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trement que par les simples actes dont | raient, par ce motif, le droit de former une parle l'art. 465, seraient-elles nulles? tierce opposition au jugement qui aurait été rendu.

L'art. 465 n'a évidemment pour but que d'inCette disposition est fondée en principe; terdire les actes inutiles, les frais frustratoi- car, à cette exception près, l'appel ne doit res. Il ne prononce point la peine de nullité avoir pour objet que la contestation jugée, et contre les conclusions auxquelles on aurait elle réunit le double avantage d'éloigner de la donné un plus grand développement. Si donc cause toute personne qui n'y viendrait que un acte plus étendu que celui dont il parle pour en prolonger et compliquer la discusétait signifié, tout ce qui résulterait de la pro- sion, et d'épargner aux parties les longueurs hibition, c'est que cet acte ne passerait point et les frais que leur causerait un nouveau proen taxe. Encore moins les conclusions seraient-cès sur la tierce opposition. elles nulles, si elles étaient simplement orales,

disposition restrictive de l'art. 466?

ou remises au greffier sans formalité; pourvu | [1679 ter. N'est-il aucune exception à la qu'il constat de leur existence, ces conclusions et le jugement qui y statuerait seraient parfaitement valables, comme l'a jugé un arrêt de la cour de cass. du 1er sept. 1813 (Sirey, t. 14, p. 67; Dalloz, t. 8, p. 440).]

ART. 466. Aucune intervention ne sera

reçue, si ce n'est de la part de ceux qui auraient droit de former tierce opposition.

C. proc., art. 339, 340. 474, 475. 722. C. civ., art. 882, 1166 et suiv., 1417. - [Devilleneuve, vo Intervention, nos 1 à 8, 11 à 27.-Carré, Compétence, 2o part., liv. II. tit. IV, art. 286. Quest. 327. Locr, t. 9, p. 333, no 14; p. 352, no 11; p. 369, no 21; p. 383, no 17 (1).]

CCCLXXXVII. La disposition de l'art. 466 ne se trouvait textuellement établie dans aucune loi antérieure au Code, et elle était essentielle pour prévenir l'abus que la chicane, si féconde en ressources, avait introduit en faisant, pour retarder le jugement ou accroître les émoluments, intervenir dans l'instance d'appel de nouvelles parties, ou en empruntant leur nom pour former d'officieuses interventions; ce qui entraînait des incidents et des délais à la faveur desquels on gagnait du temps. (V. Demian, p. 331.) Notre article prévient à jamais cet abus, en disposant qu'aucune intervention ne sera reçue, si ce n'est de la part de ceux qui, n'ayant point été appelés comme parties devant les premiers juges, au

Sous l'art. 359, nous n'avons exigé, de la part de celui qui veut intervenir en première instance, d'autre condition que d'avoir un intérêt, de quelque nature qu'il soit, à la contestation qui s'agite. Et nous nous sommes fondé sur ce que la loi n'en exige pas d'autre

en effet.

En appel l'art. 466 offre une disposition toute différente. Le simple intérêt n'est plus la seule condition à remplir de la part de celui qui veut intervenir dans l'instance; il faut enéventuellement la voie de la tierce opposition. core que cet intérêt soit de nature à lui ouvrir Il faut donc que le procès qui s'agite puisse donner lieu à une décision dont les effets lui porteraient un préjudice qui serait directement exécutoire contre lui, quoiqu'il n'y eût pas été partie.

On voit que, pour l'intervention en cause d'appel, la loi est aussi formelle qu'elle était muette pour l'intervention en première instance. Nous ne croyons pas qu'on puisse se dispenser d'appliquer sa disposition, quelque précieux, quelque identique avec celui des parties principales, que soit l'intérêt de l'intervenant, s'il ne va pas jusqu'à lui donner le droit de former tierce opposition. (Voy. la Quest. 1680 bis.)

Mais n'oublions pas qu'il s'agit uniquement ici de l'intervention en cause d'appel.

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[1o Le maire d'une commune a le droit d'intervenir, en sa qualité d'administrateur de l'octroi, sur l'appel d'un jugement correctionnel prononçant l'annulation d'une saisie qui a eu lieu à la requête des préposés de cette administration. (Cass., 18 juillet 1817; Dalloz, t. 2, p. 197.) Il y est intéressé, puisque l'octroi a droit aussi bien que la régie à une part des dommages.

20 L'intervention de la régie peut avoir lieu, en tout érat de cause, même sur l'appel, dans une contestation concernant le recouvrement des deniers d'une succession vacante et leur versement dans la caisse du domaine. (Cass., 6 juin 1809.)

3o La partie lésée par des dégâts commis par les habitants d'une commune peut intervenir sur l'appel de l'instance introduite pour ces dégâts par le ministère public, et, en cas de confirmation, peut suivre l'exé

cution du jugement rendu en première instance à son profit, quoiqu'elle n'y ait point figuré. (Cass., 4 juillet 1834.)

40 L'associé n'est pas recevable à intervenir sur l'appel d'un jugement rendu contre son associé seul gérant de la société, attendu que l'associé n'aurait pas le droit de former tierce opposition. (Bordeaux. 9 janv. 1826.) Il est clair que l'associé était représenté dans l'instance par le gérant de la société.

50 Lorsque des intervenants constituent le même avoué que l'intéressé, quoique leurs conclusions soient contraires à la prétention de celui-ci, la procédure est irrégulière et l'intervention non recevable. (Grenoble, 29 janv. 1856.)

60 Une femme séparée de biens n'a pas qualité pour proposer une fin de non-recevoir sur un appel relevé seulement contre son mari. (Rennes, 12 déc. 1817.)]

LIVRE III. Pourrait-on donner ce nom à celle qui serait fondée sur l'intérêt né, pour l'intervenant, d'une demande nouvelle, légalement formée en appel par l'une des parties en cause?

Si l'art. 466 restreint à un cas bien déterminé le droit d'intervenir en appel, n'est-ce point comme sanction de la disposition prohibitive des demandes nouvelles ? N'est-ce point pour qu'un tiers, étranger au procès, ne puisse pas venir en changer la face et les errements, selon sa volonté ou son caprice?

Mais si son intérêt se rattache à une de ces demandes nouvelles qui sont autorisées par exception, il ne violera, en donnant ses conclusions sur cette demande, ni directement ni indirectement l'art. 464. D'un autre côté, il ne sera pas lui-même l'auteur du changement opéré dans la cause, puisque ce changement sera du aux nouvelles conclusions d'une des parties qui y figuraient déjà.

Enfin, l'intervention sur une demande nouvelle ne peut être regardée comme intervention en appel. Car, sur cette demande nouvelle, il n'y a pas d'appel; c'est en première instance que la cour se trouve appelée à la juger. Il semble donc que le cas que nous signalons soit en dehors du texte comme de l'esprit de l'art. 466.

sans qu'il soit nécessaire de réclamer contre le jugement des premiers juges.

Il suffit donc, pour qu'une partie puisse intervenir sur l'appel, qu'elle ait droit de former tierce opposition, soit au jugement de première instance, soit à l'arrêt d'appel.

[L'interprétation donnée par la cour de Turin à l'art. 466 a été aussi consacrée par la cour de Toulouse, le 18 juillet 1827. Elle est d'ailleurs adoptée par tous les auteurs, et notamment par Merlin, Rép., vo Intervention, § 1er, no 3 bis ; et Favard, t. 3, p. 118.

Un arrêt de la cour de Rennes du 12 janv. 1811 (Dalloz, t. 18, p. 180), et un autre de la cour de Limoges, du 23 avril 1832, semblent néanmoins y être contraires, en ce qu'ils expriment qu'on ne peut intervenir dans une instance d'appel, lorsque le jugement attaqué ne porte aucun préjudice à l'intervenant. Mais nous croyons que ces arrêts n'ont pas eu pour objet de décider la question qui nous occupe; qu'ils n'ont été rendus que pour consacrer la nécessité du droit de tierce opposition en général pour pouvoir intervenir, sans établir aucune distinction entre la tierce opposition au jugement, et la tierce opposition à l'arrêt. On ne peut donc rien en conclure contre la solution de Carré, que nous adoptons.]

venir sur l'appel n'avait a défendre que des droits identiquement semblables aux droits de l'une des parties en cause, et fondés sur un titre commun, en sorte qu'elle dût se contenter d'adhérer à ses conclusions, devrait-on admettre cette intervention ?

Que, lorsqu'une cause a été d'abord débat-[1680 bis. Si la partie qui demande à intertue devant les premiers juges, l'on punisse la négligence de celui qui n'a pas profité, lorsqu'il y avait intérêt, du droit d'intervention dont il pouvait user en première instance, nous le concevons. Mais si l'état où se trouvait la cause n'avait pas encore fait naître cet intérêt, s'il a surgi de nouvelles difficultés élevées sur l'appel, on ne peut lui faire aucun reproche de ne s'être pas présenté plus tôt; on ne peut l'accuser non plus de changer, de son propre chef, l'état d'une cause dejà fixée. 11 profite seulement des modifications que la cause subit sans sa participation et sans son fait. (Voy., sous la Quest. 1681 ter, une application de ces principes.)]

1680. Suffit-il, pour qu'une partie soit admise a intervenir en cause d'appel, qu'elle ait droit de former tierce opposi tion à l'arrêt d'appel, sans qu'il soit nécessaire qu'elle attaque le jugement de première instance?

L'affirmative a été jugée, sous la loi du 3 brum. an II, par la cour de cass., le 20 therm. an XIII (Sirey, t. 10, p. 484; Dalloz, t. 18, p. 187). Cette loi n'avait pas une disposition semblable à celle de l'art. 466 du C. proc. civ.; elle ne réservait donc pas l'intervention en cause d'appel aux seules parties qui auraient eu le droit de former tierce opposition. La prohibition des nouvelles demandes, devant le second degré de juridiction, était alors la seule disposition légale qui put sembler faire obstacle à la solution affirmative de la question proposée; mais, dans l'espèce, le doute ne pouvait pas être sérieux, puisqu'il s'agissait d'une La cour d'appel de Turin a jugé cette ques- demande identique, fondee sur le même titre, tion pour l'affirmative, par un arrêt du 19 août et seulement formée par une nouvelle partie 1807, rapporté par Sirey, t. 9, p. 118, et Dalloz, qui venait adhérer aux conclusions de celle qui t. 18. p. 188. Elle a considéré que l'art. 466 avait figuré en première instance. Voilà par ne faisait aucune distinction entre la tierce op-quels motifs l'arrêt que nous rapportons déposition qui peut être formée contre le jugement de première instance, et celle qui pourrait avoir lieu contre l'arrêt à prononcer sur l'appel; d'où il suit qu'il suffit d'avoir le droit de former opposition à cet arrêt, pour avoir celui d'ètre intervenant en l'instance d'appel,

clara admissible en cause d'appel l'interven tion d'une personne qui n'aurait pas eu le droit de former tierce opposition.

En serait-il de même aujourd'hui en présence de l'art. 466?

Ainsi un testament est attaqué de nullité

par quelques-uns seulement des cohéritiers. naturels ; ils sont démis de leurs prétentions en première instance. Ce jugement, ni l'arrêt qui sera rendu sur l'appel, ne sont pas de nature à préjudicier aux droits des autres cohéritiers, qui pourront toujours intenter à leur tour une action en ce qui les concerne, et qui n'auraient pas, par conséquent, le droit de former tierce opposition. Leur accordera-t-on néanmoins celui d'intervenir en appel, sous prétexte que, leurs prétentions n'étant pas différentes de celles qu'élèvent déjà les parties en cause, ces prétentions étant fondées sur un titre commun, et ne donnant lieu qu'à des conclusions absolument semblables, ce serait rentrer dans l'esprit de la loi que d'autoriser une intervention au moyen de laquelle serait évitée une nouvelle instance qui ne pourrait manquer de recevoir la mème solution que la première ?

Nous ne croyons pas que l'on doive adopter ce système.

Si, pour l'intervention en première instance, nous n'exigeons d'autre condition qu'un intérêt quelconque de la part de l'intervenant (roy. nos questions sous l'art. 559), c'est que la loi n'en trace non plus aucune dans ses dispositions. Mais le mème silence n'a pas lieu pour l'intervention en appel; ici, une condition formelle se trouve imposée par l'art. 466 à celui qui veut intervenir, c'est le droit de former tierce opposition à l'arrêt qui serait rendu hors de sa présence. Et, cet article étant formel, et ne laissant apercevoir aucune limite à l'étendue de son application, il nous semble impossible d'admettre l'exception dont on parle, quelque favorable qu'elle puisse être.

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Enfin, le 28 janvier 1858, la cour de cassation a déclaré légitimement admise une intervention formée dans des circonstances semblables, en se fondant aussi sur ce que la communauté d'intérêt entre les parties aurait donné à celles qui n'étaient pas en cause le droit de former tierce opposition, lequel emporte celui d'intervenir sur l'appel.

On voit que ces arrêts, loin de vouloir faire une exception à la règle de l'art. 466, ont entendu en faire une véritable application; ils donnent exclusivement pour principe au droit d'intervenir sur l'appel, celui de former tierce opposition; sous ce rapport donc, ils confirment notre doctrine.

Mais est-il vrai que, dans les espèces jugées, le droit de tierce opposition existât?

élé

Depuis quand est-ce un simple préjugé qui fait naître ce droit? Ne faut-il pas un préjudice imminent, résultant de la chose qui jugée, et qui expose celui qui n'a pas été partie au jugement à le voir exécuter contre lui? Un préjudice qui ne puisse être réparé que par la rétractation du jugement? Rien de tout cela n'existait et ne pouvait exister dans l'espèce.

Car, de deux choses l'une ou les consorts étaient liés par la solidarité ou l'indivisibilité, et, dans ce cas, le jugement étant censé rendu contre tous (voy. la Quest. 1565), c'est la voie simple et directe de l'appel qu'ils pouvaient et devaient prendre : ou bien il n'y avait ni solidarité, ni indivisibilité, et alors le jugement rendu contre l'un d'eux ne pouvait pas être exécuté contre les autres; une instance séparée devait être dirigée contre eux, instance dans laquelle leurs moyens de défense demeuraient entiers, et pouvaient leur faire obtenir gain de cause sans qu'il fût besoin de rétracter en rien le jugement de condamnation prononcé contre le premier. Ce jugement ne leur faisait donc point grief, ne leur préjudiciait point; il s'ensuit qu'ils ne pouvaient y former tierce opposition, et, par suite, qu'ils étaient inadmissibles à intervenir sur l'appel que la partie condamnée en avait relevé.]

ter. Un créancier peut-il, en cette qualité, intervenir dans l'instance d'appel où son débiteur est partie? L'intervenant en première instance peut-il renouveler son intervention en appel?

Il est vrai que deux arrêts plus récents de la cour de cassation paraissent avoir adopté la jurisprudence de celui que nous avons déjà cité. Le premier, sous la date du 6 avril 1850 (Sirey, t. 30, p. 412), a été rendu dans une espèce où, plusieurs individus étant devenus propriétaires d'un fonds soumis à une rente, et un seul d'entre eux ayant été actionné en payement devant le tribunal de première instance, tous les consorts intervinrent sur l'ap-[1680 pel pour résister conjointement avec lui. La cour de Colmar admit leur intervention, par le motif « que la demande originaire était fondée sur des titres communs à tous les redevables, d'où il résultait que la chose jugée avec le défendeur originaire serait nécessairement un préjugé contre les détenteurs des autres biens grevés; que la chose jugée avec le défendeur originaire, en vertu des titres communs aux intervenants, donnerait à ces derniers le droit à une tierce opposition éventuelle à la chose préjugée contre eux sous les mêmes titres. Le pourvoi contre cette décision fut rejeté par l'arrêt que nous venons d'indiquer et qu'approuve Talandier, no 286.

CARRÉ, PROCÉDURE CIVILE. TOME IV.

Tout créancier peut exercer les droits de son débiteur, parce qu'il est intéressé à ce que ces droits, qui sont le gage de sa créance, ne s'évanouissent point. Il peut aussi attaquer les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, parce que, par de tels actes, le débiteur sépare ses intérêts de ceux de son créancier. Il peut enfin, comme nous l'avons dit sous l'art. 559, Quest. 1270 bis, intervenir toujours, en première instance, dans les procès que soutient son débiteur, parce que, à ce

genre d'intervention, la loi ne trace aucune règle, n'impose aucune condition.

Mais en peut-il être de même de l'intervention en appel? Non. sans doute; car ici il est une condition préalable à remplir il faut, pour être admissible à cette intervention, avoir le droit de former tierce opposition.

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par les cours de Grenoble, le 18 avril 1828; de Bourges, le 28 fév. 1829; de Lyon, le 18 juin 1836; mais les vrais principes nous paraissent avoir été consacrés par les arrêts de la cour de Poitiers des 6 mars et 4 juin 1828, et par celui de la cour d'Aix, en date du 24 fév. 1825.

Ce n'est pas que l'intervention ne doive être Or, le créancier peut-il, par voie de tierce reçue lorsqu'elle est fondée précisément sur opposition, attaquer un jugement rendu con- le défaut de présence de l'intervenant en pretre son débiteur, sous prétexte que la condam-mière instance, quoique, par fraude, son nom nation qui frappe celui-ci retombe sur sa eût été inséré aux qualités du jugement (1). tête? Il ne le peut pas; en effet, le créancier Un arrêt de la cour de Rennes du 13 fév. 1818 qui se plaint, s'il n'a pas été personnellement en offre un exemple. Cette cour a considéré partie dans l'instance, y était du moins repré-que, refuser l'intervention, ce serait se faire senté par son débiteur, qui y exerçait identi- contre la partie un moyen de la nullité et de la quement les mêmes droits que ce créancier fraude même dont elle se plaindrait. serait venu y soutenir lui-même; la chose ju- Carré, à sa note Jurisprudence, accompagée avec l'un est donc jugée avec l'autre, à gnait cet arrêt des réflexions suivantes : moins d'un cas de fraude ou de collusion entre le débiteur et sa partie adverse. Il n'y a donc pas lieu à tierce opposition, ni. par conséquent, à intervention sur l'appel, tant que cette fraude ou cette collusion n'est pas prouvée.

La loi a bien pu se montrer indulgente envers le créancier, et n'exiger de lui qu'un intérêt quelconque, pour lui permettre d'intervenir dans une instance naissante, dont il ne pouvait ni retarder la marche, ni compliquer les résultats. Mais lorsque déjà un jugement a été rendu, lorsque les positions respectives des parties se trouvent ainsi fixées, lorsqu'il s'agit de statuer sur l'appel de ce jugement, elle a dû se montrer plus difficile, et elle l'a fait. Il faut que le créancier laisse terminer, sur les mêmes errements, un procès qu'il n'a pas été assez diligent pour s'approprier dès l'origine, à moins que, les suites de l'arrêt devant retomber sur sa tête, cette circonstance ne soit de nature à lui ouvrir éventuellement la voie de la tierce opposition.

C'est ainsi que l'ont jugé les cours de Rennes, 21 juin 1817 (Dalloz, t. 18, p. 181); de Limoges, 21 mai 1823 (Dalloz. t. 18. p. 200); de Bordeaux, 29 mars et 2 mai 1828 (Sirey, 1. 30. p. 75), et 27 oct. 1850; d'Orléans, 5 mars 1823 (Dalloz, t. 18. p. 181), et la cour de cassation, le 8 déc. 1825.

Encore moins le créancier, qui serait intervenu en première instance, comme il en a toujours le droit, pourrait-il se rendre partie sur l'appel par une simple intervention. Le jugement rendu en premier ressort lui étant commun, il n'a pour l'attaquer que les voies ouvertes aux autres parties, c'est-à-dire l'appel. Et comme l'appel de ceux qui ont été condamnés avec lui ne saurait lui profiter (roy. la Quest. 1565), s'il laisse lui-même écouler le délai, le jugement acquiert à son égard la force de la chose jugée. Il n'a plus le droit de former tierce opposition, puisqu'il a été appelé dans l'instance; il ne peut donc intervenir sur l'appel. Le contraire a néanmoins été jugé

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« Cet arrêt a été rendu dans l'espèce où une femme séparée avait été mise, conjointement avec son mari, aux qualités, tant en première instance qu'en appel. On opposait qu'elle ne pouvait être distraite de ces instances pour demander, par voie d'intervention, la nullité des procédures, sans avoir préalablement fait juger le désaveu de ceux qui avaient agi pour elle, et qui avaient notifié l'appel, tant au nom de son mari qu'au sien propre. La cour a considéré que le désaven n'était nécessaire que lorsqu'il existait un mandat exprès ou tacite, et qu'ainsi lorsqu'il n'en existait ni de l'une ni de l'autre de ces espèces, les suites faites au nom de la partie réclamante étaient nulles. [V. cependant nos observations sur la Question 1501.] Et, en effet, on ne pouvait ici considérer comme opérant mandat tacite, la remise à l'avoué de première instance d'un exploit notifié au mari et à la femme conjointement, puisqu'ils devaient être assignés par acte séparé. [Voy. suprà, la Question 348 bis.] D'un autre côté l'appel, pour être valablement interjeté au nom de la femme, devait être revětu de son autorisation, par signature ou par procuration spéciale. Telles furent les raisons pour lesquelles la cour l'admit à intervenir, en la distrayant de l'instance, sous les qualités dans lesquelles on l'y faisait figurer. »

Au reste, la prohibition faite au créancier d'intervenir sur l'appel que relève son débiteur ne lui ôte pas le droit d'interjeter luimême cet appel quand son débiteur le néglige, ainsi que nous l'avons dit sous l'art. 445, et que cela résulte de l'art. 1166 du Code civil. Car si cette prohibition est fondée sur ce que le débiteur en cause représente son créancier, elle doit cesser dans le cas où, le débiteur n'agissant point, cette representation n'a pas lieu. Il est, par le même motif, des circonstances

(1) [On sent que, dans ce cas, la voie de la tierce opposition a lieu.]

dans lesquelles l'intervention en appel est per- | un jour former tierce opposition au jugement mise au créancier : de séparation de biens de son débiteur, et, par une conséquence nécessaire, elle a jugé qu'il devait être reçu intervenant dans l'instance d'appel relative à cette séparation (2).

1° En matière de faillite, parce que, chaque créancier ayant des intérêts distincts et opposés, le débiteur ne les représente point (cass., 14 mars 1810; Sirey, t. 10. p. 219; Dalloz, t. 15, p. 216, et 7 avril 1819; Colmar, 7 fév. 1829, et Brux., 12 août 1856);

2o Lorsqu'il y a dol ou fraude, d'après la restriction ci-dessus apportée à notre principe (Grenoble, 22 déc. 1815 et 21 avril 1818; Dalloz, t. 18, p. 182); le créancier peut alors intervenir pour la conservation de ses droits, ou plutôt assister dans la cause à ses frais, ou même, en certains cas, se faire subroger à son débiteur, et devenir alors partie principale en la cause (cass., 10 août 1823; Sirey, t. 26, 1re, t.6, Grenoble, 7 janv. 1831; Devilleneuve, 1. 32 26, p. 18);

[Sur le droit du créancier d'intervenir dans l'instance d'appel où son débiteur est partie, nous nous en référons à ce qui vient d'être dit sous la Quest. 1680 ter. Et, supposant que le créancier du mari se trouve dans les conditions nécessaires pour avoir ce droit, nous n'examinerons ici que la question de savoir si l'éventualité de sa créance y mettrait obstacle. Déjà, sous la Quest. 1270, à la fin de nos observations, nous avons fait connaître l'opinion, à peu près universelle, des auteurs, qui accorde la faculté d'intervenir à la partie qui n'a dans l'objet du procès qu'un intérêt éventuel. Poncet, Traité des actions, no 144, et 5o Dans les difficultés qui s'élèvent sur les Pigeau, Comment., t. 1, p. 599, professent la poursuites de saisie immobilière et d'ordre, même doctrine, qu'ils appliquent, comme les où ce sont plutôt les droits des créanciers entre autres, à l'intervention en première instance. eux, que ceux du débiteur qui s'agitent (Ren- Nul motif pour ne pas l'appliquer aussi à nes, 29 août 1814; Bordeaux, 6 avril 1838) (1); l'intervention en cause d'appel; pourvu que le 4o Dans une instance en radiation d'hypo-jugement ou l'arrêt soit de nature à préjudithèque, l'intervention en cause d'appel est permise à un autre créancier hypothécaire, elle lui sert à conserver ses droits particuliers. (Nancy, 18 déc. 1826.)

Cette doctrine est professée par Talandier, nos 283 et 298, 8°.]

1681. Celui qui n'est pas créancier ACTUEL DU MARI, mais qui a contre lui des droits ÉVENTUELS, auxquels la séparation de biens, demandée sans fraude par la femme, pourrait porter préjudice, a-t-il le droit d'intervenir, quoique le mari défende lui

même à cette demande?

On pourrait dire, pour la négative, que l'article 1447, C. civ., semble n'autoriser un tiers à intervenir dans une instance en séparation de biens, qu'autant qu'il est créancier actuel du mari; qu'aux termes du même article, c'est dans le cas seulement où la séparation serait provoquée en fraude des droits des tiers intéressés, que leur intervention pourrait être admise, et que cette fraude n'est pas présumable, quand le mari s'oppose lui-même à la séparation.

Mais la cour de cass., par arrêt du 28 juin 1810 (Sirey, t. 11, p. 28), vu la généralité des termes des art. 466 et 474, a considéré qu'un créancier, même éventuel, a le droit de pouvoir

(1) [Mais voy., au titre de la Saisie immobilière, les changements apportés à ce principe par les dispositions de l'art. 715 de la nouvelle loi.]

(2) C'est ainsi encore que la même cour a jugé, par arrêt du 27 mars 1822, que l'enfant du premier lit peut intervenir dans une instance introduite par sa mère remariée, et tendante à obtenir la réduction des

cier, par lui-même, à ces droits éventuels; car c'est là une condition indispensable pour que la tierce opposition soit admise, par conséquent aussi l'intervention sur l'appel. En un mot, il faut que le jugement ou l'arrêt contienne une disposition dont l'intervenant puisse avoir tôt ou tard à se plaindre, directement et l'intervention puisse n'être qu'éventuel, il faut personnellement. Quoique le droit qui légitime soit fondé sur une disposition actuellement que le préjudice qui pourra atteindre ce droit existante et certaine. Voilà pourquoi la cour de Bourges a eu raison de décider, le 7 déc. 1825, qu'il n'y avait pas lieu à accueillir l'intervention d'un propriétaire, dans le procès pendant entre deux de ses voisins pour une servitude de passage, sous prétexte que, si le passage était refusé à celui qui le réclamait, il pourrait, se trouvant enclavé, en réclamer un sur la propriété de l'intervenant.

Il est bien clair que le préjudice redouté par cet intervenant ne serait pas résulté contre lui de l'arrêt qui aurait terminé le procès principal, en refusant le passage demandé; car cet arrêt n'aurait rien statué, directement ni indirectement, sur la demande ultérieure d'un nouveau passage; il n'en serait même résulté aucun préjudice, ni contre lui, ni en sa faveur. C'eût été une tout autre contestation à débattre, et dans

avantages indirects faits par elle à son second époux, bien que le droit de l'enfant à la réduction soit éventuel et subordonné au décès de l'époux donateur. (Sirey, t. 22, p. 342.)

[Cet arrêt et le principe dont il dérive sont approuvés par Favard, t. 1, p. 186, no 8, et Talandier, no 287.]

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