Page images
PDF
EPUB

laquelle chacun aurait eu à défendre des droits jusqu'alors étrangers aux luttes judiciaires. La cour de Limoges a rendu, le 23 avril 1822 (voy. Talandier, no 285), un arrêt analogue à celui de la cour de Bourges.

Ainsi, la tierce opposition n'eût pas été admise: l'intervention ne devait pas l'être.] [1681 bis. Le cédant peut-il intervenir, en cause d'appel, sur la contestation soutenue par le cessionnaire sur la créance cédée, et réciproquement? Le garant le peut-il, dans le procès à raison duquel il doit la garantie?

cle 466 conduit à une conséquence contraire.

Nous pensons donc, malgré les arrêts précités, que l'intervention, en cause d'appel, n'est pas permise au cédant.

Quant au cessionnaire, le droit d'intervenir en appel sur la contestation soutenue par son cédant lui est reconnu encore par Talandier, no 298, et par deux arrêts, l'un de la cour de Brux., du 10 juin 1819 (Pasicrisie, à cette date); l'autre de la cour de Bordeaux, du 31 mai 1831.

Nous préférons l'opinion contraire, avec la qu'il soit vrai de dire que le jugement ou l'arcour de Poitiers, 5 juillet 1826. En effet, quoirêt rendu avec le cédant puisse porter préjudice au cessionnaire, et qu'ainsi l'une des deux conditions de la tierce opposition se rencontre dans l'espèce; l'autre, qui consiste à n'avoir pas assisté dans la cause, ni par soi, ni par ses représentants, n'existe certainement pas; car on ne peut contester qu'à moins d'un cas de fraude le cessionnaire ne soit valablement et légitimement représenté par son cédant.]

La première et la dernière de ces trois questions se confondent en une seule, puisque le cédant ne peut avoir intérêt au procès soutenu par son cessionnaire qu'à raison de la garantie qu'il lui aurait promise. Les cours de Rennes, le 27 avril 1818, et de Colmar, les 14 mars 1856 et 12 mars 1858, lui accordent le droit d'intervenir sur l'appel, en faisant dériver ce droit du préjudice que la condamnation du cessionnaire causerait au cédant en le soumet-[1681 ter. Un préjudice moral, à encourir

tant à la garantie, préjudice qui donnerait naissance à la faculté de tierce opposition. Talandier, no 298, se prononce dans le même sens.

Mais Pigeau, Proc. civ., liv. II, part. 4, tit. Ier,. chap. 1er, art. 11, no 8, et Comm., t. 2, p. 45, fait observer, avec raison, selon nous, que ce préjudice n'existe pas; car, lorsque le cédant sera attaqué en garantie par le cessionnaire, il prouvera à celui-ci qu'il s'est mal défendu sur l'instance principale, et sera dès lors à l'abri du recours (art. 1640, C. civ.), ou bien il sera forcé d'avouer que la condamnation ne pouvait pas être évitée, et qu'elle ne lui préjudicie pas davantage que s'il y avait été partie. Ici reviennent les principes que nous avons développés, en matière de garantie, sous la Quest. 1581 quater.

par suite du jugement ou de l'arrét, serait-il suffisant pour donner le droit d'intervenir sur l'appel? Quid du tiers qui se prétend injurié par des mémoires?

Déjà, sous la Quest. 1270, nous avons cité plusieurs arrêts qui décident qu'un intérêt d'honneur, celui, par exemple, du notaire dont l'acte est argué de faux, peut autoriser une intervention en première instance.

Elle a été admise, en cause d'appel, dans des espèces toutes semblables, par les arrêts des cours de Nimes, 6 mars 1822 (Dalloz, t. 16, p. 21) et 11 juillet 1827 (Sirey, t. 28, p. 76), et de Bordeaux, 28 août 1827 (Sirey, t. 28, 2, p. 76). Talandier, no 288, approuve ces dernières décisions.

Cependant une distinction nous paraît néLa cour de Toulouse a aussi jugé, le 9 mai cessaire. Si l'acte a été déclaré faux par le ju1820 (Dalloz, t. 18, p. 198), que la demande gement dont est appel, sans que le notaire soit en intervention, en ce qui concerne le garant, intervenu en première instance, il nous semble doit subir deux degrés de juridiction, et ne que son intervention sur l'appel n'est pas repeut être portée de plano devant les juges cevable; car ce jugement ne nous paraît pas d'appel, qu'autant que la cause de la garantie susceptible d'être attaqué par lui, par la voie serait postérieure au jugement de première in- de la tierce opposition. Il ne lui porte pas un stance; si elle existe avant, elle doit être rejetée. préjudice direct, qui puisse être exécuté conL'art. 460 du projet du Code de procédure tre lui, qui ne soit réparable que par la rétracportait : « aucune intervention ne sera reçue, tation du jugement. Il consacre tout au plus si ce n'est de la part de celui qui voudra pren- un préjugé, mais qui ne tire pas à conséquence dre le fait et cause d'une partie principale. pour l'action dont le notaire pourra être l'obComme on le voit, il résultait de cette pre-jet. (V. Quest. 945.) Le notaire a donc bien, à mière rédaction que le garant pouvait interve-la réformation du jugement, un certain intenir en cause d'appel, quoiqu'il n'eût pas figurérêt, mais cet intérêt n'est pas de nature à lui en première instance; mais l'article fut changé, ouvrir la voie de la tierce opposition, ni, par et la disposition nouvelle qu'on lit dans l'arti- conséquent, celle de l'intervention en appel (1).

[ocr errors]

(1) [En vertu de ces principes, le 21 décembre 1840, la cour de Paris a jugé irrecevable l'intervention en

cause d'appel, de la part d'un notaire dont la conduite avait été blâmée dans les motifs du jugement entre

Mais si c'est sur l'appel seulement que la I qui comparaissait pour le compte du véritable pièce est arguée de faux, comme dans l'espèce propriétaire de l'effet de commerce. de l'arrêt de Nimes, 6 mars 1822, si l'intérêt du notaire ne commence qu'en vertu de cette demande nouvelle, autorisée par l'art. 464, comme exception à la demande principale, ici | vient l'application des principes que nous avons poses sous la Quest. 1679 ter. Son intervention, dans ces circonstances, devra être considérée comme une intervention en première instance; et l'absence du droit de tierce opposition ne la rendra pas irrecevable. Le simple intérêt lésé ou compromis suffira pour l'autoriser.

Nous raisonnerons de même, à l'égard du tiers qui se prétend injurié par des mémoires signifiés, dans une cause où il n'est pas partie, et auquel nous avons accordé, sous les modifications de la loi de 1819, le droit d'intervenir en première instance. (V. notre Quest. 1270 quater.)

Si les injures dont il se plaint ont été produites en première instance, il ne pourra pas en demander, pour la première fois, la réparation, en cause d'appel; car il n'éprouve aucun préjudice, même dans son honneur, d'un jugement ou d'un arrêt qui statue uniquement sur l'objet de la contestation à laquelle il est étranger. Quel moyen aurait-il d'y former tierce opposition? Absolument aucun; car il n'aurait aucun grief à lui imputer. L'intervention en cause d'appel ne lui est donc pas permise, et c'est ce qu'a jugé la cour de Grenoble le 5 août 1815.

Mais, si les injures n'ont été produites qu'en appel, l'intérêt ne commençant qu'alors pour celui qui en est la victime, la cause doit être considérée, en sa faveur, comme étant encore à sa première phase; son intervention est une intervention de première instance.

C'est par là que se justifient les arrêts de la cour de Rouen, 25 mars 1807, et ceux de la cour de Toulouse, cités et approuvés sous la Quest. 1270 quater. Autrement, ces arrêts seraient une violation de l'art. 466, car ils ont admis l'intervention du tiers injurié, en cause d'appel. Mais les injures résultaient de mémoires signifiés en cause d'appel, et dès lors cet article n'était pas applicable.]

[1681 quater. Le véritable intéressé peut-il intervenir, en cause d'appel, dans l'in stance d'abord soutenue par son prétenom, pour la continuer lorsque celui-ci l'abandonne ou est déclaré sans intérêt?

La cour de Limoges a décidé la négative, le 17 août 1811 (Dalloz, t. 18, p. 185), dans une espèce où il s'agissait d'un endosseur en blanc

pris, attendu que, résultant des motifs seuls, ce blâme ne pouvait constituer tout au plus contre le notaire

Il faut, pour intervenir en cause d'appel, a dit la cour, et Coffinières approuve son raisonnement en le rapportant, il faut avoir le droit de former tierce opposition, c'est-à-dire ètre lésé dans ses intérêts par le jugement ou par l'arrêt. Or, le vrai propriétaire, bien loin d'éprouver aucun préjudice du jugement obtenu par son prête-nom, ne se présente que pour en demander l'exécution: il n'est donc pas dans la condition de l'art. 466.

Quelque spécieux que soient les motifs sur lesquels s'appuie la cour de Limoges, on ne peut se dissimuler que la solution n'ait, dans ses résultats, quelque chose d'extraordinaire, et qui semble blesser la justice. Il n'est pas naturel, surtout en matière commerciale, où tout est de bonne foi, qu'un débiteur qui n'a pas rempli ses engagements, et qui, au fond, ne conteste pas le droit de son adversaire, trouve cependant le moyen, on ne sait pourquoi, d'échapper à une condamnation inévitable, et de faire retomber tous les frais sur son créancier. Sans doute celui-ci pourra plus tard intenter une nouvelle action; mais à quoi bon un deuxième procès, quand tout pouvait être terminé dès la première fois?

Une pareille procédure n'est pas dans le vœu de la loi. Peut-être la cour de Limoges et Coffinières lui-même se sont-ils laissé trop préoccuper de cette circonstance, que le demandeur originaire n'avait été que le prêtenom du dernier endosseur ; il n'y avait rien à en conclure en faveur du débiteur, et sa position ne changeait pas pour cela, puisqu'il n'alleguait aucune fraude et n'opposait au véritable créancier aucune compensation. Certainement nous ne voulons pas dire que l'endosseur en blanc eût le droit d'obtenir condamnation a son profit, mais nous pensons, avec la cour de cassation, que celle qu'il avait obtenue profitait au créancier dont il n'avait été que le prète-nom celui-ci devait lui être substitué, et n'avait pas besoin pour cela de recourir à une intervention, et d'invoquer les art. 182 et 183, C. proc. civ., qui ne sont pas en effet applicables à l'espèce, ainsi que la cour de Limoges l'a fort bien établi. Nous devons faire resemblable à celle qui nous occupe, que la cour marquer que c'est dans une affaire tout à fait de cassation s'est prononcée: il résuite expressement de son arrêt, en date du 2 janv. 1828, que lorsqu'une instance a été commencée sous un nom emprunté, le véritable intéressé peut, dans le cours du procès, être substitué à son prète-nom, sans agir par voie d'intervention. Cette décision est, comme on voit, d'un grand

qu'un préjugé insuffisant pour lui donner le droit de former tierce opposition.]

intérêt; nous croyons qu'elle doit prévaloir sur l'arrêt de la cour de Limoges.

Cette question a été jugée pour l'affirmative par la cour de cassation, le 20 brum. an XIII, Talandier, qui approuve l'arrêt de la cour de et le 13 oct. 1807 (Sirey, t. 8, p. 304; Dalloz, cassation (no 298, 17°), cite encore d'autres t. 18, p. 190). « En effet, disait le procureur arrêts comme ayant établi le même principe: général Merlin, le droit qu'a d'intervenir, en Cass., 7 avril 1815 (Sirey, t. 13, p. 376); Tou- cause d'appel, la partie qui pourrait attaquer, louse, 22 fév. 1828 (Sirey, t. 28, p. 262), et par voie de tierce opposition, le jugement à Bordeaux, 21 nov. 1828 (Sirey, t. 15, p. 374) rendre, entraîne nécessairement, pour les et 15 juin 1813 (Sirey, t. 29, p. 253.)] parties principales, le droit de la forcer d'in[1681 quinquies. En matière d'état, l'inter-tervenir effectivement, lorsqu'elle ne le fait pas vention des intéressés, qui n'ont pas été parties en première instance, est-elle permise en cause d'appel?

La cour de Pau a jugé l'affirmative, le 20 janv. 1837.

Cette cour s'est fondée sur ce que les arrêts qui prononcent sur la légitimité ont effet même contre les parents qui n'ont pas été appelés au procès, un individu ne pouvant être légitime à l'égard des uns, et illégitime à l'égard des autres. Elle admet donc l'indivisibilité dans les questions qui concernent l'état des personnes.

Nous devons dire d'abord que ce principe, qu'il ne nous convient pas d'examiner ici puisqu'il tient au droit civil pur, est vivement contesté par la jurisprudence et par les au

teurs.

Mais fut-il admis, il serait loin de justifier la décision de la cour de Pau. En effet, s'il y a indivisibilité dans cette matière, le jugement rendu contre un seul des intéressés est censé

[ocr errors]

d'elle-même. L'un est absolument corrélatif à l'autre; et d'ailleurs, quel tort fait-on à cette partie, en la mettant en cause d'appel? La prive-t-on d'un premier degré de juridiction? Non, assurément; car si, sur l'appel, elle n'était pas mise en cause, et qu'elle usât ensuite de son droit de former tierce opposition à l'arrêt, elle devrait porter sa tierce opposition devant la cour d'appel, elle ne pourrait pas la porter ailleurs; on ne fait donc, en la mettant en cause, que håter le moment de sa comparution directe et immédiate devant la cour d'appel. » (Voy. notre Quest. 1271.)

C'est ainsi que nous avions résolu cette question au no 1555 de notre Analyse.

Dans notre Traité et Questions, nous avons ajouté un troisième arrêt de la même cour, en date du 18 août 1808 (Sirey, t. 8, p. 553; Dalloz, t. 18, p. 188), lequel consacre la même doctrine, en ce qu'il déclare que celui qui intervient devant une cour d'appel ne peut invo

rendu contre tous les autres (voir la Ques-quer en sa faveur la règle des deux degrés de juridiction, encore qu'il ne soit intervenu tion 1565); ce n'est donc pas la voie de la qu'après sommation. Il existe enfin un arrêt tierce opposition, ni, par suite, celle de l'inde la cour de Florence du 1er fév. 1811 (Sirey, tervention, qui leur est ouverte, c'est la voie t. 14, p. 388; Dalloz, t. 18, p. 192), et un directe de l'appel. autre de la cour de Colmar, du 19 nov. 1810, qui décident de la même manière (1), et nous croyons, en conséquence, notre solution à l'abri de toute difficulté. Cependant on verra, par la note ci-dessous, les raisons pour lesquelles la cour de Rennes a semblé rejeter cette doctrine (2),

Et, s'il n'y a pas indivisibilité, la tierce opposition serait encore moins admissible, puisque le jugement ne peut porter aucun préjudice à ceux qui n'y ont pas été parties.] 1682. Peut-on, en cause d'appel, forcer d'intervenir la partie qui aurait droit de former tierce opposition?

(1) En rapportant cette dernière décision, Coffinières la justifie par l'une des raisons que nous avions données dans notre Analyse. « D'après l'art. 466, dit-il, » l'intervention sur l'appel peut être formée par ceux » qui pourraient prendre la voie de la tierce opposi» tion; et il doit en être ainsi de la mise en cause, qui » n'est qu'une intervention provoquée par l'une des » parties avec lesquelles l'instance est engagée. D'ail » leurs, le tiers mis en cause ne peut se plaindre de ce » qu'on le prive d'un premier degré de juridiction, » puisqu'en prenant spontanément la voie de la terce » opposition contre l'arrêt (la seule qui lui soit ou» verte), il devrait se pourvoir devant la cour d'appel, » aux termes de l'art. 475. »

(2) Quoique ces autorités et ces raisons eussent été invoquées devant la cour de Rennes, elle a néanmoins rejeté la doctrine qu'elles tendent à établir, et a considéré, par arrêt du 27 juillet 1818 (Dalloz, t. 18, p. 189), « que la règle des deux degrés de juridiction était un

[L'opinion de Carré, que nous partageons,

» principe général auquel on ne peut admettre d'aua tres exceptions que celles qui sont formellement >> consacrées par la loi, laquelle, en quelque cas que » ce soit, n'autorise pas des interventions forcées. » Il est à remarquer que la cour, dans cet arrêt, reconnait que quelques auteurs ont accrédité ce système d'intervention forcée, dont, ajoute-t-elle, le Code ne fournit aucun exemple; mais, dans l'espèce qui lui était soumise, elle déclare que ces auteurs limitent cette singulière faculté au cas où la personne qu'on veut forcer d'intervenir serait recevable à former tierce opposition au jugement; circonstance qui ne se présentait pas dans cette espèce, par la raison que le jugement attaqué ne portait aucun préjudice à la partie que l'on intimait sur l'appel.

Sous ce dernier rapport seulement, nous croyons l'arrêt bien rendu; mais nous persistons à penser que l'on peut forcer à intervenir sous l'appel toute partie qui serait bien fondée à se rendre tierce opposante.

est également professée par Berriat, titre de l'Intervention; Favard, t. 1er, p. 185, no8, et t. 5, p. 119; Thomine, no 517, et Talandier, uo 290; et consacrée, en outre, par les arrêts des cours de Colmar, 16 janv. 1817 (Dalloz, t. 27, p. 209); Besançon, 29 août 1817, 10 janv. 1820; Brux., 8 mai 1822, 15 juin 1814 et 19 fév. 1816 (Pasicrisie belge, à ces dates; Merlin, de l'intervention, § 1er); Besançon, 13 déc. 1828; et par ceux de la cour de cassation, des 26 juin 1826 (Sirey, t. 27, p. 95) et 25 juin 1832 (Sirey, t. 32, 1re, p. 177).

Le système contraire a été préféré par les cours de Bordeaux, 5 février 1825; d'Orléans, 25 août 1825, et par celle de Douai, 5 juill. 1826.

Ces derniers arrêts s'appuient uniquement sur la violation de la règle des deux degrés de juridiction, objection que nous croyons suffisamment réfutée par les passages de Merlin et de Coffinières que rapporte Carré.

Ne faut-il pas d'ailleurs que le droit qu'a la partie étrangère au procès, soit d'intervenir en appel, soit de former tierce opposition à l'arrêt, soit compensé en faveur des parties en cause, par celui de l'y appeler forcement? Et celles-ci doivent-elles demeurer indefiniment exposées à ses attaques, sans avoir un moyen de provoquer de leur chef le combat? S'il en était ainsi, la loi se serait montrée injuste et partiale.

On autorise, en première instance, l'intervention forcée par corrélation à l'intervention volontaire (Quest. 1271): la même règle nous semble naturelle en appel.

Si la partie appelée se plaint qu'on lui fait franchir un degré de juridiction, on lui répondra, avec justice, que c'est la conséquence du droit qu'elle avait de le franchir elle-même, au préjudice de ceux qui prennent l'initiative.

Il n'y a point de contradiction entre cette décision et celle qui dénie le droit d'appeler garant en cause, dans le cours d'une instance d'appel. (Voy, la Quest. 771.)

Le garant, à qui le jugement rendu entre le demandeur et le défendeur originaires ne peut être opposé en aucun cas (voir nos principes sur la Quest. 1581 quater), n'aurait pas le droit d'y former tierce opposition. Il ne pour

rait donc intervenir sur l'appel proprio motu; par suite, on ne peut pas l'y faire intervenir forcément.

Mais ici nous supposons une partie qui, se trouvant dans les conditions de l'art. 466, aurait le droit d'intervenir sur l'appel. Sa position n'est donc pas la même que celle du garant. Rien de surprenant qu'elle autorise une décision différente.]

1683. Un tiers peut-il intervenir dans une instance de péremption?

Sur cette question, nous rappellerons le principe posé à la Quest. 1444, que la demande en péremption constitue une action principale et introductive d'une instance absolument distincte de celle qu'elle tend à faire juger éteinte. Or, comme, d'après l'art. 466, ceux-là seuls peuvent intervenir qui auraient droit de se pourvoir par tierce opposition contre l'arrêt à rendre, il s'ensuit rigoureusement que l'intervention d'un tiers qui n'a point été partie dans l'instance périmée ne peut être admise.

En effet, ce tiers ne pourrait former tierce opposition contre l'arrêt qui déclarerait l'instance périmée, parce que ce genre de pourvoi n'est ouvert qu'à la partie qui n'a pas été appelée au jugement, quoiqu'elle eût intérêt au procès. (Voy. nos questions sur l'art. 474.)

Or, d'après la nature et les effets d'une demande en péremption, on ne peut concevoir que d'autres personnes que les parties en cause dans l'instance dont il s'agit de prononcer l'extinction, puissent être réputées inté ressées dans cette demande, et la raison en est sensible: la cause ou le motif de la demande en péremption est un fait, celui de la discontinuation des poursuites de la part de l'appelant défendeur à cette demande; mais ce fait n'est imputable qu'à ceux qui, au moment où la demande est formée, reçoivent cette qualité de defendeurs: donc, quiconque est étranger à ce même fait ne pourrait se rendre tiers opposant au jugement qui admet la péremption, et, par une consequence necessaire de l'art. 466, il ne peut intervenir dans l'instance qui a pour objet l'obtention de ce jugement (1).

[Quel que soit l'événement qui fait acquérir

(1) S'il en était autrement, on contreviendrait à tous les principes de la matière; car l'intervention est la voie indiquée pour se rendre partie dans un procès, pour y avoir qualité, comme demandeur ou défendeur: intervenir, c'est donc prouver que l'on n'a pas encore cette qualité, que l'on n'est pas partie dans l'instance; et puisqu'il faut nécessairement l'avoir été pour agir en demandant une péremption ou en défendant à celle demande, il impliquerait que l'intervention fût ad

mise.

En second lieu, l'on ne peut valablement se pour

voir par tierce opposition qu'autant que l'on prouve souffrir un préjudice réel du jugement, et, par conséquent, avoir un intérêt direct à la cause dans laquelle il a été rendu. Mais il est impossible qu'un jugement ou un arrêt, qui déclare une péremption acquise, porte préjudice aux droits d'un tiers qui ne serait pas partie dans l'instance à périmer; car le préjudice ne pourrait résulter que du prononcé même de l'arrêt ou du jugement qui jugerait quelque chose de relatif aux droits de ce tiers, et qui pourrait lui être opposé; mais un jugement de péremption ne juge et ne préjuge

[blocks in formation]

Dans cette hypothèse, qui est possible (car le jugement dont nous parlons n'a aucun caractère qui le distingue des jugements ordinaires), la tierce opposition serait ouverte; dès lors n'en doit-il pas être de même de l'intervention en cause d'appel, laquelle aurait pour but d'empêcher ce jugement d'acquérir force de chose jugée?

Mais, dit-on, l'instance de péremption est quelque chose de séparé, qui ne touche pas aux droits du tiers, qui ne peut s'agiter qu'entre les parties qui ont jusque-là figuré dans le procès, puisqu'il s'agit de la question de savoir si elles ont réciproquement fait les diligences nécessaires, soit pour prévenir, soit pour faire encourir la péremption.

Ce raisonnement nous parait sans portée. Si le jugement dont est appel intéressé le tiers, comment peut-on contester qu'il ait aussi intérêt à une instance dont le résultat pourra être de donner au jugement l'autorité de la chose jugée? comment peut-on contester que le tiers ait le droit de former tierce opposition à l'arrêt qui terminera cette instance, et, par voie de conséquence, qu'il ait le droit d'intervenir dans cette instance?

Sans doute, en intervenant, il ne pourra pas de plano faire valoir ses droits au fond; mais pour protéger ceux-ci, pour prévenir la nécessité de se pourvoir par tierce opposition, il soutiendra que la péremption n'est pas acquise, qu'elle est demandée à tort ou irrégulièrement ; qu'on doit poursuivre le jugement

de l'affaire. Il prendra en main la défense de la procédure attaquée, craignant que son auteur ne la défende mal ou ne se prête à une collusion.

Si, malgré ses efforts, la péremption est prononcée, son intervention tombera; car il n'a pu intervenir dans une cause qui n'existait plus. La tierce opposition lui restera contre le jugement qui aura acquis ainsi force de chose jugée.

Si la demande en péremption est rejetée, son intervention produira ses effets naturels sur le fond de la contestation.

Ainsi, nous n'adoptous point l'opinion de Carré, et nous ne pouvons nous rendre aux arguments qu'il développe, soit au texte, soit à la note.]

1684. Cette décision s'applique-t-elle même au cas où le tiers interviendrait dans l'instance principale, mais après la signification de la demande en péremption?

Oui, attendu qu'une fois la demande en péremption formée, on ne peut faire valablement aucun acte concernant l'instance que cette demande tend à faire déclarer éteinte. Cette instance reste donc arrêtée au point où elle était; car, si les parties elles-mêmes ne peuvent, aux termes de l'art. 399, signifier valablement aucun acte relatif à cette instance, à plus forte raison un tiers ne peut-il rien changer à l'état où elle se trouvait au moment de la demande. La raison s'en tire de ce que dit Pigeau, liv. II, part. 2, tit. V, ch. 2: « la péremption est ir

révocablement acquise à l'instant même de » la demande; que le jugement à intervenir » n'accorde pas de droit à celui en faveur du» quel il prononce; qu'il ne fait enfin que » déclarer que le droit lui était précédemment » acquis.

[ocr errors]

Ainsi, dès que la demande est formée, la péremption légale est pour l'extinction de l'instance; le jugement ne fait que convertir cette présomption en certitude: donc, sous aucun rapport, dans aucune hypothèse, l'in

rien, même en appel, contre les droits d'un individu qui n'a été partie ni dans l'instance périmée, ni dans l'instance de péremption. Si la conséquence directe et nécessaire de la loi est, suivant l'art. 469, de donner au jugement attaqué l'autorité de chose jugée, c'est, comme le dit Merlin, vo Tierce opposition, $6, res inter alios acta, quæ aliis præjudicare non potest: maxime qui se trouve en toutes lettres dans l'art. 1351 du Code civil, et à laquelle, ajoute l'auteur, le Code de procédure n'a ni dérogé ni pu déroger. Le tiers peut donc toujours se pourvoir par action principale, pour obtenir, dans son intérêt, un jugement contraire aux effets qui résulteraient, contre les parties qui ont laissé périmer une instance, de l'arrêt qui l'a déclarée pé rimée,

Cet arrêt d'ailleurs ne peut statuer en aucune manière sur les droits d'autrui ; il déclare uniquement le fait de la discontinuation des poursuites, et prononce en conséquence la péremption que la loi en fait dépendre; ne statue pas même sur la nullité du jugement attaqué, qui n'acquiert force de chose jugée que par la volonté du législateur, et non pas par la décision du juge, et qui ne l'acquiert que contre les personnes qui étaient parties dans l'instance périmée.

Nous nous croyons donc bien fondé à conclure que ceux-là seuls peuvent intervenir dans l'instance de péremption, qui sont parties dans l'instance discontinuée. (Rennes, 16 juin 1818, cité no 1456.)

[, au texte, nos observations contraires.]

« PreviousContinue »