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que leur passé n'est pas toujours connu. Or, quand ce passé est constaté, qu'il est établi que des condamnations précédentes, remplissaut toutes les conditions exigées par la loi, ont été des avertissements inefficaces, pourquoi la souveraineté, qui procède à la répression nouvelle, abdiquerait-elle les moyens dont elle userait contre l'agent qui aurait été antérieure ment condamné en son nom?

Ces arguments ont de la gravité, toutefois je ne pense pas qu'ils doivent prévaloir : l'agent, condamné à l'étranger, qui commet depuis sa condamnation une infraction en France, ne dément pas la présomption que la pénalité, attachée à chaque infraction par la loi française, est, en général au moins, suffisante pour faire respecter les prescriptions de cette loi. L'agent a convaincu d'impuissance, si l'on veut, la pénalité étrangère; mais la pénalité française est sauve, son autorité n'est pas ébranlée. Voilà la raison théorique. Dans la pratique, d'ailleurs, que de difficultés s'il fallait comparer entre elles les classifications d'infractions et de pénalités dans la loi étrangère, et les classifications d'infractions et de pénalités dans la loi française (1)!

La condamnation prononcée sous l'empire d'une loi ancienne à une peine afflictive ou infamante, pour un fait que la loi nouvelle aurait dépouillé de son ca

(1) Voir, en sens contraire, une brillante dissertation de Nicolini, pages 66 à 101 de la Traduction.-Dans notre sens, MM. Faustin-Hélie et Chauveau, t. Ier, p. 309, 3e édition.

ractère de crime, donnerait-elle lieu à l'application de l'art. 56 ?

Pourquoi non ? L'agent aurait subi sous la loi ancienne une pénalité plus forte que celle que lui eût infligée la loi nouvelle, et il n'a pas tenu compte de cette pénalité jugée trop sévère! A cette nature exceptionnelle, il faut appliquer le supplément exceptionnel de peine.

Les condamnations par contumace et par défaut, quand elles sont devenues irrévocables, ont sous le rapport de la récidive, le même effet que les condamnations contradictoires.

Les condamnations qui n'ont pas reçu leur exécution, soit par l'effet de la grâce, soit par l'effet de la prescription, ou dont la réhabilitation a fait cesser les effets pour l'avenir, donnent lieu à l'application de l'aggravation pour récidive, quand l'agent d'ailleurs remplit les autres conditions des art. 56, 57 et 58.

La condamnation prononcée par un Tribunal militaire ou maritime, en cas de crime ou de délit postérieur, peut-elle servir de base à l'aggravation de peine pour récidive ?

La question est résolue par le § final de l'art. 56, au moins pour cet article: oui, si la première condamnation a été prononcée pour des cas punissables d'après les lois pénales ordinaires.

Le dernier § de l'art. 56 domine les art. 57 et 58: l'art. 57, lorsque l'agent a été condamné, pour un crime punissable, en vertu de la loi pénale ordinaire, par un Tribunal militaire ou maritime et qu'il com

met ensuite un délit; l'art. 58, quand l'agent, condamné par la juridiction militaire ou maritime à plus d'une année d'emprisonnement, pour un délit punissable en vertu de la loi pénale ordinaire, commel un second délit.

Ce paragraphe parle, en effet, non seulement des crimes, mais des délits; il eût été, ce semble, mieux placé à la suite de toutes les dispositions qui concernent la récidive.

C'est au juge chargé de l'application de la peine, et non au juge du fait, qu'appartient le droit de statuer sur l'existence de la récidive; la jurisprudence et la doctrine ont considéré qu'il s'agissait d'un élément extrinsèque à l'infraction, d'une qualité de l'agent, qui appelait une répression plus forte, mais qui ne se rattachait pas au fait.

DIX-HUITIÈME LECON.

COMPLICITÉ: degrés dans l'association à l'infraction.—Participation directe, immédiate à la violation de la loi. Participation indirecte, médiate, secondaire à cette violation.-Différence entre les coauteurs ou codélinquants et les complices.-Caractères essentiels des faits de complicité.-Droit rationncl.-L'ordonnateur du crime doit-il être considéré comme auteur principal, comme coauteur de l'agent d'exécution?—Dissidence sur ce point avec les théories en crédit.-Pourquoi la résolution et les actes préparatoires, qui ne sont pas punis, en général, chez l'agent principal, sont-ils punis chez l'agent secondaire ?-Pourquoi le complice doit-il bénéficier du désistement de l'agent d'exécution ?—Le complice est-il responsable de toutes les chances attachées à l'exécution de l'infraction ?-Distinctions. - Dissidence avec des auteurs graves.-Le désistement du complice avant la consommation de l'infraction l'abrite-t-il contre la pénalité ?—N'est-il efficace qu'à la condition d'avoir été notifié à l'agent d'exécution ?—Discussion.-Rejet d'une solution trop absolue.-Le désistement postérieur à l'accomplissement de l'infraction serait sans valeur.-Les faits postérieurs à l'infraction peuvent-ils être considérés comme des faits de complicité ? -Le complice et l'auteur principal doivent-ils être punis du même genre de peine?— Historique de la complicité.-Loi Romaine: Trois complicités complicité réelle, complicité présumée, complicité spéciale.— Quelques questions résolues par la loi romaine. -Lois barbares.-Ancien Droit. —Loi des 19—22 juillet 1791.—Code pénal des 25 septembre―6 octobre 1791.-Code de 1810.—Trois complicités : complicité réelle, complicité présumée, complicité résultant de faits postérieurs à l'infraction, recel.—Questions diverses. -Définition limitative des faits de complicité.-Conséquence. -Les faits élémentaires de la participation comme coauteur ne sont pas définis.-Conséquence.

MESSIEURS,

Je n'ai, jusqu'ici, mis en présence de la loi et de la pénalité que l'agent auteur du fait ou de la tentative

punissable j'ai examiné quelles étaient les causes exclusives ou modificatives de l'imputation. Mais plusieurs agents peuvent s'être associés pour la violation de la loi ils ont tous participé directement, immédiatement à l'infraction, ils sont tous auteurs principaux ou coauteurs ; ce que j'ai dit de l'agent, auteur du fait punissable, s'applique aux coauteurs.

Mais la loi ne se borne pas, et ne doit pas se borner, à réprimer la participation directe, immédiate à l'infraction; elle punit, et doit punir, la participation secondaire, l'association au but coupable, n'eût-elle fourni son contingent qu'en secours, qu'en éléments accessoires, du moment que le résultat criminel qu'elle a préparé, facilité, protégé, s'est produit ou a pu se produire grâce, peut-être, aux encouragements et à l'assistance qu'il a obtenus.

Les agents dont la participation n'a été que secondaire et accessoire s'appellent des complices. Dans l'acception large du mot, des coauteurs, des codélinquants sont des complices, puisqu'ils sont des associés; mais, dans l'acception juridique, les complices sont des agents dont la participation à l'infraction n'a pa été assez directe pour qu'ils puissent être considérés comme coauteurs. Ils ne sont pas étrangers à l'infraction; ils l'ont couverte de leur patronage, lui sont venus en aide; ils ont essayé de sauvegarder ses auteurs; mais, à proprement parler, ils ne l'ont pas faite.

Le lien qui unit l'auteur, exclusif ou principal, à une infraction, c'est le lien de cau se à effet; le coau

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