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leur imposait, et qu'elles n'ont pas voulu subir. Les juges d'appel devront les renvoyer à se pourvoir régulièrement.

» Par une conséquence contraire, mais tout » aussi vraie, si le juge de première instance » a jugé quand il ne le pouvait pas, par exem» ple, si la demande était nulle, le juge d'ap» pel, réformant et déclarant la nullité de la » demande, ne peut évoquer le fond. Une de>> mande nouvelle ne donne pas au fond le » premier degré de juridiction. Le premier

Est-ce au contraire par la faute des premiers juges que le fond de la cause a échappé à leur sentence; pouvaient-ils juger; étaient-ils régulièrement saisis; est-ce sans droit et sans raison qu'ils ont ajourné le fond ou s'en sont dessaisis, les parties ne peuvent pas souffrir» juge ne devait pas juger; le juge d'appel, de l'erreur des juges du premier degré, et pour peu qu'il soit de leur intérêt d'obtenir une prompte décision, les juges du second ont le pouvoir de la leur accorder.

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» institué pour faire ce que le premier juge » pouvait et devait faire, ne peut ni ne doit juger le fond. Ce qui est nul ne produit » aucun effet; une demande nulle ne présente qu'une nullité, et l'on ne peut évoquer » le néant.

En deux mots, n'y a-t-il qu'erreur du juge» et non pas faute de la part des parties, l'éVocation est permise. L'une et l'autre de ces deux circonstances sont-elles réunies, il n'y a point lieu à évocation; car les parties ne doivent pas être récompensées de leur procédure vicieuse.

Au reste, cette distinction n'est que la traduction de cette autre fort répandue chez les jurisconsultes qui ont traité cette matière: Judex non fecit quod potuit, évocation. Fecit quod non potuit et non debuit, point d'évocation.

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» La seconde partie de l'art. 475 présente >> une latitude d'expression qui, au premier » aspect, peut faire naître le doute; mais, en » y regardant de plus près, il est facile de voir qu'il n'y a là, pas plus que dans ce qui pré» cède, aucune exception à la règle des deux » degrés de juridiction. Il a déjà été démontré » que, lorsqu'un jugement était annulé par » une cour royale pour vice de forme, celte » nullité n'affectant que le jugement, et la de» mande ayant été régulièrement introduite En effet, si le juge pouvait faire ce qu'il n'a » et instruite, il n'y avait pas violation du prepoint fait, il n'y a faute que de sa part; les » mier degré de juridiction dans l'évocation parties l'avaient mis à même de prononcer. » du fond. C'est encore le cas de dire que le S'il a fait ce qu'il ne pouvait ni ne devait faire,» juge d'appel, en substituant un jugement c'est que les parties s'étaient présentées devant» régulier à un jugement irrégulier, ne fait que un juge sans pouvoir. » ce que le premier juge aurait dû faire.

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Les mêmes idées sont développées avec force dans une consultation de Boncenne sur la fameuse affaire Ouvrard, consultation dont voici les passages les plus afférents à notre question:

«La jurisprudence n'offre rien de bien ar» rêté sur la question; il faut s'attacher aux » principes pour la discuter.

» Ces mots soit pour toute autre cause, » doivent s'interpréter par leur rapport né» cessaire avec ce qui précède et avec l'esprit » de tout l'article; ils indiquent une analogie » avec les exemples déjà donnés et non pas une » dérogation au principe que ces exemples » sont destinés à établir; ils assimilent aux » vices de forme, expressions qui auraient pu » Le plus incontestable de ces principes, c'est» paraitre trop restreintes, toutes les irrégu» que le juge d'appel ne peut faire que ce »larités et tous les accidents qui peuvent vicier » que le premier juge aurait dû faire et n'a » un jugement. » pas fait. Ainsi se trouve consacrée et ga- "Mais il ne faut pas perdre de vue que l'ar»rantie la règle des deux degrés de juridic-»ticle 473, C. proc., ne permet aux cours » tion; ainsi les juges d'appel ne peuvent re- » royales d'évoquer que pour des causes qui »cevoir une demande nouvelle, puisque cette » vicient les jugements, parce que les degrés » demande n'aurait subi l'épreuve que d'un seul » de juridiction sont parcourus dans ce cas. » degré. Autre conséquence: Toutes les fois » Si le tribunal inférieur qui devait juger le » que le premier juge a pu et dû juger le fond » fond ne l'a pas fait, ou s'il l'a jugé nulle» d'une contestation portée devant lui, et qu'il »ment, le premier degré est rempli; il n'est » ne l'a pas fait, en s'arrêtant mal à propos à » plus nécessaire d'obliger les parties, arri» des moyens d'incompétence ou de nullité, le » vées en appel, de retourner devant les juges » premier degré de juridiction a été rempli, » inférieurs pour parcourir encore une fois le » car il n'a dépendu que du premier juge de cercle des deux degrés de juridiction. La » statuer il le pouvait et il le devait. Il en est » preuve que le législateur l'a ainsi entendu, » de même si le jugement qu'il a rendu est » c'est que, dans la discussion de l'article, l'on »entaché de quelque vice de forme, car il » regarde la seconde partie comme une con»pouvait et devait juger régulièrement; le tri- séquence toute naturelle et toute simple de »bunal d'appel, réformant et substituant un » la disposition contenue dans la première. » nouveau jugement au premier jugement nul, » n'enlève point aux parties le premier degré.

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» On lit ce qui suit dans les observations du » tribunat: Ce qu'on a dit du cas où le tri

les 9 mars 1823 (Sirey, t. 26, p. 34), et 1er fév. 1820 (Sirey, t. 20, p. 546; Dalloz, t. 9. p. 136). Ainsi, lorsque la cour décide que le tribunal a eu raison de ne pas prononcer sur un point de

» bunal d'appel infirme un jugement pré- | paratoire ou interlocutoire s'applique, à » plus forte raison, au cas où le tribunal » d'appel réforme, pour vice de forme ou » toute autre cause, le jugement de pre-litige qui ne lui a pas été soumis, elle ne peut a mière instance. Il serait dérisoire que les » tribunaux n'eussent pas alors la faculté » de prononcer sur le fond.

» Ce n'est pas de cette manière qu'on se serait exprimé, si l'on eût voulu introduire dans » l'article une innovation importante et une exception si remarquable à la règle des deux » degrés de juridiction.

statuer elle-même sur ce point spécial. (Rennes, 4 juill. 1820.) Et lorsque l'appel d'un interlocutoire est déclaré non recevable, la cour ne peut, en aucun cas, évoquer le fond. (Grenoble, 5 juin 1828.)

de forme, soit pour toute autre cause, avait 20 Si le jugement infirmé, soit pour vice

» Tout se réduit donc à ce point bien sim-jugé le fond, peut-on évoquer? Quels sont les »ple : le premier juge n'a-t-il pas jugé le fond jugements définitifs dont parle la dernière partie de l'article? » quand il pouvait et devait le juger? il y a » lieu à l'évocation sur l'appel. Il en est de » même si le jugement de première instance est »entaché de quelque vice ou irrégularité : il a » dépendu des premiers juges de statuer sur le » fond; les juges d'appel, en réformant, font » ce qu'ils auraient dû faire.

» Mais si la demande était nulle, et si, par >> conséquent, les premiers juges ne pouvaient » pas juger, les juges d'appel ne peuvent pas » plus juger, puisqu'ils doivent faire seulement » ce qui aurait dû être fait en première in» stance; ils ne peuvent donc point évoquer » dans ce cas. »>

Au reste, pour ne pas morceler cette matière, qui est difficile et importante, nous allons traiter, dans une série de paragraphes, les principales difficultés examinées par Carré et celles qu'ont soulevées la jurisprudence et la doctrine depuis la publication des Lois de la procédure.

II. Quelles sont, indépendamment des principes ci-dessus, les conditions auxquelles l'art. 473 soumet le pouvoir d'évoquer?

Pour que les juges d'appel aient le droit d'évoquer le fond, sur l'appel d'un jugement qui ne l'a pas évacué, il faut :

1° Qu'ils infirment ce jugement; 2o Que ce jugement n'ait pas statué au fond; 3° Que le fond soit en état; 4 Qu'ils prononcent sur le tout par un seul jugement.

1° Quand le tribunal d'appel CONFIRME LE JUGEMENT interlocutoire ou définitif sur un incident, peut-il évoquer le fond?

Il n'y a pas lieu à évoquer ce dont on est déjà saisi. Or, l'appel d'un jugement qui a statué sur le fond saisit le tribunal supérieur de toute la cause; le fond lui appartient immédiatement comme tous les incidents.

Sans doute il ne renverra pas la cause devant les premiers juges qui l'avaient mal ou irrégulièrement jugée, ni devant d'autres; il ne pourra même pas se dispenser de la retenir pour y faire droit. Mais ce ne sera pas en vertu de son pouvoir d'évocation qu'il agira de la sorte, c'est parce que l'appel le constitue désormais juge unique et nécessaire.

On ne peut évoquer que ce qui pend encore à juger devant les premiers juges. Mais puisqu'ils ont jugé le fond, tout est terminé devant

eux.

Ici donc les principes de l'appel seront seuls applicables et nullement ceux de l'évocation. Et, par conséquent, le juge supérieur demeurera saisi du tout, encore que le fond ne soit pas en état pour lui, et qu'il ne puisse y prononcer par le même arrêt qui annule le jugement.

Aussi devons-nous remarquer qu'en employant ces mots jugements définitifs, le dernier paragraphe de l'article n'a pas voulu désigner les jugements qui auraient statué sur le fond, mais ceux qui auraient définitivement vidé certains incidents, statué sur certaines exceptions.

Ce système est enseigné par Talandier, nos 561 et 566, et Boitard, sur l'art. 473.

Dans ses Quest., vo Appel, § 14, art. 1or, Merlin semble d'abord, no 4 1o, et 5, adopter des solutions exclusives de celles que nous venons de donner. Mais plus loin, au no 6, après Non; car l'art. 473 borne le pouvoir d'évo- avoir longuement discuté plusieurs arrêts qui cation aux seuls cas d'infirmation ; il n'eût pas ont statué sur la question, il finit par se ranété raisonnable de dessaisir un tribunal qui ger au système d'après lequel les principes de avait bien jugé, et dans la limite de ses droits. l'évocation sont inapplicables, lorsque le juCe qui a été jugé doit sortir effet, dit avec rai-gement dont est appel a terminé la cause en son Talandier, no 362.

Cette opinion a été consacrée par la cour de Rennes, le 9 fév. 1833; par la cour de Grenoble, le 24 janv. 1826, et par la cour de cass.,

statuant sur le fond; en sorte que la cour saisie de l'appel peut, avant de prononcer, soit qu'elle infirme, soit qu'elle suspende, ordonner un interlocutoire ou une instruction nouvelle.

Un seul arrêt paraît contraire à cette doctrine. Il est du 28 avril 1825 (Sirey, t. 25, p. 390; Dalloz, t. 8, p. 378), et de la cour de cassation, qui cependant l'a très-souvent consacrée, et notamment par ses arrêts des 18 avril 1818, 4 janv. 1820 (Dalloz, t. 14, p. 357), 5 fév., 26 avril et 15 déc. 1825 (Merlin, ubi supra), 17 janv. 1826, 19 nov. 1828, 17 mai 1851 (Dalloz, t. 55, 1re, p. 119), 21 fév. 1852, 21 mai 1833 (Sirey, t. 33, p. 751), 11 mai 1835 et 16 mai 1858.

V. aussi l'opinion conforme de Carré, infrà, Quest. 1706.

Dans une consultation délibérée le 8 juill. 1817, Carré traitait une espèce où le jugement dont était appel avait, sans examiner le fond, déclaré la demande non recevable par un moyen de forme. Et il n'hésitait pas à décider que, dans ces circonstances, la cour pouvait, en réformant le jugement, évoquer le fond. C'est la question inverse de celle que nous venons de traiter; mais la solution qu'y donne Carré sert à confirmer l'interprétation que nous avons adoptée de ces termes de la loi : jugements définitifs.

» On ne doit pas néanmoins se dissimuler qu'un arrêt de la cour de cassation, du 9 oct. 1811 (voy. Sirey, t. 12, p. 15), pourrait rendre la question douteuse, en ce qu'il décidé qu'une cour ne peut retenir le fond, quand elle infirme un jugement qui n'a statué que sur une nullité d'exploit.

» Mais il faut remarquer que le principal motif de la cour de cassation est fondé sur ce que les parties n'avaient pas conclu en première instance, et que nulle instruction n'avait eu lieu sur le fond. Dans notre espèce, au contraire, les conclusions avaient été prises, et il résulte des points de fait posés au jugement que les premiers juges ont eu connaissance de tout ce qui donnait matière à la contestation.

>> Par cette considération, le conseil est porté à croire que la cour pourrait statuer sur le fond, mais c'est une simple faculté dont elle peut user ou non; la loi ne lui en fait aucune obligation, et, par conséquent, les appelants n'auraient point à se plaindre si elle les renvoyait devant les premiers juges.

» Délibéré à Rennes, le 8 juill. 1817. » 3o Il faut que le fond soit en état.

Quoique nous n'approuvions pas tous les motifs de la décision de Carré, puisqu'il la fonde en partie sur ce que les conclusions au On peut dire, en général, que le droit d'apfond avaient été prises devant les premiers précier si la cause est en état appartient souvejuges, et que cette condition ne nous semblerainement aux juges qui sont chargés de propas nécessaire pour rendre l'évocation possible (voy. le n° 3°, infrà), nous citerons néanmoins le texte de sa consultation.

« Le jugement dont est appel est définitif puisqu'il prononce uniquement sur une exception à raison de laquelle il déclare la demande non recevable dans l'état.

» Mais, comme les parties ont conclu au fond, le tribunal de Loudéac avait été mis à portée de statuer sur la demande en pétition d'hérédité formée par les Gorvel, en sorte que la cour pourrait, sans contravention à aucune loi, statuer au fond, quoique le premier juge ne l'ait pas examinée.

» Cette opinion parait justifiée par la jurisprudence de la cour de cassation, suivant laquelle il est permis à la cour royale de retenir le fond quand elle infirme un jugement rendu sur une exception d'incompétence; cependant, dans cette circonstance, le fond n'aurait pas été discuté devant les premiers juges. (V. Analyse raisonnée, Quest. 1550.)

» L'analogie de ce cas avec l'espèce actuelle paraît certaine, et le principe d'après lequel il suffit, pour que la cour retienne le fond, que des conclusions aient été prises à son égard en première instance, semble fondé sur le texte même de l'art. 473, qui autorise la rétention du fond à la cour souveraine, quand un jugement définitif est infirmé, soit, dit l'art. 473, pour vice de forme, soit pour toute autre

cause.

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noncer eux seuls en effet sont naturellement compétents pour décider si l'instruction qui a eu lieu, les a, oui ou non, suffisamment éclairés.

Cependant, après avoir signalé comme décidant, en principe, que les cours ne peuvent évoquer que les affaires en état d'ètre jugées, les arrêts de Rome, 5 sept. 1811 (Sirey, t. 12, p. 165; Dalloz, t. 4, p. 572); d'Aix, 22 nov. 1825, et de Grenoble, 24 fév. 1829, on peut poser, pour l'application, les règles suivantes :

Le fond peut se trouver en état par les conclusions qui ont été prises en première instance, quoiqu'elles n'aient pas été renouvelées en appel. C'est l'avis de Merlin, Quest., vo Appel, § 14, art. 1er, no 3 1°, et de Talandier, no 566, sanctionné par un arrêt de la cour de cass. du 8 déc. 1813 (Sirey, t. 14, p. 121; Dafloz, t. 22, p. 62).

Il peut se trouver en état par les conclusions qui ont été prises seulement en appel. (Cass., 1er juill. 1818; Sirey, t. 19, p. 258; Dailoz, t. 9, p. 194; Merlin, ibidem, no 9 2o, et Talandier, no 566.) Il n'est pas nécessaire que les parties aient conclu au fond devant le tribunal de première instance, comme l'ont jugé les arrêts de la cour de cass. des 11 janv. 1809, 25 juin 1825 et 16 nov. 1823, cités par Merlin, ubi suprà. (Voy. le no 2o, suprà.) (1).

(1) [* Lorsque les parties ont pris devant le premier

qu'autant qu'il statue sur le fond à l'instant même et par le même jugement. C'est ce qu'en

Il peut être en état, quoique l'intimé n'ait conclu qu'à la confirmation du jugement, sous la réserve de tous ses droits sur le fond du li-seignent Merlin, Quest., v° Appel, § 14, art. 1er, tige. (Cass., 4 fév. 1834.)

Il peut être en état par l'instruction préalable que les juges d'appel auraient ordonnée pour éclairer le point de forme ou l'incident dont ils étaient saisis par l'appel, comme l'enseignent Merlin, ibid., no 3 5o; Thomine, no 325, et Talandier, no 367, et ainsi que l'ont jugé la cour de cassation de France, le 22 déc. 1824 (Sirey, t. 25, p. 195), et celle de Belgique, le 8 juill. 1835 (1).

Mais il ne peut être considéré comme en état, si toutes les parties ne sont pas en cause (Rennes, 20 janv. 1812, 27 mai 1814); si l'une d'elles fait défaut (Besançon, 15 mars 1806; Sirey, t. 7, p. 1149) et n'a conclu au fond ni devant les premiers juges, ni devant les juges d'appel, comme l'enseigne Merlin, ibid., no 5 1o, in fine. (V. aussi Carré, à la note de sa Quest. 1705, et le n° 15, infrà.)

L'arrêt de la cour de Caen du 4 mai 1815 (Sirey, t. 14, p. 400; Dalloz, t. 14, p. 487), qui décide que les juges d'appel peuvent évoquer le fond quand la cause leur paraît en état, lorsqu'il y a été statué en première instance, mème par défaut, n'est pas en opposition avec la règle précédente, puisque, s'agissant, dans l'espèce, de l'appel d'un jugement qui avait statué au fond, ce n'étaient plus les principes de l'évocation, mais ceux de l'appel qu'il fallait appliquer.

Pigeau, Comm., t. 2, p. 55; Thomine, no 525, et Talandier, no 368, pensent que les parties pourraient valablement consentir à l'évocation, quoique le fond ne fût pas en état. Tel n'est pas notre avis. (V. notre Quest. 1676.)

4° Il faut statuer par le même jugement. Cette règle est commune à tous les cas dans lesquels il y a infirmation du jugement dont est appel, quel que soit le motif du jugement qui prononce sur l'appel.

Ainsi, le tribunal retient-il, contre notre avis, le fond d'une affaire dans laquelle le jugement attaqué a été rendu incompétemment, ou dans laquelle un interlocutoire a été mal à propos ordonné, ou une fin de non-recevoir mal à propos accueillie, ou un incident mal jugé, ou une exception d'incompétence faussement déclarée fondée; il ne peut le faire

nos 2, 7, 8, 9 et 10; Favard, t. 1, p. 188, no6, et Talandier, no 367, et ce qu'ont jugé les cours de Rome, 5 sept. 1811; Rennes, 7 juin 1816; cass., 12 nov. 1816 (Sirey, t. 17, p. 400; Dalloz, t. 8, p. 375); cass., 25 nov. 1818 (Sirey, t. 19, p. 201; Dalloz, t. 8, p. 582), 9 oct. 1811, 18 juin 1817, 2 fév. 1824 (Sirey, t. 24, p. 251; Dalloz, t. 8, p. 374); Brux., 3 fév. 1812, et Nimes, 22 fév. 1812.

Ceci ne doit pas s'entendre, en ce sens que l'arrêt ne puisse contenir qu'une seule disposition; au contraire, deux dispositions, sont indispensables, comme l'a jugé la cour de Bourges, le 22 mai 1829 (Sirey, t. 29, p. 256), mais il faut qu'elles soient contenues dans le même arrêt.

Mais ce qui n'est pas permis, c'est, après avoir infirmé le jugement et évoqué le fond, d'en renvoyer l'évacuation après un interlocutoire qu'on ordonne. Alors en effet on viole tout à la fois et la règle que nous exposons maintenant et la précédente, comme l'a jugé la cour de cass., le 25 nov. 1818 (Sirey, t. 19, p. 201; Dalloz, t. 8, p. 382). L'arrêt de la cour de cassation du 28 avril 1825 (Sirey, t. 23, p. 390; Dalloz, t. 8, p. 576), qui le décide de même, serait donc bien rendu s'il s'agissait, dans l'espèce, d'une véritable évocation; mais, comme le jugement dont était appel avait statué sur le fond, c'était un simple appel qu'il fallait vider la procédure suivie par les juges supérieurs était, selon nous, parfaitement régulière.

Ce qui n'est pas permis non plus, c'est de renvoyer à une audience subsequente pour statuer sur le fond, après avoir, par un premier jugement, infirmé le jugement attaqué (2).

Mais ce ne serait pas violer la règle que d'ordonner un interlocutoire, avant de rien prononcer sur l'appel dont on est saisi, et, suivant ce qui résulterait de cet interlocutoire, rendre un secoud jugement par lequel on infirmerait à la fois, on évoquerait et on jugerait le fond. Ni la loi ni l'esprit de la loi ne seraient alors violés puisque, d'un côté, le fond se serait trouvé en etat au moment où l'on aurait prononcé sur le jugement incident, et que, de l'autre, l'infirmation et l'évocation auraient

juge et en appel des conclusions au fond et plaidé sur le mérite d'icelles, la cour qui infirme pour incompétence absolue le jugement dont est appel peut évoquer. (Brux., 1er déc. 1858; J. de B., 1839, p. 43.)]

(1) [*La faculté d'évoquer le fond donnée aux cours par l'art. 473, n'est pas limitée au cas où l'appel est, aussi bien que le fond, disposé à recevoir par le premier arrêt une décision définitive.

Les juges d'appel peuvent ordonner, sur ce qui a fait

l'objet du jugement, les mesures d'instruction nécessaires, et après tout interlocutoire étranger au fond évoquer celui-ci et statuer définitivement sur le tout par le même arrêt. (Brux., cass., 8 juill. 1855; Bull., 1836, p. 137; Thomine, no 523.)]

(2) [La cour de Nimes a jugé, le 22 fév. 1812, qu'une cour qui a commis cette violation peut, par un arrêt postérieur, se rétracter et renvoyer la connaissance du fond aux premiers juges.]

eu lieu par le même arrêt. Merlin, Quest., vo Appel, § 14, art. 1er, no 3 3o, professe cette doctrine, qui résulte aussi de deux arrêts de la cour de cass., 22 déc. 1824 (Sirey, t. 25,

p. 195), 16 janv. 1834, et d'un autre de celle de Belgique, 8 juill. 1835.

Ce ne serait pas non plus violer la règle, après avoir évoqué et statué au fond par le même arrêt, que d'ordonner une enquête pour l'exécution de la décision. (Cass., 20juill, 1829.) | Mais on demande si cette règle est d'ordre public, et si le consentement exprès ou tacite des parties ne peut pas couvrir sa violation. La cour de cass. a jugé que cette violation pouvait être couverte, par ses arrêts des 14 fév. 1852 et 11 janv. 1837. Elle avait décidé le contraire, le 9 oct. 1811 (Sirey, t. 12, p. 15; Dalloz, t. 8, p. 572), et, le 2 fév. 1824, elle avait déclaré que la renonciation à invoquer la nullité ne pouvait s'induire de ce qu'une partie avait procédé devant le juge d'appel depuis l'évocation, si, surtout, elle y avait proposé une exception d'incompétence.

Quant à nous, nous pensons que l'incompé tence des tribunaux d'appel, en matière d'évocation, ne peut jamais se couvrir. (V. notre Quest. 1676.)

SII. 1° Si le jugement est infirmé pour avoir mal à propos ordonné un interlocutoire, peut-on évoquer?

fond sans interlocutoire, ils n'ont pas fait ce Oui; puisque les juges pouvaient juger le qu'ils pouvaient, ce qu'ils devaient faire ; il y a faute de leur part. Puisque les juges devaient prononcer sur le fond, c'était régulièrement et à bon droit que les parties les en avaient saisis; il n'y a point faute de la part de ces dernières. Elles ne doivent point éprouver de retard, par suite d'une faute à laquelle elles n'ont point participé.

C'est, au reste, la disposition formelle du S1er de notre art. 473. qu'ont eu l'occasion d'appliquer les cours de Grenoble, 22 juill. 1809; de cass., 8 déc. 1815 (Dalloz, t. 22, p. 62); de Riom, 27 juill. 1809; de Paris, 28 janv. 1826; de Limoges, 22 nov. 1826 (Talandier, no 363), et qu'interprètent comme nous Thomine, no 523; Boitard, sur l'art. 475, et Talandier, no 362.

Mais il faut absolument que la cour statue sur le fond, par le même jugement que sur l'interlocutoire. Elle ne pourrait pas, quoi qu'en dise Boitard, ubi suprà, retenir l'affaire pour lui faire subir une légère et courte discussion dont elle pourrait avoir, besoin. Les termes de notre article s'y opposent formellement.

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2° Si le jugement est infirmé pour avoir mal à propos refusé un interlocutoire, peuton évoquer?

|

Non; puisque, l'interlocutoire étant jugé nécessaire pour arriver au jugement du fond, il s'ensuit que celui-ci n'est pas en état.

avoir mal à propos accueilli une demande SIII. 1° Si le jugement est infirmé pour en péremption, peut-on évoquer?

Oui; puisque la procédure n'était point périmée, le tribunal ne devait pas annuler, mais juger le fond, La partie qui résistait à la péremption n'avait pas tort de le faire; elle demande jugement au fond, on ne peut le lui refuser, sous prétexte d'une erreur que ses efforts ont essayé de prévenir.

C'est l'avis de Pigeau, Comm., t. 2, p. 55; de Thomine, no 525, et de Boitard, sur l'art. 473. 2° Si le jugement est infirmé pour avoir tion, peut-on évoquer? mal à propos rejeté une demande en péremp

Non; si la demande en péremption est jugée fondée, elle anéantit l'instance; il serait donc contradictoire de juger le fond.

incompétence, peut-on évoquer?' SIV. 1° Si le jugement est infirmé pour

Non; puisque le tribunal n'était pas compétent, la partie qui demande jugement avait eu tort de le saisir de la cause. C'est par sa faute que le premier degré de juridiction a été mal rempli, que le juge a fait ce qu'il ne elle a été complice. pouvait, ce qu'il ne devait pas faire. Elle ne saurait échapper à la peine d'une violation dont

Cependant, nous devons avouer qu'une jurisprudence imposante et bien assise, et une doctrine presque unanime, s'élèvent contre cette solution. La seconde partie de l'art. 475 s'exprime, dit-on, en termes trop généraux sur les causes d'infirmation qui peuvent donner lieu à évoquer, pour que celle qui dérive de l'incompétence du tribunal n'y soit pas

comprise.

Tel est l'avis de Merlin, Quest., vo Appel, 14, art. 1er, no10, 3° cas, qui avait précedemment professé une opinion contraire; de Favard, t. 1, p. 189, no 7, et de Talandier, no 363. Mais Berriat, titre de l'Évocation, note 112, no 1 et 115; Henrion, Autor, judic., t. 1, p. 415; Devilleneuve, t. 36, 1, p. 785, et t. 37, 1re, p. 8, et Demiau, p. 534, adoptent et soutiennent avec force notre opinion, qui trouve également un puissant appui dans les principes exposés dans la consultation de Boncenne, citée suprà, p. 162.

Quant à Carré, on peut voir, en rapprochant sa Quest. 1704 de sa note 5 sur la Question 1702, qu'il est demeuré jusqu'à la fin dans un état complet d'hésitation.

Sous l'ancienne législation, et le 27 frim. an II (Sirey, t. 3, p. 578), la cour de cassation avait jugé qu'en infirmant pour cause d'incom

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