1 mandé par M. de Larochefoucauld-Liancourt, qui trouvait les peines excessives, et par conséquent contraires à l'autorité des conseils de guerre, en ce que l'armée était sous le coup d'une législation qui prodiguait la peine de mort, et que la sévérité des peines touchait de près à l'impunité et à l'indiscipline. Le chiffre de l'effectif de l'armée de l'intérieur, combattu par M. Mauguin, comme exorbitant, fut adopté sans réduction sur les explications du ministre de la guerre, M. Bernard, et du président du Conseil. 13 Juin. - Après une réduction de 1,953,648 fr. sur les 13,161,808 fr. d'habillement et du campement, la Chambre termina la discussion par l'adoption du budget spécial des poudres et salpêtres. Crédit d'Afrique. - Le 7 juin commença l'examen du projet de loi relatif au crédit d'Afrique. Au yeux de M. Duvergier de Hauranne le Gouvernement s'était engagé dans une voie déplorable en Algérie par son ardeur belliqueuse, et il taxait l'expédition de Constantine de funeste et d'impolitique. Attaquant le système de colonisation, l'orateur parlait ainsi : « En 1836, le chiffre des importations était moindre de 500,000 francs que celui de 1837. Mais ce qui est bien plus important, c'est la comparaison du chiffre des exportations avec le chiffre des importations. D'un côté, je vois 33,000,000 fr., et de l'autre à peine 3,000,000 fr, Je demande donc comment l'Algérie peut payer les 33,000,000 fr. d'importations dont je viens de faire l'énumération? L'Algérie n'a ni mines d'or, ni mines d'argent; elle n'a pas non plus de trésors entassés : la preuve, c'est que l'intérêt y est fort élevé. C'est encore dans les documents officiels qui nous ont été communiqués, que je trouve l'explication d'un fait si singulier. Je vois, page 400, qu'en 1836 le Trésor public a envoyé en Algérie, en numéraire. Et en traites ou mandats sur Paris et sur les receveurs-généraux. En tout. 5,511,567 fr. 11,670,970 17,182,537 fr. • En outre, on a acheté en nature une certaine quantité de provisions pour l'armée qui figurent aussi dans le chiffre glorieux des importations. Maintenant, Messieurs, vous comprenez l'opération; je ne sais si elle est fort avantageuse, mais elle est parfaitement simple. • En France, nous levons sur le pays 30 à 40 millions d'impôt au profit d'Alger. Sur cette somme, nous employons quelques millions à acheter des objets de consommation pour l'armée qui figurent au chapitre des importations. Le reste, c'est-à-dire 17 à 20 millions, nous l'envoyons à Alger pour qu'Alger puisse se nourrir, se vêtir, et même se bâtir des maisons. Voilà, je le répète, l'opération; elle est parfaitement claire. A ce compte, d'ailleurs, il nous est bien facile de grossir à volonté le chiffre des importations. Nous n'avons qu'à envoyer 100 millions à Alger, au lieu de 70, et le chiffre des importations triplera immédiatement. Ne croyez pas d'ailleurs que cet argent rentre tout entier par la voie du commerce; il n'en est rien: la moitié de ce qui se consomme à Alger provient de l'industrie étrangère, soit directement, soit indirectement, par nos entrepôts. Ainsi, il y a double perte, perte d'abord pour les contribuables qui paient 30 à 40 millions par an au profit d'Alger, et perte pour le commerce, qui n'en recouvre pas la moitié. « Je ne conçois guère, je l'avoue, qu'on se glorifie d'un pareil état de choses. > M. Besson pensait qu'il n'y avait plus à reculer en Afrique, et que les 50,000 hommes n'étaient pas de trop pour y assurer notre domination, même provisoire; il fallait, selon lui, une constitution européenne placée à côté du pouvoir des indigènes; car les mœurs, la religion s'opposaient à une entière influence et à un Gouvernement purement français. L'orateur proposait de placer Achmet bey à Constantine, de nous attacher un chef habile, un homme puissant sur plusieurs tribus, et, confiant dans la sagesse du Gouvernement, il votait tous les crédits demandés pour l'Afrique. Intervenant dans la discussion, à propos d'un doute exprimé par M. Michel de Bourges, sur la commission d'Alger par le Gouvernement, le président du Conseil posait en principe qu'on ne pouvait assurer la responsabilité de l'avenir, et dire à l'avance: j'irai là, je m'arrêterai là, je ne ferai que cela. Quant à Achmet bey, le Gouvernement ne devait pas s'engager, vis-à-vis de lui, à la tribune nationale; enfin, avec le gouverneur général, le ministre ne désespérait pas de l'Afrique, de nos rapports avec les indigènes et de notre situation qui irait chaque jour en s'améliorant. i Le maréchal Clausel saisit cette occasion pour se plaindre du nom de desastre par lequel le président du Conseil avait qualifié la première expédition de Constantine, soutenant que cet insuccès était dû au refus du Gouvernement d'envoyer les troupes nécessaires, et non à l'inexpérience du chef. 8 Juin. - A M. Desjobert, l'adversaire de la conquête d'Alger, le général Bugeaud répliquait au sujet du traité de la Tafna qu'il n'avait pas fait d'Abd-el-Kader une puissance, car cette puissance était faite par la guerre; l'orateur général après avoir justifié la rigueur nécessaire en campagne, et qu'on avait appelée de la barbarie, se prononçait pour le mot colonisation. L'opinion de M. Guizot était qu'une politique claire, déterminée, constante, devenait indispensable dans la question d'Afrique; que notre expérience depuis 1830 le démontrait hautement. M. Jaubert continuait son plaidoyer contre Alger, qui avait déjà dévoré 30,000 de nos soldats, et nous avait déjà coûté de 300 à 350 millions. A tous ces arguments, le président du Conseil répondait que le système du Gouvernement était la domination restreinte, et que huit ans avaient suffi à notre établissement en Afrique; il demandait à la Chambre les moyens de poursuivre ce qui avait été commencé. Reprenant les faits de très-haut, M. Berryer blåmait les tergiversations et les demi-mesures des divers ministères; à l'obstacle de la différence de religion, il opposait ces paroles ou ces éloquentes raisons : • Et, Messieurs, si nous n'avons pas la même religion, nous aurons la justice, la bonne foi, l'équité, la loyauté, les relations commerciales, cette sécurité de relations des populations africaines avec la France, toujours honorables, toujours empreintes de ce caractère qui distingue les peuples avancés dans la civilisation. Et vous croyez que les communications ne s'établiront pas ? Est-ce que l'empire de cette œuvre sociale ne sera pas quelque chose qui balancera la différence des religions? Oui, assurément, et quoi qu'on ait pu dire, je suis convaincu que la France n'a pas à hésiter, qu'il y a dans la possession d'Alger des avantages réels, et que mon pays saura bien faire ce qu'ont fait les Turcs pendant trois cents ans. » Ces reproches étaient repoussés avec force par le chef du Cabinet, qui établissait que le Gouvernement ne s'était jamais engagé à céder l'Algérie à l'Angleterre, ni à toute autre puissance. Le 9 juin, à la suite d'un débat également animé sur les mêmes intérêts, le crédit extraordinaire de 16,671,408 fr. fut accordé par la Chambre à une grande majorité pour l'accroissement de l'effectif de l'armée d'Afrique. Le rapport du budget du ministère de l'agriculture, des travaux publics et du commerce, ayant été présenté le 16 mai à la Chambre des députés par M. de Vitry, député de l'Yonne; M. Billaudel, ouvrant la discussion le 25 mai par des considérations sur le service des ponts et chaussées, défendait l'institution de l'école Polytechnique contre le défaut de pratique qui leur était reproché, et désirait que le Gouvernement se chargeât de l'entreprise des chemins de fer. M. Tourret se plaignait de ce que dans nos écoles vétérinaires on s'occupait beaucoup de chevaux et peu de la race bovine; le ministre des travaux publics affirmait que les études des élèves étaient dirigées sur tous les points essentiels. Une augmentation de 300,000 francs pour l'encouragement de l'agriculture était réclamée par M. le général Bugeaud. Le général Demarçay voulait que l'on protégeât surtout la filature et la culture du lin. La Chambre adopta le chap. VI, portant une allocation de 1,920,000 fr. pour les haras. 28 Mai. Al'occasion du chap. VIII, qui accordait 170,000 fr. d'encouragement aux manufactures, au commerce, aux publications des brevets d'invention et aux travaux statistiques, M. Auguis trouvait une disproportion extraordinaire entre le mouvement commercial et la somme destinée à l'encourager. Le mouvement général du commerce en France s'élevait en effet à près de 1,200 millions et l'on proposait 170,000 fr. d'encouragements, tandis que la somme de 1,320,000 fr. Mait affectée à l'académie royale de musique. Selon lui, du reste, c'était non dans les allocations d'argent, mais surtout dans les améliorations des traités de peuple à peuple que devait consister l'encouragement véritable du commerce; l'orateur signalait comme fautif le traité passé avec la régence de Tunis, en 1838, pour la pêche du corail, concédée gratuitement à d'autres compagnies étrangères, et appelait l'attention du Gouvernement sur nos traités en Sicile, en Moldavie, en Portugal, dans lesquels étaient lésés les intérêts de la France. Les 170,000 fr., suivant le ministre du commerce, étaient appliquables à des brevets d'invention expirés, à des travaux statistiques, à l'école de Thorigny, et par conséquent à des objets d'une utilité incontestable. Quant au traité de Tunis, le ministre des affaires étrangères travaillait à revenir, par des négociations, au traité de 1830. En Molavie le commerce français était traité à l'égal du commerce des autres nations. Au nom du commerce maritime, M. Estancelin demandait une législation spéciale sur la police de la navigation: Les révoltes, les maladies des équipages étaient autant de suites du régime actuel. L'orateur reproduisait cette idée vraie, que c'était la marine marchande qui était la pépinière de nos matelots, ainsi que le prouvaient ces paroles de Napoléon : « Avcc un habit, un mousquet et quelques jours d'exercice, on transforme un artisan ou un laboureur en soldat, tandis qu'il faut des années pour former un matelot seulement médiocre; on improvise une armée, mais point une marine. » M. Auguis, remontant à la tribune, réclamait également contre les exigences abusives des octrois de certaines localités et de l'administration des contributions indirectes. La question du travail des enfants dans les manufactures donna lieu, malgré les améliorations signalées par M. CuninGridaine, à M. François Delessert, d'éveiller la sollicitude du ministre du commerce, sur les trop longues occupations |