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rendus à son profit par un tribunal étranger, la saisie-arrêt ne pourrait être validée en France qu'autant que ces jugements auraient été revêtus du pareatis. (Voy. notre Question 1899.)

Au contraire, une saisie-arrêt faite entre les mains d'un étranger, et déclarée valable par les tribunaux de son pays, peut être opposée en France aux français dont les deniers ont été saisis, si elle est faite en vertu de jugements rendus par les tribunaux français. (Cass., 14 fév. 1810; Sirey, t. 10, p. 243; Dalloz, t. 12, p. 115.)] 1954. Le débiteur saisi peut-il se pourvoir en référé, pour faire ordonner le payement des sommes qui lui sont dues, au préjudice d'une saisie-arrêt faite par son créancier ?

La négative a été jugée par arrêt de la cour d'appel de Paris du 30 mars 1810 (Sirey, t. 15, p. 14; Dalloz, t. 24, p. 41), attendu qu'une demande en référé tendant à obtenir le payement, nonobstant opposition, d'une somme saisie-arrêtée, est une procédure abusive qui ne peut plus être tolérée, depuis les sages précautions prises par le Code de procédure pour empêcher l'abus des oppositions vexatoires et indiscrètes.

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persisté dans sa jurisprudence, quoique l'on excipât de ce que, par son ordonnance en permission de saisir, le président s'était réservé qu'il lui en serait référé en cas de difficulté de la part du saisi.

Mais elle a depuis sanctionné, par ses arrêts des 15 fév. et 13 oct. 1836, 22 déc. 1857 (Devilleneuve, t. 38, 2o, p. 118), cette réserve, que le président du tribunal de la Seine est dans l'usage d'insérer dans toutes ses ordonnances portant permission de saisir-arrêter.

Elle lui accorde par conséquent le droit, soit de diminuer, sur les réclamations du saisi, l'évaluation provisoire donnée à la créance, soit même de retirer complétement la permission d'abord accordée. (V. Quest. 1932.)

Cela est-il bien légal? Nous répondrons à cette question en examinant, à notre titre des Référés, le pouvoir du président tel que nous le concevons.]

1955. Un créancier peut-il, en offrant de donner caution suffisante au tiers saisi, obtenir la mainlevée des saisies-arréts faites à la requête de quelques autres créanciers? [Les tribunaux peuvent-ils, avant de juger le fond, accorder mainlevée provisoire ?]

Un arrêt de la cour de Turin du 19 juillet 1806 (Sirey, t. 15, p. 63; Dalloz, t. 24, p. 28), a jugé que le créancier ne pouvait pas obtenir mainlevée.

En effet, comme le fait observer Coffinières, en rapportant cet arrêt, le débiteur, aux termes de l'art. 565, doit être assigné en validité de saisie-arrêt dans la huitaine du jour où elle est faite; de sorte qu'il peut alors opposer tous Nous remarquerons que, non- seulement ses moyens, et si le saisissant ne donne pas cette décision est antérieure au Code de prosuite à son action, la partie saisie peut elle-cédure, mais encore qu'elle est motivée sur les même se pourvoir en mainlevée devant le tri- dispositions d'une législation particulière au bunal de son domicile, d'après l'art. 567. Ainsi pays. Mais, quoi qu'il en soit, nous pensons ce dernier article suffit seul pour motiver la que si la question se reproduisait aujourd'hui, solution négative de la question ci-dessus po- elle devrait être résolue de la même manière, sée (1). d'après les principes consacrés par le Code actuel (2).

[La cour de Paris s'est encore prononcée dans le même sens, les 3 oct. 1810, 1er juin 1811 (Sirey, t. 11, p. 470; Dalloz, t. 23, p. 360), 25 mai 1855 (Sirey, t. 33, p. 407), 28 juin 1853 (Pasicrisie belge).

Elle avait même, dans ces dernières espèces,

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[Cependant la cour de Paris a jugé, le 31 octobre 1825 (J. de législ. commerc., t. 4, p. 160), que le tribunal pouvait déclarer n'ètre pas suffisamment éclairé sur le mérite de la saisie, et néanmoins en restreindre les effets à

(1) Nous ajouterons que, par arrêt du 15 juill. 1809 (Sirey, t. 10, p. 279), la cour de Turin a également décidé que la mainlevée d'une saisie-arrêt ne peut être la matière d'un référé, et qu'on ne peut se pourvoir que devant le tribunal par action en mainlevée, conformément à l'art. 567. Ce même arrêt décide en outre que le tiers saisi qui aurait payé en vertu d'une ordonnance sur référé, exécutoire par provision, serait valablement libéré, quoique l'ordonnance fût ensuite réformée sur l'appel.

(2) En effet, s'il peut être permis d'accorder mainlevée d'une saisie-arrêt, lorsque le débiteur saisi offre au saisissant une caution solvable de la somme qu'il a arrêtée, d'un autre côté, la justice paraît s'opposer à ce que le tiers saisi, qui est étranger aux intérêts respectifs du saisissant et du saisi, puisse être astreint par

celui-ci à lui payer la somme arrêtée entre ses mains, moyennant une caution: ce serait forcer ce tiers à prendre des engagements envers le saisissant, et adopter un système tout à fait contraire à l'effet que la loi donne à la saisie-arrêt, et qui est d'inhiber le tiers saisi de ne rien payer au saisi, et le constituer séquestre de la somme qu'il lui doit, pour en tenir compte au sasissant.

Il faut remarquer, au reste, que la saisie-arrêt a lieu à requête et pour l'intérêt du saisissant; or, on ne saurait admettre que l'on pût porter atteinte aux droits de ce dernier, en ordonnant au tiers saisi de payer au débiteur saisi, avant que ce débiteur ait obtenu mainlevée contradictoirement avec le saisissant. (V. suprà, sous l'art. 566, le no 1952.)

la partie des sommes saisies suffisante pour ga-, rantir le saisissant; et la cour de Toulouse, le 14 avril 1810 (Sirey, t. 15, p. 172; Dalloz, t. 14, p. 32), que, lorsque les juges renvoient à une époque déterminée pour statuer sur la validité d'une saisie-arrêt, ils peuvent en même temps accorder la créance et mainlevée de la saisie, en exigeant caution de la part du saisi.

Nous ne pouvons approuver ces décisions. Nos développements de la Quest. 1932 suffisent pour démontrer que la marche suivie par la cour de Paris est illégale.

dire qu'on le fasse jouir d'une faveur à laquelle il n'avait aucun droit?

Roger, no 508, n'hésite pas à se prononcer pour l'affirmative de la question, et nous pensons comme lui.

Cependant la cour de Paris semble avoir jugé le contraire, le 19 déc. 1809 (Dalloz, t. 24, p. 30), mais il faut remarquer que, dans cette espèce, les deux demandes en mainlevée et en validité existaient simultanément devant deux tribunaux différents, ce qui détermina la cour à renvoyer la première devant les juges saisis de la seconde.]

Quant à celle qu'autorise la cour de Toulouse, elle offre l'inconvénient de substituer aux sûretés que la loi avait ménagées au saisis-1956 sant, les sûretés plus équivoques et surtout plus incommodes d'une caution, qu'il sera peutêtre obligé de poursuivre sur nouveaux frais.

Le saisissant qui se trouve pressé d'obtenir mainlevée ne peut-il pas employer l'expédient que nous avons signalé, d'après Dalloz, sous cette même Quest. 1952, à la note?

Tel est aussi l'avis de Roger, no 350.] 1956. La demande en mainlevée peut-elle étre donnée au domicile élu dans l'exploit

de saisie?

ter. Si la demande en mainlevée est intentée par un autre que le débiteur saisi, devra-t-elle également étre portée devant le tribunal du domicile de celui-ci ?

En matière de saisie-arrêt, toutes les contestations doivent être jugées par le tribunal du domicile du défendeur; ainsi celles qui ont lieu entre le saisissant d'une part, et, de l'autre, le saisi, que la loi considère toujours comme défendeur, par le tribunal du domicile de ce dernier; celles qui s'élèvent sur la déclaration du tiers saisi, devant son tribunal, s'il le requiert.

Oui, quoique la loi ne le dise pas formelleD'après ce principe, il faut décider, avec Roment; autrement, l'obligation imposée au sai-ger, no 515, que lorsque la demande en mainsissant d'élire domicile serait illusoire. Il est évident que le législateur ne l'a prescrite qu'afin de faciliter la partie saisie pour se pourvoir contre la saisie. (Voy. Hautefeuille, p. 320.)

[Nous embrassons cette solution, avec Roger, p. 309, no 517, en faisant observer qu'elle se borne à la remise de l'exploit. Il ne faudrait pas en conclure que le tribunal du domicile élu dans la saisie-arrêt fùt compétent pour statuer sur sa validité. Il n'en est pas de cette élection comme de celle qui aurait été faite dans l'acte d'obligation en vertu duquel on saisit, et pour l'exécution de cet acte. (Voy. la

note du comm. CCCCLII.)]

[1956 bis. Le saisi pourrait-il porter la demande en mainlevée devant le tribunal du domicile du saisissant?

L'art. 567 dispose que la demande en mainlevée, comme celle en validité de saisie-arrêt, sera portée devant le tribunal du domicile du saisi. La raison en est, et tous les auteurs le font observer, que, quoique demandeur en apparence, le saisi est le véritable défendeur, puisque c'est contre lui que la première attaque a été dirigée par le fait de la saisie, et que sa demande en mainlevée n'est qu'un moyen de repousser cette attaque.

On voit donc que l'attribution au tribunal de son domicile est uniquement faite dans son intérêt. Dès lors ne peut-il pas y renoncer? et le saisissant pourra-t-il se plaindre qu'on le traduise devant son propre tribunal, c'est-à

levée est intentée par un autre que le saisi, elle doit être portée devant le tribunal du domicile, soit du saisi, soit du saisissant, selon qu'elle sera dirigée contre l'une ou l'autre de ces deux parties.]

[1956 quater. Devant quel tribunal devrait étre portée la demande en validité d'offres réelles, tendant à obtenir la mainlevée de la saisie ? (Voy. Quest. 1952 bis.) La mainlevée de la saisie étant le but de cette

demande, l'art. 567 doit lui être appliqué.

Ainsi l'exploit pourra être signifié au domicile élu dans la saisie (voy. Quest. 1936), et la demande sera portée au tribunal du domicile du saisi. (Paris, 9 floréal an x1; Sirey, t. 3, p. 291; Dalloz, t. 20, p. 504.)]

ART. 568. Le tiers saisi ne pourra être assigné en déclaration, s'il n'y a titre authentique, ou jugement qui ait déclaré la saisie-arrêt ou l'opposition valable (1).

[Locré, t. 10, p. 190, no 25.]

CCCCLIII. Autrefois, dès lors que la saisie était apposée, le saisissant pouvait, en la dénonçant au débiteur, assigner le tiers saisi pour faire sa déclaration. L'art. 568 fait une juste

(1) Voy. le comm, sur l'art. 564,

distinction: quand il y a titre authentique, la créance ne peut être révoquée en doute; mais quand il n'y a pas de titre, ou que le titre est sous signature privée, il faut un jugement pour que le saisissant ne puisse pas, sans raison, s'immiscer dans les affaires d'autrui.

[1956 quinquies. S'il y a titre authentique, à quelle époque et par quel acte le tiers saisi peut-il être assigné en déclaration? Il le peut, dans ce cas, dès le début de la procédure et par l'exploit même de saisie-arrêt, comme l'enseignent Thomine, no 626, et Roger, no 550. Mais le tiers saisi ne pourra être tenu de faire sa déclaration avant que l'assignation en validité lui ait été dénoncée.

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[CCCCLIII bis. Art. 6 du décret du 18 août 1807 : « Les receveurs dépositaires ou administrateurs seront tenus de délivrer, sur la demande du saisissant, un certificat qui tiendra lieu, en ce qui le concerne, de tous autres actes et formalités prescrites à l'égard des tiers saisis par le titre XX, liv. III du Code de procédure civile;

» S'il n'est rien du au saisi, le certificat l'énoncera;

» Si la somme due au saisi est liquide, le certificat en déclarera le montant;

» Si elle n'est pas liquide, le certificat l'exprimera. >>

Par application de cet article, la cour de Toulouse, 17 déc. 1850 (Sirey, t. 31, p. 257), Et d'ailleurs quelque authenticité qu'aient et la cour de cass., 11 fév. 1834 (Devilleneuve, les titres du saisissant, il ne peut se faire payer t. 34, 1, p. 103), ont jugé qu'alors même du tiers saisi avant que le mérite de son oppo- qu'une saisie-arrêt pourrait être pratiquée ensition ne soit jugé. (Paris, 25 mars 1831; De-tre les mains d'un préfet, comme fonctionvilleneuve, t. 31, 2o, p. 179.)]

[ 1956 sexies. Existe-t-il un délai fatal pour l'assignation en déclaration ?

Roger, no 551, fait observer, avec raison, que les déchéances que la loi attache à la tardiveté soit de l'assignation en validité, soit de la dénonciation de cette assignation, n'existent pas à l'égard de l'assignation en déclaration.

Le saisissant, pourvu qu'il soit dans les conditions de notre article, peut donc la donner en tout état de cause, et même longtemps après le jugement définitif de la cause.] [1956 septies. L'assignation en déclaration

est-elle toujours nécessaire?

naire, ce qui n'est point (voy. notre Quesdispensé de fournir une déclaration affirmative; tion 1941 quater), il serait dans tous les cas on ne pourrait exiger de lui qu'un certificat des sommes dues au saisi.]

1957. Les notaires, les huissiers et autres fonctionnaires, peuvent-ils être assignés en déclaration des sommes qu'ils ont reçues ou touchées en leur qualité?

On eût pu décider la négative, d'après les expressions générales de l'art. 592 du projet, qui portait que les fonctionnaires ne seraient point assignés en validité, mais qu'ils délivreraient seulement un certificat. Cette exception a été restreinte, sur les observations de la cour de Dijon, aux fonctionnaires désignés en l'article 561, et conséquemment les notaires, les huissiers, etc., peuvent, comme les simples particuliers, être assignés en déclaration.

[C'est là ce qu'enseignent aussi, et avec raison, Thomine, no 629, et Roger, no 585.]

Nous pensons, avec Thomine, n° 627, que, lorsque toutes les parties sont d'accord sur l'existence, entre les mains du tiers saisi, de fonds appartenant au débiteur, et sur leur suffisance pour payer le saisissant, celui-ci pourra se borner à signifier au tiers saisi le jugement de validité qui équivaut pour lui à un trans-[1957 bis. A quelle époque les fonctionnaiport, à une délégation de la part du débiteur, et que, sur cette signification, le tiers saisi videra valablement ses mains entre celles du saisissant. (Voy.suprà, notre Quest. 1959 ter.) Mais s'il survient quelques difficultés, l'as-certificat comme à la déclaration affirmative du signation en déclaration sera le seul moyen de les faire juger, comme l'enseigne Roger,

n° 552.]

ART. 569. Les fonctionnaires publics dont il est parlé à l'art. 561 ne seront point assignés en déclaration; mais ils délivreront un certificat constatant s'il est dû à la partie saisie, et énonçant la somme, si elle est liquide.

Tarif, 91.-Suprà, art. 560.—[Locré, t. 10, p. 113, no 27.]

res dont il s'agit en l'art. 561 peuvent-ils étre tenus de fournir leur certificat?

La raison de l'art. 568 doit s'appliquer à ce

tiers saisi simple particulier. En conséquence, certificat pourra être exigé aussitôt après la nous pensons que, s'il y a titre authentique, le saisie-arrêt, et que, s'il n'y en a pas, il faudra attendre le jugement de validité.

Telle est aussi l'opinion de Pigeau, Comm., t. 2, p. 166, et de Roger, p. 351, à la note.] 1958. Les fonctionnaires désignés en l'article 561 ne pouvant être assignés en déclaration, que doit-on faire pour avoir le certificat qui en tient lieu ?

Il faut le requérir d'eux par une sommation

d'avoué. (Voy. Tarif, art. 91, et décret du 18 août 1807, art. 6 et 7.)

[Cette voie, en effet, est légale, puisque le Tarif accorde une vacation à l'avoué pour cet objet; mais Thomine, no 628, dit qu'elle n'est pas nécessaire, et qu'une demande verbale peut suffire. Nous adhérons volontiers à ce sentiment. (Voy. la question suivante.)]

[ 1958 bis. Si le fonctionnaire refuse le certificat, quelle marche doit-on suivre ? Voyez, sous l'art. 577, notre Quest. 1976 ter.]

ART. 570. Le tiers saisi sera assigné, sans citation préalable, en conciliation, devant le tribunal qui doit connaître de la saisie, sauf à lui, si sa déclaration est contestée, à demander son renvoi (1) devant son juge.

Tarif, 29 et 75. — [Tar. rais., nos 457 et 438.] — C. de proc., art. 567 et 568. [Devilleneuve, vo Saisiearrêt, nos 72 et 73. - Carré, Compétence, 20 part., liv. III, tit. IV, ch. 2, art. 394, no CCXXXVIII, à la note, éd. in-80; t. 7, p. 338. Locré, t. 10, p. 113, no 27.] (Voy. FORMULE 454.)

CCCCLIV. Le motif de l'art. 570 est facile à saisir c'est que le tiers saisi n'est pas, à proprement parler, partie dans la cause; il n'est réellement qu'un témoin qui fait sa déclaration.

[Il est témoin, tant qu'on s'est borné à lui demander sa déclaration, mais si on la conteste, il devient partie; et dès lors, comme défendeur, il a le droit d'ètre renvoyé devant son juge; car la contestation sur la déclaration est un véritable procès sur lequel les juges ne peuvent se dispenser de prononcer. (Rennes, 17 nov. 1813; Dalloz, t. 24, p. 48.)}

1959. Le tiers saisi peut-il demander son renvoi devant ses juges naturels, quelle que soit la nature de la contestation à laquelle sa déclaration donne lieu? [Meme si elle n'est contestée que comme irrégulière en la forme, ou pour n'être pas accompagnée de pièces justificatives?]

La disposition de l'art. 570 est conçue en termes généraux d'où il suit qu'elle doit recevoir son application dans tous les cas de contestation, soit que le différend porte sur l'existence ou la quotité de la dette, soit qu'il concerne seulement le mode, le temps, le lieu, la forme du payement, ou la personne à laquelle la somme doit être payée.

[Tels sont en effet les termes d'un arrêt de

(1) Cette demande se forme par une requête à laquelle on peut répondre. (Tarif, art. 75.) [Sic, Roger, no 604.]

la cour de Turin du 30 janv. 1808 (Dalloz, t. 24, p. 47), que Roger, no 599, interprète dans le sens le plus large et le plus étendu.

Cependant la cour de Bordeaux, 23 mars 1813, a jugé que le tiers saisi ne peut demander son renvoi devant ses juges naturels, lorsque sa déclaration est contestée pour vices de forme. Elle a considéré que la faculté accordée par l'art. 570 devait être nécessairement restreinte au cas où le saisissant conteste sur la sincérité des faits déclarés; mais qu'elle ne devait pas avoir lieu, lorsqu'il s'agit uniquement de savoir si la déclaration a été faite, si elle l'a été régulièrement; que, dans ce cas, c'est au tribunal, au greffe duquel on a dù faire la déclaration, à décider si elle existe légalement.

« Cette distinction, dit Favard, t. 5, p. 14, no 15, ne résulte assurément pas du texte de la loi, qui donne au tiers saisi, en termes généraux et sans distinction, le droit de demander son renvoi, si sa déclaration est contestée; le motif de cette disposition est de ne pas l'obliger à plaider devant un autre juge que celui de son domicile. Or, ce motif ne s'appliquet-il pas également au cas où la contestation porte sur la forme de la déclaration, et à celui où elle porte sur le fond? La distinction faite par la cour de Bordeaux n'est-elle pas dès lors arbitraire et contraire à la loi? >>

L'arrêt de la cour de Bordeaux n'est pas le seul qui consacre une jurisprudence contraire à l'opinion de Favard. Celle de Paris a décidé, le 12 mars 1811 (Sirey, t. 11, p. 439; Dalloz, t. 24, p. 43), que lorsque le saisissant soutient la nullité ou l'insuffisance de la déclaration affirmative, le tiers saisi ne peut demander son renvoi devant le tribunal de son domicile. Voici comment Coffinières justifie cet arrêt: « Il suffit de remarquer que l'art. 570 ne dispose que pour le cas particulier où le tiers saisi est retenu dans une contestation que le saisissant occasionne par une résistance injuste, qu'il n'y a conséquemment pas lieu à son application, lorsque le tiers se refuse lui-même à affirmative; et que d'ailleurs, puisque la cause remplir le vœu de la loi dans la déclaration du saisissant est assez favorable pour qu'il puisse appeler le tiers saisi devant un tribunal qui n'est pas le sien, on ne peut le priver de cette faculté lorsqu'il n'a rien fait pour la perdre. »

Au reste, Carré, qui a plus amplement examiné la question dans la consultation que nous allons rapporter, s'est prononcé pour l'application absolue et sans restriction de l'art. 570 à tous les cas:

«Le conseil soussigné a pris lecture d'un mémoire à consulter, par lequel on lui soumet les questions suivantes :

» 1re Question, Lorsque la partie saisissante conclut au rejet de la déclaration du tiers saisi, sur le motif qu'elle n'aurait pas été accompa

gnée de pièces justificatives, ou que les pièces ne seraient pas suffisantes, y a-t-il lieu à faire droit dans l'exception du tiers saisi, tendante à son renvoi devant le juge de son domicile, conformément à l'art. 570, C. proc.?

» ment de connaître de la régularité de sa dé>> claration; 2o Que si, de l'ensemble des » deux décisions fournies par Laporte et comp., » et de leur compte avec Contenseau, il résulte » qu'ils ont suffisamment rempli la disposition » 2° Question. Indépendamment de la solu-» de l'art. 573, le dépôt du compte fait au tion affirmative ou négative de cette question, » greffe ne peut aucunement tenir lieu des le tribunal peut-il, par un seul et même juge-» pièces justificatives dont le dépôt est exigé ment, rejeter le déclinatoire, et déclarer en même temps ce tiers saisi débiteur pur et simple de la saisie? (Conformément à l'art. 577.) >> Sur ces deux questions, que la cour de Rennes aura à examiner par suite de l'appel que les sieurs Laporte et comp. ont interjeté du jugement rendu par le tribunal de SaintMalo, le 29 août 1822, le conseil est d'avis des résolutions suivantes :

» La première question revient en d'autres. termes à celle de savoir si l'application de l'article 570, C. proc., s'étend à tous les cas où la déclaration du tiers saisi devient un objet quelconque de contestations, ou doit être limitée à celui où la contestation ne porte que sur la sincérité de cette même déclaration, soit parce que le tiers aurait dénié sa qualité de débiteur, soit parce que l'on prétendrait qu'il le fût d'une somme plus forte que celle qu'il eût confessé devoir.

» par l'art. 574; - 3° Que, quand il serait vrai » que la production de toutes les pièces ait été » nécessaire à leur défense devant les divers » cours et tribunaux où ils déclarent être en >> instance, ils ne pourraient du moins se dis» penser de justifier des instances dont une » seule est reconnue par les demandeurs en » saisie-arrêt, et de la nécessité de la produc» tion. »

» Tels sont les motifs pour lesquels le tribunal, rejetant le déclinatoire opposé, a jugé la compagnie Laporte débitrice des causes de la saisie.

» Cette décision repose évidemment sur une interprétation restrictive d'une disposition conçue en termes généraux, et qui ne peut conséquemment admettre d'autres exceptions que celles qui seraient formellement prononcées par la loi. Elle contient une violation de la maxime si connue: ubi lex non distinguit, etc. Et, en effet, le tribunal de Saint-Malo distingue entre la contestation élevée sur le mérite de la déclaration, quant à sa forme, et la contestation sur la validité ou la suffisance de cette

« L'article dont il s'agit est ainsi conçu : » Le tiers saisi sera assigné, sans citation » préalable en conciliation, devant le tribunal » qui doit connaître de la saisie, sauf à lui, » si la déclaration est contestée, à deman-même déclaration, quant à son montant; et » der le renvoi devant son juge. »

» Dans l'espèce soumise au conseil, les sieurs Laporte et comp. ont fourni aux sieurs et dames Ricard et Lebrun, demandeurs en validité d'une saisie-arrèt apposée sur les valeurs ou marchandises que cette compagnie eût pu devoir au sieur Contenseau, deux déclarations, dont la dernière, accompagnée de leur compte et d'un extrait de leurs livres, porte qu'ils ne peuvent être jugés débiteurs de la balance de ce compte pour divers motifs déduits dans cette déclaration.

» Les saisissants ont prétendu que cette déclaration devait être considérée comme non avenue, attendu qu'elle n'était pas appuyée des pièces justificatives, et, par suite, ils ont provoqué contre les tiers saisis l'application de la disposition rigoureuse de l'art. 577, nonobstant leur demande en renvoi devant le tribunal de leur domicile aux termes de l'art. 570.

» Le tribunal a considéré, 1o que, de la con»férence des art. 570 et 577, C. proc., il ré»sultait évidemment que le tiers saisi ne peut » demander son renvoi devant les juges de son » domicile qu'autant que sa déclaration est » accompagnée de toutes les formalités pres» crites par les art. 573, 574 et 578, et que >> c'est au tribunal qui a prononcé la validité » de la saisie-arrêt qu'il appartient exclusive

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l'art. 570 prescrit, sans nulle distinction, de faire droit à la demande en renvoi, lorsque la déclaration est contestée. Et sans contredit, c'est la contester que de maintenir qu'elle doit être rejetée, faute de représentation de pièces justificatives, que le tiers saisi de son côté prétend n'être pas obligé de fournir. Alors ce dernier, de témoin qu'il était dans l'instance d'arrêt, devient personnellement partie au procès sur une action purement personnelle; et suivant les principes du droit commun (art. 59), il y aurait lieu à renvoyer la contestation devant le juge du domicile, alors même que l'art. 570 ne l'exigerait pas expressément. La raison de la disposition qu'il renferme est précisément fondée sur ce que l'on vient de dire, d'après Pigeau, que, jusqu'à contestation de sa déclaration, le tiers saisi n'est qu'un témoin, et que d'ailleurs il lui importe peu de la donner devant tel ou tel tribunal, puisqu'il est entièrement étranger aux contestations qui pourraient exister entre le saisissant et le saisi. Tel est aussi le motif pour lequel l'un des soussignés a pensé, d'après les conférences des opinions et arrêts sur le Code de procédure (Quest. 1786), que le tiers saisi pouvait demander son renvoi devant ses juges naturels, quelle que fût la nature de la contestation à laquelle sa déclaration donnerait lieu.

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