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que, bien que personne n'ait conclu pour lui, ce silence n'empêche pas qu'il ne doive être soumis à l'autorité de la chose jugée; c'est la règle fondamentale de la matière.

Il en serait autrement si aucunes conclusions n'avaient été prises contre le garant, ou si un sursis avait été prononcé à son égard, et que le sursis n'eût pas été levé avant la décision définitive; alors, comme l'a jugé la cour de cassation, le 18 janv. 1832, le garant aurait le droit de former tierce opposition à la décision qui l'aurait compris dans la condamnation.]

1719. Le tuteur d'un interdit est-il recevable à attaquer, par voie de tierce opposi tion, un jugement rendu avec ce dernier lui-même, avant que son interdiction eût été prononcée par la justice?

et un tiers, que cet immeuble n'a pas appartenu à celui duquel il tient son droit d'usufruit?

Un arrêt du parlement de Paris du 6 fév. 1778 a accordé ce droit à une veuve douairière, et par conséquent usufruitière. (Voy. Nouv. Rép., art. 7.) Mais il importe de remarquer que le droit réel que cette veuve avait sur l'immeuble lui était déféré par la loi seule; qu'elle ne le tenait pas des héritiers de son mari, et que, conséquemment, on ne pouvait pas dire qu'elle fûut leur ayant cause ni qu'elle eût été représentée par eux, lors du jugement qui avait à son mari. L'arrêt que nous citons ne pourprononcé que l'immeuble n'avait pas appartenu rait donc s'appliquer avec certitude que dans le cas d'un usufruit légal, et non dans celui d'usufruit conventionnel, où l'on pourrait opUn arrêt du 5 fév. 1767 a jugé négativement poser à l'usufruitier qu'il n'était pas nécessaire cette question. (Voy. Nouv. Rep., ubi suprà, de l'appeler lors d'un jugement qui n'avait art. 5.) (1). [Voy. nos questions sur l'art. 895.] que la propriété pour objet ; que, s'il avait des [1719 bis. Le donataire, en vertu d'un acte d'intervenir; que, ne l'ayant pas fait, il est moyens particuliers à faire valoir, c'était à lui antérieur à l'interdiction du donateur, censé s'en être rapporté à ce que dirait le propeut-il former tierce opposition au juge-priétaire; qu'il a ainsi consenti implicitement ment d'interdiction, si la donation est attaquée comme consentie par une personne que ce qui serait jugé avec celui-ci le fût avec lui. en état de démence?

[(2) Mais c'est précisément parce que le juNon; la donation, étant antérieure à l'inter-gement n'avait que la propriété pour objet diction, n'est pas viciée par le jugement qui prononce l'interdiction. Ainsi décidé, par arrêt de la cour de Riom, le 9 janv. 1808 (Dalloz, t. 27, p. 191).

Mais le donateur rentré dans l'objet, en vertu d'un jugement qui prononce la révocation pour cause d'ingratitude, peut-il former tierce opposition au jugement rendu contre le donataire avant la révocation?

Pigeau, liv. II, part. 4, titre ler, ch. 2, enseigne que si le jugement est rendu depuis l'inscription de l'extrait de la demande en révocation, conformément à l'art. 938, C. civ., le donateur aura le droit de se pourvoir; mais que si le jugement est rendu auparavant, il ne le pourra pas, aux termes du même article, suivant lequel il est considéré, vis-à-vis des tiers, comme successeur du donataire, sauf recours contre celui-ci. (Voy. suprà, Question 1710 ter, ce que nous avons dit d'un acquéreur. Voy. aussi suprà, notre observation IV, sur la Quest. 1709.)]

1720. L'usufruitier d'un immeuble peut-il attaquer, par tierce opposition, un jugement qui a décidé, entre le propriétaire

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que l'usufruitier, qui n'est que simple possesseur, ne peut être censé y avoir été suffisamment représenté par le propriétaire, son cédant, aux droits duquel il ne succède qu'à titre particulier. Il faut bien se garder, en effet, de confondre le successeur, dans le fait de la possession, avec le véritable ayant cause de celui auquel il succède. « Ainsi, dit Proudhon, Traité des droits d'usufruit, d'usage, etc., t. 5, p. 223, no 1533, le vendeur à réméré qui exerce le rachat succède bien à la possession de l'acheteur qu'il vient remplacer dans la jouissance du fonds, mais il n'en est pas l'ayant cause, parce que ce n'est pas de lui qu'il tient son droit de propriété; il ne peut donc être soumis à l'autorité de la chose jugée, dans l'intervalle, contre son acquéreur.

D'un autre côté, il est de principe constant en jurisprudence que l'action en revendication ne peut être valablement intentée que contre le possesseur actuel du fonds. Or, comme il est évident que le tiers qui se prétend légitime propriétaire n'a fait, en attaquant celui qui avait à ce titre cédé le droit de l'usufruit, qu'un acte de revendication, il s'ensuit que, loin qu'on puisse opposer à l'usufruitier sa négligence à

(1) Idem à l'égard du jugement qui, bien que ce tuteur n'eût pas été appelé, a déclaré l'interdit relevé de son interdiction. (Bull. offic. de la cour de cassation, t. 13, p. 35.)

(2) V. suprà, notre observation IV, sur la Quest. 1709.

locataire ne peut pas avoir plus de droits que son cédant; mais c'est là le fond du procès, tandis que la cour de Paris avait à statuer, d'abord, sur la recevabilité de la tierce opposition. Or, le principal locataire s'était dessaisi d'une partie du droit que lui donnait son bail. Il était aussi nécessaire de faire juger contre le sous-locataire que contre lui la nullité de ce bail, car il n'avait aucun pouvoir pour représenter son cessionnaire, qui n'était l'ayant cause de son bailleur qu'à l'égard de ce qui avait précédé son bail. Quel danger n'y auraitil pas pour les sous-locataires, si leurs droits pouvaient être ainsi compromis par un cédant négligent ou de mauvaise foi!

intervenir dans le jugement en question, c'est au tiers au contraire qu'il faut imputer ce défant d'intervention et le préjudice qu'il peut entraîner. A lui seul incombait le soin, à lui seul i importait de mettre en cause l'usufruitier, pour faire prononcer sur l'ensemble de ses droits, par un seul et même jugement. De ce qu'il a omis de le faire, on ne saurait en conclure, comme le fait Carré, que ce dernier ait implicitement consenti que ce qui serait jugé avec son cédant le fût avec lui. Car, dès l'instant que le jugement est postérieur au titre qui a conféré l'usufruit, les droits de propriété et d'usufruit sont distincts et séparés, comme le fait observer Favard, t. 5, p. 606. On ne peut donc pas dire que l'usufruitier, soit légal, soit Nous croyons donc que, dans ce cas comme conventionnel, ait été représenté par le pro- dans ceux de la question précédente, et par les priétaire, et qu'il doive être soumis à l'auto-motifs qui y sont développés, la tierce opposirité de la chose jugée contre son auteur. tion du sous-locataire était recevable. (Voy. aussi suprà, notre observ. IV, sur la Ques

On devrait decider autrement, si la transmission du droit d'usufruit n'avait eu lieution 1709.)] qu'après le jugement; ici, les principes exposés plus haut à l'égard du vendeur et de l'acquéreur retrouveraient leur application. (Voy. suprà, Quest. 1710 ter.)

C'est en vertu des mêmes principes que nous croyons qu'il a été mal jugé par la cour de Rennes, lorsqu'elle a décidé, le 25 déc. 1812 (Dalloz, t. 27, p. 212), qu'un fermier n'était pas recevable à former tierce opposition à un arrêt qui condamnait son bailleur sur une question de propriété, parce qu'il avait eu connaissance de l'instance terminée par cet arrêt.

Cet arrêt de Rennes s'est fondé également sur ce que le défaut d'intervention dans l'instance de la part du fermier établissait suffisamment qu'il s'était considéré comme valablement représenté par son propriétaire; doctrine évidemment erronée, comme nous croyons l'avoir établi. Mais au reste, il est vrai de dire que ce qui diminue singulièrement l'importance de cet arrêt dans la question qui nous occupe, c'est qu'il admet en fait que, dans l'espèce, le fermier dont les droits se réduisent à la garantie d'éviction n'éprouvait aucun préjudice de la sentence attaquée, laquelle n'avait ni préjugé ni exclu cette garantie, et que, sous ce dernier rapport, il avait dù nécessairement juger que le fermier n'était pas recevable à se pourvoir par tierce opposition.] [1720 bis. Le sous-locataire est-il recevable à former tierce opposition au jugement qui annule le bail du principal loca

taire et rendu contradictoirement avec celui-ci ?

La cour de Paris, en jugeant la négative sur cette question, le 11 nov. 1812 (Dalloz, t. 27, p. 212; Pasicrisie, à cette date), nous paraît être tombée dans l'erreur.

Sans doute, il est bien évident que le sous-
CARRÉ, PROCÉDURE CIVILE. — TOME IV.

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1721. La tierce opposition est-elle admissible contre un jugement qui statue sur une question d'état?

On pourrait croire le contraire, en se fondant sur le principe que l'état est indivisible; et c'est aussi par ce motif que, par arrêt du 23 juill. 1806, la cour de Poitiers avait rejeté la tierce opposition formée par un émigré amnistié, à un jugement rendu pendant son émigration, et qui déclarait, contradictoirement avec son épouse, qu'un enfant était le fils de celle-ci. Mais cet arrêt a été cassé le 7 déc. 1808 (Sirey, t. 9, p. 49; Dalloz, t. 4, p. 154), par le motif que ni l'émigré ni sa famille n'avaient été appelés au jugement, ni en personne, ni par leurs représentants. La cour a ainsi jugé que le mari n'était pas représenté de droit par son épouse. (Voy. Jurisp. sur la proc., t. 5, p. 145.)

[(1) Merlin, Répert., t. 8, p. 819; Favard, t. 5, p. 608, et Berriat, titre De la tierce opposition, no 6, note 1re, professent une opinion conforme à cette décision. La cour de cassation a également jugé, le 1er août 1827 (Sirey, t. 28, p. 49), que les enfants déclarés adulterins par un jugement qui annule une donation faite à leur mère, comme faite à personne interposée, avaient qualité pour intervenir et former tierce opposition à ce jugement, parce qu'il mettait leur état en question.

On lit dans un auteur que les enfants nés d'un mariage légitime ont des droits de famille propres et personnels, droits qu'il ne faut pas confondre avec ceux qui peuvent leur appartenir comme héritiers, du chef de leur auteur; qu'à l'égard de ces derniers, ils sont tenus sans

(1) [V. suprà, notre observation IV, sur la Quest. 1709.]

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tat est toujours considéré comme représentant valablement l'émigré, que celui-ci pouvait attaquer par la voie de la tierce opposition l'arrêt dans lequel l'État aurait été représenté par un autre administrateur que celui que la foi avait investi spécialement de ce droit. (Rennes, 26 fév. 1816, et Besançon, 14 nov. 1826. Voy. suprà, notre Quest. 1716 bis.)

contredit de remplir tous les engagements de | leur père, et qu'ils ne peuvent point, par conséquent, former tierce opposition aux jugements rendus contre eux; mais qu'il en est autrement des droits de famille qui leur appartiennent par le seul fait de leur naissance en mariage légitime; que, relativement à ces droits, leurs auteurs ne peuvent ni les obliger par leur fait, ni les représenter dans les in- Enfin, et alors même que l'émigré eût été stances où ils n'ont pas été personnellement valablement représenté, quant à la qualité du appelés. Cette distinction importante et que fonctionnaire délégué par l'État, la voie de nous approuvons a été consacrée par un arrêt tierce opposition ne lui en demeure pas moins de la cour de cassation, du 9 mai 1821 (Sirey, ouverte contre les jugements ou arrêts rendus t. 21, p. 249), qui a cassé un arrêt de la cour depuis l'amnistie. Rentré dans la plenitude de de Toulouse, par lequel il avait été refusé de ses droits civils, il n'avait nul besoin en effet recevoir un fils tiers opposant envers un juge- qu'ils fussent exercés par un intermédiaire ment rendu contre son père et qui l'obligeait à quelconque, et dès lors la chose illegitimement reconnaître pour frère légitime et pour cohé-jugée contre ce dernier ne pourrait lui être ritier un enfant né hors du mariage.] [1721 bis. Les émigrés sont-ils recevables a former tierce opposition aux jugements dans lesquels ils ont été représentés par P'État durant leur mort civile (1)?

opposée. (Cass., 16 mai 1815; Sirey, t. 15, P. 191; Dalloz, t. 26, p. 143.)]

1722. Pour écarter l'exception de chose jugée, tirée mal à propos d'un jugement dans lequel on n'a pas été partie, est-il absolument nécessaire de former tierce opposition à ce jugement (2)?

La négative résulte de l'ensemble de toutes les lois sur l'émigration, et notamment de l'article 16 du sénatus-consulte du 6 flor. an x; L'art. 474 dit bien qu'une partie PEUT forc'est ce que décide un arrêt de la cour de cass., mer tierce opposition, etc.; mais il ne dit pas du 14 juin 1815, en énumérant les lois relatives qu'elle soit tenue de prendre cette voie; il ne à la matière. (Voy. aussi un arrêt de la mème lui ôte pas la faculté de se borner à dire que le cour, du 5 avril 1815; Sirey, t. 15, p. 157; jugement qu'on lui oppose n'a pas été rendu Dalloz, t. 27, p. 186; Pasicrisie, à cette date.) avec elle; qu'il lui est étranger; que ce jugeNéanmoins, et si telle est en principe la règlement est, à son égard, comme s'il n'existait générale, la nature diverse des droits revendiqués a dû faire consacrer plus d'une excep

tion.

Ainsi, par exemple, lorsqu'il s'agit d'une question d'état, on conçoit que la nation soit sans qualité pour représenter l'émigré, car si elle a pu, comme on le faisait très-judicieusement observer devant la cour suprême (voy. arrêt du 9 mai 1821, à la quest. précéd.), faire passer ses biens d'une main dans une autre, l'etat est indivisible; il tient à la famille, et quelle que soit la puissance de fait qu'on veuille attribuer à la nation, il ne saurait lui être donné de faire ou de défaire la famille. L'émigré serait donc recevable dans ce cas à former tierce opposition, après comme avant la perte de ses droits civils, durant laquelle serait intervenu le jugement attaqué.

On a même jugé, dans une cause où il ne s'agissait que des biens à l'égard desquels l'É

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point; que c'est, en un mot, res inter alios acta. (Voy. C. civ., art. 1551.)

Ainsi, la tierce opposition est purement facultative; et si nous avons dit, sur la Question 1682, que l'on peut forcer d'intervenir celui qui aurait droit de se rendre tiers opposant à un jugement à rendre, on ne peut en conclure qu'il ait besoin d'user de ce droit pour empêcher que le jugement ne produise ses effets contre lui; le droit de le contraindre à cette intervention n'est établi qu'en faveur de la partie intéressée à ce que le jugement qu'elle poursuit soit rendu contradictoirement avec lui. (Voy. Nouv. Répert., art. 7, § 6, p. 762.)

On peut donc l'attaquer pour cause de fraude, de collusion, etc., ou faire juger qu'il est res inter alios acta (3).

[Voy. suprà, nos observations sur la Question 1709.]

paru les plus importantes sur le droit de former tierce opposition. On trouve d'autres espèces traitées par Pigeau, liv. II, part. 4, tit. Ier, chap. 2 inclusivement, ou indiquées au Code annoté de Sirey. Il convient surtout de voir les annotations concernant les émigrés, desquelles il résulte, en général, qu'ils ont été, durant leur mort civile, représentés par l'Etat dans les causes qui les concernaient, et que, par conséquent, ils ne

ART. 475 (1). La tierce opposition for- | mée par action principale sera portée au tribunal qui aura rendu le jugement attaqué.

La tierce opposition incidente à une contestation dont un tribunal est saisi, sera formée par requête à ce tribunal, s'il est égal ou supérieur à celui qui a rendu le jugement.

ART. 476. S'il n'est égal ou supérieur, la tierce opposition incidente sera portée, par action principale, au tribunal qui aura rendu le jugement.

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Tarif, 75.- Tar. rais., nos 377 et 378.-C. civ., articles 1551, 2265 et 2279. C. proc., art. 48, 49, § 3, 337, 472 et 490. [Devilleneuve, vo Tierce opposition, nos 61 à 75. Carré, Compétence, 20 part., liv. II, tit. IV, Q. 306. — Locré, t. 9, p. 339, no 5; p. 369, nos 26 et 27, et p. 584, no 23.] (2).—(Voy. FORMULES 381 et 382.)

CCCXCIV. La loi établit ici cette première règle générale, que la tierce opposition doit être faite devant le tribunal qui a rendu le jugement.

Il peut, sans doute, a dit à cet égard Bigot de Préameneu, en résulter que le tiers opposant soit obligé de plaider devant les juges dont autrement il n'eût point été justiciable; mais une tierce opposition ne peut être considérée que comme une intervention pour arrêter ou prévenir l'exécution d'un jugement. Or, nulle intervention ne peut se faire que devant le tribunal où la cause principale est portée.

En partant de ce principe, il restait un cas à prévoir, celui où, à l'occasion d'une contestation qui s'instruit devant un tribunal, l'une des parties se prévaudrait d'un jugement qu'un autre tribunal aurait rendu, et contre lequel son adversaire aurait le droit de former une tierce opposition.

Dans ce cas, les parties sont en présence devant le tribunal saisi de la contestation principale. Doit-on, comme on le faisait autrefois, les renvoyer devant le tribunal qui a prononcé le jugement attaqué par la tierce opposition? On ne saurait douter qu'il ne soit, en général, plus convenable à leurs intérêts de rester

devant le tribunal même où elles se trouvent, et où, conséquemment, elles peuvent espérer un jugement plus prompt sur l'un et sur l'au

tre différend.

En prenant ce dernier parti, il fallait seulefüt troublée. Un tribunal inférieur ne doit jament éviter que la hiérarchie des tribunaux mais être revêtu du pouvoir de prononcer sur un jugement rendu par un tribunal supérieur.

Il peut sans doute arriver que, dans le cas où les moyens du tiers opposant seraient précisément les mèmes que ceux qui auraient été rejetés par le jugement attaqué, ces moyens soient admis par un autre tribunal d'un pouvoir égal; mais c'est encore un de ces cas trèsrares, et qui ne suffisent point pour écarter une mesure d'une utilité certaine et journalière.

Il faut, d'ailleurs, observer que, si le jugement sur la tierce opposition a été rendu par des juges de première instance, on a, pour éprouver la bonté de ce jugement, la voie de l'appel.

S'il a été rendu un jugement en dernier ressort, la variété d'opinions entre les tribunaux indépendants sur les mêmes questions, est un inconvénient général contre lequel il n'y a de remède que dans l'autorité de la cour de cassation, lorsqu'il y a lieu de s'y pourvoir. (Exposé des motifs.)

1723. Comment la tierce opposition est-elle formée lorsqu'elle est principale?

Elle se forme par une assignation ordinaire, et l'on doit suivre à son égard les mêmes règles de procédure que sur toute autre action principale (3).

[Il en est de même de la tierce opposition incidente, bien que sa forme ordinaire soit celle de la requête, mais seulement dans le cas où elle doit être portée à un autre tribunal que celui qui connaît du procès dans lequel a été produit le jugement qu'on veut faire tomber.

Quant à la question de savoir si ces formes sont de rigueur, nous croyons qu'il faut distinguer le cas où la tierce opposition est principale de celui où elle n'est qu'incidente.

peuvent former tierce opposition aux jugements intervenus dans cet intervalle; mais qu'ils sont recevables à se pourvoir de la sorte contre ceux qui auraient été rendus avant la prévention d'émigration', ou depuis la cessation des effets de leur mort civile. [. notre ques tion précédente.]

(1) A l'exemple de Locré, Esprit du Code de proc., t. 2, p. 288, nous réunissons ces deux articles, parce qu'ils n'auraient pas dû être séparés, ou que si l'on voulait les maintenir divisés, on aurait dû ne comprendre dans le premier que la disposition relative à la tierce opposition formée par demande principale.

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[10 La tierce opposition à des arrêts de l'ancien conseil du roi, sur une question de propriété domaniale, doit être portée devant les tribunaux ordinaires. (12 août 1818.-. nos principes de compétence et de juridiction administrative.)

20 On peut former tierce opposition contre un jugement avant l'expiration du délai donné pour interjeter appel. (Bordeaux, 29 juin 1833; Devilleneuve, t. 33, 2o, p. 503.)]

(3) Car la forme de requête ne peut être employée que dans les instances incidentes. (Rennes, 2 sept. 1818.)

Dans le premier, l'affirmative ne nous paraît pas douteuse par cela seul qu'elle a pour objet de s'opposer par une action directe et distincte à un jugement dont l'exécution ne peut être arrêtée qu'au moyen d'une instance nouvelle, la tierce opposition principale ne peut être formée que par exploit ordinaire, et c'est avec raison, selon nous, qu'on a jugé d'après ces principes (Turin, 14 mars 1808) qu'elle ne peut avoir lieu par acte d'avoué à avoué, sur le motif que cette manière de procéder est contraire à l'art. 475.

Toutefois, l'article ne doit pas être entendu dans ce sens, que l'exploit doive, à peine de nullité, contenir le mot tierce opposition. Il suffit qu'on se soit pourvu par action principale, encore bien que l'exploit ne contienne pas le mot tierce, pour que l'opposition doive être déclarée recevable. (Rennes, 5 juin 1817.) Dans le second cas, au contraire, nous ne voyons pas pour quelle raison la tierce opposition incidente serait astreinte à une forme sacramentelle; l'art. 475 n'attache pas la peine de nullité à l'omission de cette formalité, et rien n'empêche que, dans ce cas, la tierce opposition, qui se porte toujours devant le tribunal saisi de l'action principale et où elle a pris naissance, n'y soit formée ou par conclusions verbales sur la barre, lorsque cette exception est nécessaire (Colmar, 9 août 1814; Sirey, t. 15, p. 152; Dalloz, t. 19, p. 483; et Metz, 23 mars 1820; Dalloz, t. 27, p. 225), ou bien par assignation, comme l'a décidé la cour de Toulouse, le 18 août 1827 : c'est aussi l'opinion de Thomine, no 327.

Un arrêt de la cour d'Orléans, à la date du 22 nov. 1822, semble bien avoir décidé le contraire; mais on se convaincra, en l'examinant de près, que cette décision ne doit être attribuée qu'à la circonstance qu'en déclarant se porter, en tant que de besoin, opposant ou tiers opposant, la partie avait cumulé deux voies qui s'excluent mutuellement, ainsi que l'a jugé la cour de Montpellier, le 1er fév. 1809, en faisant une saine application des principes.]

1724. Mais est-elle sujette au préliminaire de conciliation?

Les auteurs du Praticien, t. 3, p. 274, se déclarent pour l'affirmative, attendu qu'aucune disposition du Code n'excepte du préliminaire dont il s'agit la tierce opposition formée par action principale. Pigeau, liv. II, part. 4, tit. Ier, ch. 2, est d'un avis contraire; il se fonde sur ce que la tierce opposition est une espèce d'intervention. Or, l'art. 49 excepte l'intervention de la formalité de la conciliation.

On peut encore appuyer cette opinion de Pigeau du passage ci-dessus transcrit, p. 195,

du discours de Bigot de Préameneu, où il dit que la tierce opposition ne peut être considérée que comme une intervention; motif pour lequel elle ne peut se faire que devant le tribunal où la cause principale a été portée. Quoi qu'il en soit, on peut argumenter, en faveur de l'opinion des auteurs du Praticien, de la règle générale posée dans l'art. 48; et comme l'art. 49 n'y fait aucune exception relativement à la tierce opposition, il nous paraît du moins qu'il est prudent de soumettre à l'essai de conciliation la tierce opposition à former par action principale.

[Le conseil de Carré nous paraît très-sage. La tierce opposition peut bien être considérée d'une manière indirecte, comme une intervention, dans ce sens qu'elle tend à remettre en question ce qui a été jugé, et à le faire rétracter. Mais cette consideration, d'un ordre secondaire, ne fait pas qu'on puisse assimiler la tierce opposition, en général, à l'intervention dont elle diffère si profondément sous d'autres rapports, ainsi que l'enseigne Boitard, sur l'art. 476. Il arrive fréquemment, en effet, qu'elle est dirigée comme action principale contre un jugement en dernier ressort ou contre un arrêt; et dès lors, comment soutenir en ce cas que le tiers opposant intervient dans une instance définitivement vidée entre les parties?

Ce qui fait, dit Boitard, ubi suprà, que l'intervention a été dispensée du préliminaire de conciliation, c'est qu'elle est nécessairement incidente.

Si donc ce caractère se retrouve dans la tierce opposition, elle demeurera soumise aux mèmes conséquences; dans le cas contraire, les règles imposées à toute autre espèce de demandes devront la régir.

Cela posé, il est facile d'apercevoir la différence qui existe entre les deux espèces de tierce opposition admises par le Code, et les conséquences naturelles qui en découlent.

La tierce opposition est-elle formée d'une manière incidente, elle ne sera plus alors introductive d'instance, et, par suite, point de conciliation préliminairement nécessaire : tandis qu'elle devra au contraire subir l'épreuve dont ne la dispense aucune disposition législative, si elle est intentée par action principale, c'est-à-dire sans avoir été nécessitée par aucune autre espèce de contestation existante.

Cette doctrine, enseignée par Demiau, p. 337, et Boitard, loc. cit., se trouve consacrée par plusieurs arrêts de la cour de Paris, des 21 pluv., 29 prair. an x, 5 pluv. et 3 prair. an XI (Sirey, t. 7, p. 974; Dalloz, t. 25, p. 357; Pasicrisie, à cette date).

Pigeau, ubi suprà, qui ne se range pas à notre opinion, trouve extraordinaire que la tierce opposition soit soumise à la conciliation, lorsqu'elle est portée à un tribunal de pre

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