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vard, t. 4, p. 355, adopte avec nous cette opinion.]

ART. 510. Néanmoins aucun juge ne pourra être pris à partie, sans permission préalable du tribunal devant lequel la prise à partie sera portée.

[Tar. rais., no 389.] — Règlement des 4 juin 1699, 17 mars 1700 et 18 août 1702, et le Comment. de l'article 508. [Locré, t. 9, p. 326 et 375, no 46.]

CCCCXVII. Ce serait en vain que l'on eût énoncé dans la loi les causes qui autorisent la prise à partie, s'il suffisait de les alléguer pour qu'un juge fût traduit en justice. Il est donc également indispensable que de pareilles allégations soient soumises d'abord à l'examen du tribunal devant lequel la demande sera intentée; il la rejettera, si, dénuée de vraisemblance, elle ne lui paraît avoir d'autre fondement que des passions ou des ressentiments contre la justice.

1813. Avant d'obtenir la permission exigée par l'art. 510, faut-il citer en conciliation? Cette permission ne peut-elle étre accordée qu'après communication au ministère public?

L'essai de conciliation n'est pas nécessaire (art. 49, § 7); mais il en est autrement de la communication au ministère public (art. 83, § 5).

[C'est aussi le sentiment de Thomine, no 559, et le nôtre. (V. Quest. 1822.)]

1814. La permission de prendre à partie un juge qui ne serait pas désigné suffirait-elle?

Non; on doit indiquer le magistrat contre lequel l'action sera dirigée. (V. Denisart, au mot Prise à partie, et Pigeau, liv. II, part. 4, tit. II.)

la fraude ou la concussion, la partie estelle obligée d'en administrer les preuves avec sa requête ?

Elle n'y est évidemment obligée qu'autant qu'elle a des preuves écrites; mais si elle ne peut prouver que par témoins, elle détaille les faits, et s'ils sont admissibles, la cour ordonne enquête. (Voy. Pigeau, liv. II, part. 4, tit. II.)

[Nous dirons de plus, comme Thomine, n° 553, que de telles accusations, même au civil, ne doivent être ni intentées ni admises, s'il n'y a pas évidence de preuves.] [1815 bis. Dans le cas où la partie ne peut pas signer, l'avoué qu'elle charge de présenter la requête ne peut-il pas déclarer au bas que sa partie est dans l'impuissance de signer?

-

Non, sans doute; l'art. 511 est formel, il faut que la requête soit signée par la partie ou par un fondé de procuration authentique et spéciale. C'est aussi ce que nous avons décidé en matière de désaveu et de récusation. (Voy. t. 1, no 195, et ce qu'enseignent, en outre Demiau, p. 356, et Dalloz, t. 23, p. 8. Voy. au surplus Lepage, p. 547, 1re Quest.)] [1815 ter. La récusation dirigée contre tous les membres d'un tribunal est-elle non recevable, si elle n'est formée ainsi qu'il est prescrit en matière de prise à partie?

Nous avons résolu négativement cette ques

tion, sous l'art. 568, Quest. 1557.]

ART. 512. Il ne pourra être employé aucun terme injurieux contre les juges, à peine, contre la partie, de telle amende, et contre son avoué, de telle injonction ou suspension qu'il appartiendra.

C. proc., art. 377, 1036. [Locré, t. 9, p. 326 et 375, no 47.]

[Parce que la moindre incertitude ne saurait être permise dans une matière si délicate, et qu'on n'a entourée de formalités nombreuses que pour mettre la dignité des magistrats à l'abri des injustes et aveugles attaques de l'in-lier d'Aguesseau, dans un réquisitoire du 4 juin térêt personnel, blessé par un jugement.]

ART. 511. Il sera présenté à cet effet une requête signée de la partie ou de son fondé de procuration authentique et spéciale, laquelle procuration sera annexée à la requête, ainsi que les pièces justificatives, s'il y en a, à peine de nullité.

(Tar. rais., no 389.] Règlement des 4 juin 1699 et 8 août 1702. [Locré, t. 9, p. 326 et 335, no 18.] -(Voy. FORMULE 393.)

CCCCXVIII. « Les parties, disait le chance1699, doivent garder un silence respectueux sur la conduite des ministres de la justice, jusqu'à ce que la justice elle-même ouvre la bouche à leur plainte. » Le caractère de juge doit donc être respecté dans la requête même qui a pour objet d'ètre autorisé à le poursuivre; aussi l'art. 512 défend-il, sous des peines graves contre la partie et même contre son avoué, d'y employer aucun terme injurieux.

ART. 513. Si la requête est rejetée, la partie sera condamnée à une amende qui 1815. Lorsque la requête porte sur le dol, ne pourra être moindre de 300 fr., sans

préjudice des dommages-intérêts envers | [1815 sexies. Quel est le pouvoir du juge reles parties, s'il y a lieu.

C. civ., art. 1146 et suiv. [Locré, t. 9, p. 326 et 559,

Ord. de 1540, art. 2. C. proc., art. 516, 1029. no 31.] (Voy. FORMULE 394.)

CCCCXIX. Il n'est pas besoin d'insister sur les motifs des peines pécuniaires que prononce l'art. 513; mais il convient de faire observer que l'amende est de droit, puisqu'elle est acquise au fisc, et, par conséquent, elle doit être prononcée d'office.

Il en est autrement des dommages-intérêts: il faut qu'ils soient formellement demandés. [1815 quater. Les parties qui ne figurent pas sur la requête, mais qui souffrent du retard dans la procédure, peuvent-elles intervenir dans la demande, pour obtenir des dommages-intérêts par le même jugement qui rejettera la prise à partie? Pigeau, Comm., t. 2, p. 111, pense qu'on doit décider la négative, parce que, dit-il, avant le jugement sur cette requête en prise à partie, leur demande est prématurée : car, ou la requête sera admise, et alors, ce sera seulement dans l'instance en prise à partie qu'elles devront intervenir, ou la requête sera rejetée, et, alors, le tort qu'elles auraient éprouvé par le retard étant constant, elles pourront demander des dommages-intérêts par une demande incidente. Nous adopterions en ce cas l'intervention en la soumettant, quant aux frais, aux règles que nous avons développées au titre de l'Intervention, Quest. 1270. (Voy. infrà, sous l'art. 516, notre Comm. CCCCXX ter.)]

[1815 quinquies. De ce que la plainte du plaideur contre le juge est attribuée a la connaissance de la cour royale, peut-on en induire que le juge outragé à raison de ses fonctions, soit par lettres, soit par libelles, pourrait également, s'il ne voulait pas prendre la voie correctionnelle, obtenir de la cour la permission de traduire le plaideur devant elle à fins ci

viles?

Non, dirons-nous avec Thomine, no 558, rien n'indiquant dans la loi l'existence du droit réciproque qu'il s'agirait de créer ici, en faveur du juge; mais il pourrait intervenir dans l'instance en prise à partie, comme tout autre justiciable qu'elle léserait indirectement (voy. la question précédente), pour obtenir des dommages-intérêts, en réparation de l'offense qu'il aurait reçue. C'est aussi ce qu'enseigne Pigeau, Comm., t. 2, p. 111; et nous décidons, en conséquence, que si le juge veut intenter une action principale en dommage, il ne peut le faire que dans les formes et devant les tribunaux ordinaires.]

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lativement à l'amende?

Comme la raison de décider est ici la même que pour l'art. 479, nous nous contentons de renvoyer à notre Quest. 1734.]

ART. 514. Si la requête est admise, elle sera signifiée dans trois jours au juge pris à partie, qui sera tenu de fournir ses défenses dans la huitaine.

Il s'abstiendra de la connaissance du différend; il s'abstiendra même, jusqu'au jugement définitif de la prise à partie, de toutes les causes que la partie, ou ses parents en ligne directe, ou son conjoint, pourront avoir dans son tribunal, à peine de nullité des jugements.

Tarif, 29 et 75. - [ Tar. rais., no 390.] — Ord, de 1667, tit. XXV, art. 5. — C. proc., art. 378.- [Devil

leneuve, vo Prise à partie, no 10. - Locré, t. 9, p. 327, 375 et suiv., no 158, etp. 359, no 32.] — (Voy. FORMULE 396.)

CCCCXX. L'ordonnance de 1667 avait interdit au juge pris à partie la connaissance du différend qui avait donné occasion à cette attaque, à moins qu'il n'eût été follement intime, et que l'une et l'autre partie ne consentissent qu'il demeurât juge.

On a peine à concevoir, dit Bigot de Préameneu, qu'un plaideur fasse descendre un juge de son tribunal pour l'inculper, et qu'en même temps il consente à l'avoir pour juge; mais ce qui semble évident, c'est qu'un juge contre lequel une prise à partie a été admise compromettrait et sa délicatesse et la dignité de la justice, si, même en supposant ce consentement, il connaissait du différend à l'occasion duquel il a été pris à partie. Il ne serait pas même convenable qu'avant qu'il eût été statué sur la prise à partie, il pût connaitre des autres causes que son adversaire, les parents de cet adversaire en ligne directe, ou la personne qui lui serait unie par mariage, pourraient avoir dans le mème tribunal.

C'est dans cet esprit que la disposition de l'ordonnance a été modifiée. Ainsi, sous tous les rapports, on a pris des précautions pour que la justice soit à l'abri des abus que pourraient commettre ses ministres, et des atteintes que voudrait porter à la dignité du juge l'ani mosité des plaideurs.

1816. La signification de la requête pres crite par l'art. 514 doit-elle être faite au juge dans la personne du greffier, comme les réquisitions exigées par l'art. 507?

L'art. 514 gardant le silence à cet égard, nous ne pensons pas que l'on puisse considérer comme non avenue la signification donnée à la personne ou au domicile du juge; nous

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loi ne prononce pas la déchéance. (Voy. Pigeau, liv. II, part. 4, tit. II.)

[C'est aussi ce qu'enseigne Demiau, p. 356, et ce que nous adoptons avec lui.

L'art. 514 ne fixant pas ce délai à peine de nullité, on ne pourrait pas la prononcer. Lepage, p. 549, 3° Quest., pense avec beaucoup de raison que l'art. 1055, C. proc. civ., serait applicable, et qu'il faudrait augmenter ce délai à raison des distances, soit dans le cas où le domicile du juge serait éloigné, soit dans le cas où, conformément à l'art. 515, il faudrait se pourvoir en cassation pour faire déterminer la cour qui serait compétente.]

[1817 bis. Par quelle voie peut-on_faire prononcer la nullité établie par l'arti

cle 514?

Si la prise à partie n'a été dirigée que contre un juge, et que le tribunal qui a rendu le jugement soit encore en nombre suffisant, on

[1816 bis. La demande à présenter à la cour de cassation, section des requêtes, pour être autorisé à prendre un juge à partie, doit-elle être préalablement noti fiée à ce magistrat, aux termes de l'arti-Pourra se pourvoir devant lui pour faire pro

cle 514?

Un arrêt du 8 therm. an XI (Sirey, t. 3, p. 364; Dalloz, t. 23, p. 8) avait jugé l'affirmative, sous l'empire de l'art. 367, C. de brum. an Iv; mais c'est avec raison que Thomine, no 339, décide qu'il n'est pas nécessaire que la requête ait été préalablement communiquée au juge; les dispositions du Code de procédure répugnent à toute autre interprétation. C'est aussi la procédure qui est suivie devant la cour de cassation; jamais le juge n'est appelé devant la chambre des requêtes.]

[1816 ter. Est-il nécessaire que le juge pris à partie soit assigné à comparaître devant la cour par un exploit séparé?

Nous ne le pensons pas, et nous nous fondons à cet égard sur le silence du Code et du Tarif. Cependant, dira-t-on, il faut bien qu'il y ait un ajournement pour que le juge sache quel jour il doit comparaitre! Cela est vrai, mais pourquoi l'assignation ne serait-elle pas donnée par l'acte même de signification de l'arrêt et de la requête ! C'est ainsi que la loi veut qu'on procède en matière de règlement de juges or, il y a entre les deux cas une parfaite analogie, et nous nous en prévalons. Ajoutons que l'usage est conforme à cette opinion. Il suit de là qu'une assignation donnée au juge pris à partie, par acte séparé, ne doit pas passer en taxe, même pour les déboursés. Nous pouvons ici, comme pour la question précédente, nous étayer de la procédure suivie devant la cour suprème.]

noncer la nullité, si la voie d'opposition est
ouverte; sinon, il faudra employer l'appel ou
la requête civile, selon que le jugement sera
en premier ou dernier ressort. Si le même tri-
bunal ne peut statuer parce qu'il n'est pas en
nombre, il faudra se pourvoir devant la cour
de cassation; c'est ce que disent Pigeau;
Comm., t. 2, p. 112, et Delaporte, t. 2, p. 92.
Berriat, de la Prise à partie, p. 471, note 25,
n° 2, critique sur ce point l'opinion de Pigeau,
il dit que le dol est assimilé à la forfaiture, et
que si la partie n'est pas complice du juge,
c'est le cas de se pourvoir en cassation, parce
d'annuler les actes où les juges ont commis
qu'il entre dans les attributions de cette cour
forfaiture. Y a-t-il bien forfaiture, par cela
seul que le juge pris à partie ne se sera pas
abstenu dans le cas de l'art. 514?]
1818. Doit-on signifier, avec la requête,
l'arrêt qui l'admet?

-

Oui. (Voy. art. 29 du Tarif.)

[Quoique l'art. 514 ne le dise pas, Demiau, p. 356, est du même avis, et l'art. 29 du Tarif ne laisse aucun doute à cet égard.

Cependant, il serait difficile de soutenir qu'il y eût nullité, si l'on se bornait à énoncer le jugement d'admission.]

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[1818 bis. Le juge, sur la signification de la requête, doit-il constituer un avoué?

L'art. 514 faisant courir le délai de huitaine, pour signifier les défenses, du jour de la signification de la requête, il semble que le juge ne doive pas constituer avoué; cependant, ses défenses doivent être signifiées par acte d'avoué. C'est dans cet acte que la constitution se fait en même temps. Telle est l'opinion de Delaporte, t. 2, p. 95, et de Demiau, Nous ne le pensons pas, par le motif que la | p. 356. Le juge pris à partie devient partie,

1817. Si la requête était signifiée après le délai de trois jours, la signification serait-elle réputée non avenue?

[1820 bis. Quelle est la durée de l'action en prise à partie?

dès lors qu'il ne rentre dans aucune exception; I nullité du jugement auquel le juge pris à parpour paraître devant les juges, il doit se con- tie aurait illégalement concouru.] former au préalable imposé à tout plaideur. C'est aussi l'avis de Dalloz, t. 25, p. 8. Mais nous pensons, avec Thomine, no 560, que le délai de huitaine prescrit au juge pour donner ses défenses, n'est point fatal; qu'il le serait évidemment encore moins pour son hé-à ritier (voy. suprà, Quest. 1803), et qu'il n'y a nul doute que la cour doit lui donner tous les délais nécessaires et lui faciliter tous les moyens de justification. (Voy. encore suprà, Quest. 1817.)]

1819. Celui qui prend le juge à partie peutil répondre à l'écrit de défenses fourni par ce dernier?

Il y est autorisé par l'article précité du

Tarif.

[Nous ne donnerons pas le même motif, car cet art. 29 ne parle que de la requète et non de la réponse à l'écrit de défenses du juge, mais nous partageons l'opinion de Carré, parce qu'il faut que la partie puisse relever les erreurs ou les inexactitudes que le juge aurait

La solution de cette question se lie intimement, par la nature même de la prise à partie, celle de savoir si l'action civile se prescrit dans les mêmes délais que l'action publique; nous sommes donc naturellement amené à donner ici notre opinion sur l'une des difficultés les plus graves qui aient été soulevées en matière de prescription.

On sait quelles ont été, à cet égard, les variations de la cour de cassation, dont les divers arrêts ont pu servir tour à tour d'appui aux opinions les plus diamétralement opposées. Longtemps elle a paru admettre que l'action civile en réparation d'un délit n'était soumise à la même prescription que ce délit, qu'autant l'action publique; que, exercée isolément, elle qu'elle était poursuivie simultanément avec n'était régie que par les règles de la prescription ordinaire; mais un arrêt récent, à la date du 3 août 1841 (Devilleneuve, t. 41, 1re, p. 755), s'est formellement prononcé pour le principe contraire, déjà soutenu par Mangin, Traité de l'Action publique et de l'Action civile, nos 363 à 369; et en rapportant ce dernier Cependant l'art. 514 ne parlant pas de la arrêt, Morin en approuve la doctrine : examiréponse de la partie, il semble que les magis-nons jusqu'à quel point elle est fondée. trats saisis de la prise à partie pourraient, s'ils se trouvaient suffisamment éclairés, ne pas permettre la réponse de la partie, et que leur jugement ne pourrait être attaqué sur ce point.

commises dans sa défense.

Pigeau, liv. II, part. 4, tit. II, est du même

avis.

Disons néanmoins, quant à l'utilité de cette réponse, que la cause n'étant pas encore engagée, le demandeur n'a pu savoir quels étaient les moyens qu'opposerait son adversaire; une fois ces moyens connus, il paraît convenable de lui accorder la faculté de les réfuter.

C'est aussi ce qu'enseigne Dalloz, t. 25,

p. 9.]

1820. Un juge pourrait-il, du consentement des parties, concourir au jugement d'un proces dans lequel serait intéressé celui qui l'aurait pris à partie?

Non. (Voy. Exposé des motifs, ci-dessus, au commentaire de l'article.)

[Sous l'ordonnance de 1667, art. 5, les parties pouvaient consentir à ce que la cause fût jugée par le magistrat pris à partie; mais Bigot de Préameneu, dans l'Exposé des motifs, p. 82, a dit que l'art. 514, C. proc. civ., introduisait une règle contraire, et que la nullité prononcée par cet article était d'ordre public.

Il faut donc tenir, avec Carré et Favard, 1. 4, p. 534, que le consentement des parties intéressées, dans ce cas, ne couvrirait pas la

Aux termes des art. 2, 637, 658 et 640, C. d'inst. crim., l'action civile, il faut le reconnaître, se prescrit par les mêmes délais que l'action publique.

Mais que doit-on entendre par ces dispositions?

Faut-il en induire que, dans tous les cas où il s'agit d'un fait punissable, les intérêts de la vindicte publique sont si étroitement liés à ceux de la réparation privée, que celle-ci ne puisse jamais être poursuivie, après les délais qui limitent l'exercice de la première?

Non, sans doute, car tous les jours, Mangin en convient lui-même, une partie civile inter

jette appel d'un jugement correctionnel qui a acquitté le prévenu, et, sans qu'il soit nécessaire de lui appliquer aucune peine, fait prononcer par le tribunal supérieur, nonobstant le désistement du ministère public, les réparations civiles résultant du délit constaté.

Notre auteur suppose, il est vrai, que l'appel relevé par la partie l'a été dans les délais de la loi criminelle; mais il reste toujours qu'eu égard à la nature des deux actions, la loi les a créées indépendantes l'une de l'autre, que les intérêts qui leur servent de mobile sont entièrement distincts, qu'elles reposent sur deux bases toutes différentes, et que rien n'empêche, dès lors, qu'elles puissent mutuellement survivre l'une à l'autre.

S'il en était autrement, le choix laissé à la

partie lésée par l'art. 5, C. d'inst. crim., entre l'action civile et la plainte portée au criminel ou au correctionnel, serait illusoire, ainsi que la cour de cassation l'a jugé en matière de délit de presse, le 4 août 1841 (Devilleneuve, t. 41, 1, p. 787), et la garantie générale accordée à l'exercice de toute action personnelle par l'article 2262, C. civ., n'en serait plus une.

contrat qui a précédé le délit, et non dans le délit lui-même, puisque l'action existait avant lui. » D'où Mangin, ubi suprà, no 368, conclut, en résumé: « qu'il faut tenir pour constant que la prescription établie par les lois criminelles n'est applicable aux actions civiles, qu'autant que ces actions ont réellement pour base un crime, un délit ou une contraven

Il faut donc conclure que la prescription|tion. »> réglée par les art. 637 et suiv., C. d'inst. crim. est une prescription toute spéciale qui laisse intacts les principes du droit commun.

On conçoit en effet que, dans le cas prévu par cet article, l'action civile occasionnellement accessoire à l'action publique se lie irrévocablement au sort du principal et en subisse toutes les conséquences.

Mais lorsque l'action civile est intentée séparément, que le fait punissable sommeille, soit à cause de l'inaction, soit par suite du désistement de la partie publique; qu'il ne s'agit, en un mot, que d'une réparation purement civile, fondée exclusivement sur le préjudice causé à un particulier, que deviennent les motifs d'ordre public qui ont déterminé, dit-on, les dispositions du Code d'instruction criminelle?

Cette exception, qui paraît étrange dès lors qu'on rejette en principe la distinction des actions publique et civile, a sans doute été suggérée à Mangin, par un arrêt de la cour de cassation du 23 janv. 1822, arrêt mal interprété, selon cet auteur, par Bourguignon, Jurisp. des C. crim., t. 2, p. 539, et Carnot, Comm. sur le C. pén., t. 1, p. 52, qui enseignent une opinion conforme à la nôtre.

Mais n'est-il pas facile de répondre qu'une si grave exception ne se justifie pas davantage par le texte de l'art. 637, que la règle contre laquelle on l'oppose si rigoureusement?

Qu'elle s'appuie, en effet, sur des considéra tions puisées dans la nature des actions pure ment civiles, en dehors des termes du droit criminel?

Et que, dès là qu'on prétend la fonder sur Le fait punissable n'est plus, dans ce cas, un contrat antérieur au crime ou au délit, la l'origine de l'action; elle prend sa source dans réparation civile pourrait aussi se prévaloir de le fait dommageable seul, soumis à l'applica- l'existence du quasi-contrat, censé survenu tion de l'art. 1382, C. civ. La conséquence doit entre la partie lésée et le délinquant, au modonc être que la prescription ordinaire régitment même où le quasi-délit s'est commis, ficla durée de l'action. Mangin le reconnaît indi- tion légale sur laquelle repose le principe conrectement, lorsqu'il dit que la prescription ne sacré par l'art. 1382, C. civ.? dépend pas de la nature de la juridiction, de, vant laquelle l'action est portée, mais de la nature de l'action elle-même; voilà les vrais principes, dirons-nous à notre tour; et ce savant auteur subit leur influence, lorsqu'il enseigne que la prescription, comme il l'entend, ne s'applique qu'aux seules réparations civiles qui naissent d'un délit, mais qu'elle ne s'étend pas aux actions qui résultent d'un contrat préexistant, le délit provint-il de sa viola

tion.

La cour de cassation a reconnu, le 1er avril 1813 (Sirey, t. 13, p. 518), que le tribunal compétent pour appliquer la peine était seul compétent pour déclarer le fait et la culpabilité; d'où il résulte que la prescription du Code d'instruction criminelle devant être la conséquence de la déclaration du fait, ce Code ne peut pas être appliqué par les tribunaux civils, qui sont incontestablement incompétents pour appliquer la peine; il y a plus, la prescription en matière de crimes et de délits doit être admise d'office, ce qui ne peut pas avoir lieu en matière civile.

Ne pourrait-on pas dire que si, pour faire courir la prescription du Code d'instruction contre l'action civile, il est indispensable que le crime, le délit ou la contravention, qui lui donne naissance, soit réellement constaté, cette constatation sera impossible toutes les fois que le fait punissable, en vertu duquel l'action en réparation sera exércée, n'aura pas été légalement poursuivi?

« En effet, dit-il, en citant l'exemple d'un comptable, dilapidateur des deniers publics (art. 169, C. pén.), antérieurement au vol des deniers confiés, il existait un contrat de droit civil qui s'était formé par la perception des choses reçues; ce contrat donnait lieu à une action en répétition, dont la durée était fixée par le droit civil; le délit ou le crime du débiteur de l'obligation n'a pu changer ce contrat, allérer le droit du créancier et réduire la durée du temps pendant lequel il pouvait l'exercer. Si la mauvaise foi à causé un dommage autre que celui qui résulte de la perte de la chose confiée, la réparation n'en pourra être poursuivie que pendant le temps prescrit par Le ministère public, demeuré dans l'inacle Code d'instruction; mais l'action en répétition, a laissé prescrire; le juge saisi au civil tion a son principe ailleurs; il existe dans le ❘ est matériellement incompétent; et la partie

Comment rapporter, en effet, dans ce cas, la preuve réelle du caractère criminel de ce fait?

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