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7 janvier 1812; Sirey, t. 12, 1re, p. 148; Dalloz, t. 2, p. 104; et Rennes, 7 sept. 1808.)

[Tous les auteurs sont unanimement d'accord sur l'interprétation de cet article, relativement au pouvoir discrétionnaire qu'il donne au juge; et l'on peut joindre aux opinions déjà citées, celles de Demiau, p. 338; de Favard, t. 5, p. 614; de Thomine, no 529; de Poncet, nos 424 et suiv.; de Boitard, sur l'art. 477, et l'autorité même de la cour de cass., arrêt du 4 fév. 1834 (Devilleneuve, t. 34, 1re, p. 349).

Mais dans le cas où le tribunal saisi de la contestation principale aurait passé outre, en vertu du pouvoir que la loi lui confère, quel serait le moyen de faire reformer sa décision, si, plus tard sur la tierce opposition, il intervenait une décision diametralement contraire?

Le remède, dit Boitard, loco citato, se trouve textuellement écrit dans l'art. 504, C. proc. civ., qui prévoit spécialement le cas de cette contrariété de jugements survenus entre les mêmes parties, devant deux tribunaux différents, qui autorise dans ces circonstances le pourvoi en cassation. (Voy. suprà, p. 179, et notre observation IV, sur la Question 1709.)]

ART. 478. Les jugements passés en force de chose jugée, portant condamnation à délaisser la possession d'un héritage, seront exécutés contre les parties condamnées, nonobstant la tierce opposition et sans y préjudicier.

Dans les autres cas, les juges pourront, suivant les circonstances, suspendre l'exécution du jugement.

C. civ.,

Ordonnance de 1667, tit. XXVII, art. 11. art. 1519 et 1351. C. proc., art. 135 et 497. [Devilleneuve, vo Tierce opposition, nos 76 à 80.-Locré, t. 9, p. 339, no 5; p. 571, no 29, et p. 584 et suiv.,

no 23.] (Voy. FORMULE 383.)

CCCXCVI. L'article qui précède pose, quant à l'exécution du jugement attaqué par la tierce opposition incidente ou principale, cette autre règle générale, qu'une tierce opposition ne doit point être un obstacle à l'exécution contre les parties qui, après avoir été appelées, ont été condamnées par ce jugement.

Mais, d'une autre part, cette exécution du jugement contre les parties condamnées ne doit pas préjudicier aux droits du tiers oppo

sant.

Ce sont des principes d'une justice évidente. Tel était l'esprit de l'ordonnance de 1667, et elle s'exécutait ainsi. Mais on s'était borné à y prévoir le cas où le jugement aurait condamné à délaisser la possession d'un héritage, et, dans ce cas, l'exécution était ordonnée nonobstant l'opposition des tierces personnes, et sans préjudice à leurs droits.

On avait mis cette disposition, tant pour réprimer, d'une manière spéciale, l'abus des tierces oppositions provoquées par ceux qui étaient condamnés à délaisser des héritages, que pour écarter la difficulté qu'un tiers opposant aurait voulu fonder sur ce qu'il eût souffert préjudice par le seul fait du délaissement à son adversaire.

Cette disposition salutaire a été consacrée par l'art. 478, mais en exprimant de plus que, dans les autres cas, les juges pourront, suivant les circonstances, suspendre l'exécution. Tel serait le cas où le tiers opposant réclamerait la propriété d'un meuble dont la vente aurait été ordonnée par le jugement; tels seraient, en géneral, ceux où l'exécution serait préjudiciable au tiers opposant. (Exposé des motifs.)

1732. Quels sont les cas dans lesquels l'exécution du jugement attaqué ne peut étre suspendue, et ceux dans lesquels elle peut l'étre par ordre des juges?

Il faut distinguer, d'après l'art. 478, les jugements passés en force de chose jugée, et portant condamnation à délaisser la possession d'un héritage, des jugements qui prononcent d'autres condamnations.

A l'égard des premiers, le tribunal saisi de la tierce opposition ne peut en ordonner la suspension, d'après la première disposition de l'article, conforme, en ce point, à l'art. 11 du titre XXVII de l'ordonnance. Ils doivent donc être exécutés contre les parties condamnées, nonobstant la tierce opposition, et neanmoins sans préjudicier aux droits du tiers op

posant.

Mais il est entendu qu'il faut pour cela la double circonstance que le jugement porte condamnation à délaisser la possession de l'héritage, et qu'il soit passé en force de chose jugée. Si, par exemple, cette dernière circonstance n'existait pas, il nous paraît évident que la tierce opposition produirait l'effet de permettre au tribunal devant lequel elle serait portée de suspendre l'exécution du jugement attaqué, c'est-à-dire d'user de la faculté que lui donne la seconde disposition de l'article, à l'égard de tout jugement qui prononcerait d'autres condamnations que celles en délaissement d'immeubles. (Voy. Demiau, p. 338.)

Nous remarquerons maintenant qu'en général les cas où les juges peuvent, d'après cette seconde disposition de l'art. 478, suspendre l'exécution du jugement attaqué, sont ceux où l'on aurait à craindre que les effets de l'exécution ne fussent irréparables en définitive, comme il pourrait arriver, si, par exemple, le tiers opposant réclamait la propriété d'un meuble dont la vente aurait été ordonnée par le jugement attaqué. (Voy. Nouv. Répert., au mot Opposition (tierce), $ 5, p. 76, no 5,

et Pigeau, liv. II, part. 4, tit. Ier, ch. 2.) Dans tous les cas, nous pensons que le sursis à l'exécution ne peut être accordé que sur la demande de l'opposant, qui prouve que l'exécution peut lui nuire, et qu'elle ne serait pas réparable en definitive. (Voy. Demiau, p. 359.)

exemple, l'impuissance égale dans laquelle elles sont d'empêcher le jugement de sortir effet, toujours est-il qu'il y a cette immense différence entre un jugement simplement exécutoire par provision et celui qui a acquis l'autorité de la chose jugée, que le dernier est inattaquable, tandis que l'autre, nonobstant le [Il nous parait bien plus simple, dans le seul privilége transitoire dont il jouit, n'en demeure cas où nous admettons la tierce opposition, pas moins soumis à la voie de l'appel, qui supra, Quest. 1709, de prendre la voie d'op-appartient encore à la partie condamnée. position qui fait nécessairement tomber la décision obtenue.

Quant aux effets des jugements rendus, nous avons démontré qu'ils étaient nuls vis-à-vis du tiers, qui, s'il s'agit d'un effet mobilier, a toujours le droit d'obtenir une ordonnance qui permet de saisir-revendiquer ce meuble entre les mains de celui qui le détient (art. 826 et suiv., C. proc. civ.), ou qui peut prendre la voie d'action possessoire, à l'aide de laquelle il se fera maintenir en possession, s'il s'agit d'un immeuble.

Ces voies sont, à notre sens, bien préférables aux résultats incertains et arbitraires de la tierce opposition.]

Il n'est donc pas exact de dire, comme le fait Pigeau, qu'il y á identité de raison.] 1733. Quel est l'effet de la tierce opposition, par rapport à ceux qui ont été parties dans le jugement attaqué par voie de tierce opposition?

Le jugement qui admet la tierce opposition ne doit, en général, rétracter le premier jugement qu'en ce qui concerne le droit et l'intérêt personnel de l'opposant. (Cass., 23 germ. an vi, 15 pluv. an Ix et 5 juill. 1810.)

Mais cette règle reçoit exception, lorsque l'objet de la première contestation est indivisible; par exemple, lorsqu'il s'agit de servi[1732 bis. La première disposition de l'ar-cuter le premier et le second jugement: alors, tude, lorsqu'il y a impossibilité absolue d'exéticle 478 peut-elle s'appliquer au jugement qui n'est pas passé en force de chose jugée, quand il est exécutoire par provision (1)?

Pigeau, Comm., t. 2, p. 69, résout affirmativement la difficulté, parce que, dit-il, il y a même raison de décider que dans le cas où le jugement a l'autorité de la chose jugée. Nous n'adoptons pas cet avis.

Sans doute la vérité des motifs d'interprétation, que Pigeau invoque à l'appui de son opinion, nous paraît suffisamment ressortir du texte mème de l'art. 478; sans doute c'est parce qu'on a dù craindre que le possesseur d'un héritage, condamné souverainement à le délaisser, et n'ayant plus pour attaquer la sentence aucune voie ordinaire, ni, par conséquent, aucune voie suspensive, ne cherchât, au moyen d'une tierce opposition simulée, à mettre obstacle à l'exécution du jugement; mais Pigeau nous semble perdre de vue que cette disposition du 1er § de l'article est exceptionnelle, et que pour en légitimer l'application, c'est-à-dire pour enlever au juge la faculté que la loi lui accorde dans tous les autres cas, celle de suspendre l'exécution du jugement, il faut le concours des deux circonstances qu'il énumère tous les auteurs sont d'accord sur ce point. Or, quelle que soit l'analogie de position que l'on puisse signaler, dans les deux cas, entre les parties condamnées, et par

(1) [Cette question n'a d'intérêt qu'autant qu'on n'adopte pas nos principes, bien plus simples, ex

il faut bien que le premier soit rétracté à l'égard de toutes les parties. (V. les arrêts cidessus cités, et Nouv. Répert., ubi suprà, $ 3.)

C'est la seule exception que l'on puisse admettre à la règle générale que l'effet d'une tierce opposition jugée valable est de faire prononcer la rétractation du jugement attaqué par cette voie au profit de l'opposant seulement, et en ce qui ne concerne que son intérêt et son droit personnel. Si donc, comme on l'a vu quelquefois, et comme Demiau, p. 355, paraît insinuer qu'on le puisse faire, un tribunal préférait à la rigueur de cette règle la voie de l'équité, qui, suivant les expressions de Merlin, lui parlerait en faveur des parties condamnées injustement, il y aurait lieu de croire que la décision serait cassée, si les parties se pourvoyaient contre elle.

Aux autorités sur lesquelles nous avons fondé cette proposition, on doit ajouter les arrêts de la cour de cass., des 28 août 1811 et 12 janv. 1814 (Sirey, t. 11, 2, p. 352, et t. 14, p. 246; Dalloz, t. 27, p. 228).

Nous remarquerons que, suivant un acte de notoriété du 18 juill. 1716, rapporté par Devolant, in fine (voy. aussi Duparc-Poullain, t. 10, de ses Princip.), la partie condamnée contre laquelle il y avait tierce 'opposition pouvait, en Bretagne, présenter requête en déclaration d'arrêt commun, de sorte, disait Du

posés suprà, Quest. 1709. (V. aussi notre question précédente.)]

parc, que si l'arrêt opposé était rétracté sur | principes sont rigoureux : Dura lex sed l'opposition, il l'était également pour la scripta.] partie condamnée. Aujourd'hui, d'après ce que nous avons dit ci-dessus, il est certain que la tierce opposition ne profite, en général, qu'au tiers opposant, et qu'il n'y a d'exception que pour le cas où il est absolument impossible d'exécuter séparément, et le jugement opposé et celui qui le rétracte.

[1733 bis. Les actes d'instruction qui ont servi de base au jugement attaqué, comme une enquête ou un rapport d'experts, peuvent-ils être pris en considération par les juges de la tierce opposition?

Favard, t. 5, p. 614, pense que cela dépend Des jugements de première instance étant des circonstances dont l'appreciation est laissée attaqués par des tiers, soit par appel, soit par à la prudence du juge. Le demandeur peut tierce opposition, une cour royale ne peut les bien conclure à ce que les actes soient recomannuler comme frauduleux, sans recevoir l'ap-mencés avec lui; mais le juge peut, suivant pel ou la tierce opposition, et sans prononcer les cas, ne pas l'ordonner, parce que la tierce préalablement sur les fins de non-recevoir. opposition n'annule pas ces actes; et quelle (Cass., 50 août 1808; Sirey, t. 8, 2o, p. 547.) que soit sa décision sur ce point, elle n'offre [Telle que nous la concevons (voy. supra, pas, en général, prise à la censure de la cour p. 179, Quest. 1709), la tierce opposition n'est de cassation. C'est en effet ce qu'a jugé un ouverte qu'en faveur de celui qui, condamné arrêt de cette cour du 1er août 1821 (Sirey, sans avoir été appelé, veut faire tomber la dét. 21, p. 455). cision illégalement obtenue contre lui; mais il ne le peut qu'autant qu'il n'y a ni solidarité, ni indivisibilité, car dans ces deux cas le jugement obtenu contre son coobligé solidaire ou indivisible est censé rendu contre lui, ainsi que nous le décidons, Quest. 1565, et au titre de la Requête civile, Quest. 1794 bis.

Si la matière est divisible, évidemment la tierce opposition ne profitera qu'à celui qui l'aura formée, et qui aura réussi. Les juge

ments ou arrêts obtenus contre des coïntéressés n'en conserveront pas moins toute leur force.

Ainsi nous partageons l'opinion de Carré sur ce dernier point, mais nous ne voyons pas d'application possible de sa doctrine en cas d'indivisibilité.

On peut consulter sur la distinction établie par Carré, Pigeau, Comm., t. 2, p. 66; Favard, t. 5, p. 615; Berriat, titre de la Tierce opposition, no 5, note 24, et les arrêts des cours de cassation des 6 fruct. anxet 8 avril 1829 (Sirey, t. 29, p. 150); de Nimes, 18 fév. 1807 (Sirey, t. 7, p. 338; Dalloz, t. 27, p. 184), et de Besançon, 12 juill. 1828 (Sirey, t. 28, p. 144). Nous ajouterons que, comme dans l'espèce de l'arrêt de l'an x, nous ne voyons pas l'indivisibilité légale, dans le cas où, pour une vente, pour un ordre, la plainte d'un acquéreur où d'un créancier fait tomber plusieurs ventes successives, ou un ordre tout entier. Ce n'est pas l'application des principes d'indivisibilité qui produit ce résultat, c'est que, par rapport à celui qui obtient gain de cause, toutes les autres parties étaient ses adversaires, et que tout ce qu'elles ont fait juger entre elles ne pourrait pas lui être opposé; car, nous le répéterons en terminant, s'il y avait véritablement indivisibilité d'intérêt, les principes s'opposeraient à toute rétractation de la part d'une partie liée d'avance par la condamnation obtenue contre son coobligé, ou coïntéressé. Ces

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Voy., pour les diverses positions dans lesquelles la tierce opposition est recevable, la Quest. 1709, qui doitavoir une grande influence

sur la solution de celle-ci.]

ART. 479. La partie dont la tierce oppoamende qui ne pourra être moindre de sition sera rejetée, sera condamnée à une 50 francs, sans préjudice des dommages et intérêts de la partie, s'il y a lieu.

Ordonnance, tit. XXVII, art. 10; Règlement de 1758. -C. civ., art. 114.-C. proc., art. 213, 471 et 1029. -[Devilleneuve, eod. verb., nos 74 et 75.-Locré, t. 9, p. 359, no 5, et p. 384, no 23.]

CCCXCVII. L'ordonnance de 1667 condamnait le tiers opposant débouté de son opposition à une amende de 150 fr. s'il s'agissait d'un arrêt, et de 73 fr. s'il s'agissait d'une sentence; le tout applicable, moitié au profit du domaine, et moitié envers la partie. L'article 479 a rejeté ce partage, inadmissible en fait d'amende, et il l'a fixée à 50 fr. au moins; mais il ajoute que ce sera sans préjudice des dommages et intérêts des parties, s'il y a lieu, seule manière de punir dignement un manque de respect à la sainteté des jugements, et de pourvoir avec justice au dédommagement des parties lésées. (Rapp. au Corps législatif.) 1734. La condamnation à l'amende peutelle excéder la somme de 30 fr.?

Suivant les auteurs du Prat., t. 3, p. 279, il résulterait de la rédaction de l'art. 479, que cet article n'aurait fixé que le minimum de l'amende, et donné au juge la faculté de la porter à tel taux qu'il jugerait convenable.

Plusieurs cours d'appel avaient réclamé contre cette rédaction, et demandaient que l'amende fût invariablement fixée; cependant elle a été maintenue, et c'est particulièrement

Quant à la quotité de l'amende, que fixe cet article dans le but de rendre les tierces oppo

d'après cette circonstance que les auteurs du Praticien estiment que l'amende peut être fixée par le juge à une somme excédant 30 fr.sitions moins fréquentes, il nous parait qu'en Hautefeuille, p. 286, pense le contraire, at- principe, et de ce que les réclamations des tendu, dit-il, que toutes les fois qu'il s'agit cours ont été infructueuses pour modifier la d'une peine, elle doit être restreinte dans ses rédaction qui a maintenu le minimum de l'ajustes limites. Or, dans l'espèce, la loi a dit mende, sans s'occuper du maximum, il faut que l'amende ne pourrait être moindre de 50 fr.; conclure que la loi a voulu laisser à la prumais elle n'a pas dit non plus qu'elle pourrait dence du juge la faculté de l'élever suivant les excéder cette somme. circonstances, ainsi que l'enseignent Favard, t. 5, p. 316, et Thomine, loco citato.

Nous serions assez porté à adopter cette opinion; car s'il était permis de porter l'amende au-dessus de 30 fr., cet excédant serait arbitraire, et il ne doit jamais exister d'arbitraire, si ce n'est entre un minimum et un maximum fixés par la loi. D'ailleurs, le tribun Albisson paraît avoir expliqué en ce sens l'art. 479, puisqu'il dit, dans son rapport au Corps législatif (voy. édit. de F. Didot, p. 172), que le Code a fixé l'amende à 30 fr. au moins. Mais nous devons dire que Merlin, Nouv. Rép., ubi suprà, § 3, p. 761, paraîtrait professer l'opinion contraire. Aujourd'hui, dit-il, l'amende ne pourrait plus être exigée si elle n'était pas prononcée, car le taux n'en est plus déterminé par la loi; elle en a seulement fixé le minimum à 50 fr.

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Nous devons dire néanmoins que Boitard, sur l'art. 479, est d'un avis contraire. Il pense qu'à raison de nos habitudes judiciaires, qui répugnent en matière civile aussi bien qu'en matière pénale à l'idée d'amendes arbitraires, le minimum de l'art. 479 doit être tout ensemble, dans la pratique, un minimum et un maximum; en d'autres termes, que l'amende ne doit jamais être au-dessus ni au-dessous de cinquante francs, comme en matière de pourvoi devant la cour de cassation où, quoiqu'il n'y ait aussi qu'un minimum de fixé et que le règlement de 1758 permette de varier le taux de l'amende suivant certaines distinctions, l'amende est toujours la même.]

1735. L'amende et les dommages-intérêts ont-ils lieu, quelles que soient les causes du rejet de la tierce opposition?

On doit les prononcer dans tous les cas de rejet, soit par nullité, soit par fin de non-recevoir, soit par débouté au fond, parce que l'article s'exprime sans distinction, à la difference de l'art. 10 du tit. XXVII de l'ordonnance de 1667, qui ne prononçait l'amende que contre celui qui était débouté. (Pigeau, t. 2, p. 157, no 604.)

Mais si l'amende ne peut être exigée, si le jugement ne la prononce pas, il n'en reste pas moins vrai que les juges sont obligés d'en prononcer la condamnation d'office; car la loi prescrit impérativement cette condamnation, et l'art. 1029 dispose qu'aucune des peines prononcées par le Code ne peut être comminatoire. [C'est aussi ce qu'à décidé un arrêt de la cour suprême du 25 mars 1825 (Sirey, t. 24, p. 158; Dalloz, t. 5, p. 405), et ce qui résulte de la manière la plus explicite d'une lettre du ministre des finances, en date du 4 mars 1826, où se trouve relatée une invitation de M. le [Nous avons adopté cette opinion dans notre garde des sceaux aux procureurs du roi, dans Comm. du Tarif, t. 2, p. 8, no 27, et nous la personne d'un de leurs collègues, pour qu'ils avons posé le même principe au titre de l'Apaient désormais à veiller à ce que les disposi-pel, suprà, Quest. 1694 bis. tions des art. 213 et 479, C. proc., soient exactement observées.

Nous pensons, néanmoins, que si les magistrats omettaient de remplir cette obligation, l'amende ne pourrait avoir lieu de plein droit et sans condamnation. C'est ce qu'il faut induire, avec Thomine, no 531, de ces mots du texte, la partie sera condamnée. (V. aussi notre Quest. 1694 quater.)

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Toutefois, nous devons dire que les auteurs et la jurisprudence sont plus indulgents que nous et permettent en ce cas de ne pas condamner à l'amende prévue par l'art. 479. (V. Pigeau, Comm., t. 2, p. 65; Favard, t. 5, p. 616; Thomine, no 551, et les arrêts de Brux., 9 avril 1808, et de Paris, 22 janv. 1810; Sirey, t. 14, p. 406; Dalloz, t. 1, p. 449.)]

TITRE II.

DE LA REQUÊTE CIVILE.

S'il est juste que les parties qui n'ont pas été appelées à un jugement qui leur porte préjudice, soient admises à s'opposer à ce jugement, il ne l'est pas moins lorsqu'une décision, rendue en dernier ressort, ne repose pas sur les bases essentielles posées par la loi, que les parties ou leurs héritiers aient (1) la faculté de démontrer au juge l'erreur qu'il a commise, et d'obtenir de lui la rétractation de la décision et un jugement nouveau. (Exposé des motifs.)

De là naît la voie extraordinaire de la requéte civile (2). On peut la définir une demande tendante à faire rétracter en totalité ou en partie un jugement en dernier ressort ou un arrêt soit contradictoire, soit par défaut, mais non susceptible d'opposition. (Art. 480.) Cette demande opère contre la chose jugée une sorte de restitution dont l'effet, lorsque la requête est admise, est de remettre les parties, par rapport au jugement ou au chef de jugement entrepris, au mème état où elles étaient avant qu'il eût été prononcé. (Art. 501.)

Mais comme rien n'est plus respectable que l'autorité de la chose jugée, on a dû prévenir l'abus que, sous les plus légers prétextes, les parties pourraient faire de la requète civile, en déterminant les cas dans lesquels elle peut être admise, en l'assujettissant à des formes spéciales, en déclarant qu'elle n'empêche point l'exécution du jugement attaqué; enfin, en punissant d'une amende celui qui l'aurait témérairement formée. (Art. 492, 498 et 500.)

Il intervient sur la requête civile, c'est-à-dire sur l'acte contenant le pourvoi, deux sortes de jugements: l'un sur le rescindant, que l'on plaide d'abord; l'autre sur le rescisoire, que l'on plaide ensuite si la requète est entérinée (3).

ART. 480. Les jugements contradictoires rendus en dernier ressort par les tribunaux de première instance et d'appel, et les jugements par défaut rendus aussi en dernier ressort, et qui ne sont plus susceptibles d'opposition, pourront être rétractés sur la requête de ceux qui y auront été parties ou dùment appelés, pour les causes ci-après :

1° S'il y a eu dol personnel;

2o Si les formes prescrites à peine de nullité ont été violées, soit avant, soit lors des jugements, pourvu que la nullité n'ait pas été couverte par les parties;

5° S'il a été prononcé sur choses non demandées;

4° S'il a été adjugé plus qu'il n'a été demandé;

5o S'il a été omis de prononcer sur l'un des chefs de demande;

6o S'il y a contrariété de jugements en dernier ressort, entre les mêmes parties et sur les mêmes moyens, dans les mêmes cours ou tribunaux;

(1) V. les observations que nous avons faites, infrà, art. 480, sur la question de savoir si elle est ouverte en faveur des ayants cause.

(2) Le mot requête civile rappelle qu'en attaquant ie jugement, on ne doit rien exprimer dans la requête qui soit offensant pour le magistrat qui l'a rendu. Suivant Loiseau, Traité des offices, p. 91, no 66, on aurait dit requête civile, pour distinguer cette voie extraordinaire, fondée sur certains moyens particuliers qu'on pallie civilement et accortement, de la surprise de la partie, des simples requêtes ou plaintes qu'on faisait autrement contre les sentences des baillis et sénéchaux, et qui étaient plutôt accusations que procédures civiles. Cette observation ne cesse pas de subsister, quoique, suivant plusieurs auteurs, la qualification de requête civile ne soit employée que pour exprimer que le pourvoi dont il s'agit n'a point lieu dans les affaires criminelles.

(5) I importe d'expliquer ces trois termes de pratique.

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Rescindant signifie, en général, tout moyen qui sert à faire rescinder, autrement annuler un acte. Appliqué à la requête civile, il exprime l'ensemble des moyens qui y donnent ouverture, d'après l'art. 480, et qui, s'ils sont jugés fondés, font rétracter le jugement.

Plaider sur le rescindant, juger le rescindant, c'est donc plaider, c'est prononcer sur ces moyens. S'ils sont admis, on dit que la requête civile est entérinée, c'est-à-dire qu'elle produit son effet en remettant les parties dans le même et entier état où elles étaient avant que le jugement rétracté, par suite de cette admission, eût été rendu (art. 501).

C'est alors que l'on plaide pour faire prononcer sur le rescisoire, c'est-à-dire sur la contestation principale que le jugement rétracté avait terminée.

Le rescisoire est jugé par les mêmes juges qui ont prononcé sur le rescindant (art. 502). En cela, on est revenu aux anciens principes, qui avaient été abrogés en ce point par une loi du 18 fév. 1791.

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