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précises, a fait cesser toutes les incertitudes existantes dans l'état antérieur de la jurisprudence.

[Les questions de premier et dernier ressort, autrefois régies, en matière civile, par les articles 9 et suiv. du tit. III, et par l'art. 5 du tit. IV de la loi des 16-24 août 1790, et maintenant par les art. 1 à 9 de la loi du 25 mai 1858, et 1 et 2 de la loi du 11 avril 1838 (1), sont des questions de compétence qu'il n'entrait pas dans le plan de Carré d'examiner dans ses Lois de la Procédure. On peut consulter, sur cet objet, les Lois de la Compétence du même auteur, 2o part., liv. II, tit. IV, et le Commentaire de la loi de 1858 de notre savant collègue, Bénech.]

[1631 bis. Quelle est l'utilité de la qualification du jugement?

Puisque, d'après l'art. 453, la qualification donnée par un tribunal à son jugement ne change pas sa nature, on peut se demander si cette qualification est nécessaire et quel en est le but.

Elle n'est pas nécessaire: aussi ne se rencontre-t-elle pas toujours dans les jugements. Mais elle est utile; car, suivant l'observation très-juste de Thomine, no 506, et de Boitard, sur l'art. 453, elle sert à déterminer l'effet que l'appel pourra produire sur ce jugement, suspensif s'il est qualifié en premier ressort, non suspensif s'il l'est en dernier ressort (art. 437). Il y a donc toujours grand avantage, pour la partie gagnante, à ce que son jugement soit qualifié en dernier ressort, car elle pourra le faire exécuter malgré l'appel; et pour la partie perdante, à ce qu'il soit qualifié en premier ressort, car elle pourra en suspendre l'exécution au moyen d'un appel. Bien entendu néanmoins que ces qualifications, si elles sont erronées, n'influent en rien sur la recevabilité ou l'irrecevabilité de l'appel.]

1632. Est-il des cas où le Code de procédure ait permis l'appel, quoique l'objet contesté fût dans le taux du dernier ressort?

Oui; par exemple, lorsqu'il est statué sur le fond d'une instance périmée (art. 15); en matière de récusation (art. 591); lorsqu'il s'agit d'incompétence, si toutefois l'on admet l'opinion que nous émettons sur la Quest. 1653. 1633. Mais peut-on étendre ces exceptions à d'autres cas, et particulièrement à celui où la contrainte par corps aurait été

prononcée ?

La cour d'appel de Rome a jugé que, dans

(1) [* 7., pour la Belgique, la loi du 25 mars 1841.]

ce dernier cas, le jugement n'était sujet qu'au recours en cassation (voy. arrêt du 20 nov. 1809), en décidant que l'appel d'un jugement du tribunal de commerce portant condamnation à une somme de 200 fr., et qualifié en dernier ressort, était non recevable, quoiqu'il ne tombât que sur la contrainte par corps. Elle a considéré que cette contrainte n'était qu'un moyen d'exécution, un simple accessoire de la condamnation principale, et devait en suivre le sort, suivant la maxime: accessorii idem est judicium quod principalis (2).

en

La cour suprême a préjugé, dans le même sens, la solution de cette question, par un arrêt du 5 nov. 1811 (Sirey, t. 12, p. 18), cassant un jugement rendu en premier et derpar corps contre un simple particulier signanier ressort, qui avait prononcé la contrainte taire d'un billet à ordre. En effet, le recours n'aurait pas été reçu, si le jugement avait été susceptible d'appel. Nous devons dire néanmoins que la cour de Turin s'est prononcée dans un sens contraire, par arrêt du 5 déc. 1810 (Sirey, t. 11, p. 175; Dalloz, t. 4, p. 527), attendu que le jugement, relativement au chef de la contrainte, avait prononcé sur la liberté individuelle, et, par conséquent, sur un objet inappréciable. Telle est aussi notre opinion.

[Cette question est de nouveau traitée sous le n° 2675, où nous ferons connaitre les nombreux arrêts auxquels elle a donné lieu. Mais l'art. 20 de la loi française du 19 avril 1832 l'a désormais tranchée pour l'affirmative.] [1633 bis. La fin de non-recevoir contre l'appel, résultant de ce que le jugement attaqué devait prononcer en dernier ressort, peut-elle être proposée en tout état de cause, et suppléée par les juges?

Cette question a toujours été jugée affirmativement, et il en devait être ainsi. Quand la loi attribue la force de la chose irrévocablement jugée à la sentence rendue par de certains juges, dans de certaines limites, il est de l'intérêt de l'ordre public que l'objet de cette sentence ne soit pas remis en question. Aussi les parties ne peuvent consentir, d'une manière soit expresse, soit tacite, à en saisir le tribunal supérieur, et celui-ci ne peut pas en retenir la connaissance. Ce principe se trouve établi dans une dissertation insérée par Devilleneuve, au tome 31, 2e part., p. 70, de son Recueil.

Quest. 759 bis, où nous avons cité de nomNous l'avons déjà posé nous-même, sur notre breuses autorités. On peut y ajouter encore les arrêts des cours de Liége, 13 fév. 1818 (Pasi

(2) [*. Liége, 9 novembre 1821, et 28 juillet 1823 (Pasicrisie belge, à ces dates).]

crisie belge et la note); Brux., 17 mars 1820; Liége, 6 avril 1824; Toulouse, 29 nov. 1828, et Lyon, 13 mai 1828 (Sirey, t. 28, p. 335) (1). Cependant, dans les motifs d'un arrêt du 7 mai 1829 (Sirey, t. 29, p. 179), la cour de cassation semble avoir supposé que la fin de non-recevoir se couvrirait par les conclusions des parties; mais, ce motif étant inutile à la décision, qui se soutient par des considérations de fait, on ne peut pas le regarder comme une véritable autorité.

Au reste, notre opinion est aussi celle de Merlin, Quest., vis Appel et Dernier ressort, et de Carré, Compétence, 2 part., liv. II, tit. IV, Quest. 513.]

1634. Le consentement des parties à étre jugées en dernier ressort, quand la loi en refuse le pouvoir au tribunal, suffit-il pour qu'elles ne puissent appeler de ce jugement?

Il n'est pas douteux que le consentement de l'une des parties seulement ne suffit pas pour conférer au tribunal le droit de prononcer en dernier ressort. (Voy. cass., 2 mess. an x; Dalloz, t. 8, p. 296.) Mais ne semble-t-il pas résulter de cette décision, que le consentement de toutes les parties suffit pour autoriser un tribunal à les juger en premier et dernier ressort, dans une matière qui ne serait de sa compétence qu'en premier ressort seulement? C'est notre opinion, fondée, premièrement sur l'art. 6 du tit. IV de la loi du 24 août 1790, qui est relative à la compétence, et qui, par conséquent, ne peut être considérée comme abrogée par le silence du Code de procédure, qui, comme le disait le conseiller d'État Treilhard, n'a pas eu pour objet de régler la compétence; secondement, sur l'art. 639, § 2, C. comm. (Voy. cass., 5 nov. 1811; Comm. des Ann. du Not., t. 3, p. 93; Sirey, t. 12, p. 18; Brux., 16 juill. 1811.)

[Cette opinion, que nous croyons conforme à la loi, est aussi embrassée par Merlin, Quest., vo Appel, §7; Poncet, no 283; Pigeau, Proc. civ., liv. II, part. 3, tit. IV, chap. 1er, sect. 5; Carré, Compétence, 2° part., liv. Ier, tit. Ier, Quest. 57; Favard, t. 1, p. 160, no 2, et Boitard, 49° leçon, et consacrée par arrêt de la cour de Rennes, 24 juill. 1812; de la cour de cass., 8 oct. 1806 (Sirey, t. 6, p. 452; Dalloz, t. 5, p. 187), et de Paris, 21 juin 1817. En effet, l'art. 6 du tit. IV de la loi des 16-24 août 1790 est ainsi conçu : << En toutes matières personnelles, réelles et mixtes, à quelque somme ou valeur que l'objet de la contestation puisse monter, les parties seront tenues de déclarer, au commencement de la procédure, si

elles consentent à être jugées sans appel, et auront encore, pendant le cours de l'instruction, la faculté d'en convenir, auquel cas les juges de district prononceront en premier et dernier ressort. »>

Sans doute, la première partie de cet article, celle qui fait aux plaideurs un devoir de déclarer, in limine litis, leur intention relativement au premier ou dernier ressort, est abrogée par une désuétude complète; mais il n'en est pas de même de la disposition qui leur ac corde la faculté d'en convenir. On ne peut prétendre que l'article cité soit abrogé par le Code de procédure, pas plus que les autres règles de compétence contenues dans la loi de 1790, et sur lesquelles le nouveau Code a gardé le silence.

à l'appel, il faut avoir la libre disposition de Il est bien entendu que, pour renoncer ainsi ses droits. Ainsi, ceux qui ne peuvent pas compromettre ne peuvent consentir à être jugés en dernier ressort. De même ce consentement ne peut pas avoir lieu pour les objets sur lesquels il est interdit de transiger. On peut consulter le traité de notre savant collègue Bénech, p. 421.

Mais comment doit être donné le consentement des parties à être jugées sans appel? Pigeau, ubi suprà, se fondant sur l'analogie de l'art. 7, C. proc., enseigne qu'il doit l'être par une déclaration faite aux juges par les parties elles-mêmes et signée d'elles. Il nous semble, au contraire, peu nécessaire que le juge ait donné acte aux parties de ce consentement; il suffit que son existence soit constatée par un acte quelconque.

Quant au point de savoir si les parties peuvent de même renoncer au premier degré de juridiction, en consentant à être jugées de plano par le tribunal d'appel, voy. la Question 1676.]

[1634 bis. La convention de renoncer à l'appel est-elle obligatoire pour le cas même où le tribunal se dessaisit par un jugement d'incompétence?

La cour de cassation a jugé, le 1er floréal an Ix (Dalloz, t. 1, p. 103), conformément aux conclusions de Merlin, Quest., vo Appel, §7, que cette convention devait s'étendre à tous les jugements préparatoires et définitifs qui peuvent intervenir sur la contestation. La cour de Bruxelles, étendant encore ce système, a résolu affirmativement notre question, le 16 juill. 1811.

Si la question d'incompétence avait été soulevée avant la convention, nous croyons qu'une pareille décision serait légale; mais si une des parties l'a proposée depuis, ou si le tribunal l'a suppléée d'office, il nous semble

(1) [* Brux., 30 décembre 1836 (J. de B., 1837, que la convention ne peut recevoir d'applicap. 147).]

tion. Car le consentement des parties n'a

vait trait qu'à la fixation du ressort, et ne de- | pour raison d'incompétence soit recevable. II vait pas empêcher que le tribunal se renfermåt paraît dire seulement que la qualification en dans les bornes de ses attributions. C'est pour dernier ressort n'empêche pas de recevoir juger le procès existant entre elles qu'elles l'appel des jugements de compétence; et c'est avaient prorogé la juridiction, et certes il n'est ainsi que Pigeau a expliqué ce même article, pas jugé, ce procès, par un jugement qui dé- t. 1, p. 135, 491 et 556. Cependant, si l'on clare l'incompétence. Elles ne sont donc pas compare ses dispositions avec celles de l'artiprésumées avoir renoncé, pour ce cas, à la cle qui précède, on reconnaîtra que le législavoie de l'appel, que la loi ouvre toujours pour teur a voulu que, lorsqu'il s'agit de compéles jugements d'incompétence. (Art. 454.)] tence, l'appel fût recevable, quelle que fut la valeur de la contestation au fond.

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C. proc., art. 16. 165, 325, 376 et 437. — [Devillen., vo Appel civil, no 7.-Carré, Compétence, 1re partie, no 81, à la note, édit. in-80, 2e part., liv. II, tit. IV, art. 286, et no CLXXXIII, 2e partie, liv. II, tit. V, art. 295; 2e part., liv. II, tit. V, art. 304. no CXCV, au texte et à la note; 20 part.. liv. III, tit. II, chap. 2, art. 321, no CCXI; 2e part., liv. III, tit. VII, chap. 2, art. 546, no CCLXIV.-Locré, t. 9, p. 350, no 6, p. 367, no 14, et p. 382, no 12.]

CCCLXXVII. La disposition de cet article est encore une conséquence du principe énoncé au commentaire du précédent, que la compétence est du droit public: d'où il suit que lorsqu'il s'agit du pouvoir du juge, l'appel doit être recevable, quelque qualification qui ait été donnée au jugement, puisque autre ment, il dépendrait de lui de priver les parties de ce recours, en qualifiant son jugement en dernier ressort. C'est ainsi que, suivant l'art. 77 de la loi du 27 vent. an VIII, quoiqu'il n'y ait point ouverture à cassation contre les jugements en dernier ressort des juges de paix, ils perdent cette exemption pour cause d'incompétence et d'excès de pouvoir : tout cela fondé sur l'universalité de l'adage, non est major defectus quam defectus potestatis. (Rapp. au Corps législ., et notre Traité des lois d'organ. et de compét., liv. III, tit. III, sect. 1re.)

En effet, l'art. 453 dispose généralement que la qualification en dernier ressort, donnée à un jugement, n'empêche pas qu'on ne puisse se pourvoir contre lui par l'appel, quand la valeur sur laquelle il est rendu excède la compétence pour prononcer souverainement. Il suit de là que l'art. 454 serait inutile et sans objet, s'il n'était pas entendu dans le sens que l'appel pour cause d'incompétence est recevable, quoique la valeur du procès au fond füt dans les limites du dernier ressort (1).

[La justesse de cette solution est certaine. Elle est unanimement adoptée par Pigeau Comm., t. 2, p. 28; Favard, t. 1, p. 160; Thomine, no 506; Boitard, sur l'art. 454, et elle résulte d'un grand nombre d'arrêts, notamment de ceux des cours de Rennes, 19 août 1819 (Dalloz, t. 24, p. 55); Brux., 8 juin 1822, et 19 nov. 1825; Metz, 8 mai 1824 (Dalloz, t. 18, p. 599); Rouen, 4 avril 1825; Paris, 25 fév. 1829; Brux., 7 juin 1833, et Agen, 19 déc. 1836.

La règle qui soumet à l'appel tout jugement sur la compétence, encore que la valeur du procès soit dans les termes du dernier ressort, a été même appliquée, par la cour de Paris, le 10 juin 1812 (Sirey, t. 12, p. 424; Dalloz, t. 2, p. 474), au jugement rendu sur une action en nullité de sentence arbitrale, quoique antérieurement, et avant le Code de procédure, la cour de Turin eût décidé, le 24 germ. an XII (Sirey, t. 6, p. 499), qu'un tel jugement ne pouvait être attaqué, même pour incompétence, que par la voie de cassation. Cet arrêt se fonde sur l'art. 80 de la loi du 27 vent. tation, comme le démontrent Coffinières, loco an VIII, auquel il donne une fausse interprécitato, et Merlin, Quest., vo Excès de pou

1635. L'appel est-il recevable en matière de compétence, lors même que la matière n'est disposée à recevoir au fond qu'un jugement en dernier ressort ? [ L'est-il également lorsque l'exception d'incompétence n'a pas été proposée devant les pre-loz, t. 18, p. 405), et de Colmar, 8 déc. 1813, Les cours de Montpellier, 8 janv. 1824 (Dalmiers juges?]

Si l'on s'attachait rigoureusement aux termes de l'art. 454, on pourrait croire qu'il n'a pas entendu prononcer qu'en toute matière, l'appel

voir.

ont aussi implicitement reconnu la doctrine de Carré, la première, en déclarant qu'il y a incompétence, et, par conséquent, ouverture à l'appel, quelle que soit la valeur du litige,

(1) La solution que nous en donnons est conforme Thomine, no 758; Hautefeuille, p. 256; le Discours du au sentiment de presque tous les auteurs, et à plusieurs tribun Albisson; Trèves, Brux., Colmar; enfin, les arrêts, dont deux émanent de la cour de cassation. arrêts de la cour de cass., des 22 avril 1811 (Sirey, (V. Delaporte, t. 2, p. 15; le Prat. Franç.,t.3,p.95; | t. 14, p. 162; Dalloz, t. 2, p. 42), et 24 octobre 1811.)

lorsque le tribunal a, par une disposition nouvelle, corrigé les dispositions d'un premier jugement; la seconde, en refusant de voir le vice d'incompétence dans ce fait, que le jugement aurait été rendu par une autre chambre que celle qui se trouvait originairement saisie de la contestation, ou dans celui de l'adjonction irrégulière d'un avoué pour compléter le tribunal; en sorte qu'il faut alors, si la valeur du fond est inférieure au taux du dernier ressort, se pourvoir en cassation et non par appel.

Mais la cour de Grenoble, les 13 déc. 1823 et 12 avril 1826 (Sirey, t. 26, p. 302, Dalloz, t. 8, p. 269), a mis à notre principe une importante restriction que nous ne pouvons adopter. Elle a pensé que l'appel pour incompétence n'est pas recevable, dans le cas où l'objet du litige est par sa valeur soumis au dernier ressort, si l'exception d'incompétence n'a pas été proposée devant les premiers juges. Cette décision ne serait admissible qu'autant qu'il s'agirait d'une incompétence ratione persona, laquelle veut être proposée in limine litis; mais il paraît, au contraire, que, dans l'espèce soumise à cette cour, l'incompétence était relative à la matière; dès lors, elle était proposable en tout état de cause; et la circonstance de la valeur du litige ne pouvait rien changer à cette règle souveraine, puisque ce n'est pas cette valeur qui doit être consultée en matière d'incompétence.

En un mot, l'art. 454 ne doit pas être entendu dans ce sens qu'il reçoit l'appel contre tout jugement rendu sur une question de compétence, mais dans celui-ci, que l'appel est toujours recevable lorsqu'il se fonde sur l'incompétence, sauf à examiner si l'incompétence ratione personæ n'a point été cou

verte.

D'après un arrêt de la cour de cass. du 11 juin 1818 (Sirey, t. 18, p. 363; Dalloz, t. 3, p. 172), notre règle n'est pas applicable aux tribunaux de simple police, dont les jugements, lorsqu'ils peuvent prononcer en dernier ressort sur le fond, ne peuvent être attaqués, même pour incompétence, que par la voie de la cassation.]

[1635 bis. L'art. 454 est-il applicable aux

deux espèces d'incompétence?

Le projet de cet article était textuellement restreint à l'incompétence ratione materiæ. Mais sur les observations du tribunat, qui désirait l'appliquer aussi à l'incompétence ratione persona (voy. Locré, t. 9, p. 350, no 6), la rédaction présente fut adoptée. Pigeau, Comm., t. 2, p. 28; Favard, t. 1, p. 160, no 3, et Thomine, no 506, concluent de là, avec raison, que la règle de notre article est générale et s'applique aux deux espèces d'incompétence. Nous croyons cependant qu'il n'en peut être

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ainsi qu'avec la distinction par nous indiquée sur la question précédente, c'est-à-dire, s'il s'agit d'une incompétence personnelle, l'appel ne sera recevable qu'autant que l'exception ayant été proposée devant les premiers juges, ceux-ci y auront statué; tandis que, si l'incompétence est matérielle, on pourra, sans en avoir excipé devant les premiers juges, appeler de leur jugement et le faire annuler au fond comme incompétemment rendu.] [1635 ter. Lorsqu'un tribunal d'appel est saisi, pour cause d'incompétence, de l'appel d'un jugement rendu sur une matière de dernier ressort, à quoi se bornent ses pouvoirs?

Ils se bornent à statuer sur la question de

compétence, sans qu'il puisse annuler pour irrégularité autre que l'incompétence, ni examiner s'il y a bien jugé au fond, dans le cas où le moyen d'incompétence n'est pas accueilli. Autrement il n'y aurait pas de jugement qu'on ne pût déférer, même pour le fond, au second degré de juridiction, en soulevant un déclinatoire bien ou mal fondé.

Cette solution, d'ailleurs évidente, a été con

sacrée par arrêts de la cour de cassation des 22 juin 1812 (Sirey, t. 12, p. 568; Dalloz, t. 2, Dalloz, t. 8, p. 324), et approuvée de Favard, P. 45), et 11 mai 1813 (Sirey, t. 13, p. 352; t. 1, p. 161, no 4, et Boitard, sur l'art. 454. En cas d'infirmation pour vice d'incompétence, voy. nos Questions sur l'art. 473.]

[1635 quater. Peut-on appeler d'un jugement qui statue sur un déclinatoire proposé, soit pour litispendance, soit pour connexité, si la valeur litigieuse n'excède pas le taux du dernier ressort?

La cour de Bordeaux a jugé la négative, le 17 août 1833. Cette décision est fondée sur le

motif, que la demande en renvoi pour incompétence n'est pas proprement une exception d'incompétence, mais seulement une fin de non-procéder.

Les solutions que nous avons données aux Quest. 728 et 732, t. 2, p. 191 et 194, repoussent une semblable doctrine, qui d'ailleurs repose sur une distinction doctrinale fort surannée.]

1636. La solution de la Quest. 1635 s'applique-t-elle aux jugements rendus par les tribunaux de commerce et les justices de paix, comme à ceux rendus devant les tribunaux civils?

La disposition de l'art. 425 contient ellemême, indépendamment de l'art. 454, la solution affirmative de cette question, relativement aux tribunaux de commerce; et c'est en ce sens aussi que s'est prononcée la cour de Liége,

dans un arrêt du 22 avril 1809 (Sirey, t. 12, p. 359).

[Et dans un autre du 6 juill. 1855. C'est aussi l'avis de Thomine, no 506.]

Mais on avait douté que l'on pût décider ainsi relativement aux jugements rendus par les justices de paix, attendu, disait-on, que la disposition de l'art. 454 ne s'appliquait qu'aux tribunaux civils, la forme de procéder étant réglée par un livre spécial, qui ne contient aucune disposition semblable à l'art. 454.

La cour de cassation, par les deux arrêts cités sur la précédente question, a rejeté ce moyen, en déclarant que la disposition de l'article 454 est générale; que se trouvant au titre unique de l'appel et de l'instruction sur l'appel, elle gouverne les appels des jugements de justices de paix, comme ceux des tribunaux inférieurs, et qu'enfin elle n'est contrariée par aucune autre disposition des divers titres du liv. Jer, qui concerne l'instruction devant les justices de paix. (Voy. surtout l'arrêt de la cour de cass. du 22 avril 1811; Sirey, t. 11, p. 162; Dalloz, t. 2, p. 42.) (1).

[Thomine, no 506, partage avec raison cet avis, qui a reçu une sanction légale de l'art. 14 de la loi du 25 mai 1838 (2).]

ART. 455. Les appels des jugements susceptibles d'opposition ne seront point recevables pendant la durée du délai pour l'opposition.

C. pr., art. 20, 156 suiv., 459, 809.- [Devilleneuve,

vo Appel civil, nos 160 à 177.- Locré, t. 9, p. 50,

no 6, p. 367, no 15, et p. 382, no 12.] (3).

CCCLXXVIII. L'ord. de 1667 n'accordait le droit de s'opposer, dans le délai de huitaine, aux jugements par défaut, que dans le cas où la partie condamnée en dernier ressort n'avait plus la ressource de l'appel. Mais l'usage de la plupart des tribunaux de France avait étendu même aux jugements susceptibles d'appel, la faculté de s'y opposer: on avait justement pensé qu'il était plus utile aux deux parties d'instruire leur affaire devant les premiers juges, et de pouvoir prendre ensuite la voie de l'appel; mais le plus souvent, et avant

même que le délai de l'opposition fût expiré, on interjetait appel, sous prétexte de sortir plus promptement d'affaire, ou de se soustraire à des préventions.

Ce droit d'opposition est accordé par la loi comme le moyen qui doit être employé, et non pour qu'on ait le choix de prendre cette voie ou d'interjeter appel. Si le délai pour s'opposer est expiré, la loi présume que la partie condamnée n'a point été à portée ou à temps de fournir ses moyens d'opposition, et elle lui conserve encore la ressource de l'appel. (Exposé des motifs.)

[1636 bis. Peut-on, après avoir pris la voie de l'opposition, l'abandonner pour prendre celle de l'appel? Si l'une des parties qui ont succombé s'est pourvue par opposition, et l'autre par appel, ayant laissé écouler le délai de l'opposition, comment faut-il procéder à l'égard de l'une et de l'autre?

Ces questions, que nous reproduisons ici, parce que c'est leur place naturelle, ont été traitées par Carré, sous les no 1570 et 1571, que nous avons fait suivre de nos observations. Il nous suffit d'y renvoyer le lecteur.]

[1636 ter. La fin de non-recevoir contre l'appel relevé pendant les délais de l'opposition ou avant qu'il ait été statué sur icelle, peut-elle être suppléée d'office?

dictions, et à cette règle absolue qui veut que Oui parce qu'elle tient à l'ordre des jurile second degré ne puisse être abordé par les parties avant qu'elles aient épuisé le premier (voy, les préliminaires de ce titre); qu'enfin la voie de recours la plus simple, tant qu'elle demeure possible, soit toujours préférée à une voie plus compliquée. Tel est aussi l'avis de Thomine, no 507. (V., par analogie, les Quest. 243, 739 bis et 1676.)]

[1636 quater. Lorsqu'on a laissé écouler, sans en profiter, les délais de l'opposition, ou qu'on a fait défaut sur l'opposition qu'on avait d'abord formée, est-on néan

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déclaré faire défaut faute de plaider, mais dont le dispositif prononce contradictoirement, peut être attaqué par la voie de l'appel dans le délai de l'opposition. (Colmar, 15 juin 1831.)

30 L'acte qui contient à la fois opposition et appel, ne peut être valable comme acte d'appel, quand la partie elle-même en a fixé le caractère, en s'en servant devant les premiers juges comme acte d'opposition. (Bourges, 15 thermidor an vIII.)

4o Une partie ne peut pas être déclarée non recevable dans son appel d'un jugement, parce qu'elle n'attaquerait pas un second jugement rendu par défaut, et non encore signifié. (Rennes, 19 novembre 1813; Dalloz, t. 24, p. 79.)]

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