué. (Cass., 14 niv. an ix; Sirey, t. 1er, p. 286.)

Du reste, la cour de Bordeaux a jugé, avec raison, le 28 janv. 1831, que la partie qui a conclu en première instance à une condamnation de dommages-intérêts à fournir par état, ne forme pas une demande nouvelle en fixant sur l'appel la quotité des dommages qu'elle réclame.]

aussi qu'en semblable circonstance, une demande en provision ne peut être accueillie en cause d'appel, d'après la seconde disposition de l'art. 464, qui ne permet de demander, soit des intérêts, arrérages, loyers ou autres accessoires, qu'autant qu'ils sont échus depuis le jugement de première instance, soit des dommages-intérêts, qu'autant que le préjudice a été également souffert depuis ce juge

ment.

Mais on peut, à contrario, conclure de cette disposition que toute demande en provision, formée à raison de besoins qui ne seraient pas nés avant le jugement dont est appel, peut et

[1674 sexies. Peut-on demander, en appel, doit être accueillie par les juges supérieurs;

(1) [*. Liége, 26 mai 1830, et Brux., 8 fév. 1832, et voy. Dalloz, t. 8, p. 361 el 381.]

que, par suite de conséquence, ces mêmes juges peuvent aussi, sans réformer le jugement de première instance qui aurait accordé une provision trop faible, adjuger une provision

supérieure, vu les circonstances survenues depuis l'instance d'appel. (Cass., 14 juill. 1806 et 3 juili. 1809; Sirey, t. 6, p. 563, et Rép., V Appel, sect. 1oo, § 9, no 7 et 8, et Provision, no 1 et 2.) (1).

En d'autres termes, la règle de compétence qui n'attribue aux tribunaux supérieurs la connaissance des affaires qu'en deuxième ressort, est-elle d'ordre public, ou relative simplement à l'intérêt des particuliers? Peut-elle être valablement modifiée par la renonciation de ceux-ci? Est-ce là une compétence ratione materiæ ou ratione personæ ?

[La distinction adoptée par Carré, relativement aux demandes en provision formées pour la première fois sur l'appel, nous paraît conforme à la loi. Elle est egalement enseignee par Favard, t. 1, p. 183, no 6. La seconde branche en est consacrée par plusieurs arrêts qui ont jugé que la demande en provision est recevable sur l'appel, soit quand il s'agit d'une instance en séparation de corps, soit dans toute autre circonstance. Voici l'indication de ces arrêts, dont la plupart ont eté rendus sur les conclusions de Merlin (Rép., vo Appel, section 1re, $9, no 7 et 8, el Quest., vo Appel, §14, nos 7 et 8): Cass., 2 niv. an ix, 21 vend. an x, 13 niv. an x11, 14 juill. 1806, 5 juil. 1809 (Dalloz, t. 14, p. 245; Sirey, t. 9, p. 409); Bordeaux, 3 janv. 1826 (Sirey, l. 26, p. 202); Angers, 17 juill. 1828 (Sirey, t. 28, p. 351); Brux., cass., 3 déc. 1840 (Bull., 1841, p. 60). 1676. Quand une demande nouvelle non recerable a été formée en cause d'appel, verte par la défense de l'intimé qui, plai-tribunaux d'appel peuvent suppléer d'office les dant au fond, ne s'en prévaut pas?

Cette question est controversée; et, comme le font observer Merlin, loco cit., et Talandier, no 355, les deux chambres de la cour de cassation la resolvent différemment. La section des requêtes pense que les parties sont libres de renoncer au premier degré de juridiction, comme nous avons dit, sur la Quest. 1634, qu'elles pouvaient renoncer au second. C'est ce qui résulte de l'arrêt cité par Carré, et de ceux qui ont été rendus les 14 octobre 1806 (Sirey, t. 20, p. 460), 1er juillet 1818 (Sirey, t. 19, p. 238; Dalloz, t. 9, p. 194), 16 juin 1824 (Sirey, t. 24, p. 510; Dalloz, t. 8, p. 581), et 4 février 1829 (Sirey, t. 31, 1re, p. 56). |

la nullité de cette demande est-elle cou

C'est notre opinion, fondée sur ce que cette nullité n'est prononcee que dans l'intérêt de la partie contre laquelle la nouvelle demande est formée. C'est aussi ce qui résulte d'un arrêt de la cour de cass. du 14 juill. 1806 (Sirey, 1. 6, p. 563).

[Merlin, Quest. de droit, vo Appel, § 14, art. 1er, no 22 2o, généralise cette question, en demandant si le defaut de pouvoir d'une cour, soit pour statuer sur une demande nouvelle, soit pour évoquer, sur l'appel d'un incident, le fond qui ne serait pas en etat, soit pour connaître directement d'une demande principale, pourrait être couvert par le consentement des parties?

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La section civile décide, au contraire, que le consentement des parties ne les rend pas violerait l'une des règles précitées, et que les non recevables à se plaindre d'un arrêt qui

fins de non-recevoir dont ces règles seraient le principe elle l'a ainsi jugé par ses arrêts des 26 mars 1811 (Dalloz, t. 8, p. 380), 9 octobre 1811 et 18 juin 1817 (Sirey, t. 17, p. 299; Dalloz, t. 8, p. 375). C'etait encore en ce sens que l'avait jugé un arrêt du conseil du 24 octobre 1777.

Talandier embrasse le système de la section des requêtes, que Merlin avait lui-même d'abord soutenu. Mais ce dernier auteur expose avec force les motifs qui le lui ont fait abandonner.

Nous pensons, comme lui, que l'incompétence des tribunaux superieurs pour connaitre d'une demande non soumise aux juges inférieurs, est une incompétence ratione materiæ. En effet, si la cause qu'on leur défère

séquemment, doit subir, comme toute demande principale, les deux degrés de juridiction. (Rennes, 15 avril 1810.)

Si l'intimé prend, sous l'instance d'appel, des conclusions teudantes à obtenir une provision jusqu'à la reddition d'un compte qu'il prétend lui être dû par l'appelant, ses conclusions ne peuvent lui être adju

(1) C'est à la cour saisie de l'appel, et non pas aux juges de première instance, que l'on doit former de semblables demandes, attendu qu'elles sont incidentes à l'appel, et forment un accessoire survenu depuis le jugement de première instance. Telle a été la décision de la cour de Rennes, dans l'espèce d'une demande en provision alimentaire ayant pour objet, et la subsistance d'une femme qui avait obtenu la sépa-gées lorsqu'elles n'ont pas été établies devant les preration de corps, et celle de sa famille. (Rennes, 2 mai 1812.)

Mais la femme séparée de corps et de biens ne pourrait, sur l'appel du jugement qui a prononcé la séparation, demander, pour la première fois, que les avantages qu'elle a faits à son mari fussent déclarés comme non avenus. Cette demande, en application de l'art. 299 du Code civil, est une demande nouvelle, dont la cause remonte à une époque antérieure à l'appel, et qui, con

miers juges: il doit donc être renvoyé à se pourvoir comme il verra être bon. (Rennes, 18 mars 1809.)

Cet arrêt nous semble contraire à celui que nous venons de rapporter au numéro précédent, et nous estimons que l'on doit s'en tenir à ce dernier, parce que l'on ne peut dire que la cause de la demande en provision a pris exclusivement naissance avant l'instance d'appel, cette cause renaissant à chaque instant de retard que le compte éprouve.

n'est point, par sa nature, hors de leur juri- tème de la chambre des requêtes, il faudrait au diction, elle l'est du moins par la position moins avouer que la cour, irrégulièrement dans laquelle elle se présente. Ces tribunaux saisie d'une demande nouvelle, ou d'une den'ont pas été institués directement pour juger mande principale, ou de conclusions tendantes les contestations des parties, mais pour appre- | à l'evocation du fond, non encore en etat d'être cier le bien ou le mal jugé des juridictions du jugé, ne serait pas tenue d'y statuer; c'est la premier degré. Si done on ne leur présente décision d'un arrêt de la cour de cass. du 11 fépoint une sentence à infirmer ou à confirmer, vrier 1819 (Sirey, t. 19, p. 305; Dalloz, t. 8, on les appelle à juger une matière qui n'est p. 381), cité et approuvé par Merlin, Quest., point de leur compétence. Et. par conséquent, vo Appel, § 14, art. 1er, no 23, et Tallandier, les parties peuvent réclamer en tout etat de n° 557. C'est aussi, par analogie, la consécause contre cette privation du premier degré; quence de la solution donnée par Carré et par leur consentement même explicite ne leur en nous à la Quest. 721.] ôte pas le droit.

Il n'y a point de contradiction entre cette solution et celle de la Quest. 1654, qui admet les parties à consentir valablement une renonciation au second degré de juridiction. Car, dans ce dernier cas, les parties ne changent pas la compétence du tribunal de première instance, dont elles promettent de regarder le jugement comme la règle définitive de leurs droits. Le tribunal, après cette convention, ne jugera pas autrement qu'il ne l'eût fait si elle n'avait pas eu lieu; ce sera toujours sur le même objet et au même point de vue qu'il prononcera. L'effet que la convention attribue à la sentence est quelque chose d'etranger au pouvoir de celui qui la rend, et qui ne lui confère aucune nouvelle fonction.

Il en est autrement du consentement que donneraient les parties à être jugées pour la première fois par la cour d'appel: ici le pouvoir de cette cour est déplace; il ne devrait s'exercer que sur une cause déjà jugée en premier ressort, et on l'applique à une cause non encore examinée : c'est une violation manifeste de la competence materielle. Il y a, dans cette infraction, une atteinte à l'ordre public, comme dans l'omission de l'essai de conciliation (voy. Quest. 243, t. 1, p. 207), comme dans l'appel d'un jugement rendu sur une matière de dernier ressort (voy. Quest. 1635 bis), comme dans l'appel relevé pendant les delais de l'opposition. (V. Quest. 1636 ter.) Mais il faut convenir, toujours avec Merlin, Quest. de droit, vo Appel, 14, art. 1er, no 22 1o, que le defaut de pouvoir dont nous argumentous serait couvert par un arrêt préparatoire non attaqué ou passé en force de chose jugée, qui aurait ordonné soit de plaider sur la nouvelle demande formée en cause d'appel, soit sur le fond du procès non encore en état d'être jugé, soit sur l'action principale intentée directement devant la cour d'appel. En effet, l'autorité de la chose jugée couvre tous les vices, toutes les nuilités, tous les excès de pouvoir. Et c'est ce qui explique les arrêts de la cour de cassation des 18 août 1818 (Sirey, t. 19, p. 33; Dalloz, t. 22, p. 62) et 16 juin 1819 (Sirey, t. 20, p. 109; Dailoz, t. 18, p. 435).

Au reste, si l'on persistait à adopter le sys

1677. Si l'on peut, en certains cas, former en appel des demandes nouvelles, ne peuton pas, a plus forte raison, y faire valoir des moyens nouveaux, et étre admis a y prouver des faits que l'on n'aurait pas posés en première instance?

C'est une conséquence nécessaire de l'article 464, en ce qu'il admet les demandes nouvelles qui sont défenses à l'action principale; conséquence d'ailleurs conforme au principe in appellationibus non deducta deduci, non probala probari possunt, ainsi que nous l'avons dit sur la Quest. 1673.

Ainsi, dit Domat, Supplément au droit public, liv. IV, tit. VIII, no 6: « On peut, en » cause d'appel, faire tout ce qui peut servir » à éclairer le juge sur le principal qui a été » décidé en première instance. » La cour de Rennes a fait l'application de ce principe en décidant, par arrêts des 11 et 19 août 1817 (Dalloz, t. 27, p. 86), qu'on pouvait demander à prouver ce qu'on n'aurait point offert de prouver en première instance, si toutefois les faits ne constituent point une des demandes nouvelles que proscrit l'art. 464.

A la verite, la même cour, par arrêt du 25 août 1811, a decide le contraire, sur l'appel d'un jugement rendu par un tribunal de commerce, en se fondant sur le principe que les appellations se jugent dans l'état, et en considerant que ce serait contre le vœu de la loi, surtout en matière commerciale, que d'admettre, sur l'appel, les parties à la preuve de faits qu'elles n'auraient pas posés devant le premier juge.

Cet arrêt, qui se trouve en opposition avec les autorités citées ci-dessus, nous semble présenter tout à la fois une fausse application du principe qu'il rappelle, et qui ne s'entend en général qu'en ce sens qu'on ne peut changer l'etat de l'instance quant au fond à juger (voy. infrà sur l'art. 465), et une contravention à l'art. 464.

Nous remarquerons en outre que, puisqu'il est constant (voy. suprà, no 1675 et suiv., et cass., 12 frimaire an x; Sirey, t. 2, p. 101; Dalloz, t. 8, p. 432) que le juge d'appel peut statuer d'après des moyens nouveaux, et sur

des exceptions que le défendeur originaire n'aurait pas proposées en première instance, il s'ensuit nécessairement que la partie doit être admise à la preuve de ces moyens et de ces exceptions (1).

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stance, lorsqu'elles ne sont destinées qu'à appuyer ou repousser la mème demande. (Turin, 25 juillet 1806; cass., 25 janvier 1810; Dalloz, t. 10, p. 260; Sirey, t. 6, p. 665, et t. 10, p. 126; Paris, 3 juillet 1813; cass., 26 novembre et 23 décembre 1834; Devilleneuve, 35, 1re, p. 52; Sirey, t. 35, p. 52.)

Nous ne pouvons approuver deux arrêts de la cour de Paris, des 9 germinal et 9 floreal an XI (Sirey, t. 7, p. 889; Dalloz, t. 8, p. 438), qui ont jugé que celui qui succombe en première. instance, par jugement contradictoire sur une demande en revendication, ne peut faire réformer le jugement sur l'appel en pro justifient de son droit de propriété. La cour de cass. ne nous paraît pas avoir bien jugé non plus, le 18 fevrier 1827 (Sirey, t. 27, p. 107), en décidant que celui qui se plaint d'une contrefaçon n'est pas recevable à produire en appel un brevet d'invention dont il n'avait pas excipé en première instance.

[Tout ce que l'art. 464 a voulu interdire en cause d'appel, ce sont les demandes nouvellest. tendantes à obtenir des condamnations qui n'avaient pas été sollicitées en première instance. Mais les moyens nouveaux à l'appui des demandes ou des exceptions originaires ne sauraient être regardés comme une violation de la disposition qui nous occupe. Ce serait rendre le plus souvent illusoire la voie de réformation que la loi a voulu ménager au plai-duisant pour la première fois les titres qui deur mal jugé; car c'est d'ordinaire pour suppléer aux omissions, soit des juges, soit des parties, que l'appel est utile. On pourra donc, pour justifier de plus en plus une demande qu'on avait d'abord mal ou imparfaite ment soutenue, proposer des moyens jusqu'alors négligés; moyens de droit, moyens de fait; moyens que le juge de première instance aurait pu suppléer dans le silence des parties, moyens qu'il lui était défendu de prendre d'office en considération; moyens consistant dans l'invocation d'un nouveau texte de loi, ou dans la production de nouvelles pièces; moyens tendants à établir des faits nouveaux, à se procurer de nouvelles voies d'instruction, enquêtes, expertises, vérification d'écritures, etc., etc.

En général, comme nous l'avons dit sur la Quest. 1674, il n'est pas permis au demandeur de changer le dispositif de ses conclusions au fond, mais il peut en modifier les motifs.

Tels sont les principes unanimement reconnus par tous les auteurs, et notamment par Merlin, Quest., vo Appel, § 14, art. 1er et 12, l. 7, p. 326; Pigeau. Proc. civ., liv. II, part. 4, tit. fer, chap. 1er, sect. 5, § 11, no 5. et Comm., t. 2, p. 43; Favard, t. 1, p. 183, n°6; Thomine, no 514; Bʊitard, sur l'art. 464, et Talandier, no 352, et consacres in terminis par la cour de cassation, le 14 octobre 1806 (Sirey, t. 6, p. 4135), et par la cour de Brux., le 18 avril 1827.

En voici maintenant plusieurs applications. 1o On peut, en appel, produire des pièces dont on n'avait pas fait usage en première in

2o On peut demander une vérification d'écriture, alléguer de nouveaux faits, en offrir la preuve, etc. (Paris, 8 avril 1811; Rennes, 28 février 1824; Poitiers, 18 février 1825 (Sirey, t. 27, p. 261); cass., 21 juillet 1820, 10 janvier 1823, 3 juillet 1828. V. notre Quest. 1136.) (2).

|
Un arrêt de la cour d'Aix, du 16 juillet 1825,
est néanmoins contraire à ces décisions, puis-
qu'il refuse à l'assureur qui n'a pas, devant les
premiers juges, demandé un delai pour faire
la preuve contraire aux attestations de perte
produites par l'assuré, le droit de le réclamer,
sur l'appel, malgré le bénéfice de l'art. 584,
C. comm.

3o On peut attaquer les actes par des moyens différents de ceux qu'on avait d'abord proposés, pourvu que le résultat à obtenir soit le même; ainsi, par la voie de l'inscription de faux, après s'être servi de moyens qui touchaient au fond. (Paris, 30 août 1810; Sirey, t. 14, p. 319. — V. la Quest. 863.) Cette voie peut êire employée, par exemple, contre un testament, qu'en appel on avait attaqué pour cause d'imbécillité du testateur. (Montpellier, 28 février 1810; Sirey, t. 14, p. 591; Dalloz, t. 8, p. 433.) Nous croyons mème, malgré un arrêt contraire de la cour de Brux., du 12 janvier 1826, et conformément à l'opinion de

(1) Nous ne dissimulons pas que l'on peut citer quelques arrêts de cours d'appel, qui sembleraient contrarier notre opinion; mais il nous semble inutile de les discuter (voy. Code de procédure annoté, art. 464), 30:1 parce qu'ils sont rendus dans des espèces où il y avait eu, en première instance, renonciation expresse ou tacite aux exceptions qu'ils out rejetées, soit parce que nous croyons en avoir suffisamment démontré le peu de fondement, en démontrant la règle générale à laquelle ils sont opposés, et qui d'ailleurs a été consa

crée de la manière la plus formelle par un arrêt de la cour de cassation du 25 juin 1817, en ce qu'il décide qu'en cause d'appel on peut alléguer un fait qui n'a point été présenté en première instance, lorsque ce fait constitue seulement un moyen nouveau à l'appui de la demande principale. (Sirey, t. 18, 1re, p. 13.)

(2) [* On peut, en degré d'appel, être admis à prouver de nouveaux tats de dol et de fraude, non articulés en première instance. (Brux., 14 août 1833 ; J. de B., 1834, p. 108.)]

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