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Certainement tout n'est pas neuf dans cet exposé, surtout pour les gens de la campagne, mais il n'en est pas de même pour ceux de la ville; on peut s'en assurer par ces questions si fréquentes que font les gens qui sortent de chez eux dans certaines saisons; Pleuvera-t-il? Dois-je prendre mon manteau, mon carrick?

Il se trouve dans cet article, de composition anglaise, quelques observations météorologiques qui ne sont pas sans intérêt, mais qui seraient devenues très sèches si je les avais isolées. Le tout fait ensemble et réunit dans un seul cadre les notions de plusieurs ; enfin j'ai pensé que puisque l'on a cru pouvoir imprimer cet article pour le peuple le plus sérieux de l'Europe, il ne serait pas tout-à-fait déplacé, même en le rangeant parmi les balivernes pour le peuple qui, de tous, aimait le plus a rire autrefois, dit-on.

PONT DE CORDES

DANS L'AMÉRIQUE MÉRIDIONALE.

Le pont qui est établi sur le Maypo, près de Santiago, capi→ tale du Chili, est véritablement un objet de grande curiosité, et par sa simplicité et par son exacte ressemblance, soit dans le principe, soit dans l'exécution, avec ceux qui ont été établis récemment en Angleterre sur des chaines.

Ce pont offre un passage étroit formé avec des planches pla cées de travers, qui portent par leurs deux bouts sur des cordes perpendiculaires et courtes, attachées de chaque côté à trois forts câbles formant trois courbes placées l'une sur l'autre, et qui traversent la rivière, large de 123 pieds. D'un bout, elles sont attachées au roc, à une hauteur de 38 pieds au-dessus de l'eau ; comme le côté opposé est plus bas, on a corrigé la pente naturelle du terrain, en élevant des piliers de bois enfoncés dans la terre. Ils sont soutenus par d'autres pieux placés en arrière, ainsi que par des liens qui les attachent à de grands arbres.

Comme les cordes sont très-élastiques de leur nature, quoique tout ait été calculé pour rendre le poids des hommes ou des animaux qui traversent ce pont égal sur tous les points, néanmoins il éprouve de telles vibrations qu'on ne s'en sert que par nécessité, et avec une sorte d'effroi, encore moins parce qu'il paraît peu solide, que parce qu'il a une telle élasticité, que les seuls hommes qui sont habitués à le traverser y marchent à pied ferme. (Extrait du Journal du cap. Basil Hall.)

Si nous avons donné connaissance de cette espèce de ponts, ce n'est pas seulement la curiosité que nous avons voulu alimenter; nous avons voulu aussi provoquer de nouvelles idées dans l'esprit des lecteurs que nous pourrons avoir dans les pays montagneux, où les torrens, et souvent des gorges très-étroites, interrompent les communications, et forcent les habitans et les voyageurs à prolonger leur route, quelquefois de plusieurs lieues, pour franchir un passage de quelques brasses de largeur. Le pont de Maypo est très-imparfait; mais il suffirait de remplacer de chaque côté l'une des cordes par une chaîne de fer, ou d'en placer une sous le milieu du chemin pour empêcher sa trop grande élasticité. Enfin on pourrait établir des garde-fous avec un double rang de cordes seulement, pour rendre un pareil pont très-sûr et très-praticable.

Les idées défectueuses dans leur ensemble ne sont pas toujours privées d'intérêt réel; les arts ou les métiers, les constructions et les fabrications qui approchent aujourd'hui le plus de la perfection, se sont montrés souvent à leur origine avec une grossièreté repoussante; ce n'est que successivement et peu à peu qu'ils se sont améliorés et perfectionnés, et si l'on eût dédaigné la première invention, ou si elle n'avait pas eu lieu, jamais peut-être quelques-uns des procédés qui sont aujourd'hui les plus utiles, et de l'usage le plus commun, n'auraient jamais eu d'existence.

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DE LA NÉCESSITÉ

D'AUGMENTER LES FORCES MILITAIRES

DE LA FRANCE (1).

Par le Colonel MARBOT.

Il n'est personne qui, en comparant l'armée permanente de la France, avec celles qu'entretiennent les autres puissances continentales, ne s'aperçoive de la grande disproportion qui existe sous ce rapport, à notre désavantage. En effet, toute l'Allemagne, l'Autriche, la Prusse et la Russie semblent, par leur attitude, bien plutôt disposée à envahir le territoire de leurs voisins, que simplement préparées à défendre le leur. Le premier désir qui doit donc naturellement s'élever dans l'âme d'un Français, est celui de voir sa patric en état de résister à une invasion, à laquelle il est permis de croire, lorsque rien ne garantit qu'elle ne peut pas avoir lieu, et que les moyens de l'exécuter sont là. Tel est le motif qui a dirigé le colonel Marbot en écrivant l'ouvrage, plein d'idées justes et patriotiques, qui fait l'objet de cet article. Il n'est pas de notre sujet d'exami ner si et jusqu'à quel point une pareille invasion serait possible ou dangereuse; cet examen ne peut être fait, même sous le rapport militaire, sans la rattacher à des questions politiques d'un

(1) Paris, chez Anselin et Pochard, rue Dauphine, no. 9. 1825.

haut intérêt, dont la place n'est pas dans ce journal. Nous nous contenterons de celui de l'ouvrage du colonel Marbot.

Quoique le titre paraisse annoncer qu'il doit traiter des forces militaires de la France dans toute leur étendue; c'est-à-dire, des moyens de tout genre que notre patrie peut opposer aux attaques d'un ou plusieurs ennemis ; l'auteur s'est borné à la seule armée permanente. Nous devons regretter que, n'ayant pas envisagé cette question importante dans son entier, il ait borné ses recherches et ses méditations, à une seule des parties qui composent le total de la force militaire des nations. Nous avons exposé dans un précédent mémoire (1) que l'élément mobile de la force de la guerre, qui est précisément ce que l'auteur entend par force militaire, devait se composer luimême de deux parties, l'une permanente et l'autre temporaire ou accidentelle; et cela parce que le développement extraordinaire de force, que peut nécessiter une attaque menaçante, n'est lui-même qu'une circonstance accidentelle ; et parce qu'il n'est aucun état qui puisse supporter l'entretien d'une armée toujours égale à la totalité de celles qui peuvent l'attaquer. C'est ce qui a fait que partout on a cherché sous diverses dénominations et par différens moyens à créer une force armée temporaire, ou auxiliaire, ou accidentelle. Nous aurions donc désiré que le colonel Marbot, après avoir fixé les limites que ne doit pas dépasser l'armée permanente, en raison de la population, des besoins, des arts et de l'agriculture et de la situation des finances; eut porié son attention sur les moyens de l'augmenter dans les mo mens d'un pressant besoin, par des ressources hors de son sein et hors du cercie où elle s'alimente, sans grever la population par la distraction d'un trop grand nombre d'hommes, des travaux habituels de la société. Nous sommes persuadés qu'il l'aurait fait avec son talent ordinaire.

Après avoir dans un premier chapitre, qui sert d'introduction, exposé les deux moyens extrêmes ; l'un de ne faire repo

(1) Journal des Sciences Militaires. Tome I, première livraison, page 25 et suivante.

ser la défense que sur des levées en masse, et l'autre de l'assurer par des armées perinanentes fort nombreuses; l'auteur les trouve tous deux inconvenans. Le premier, parce qu'il ne produit que des troupes non-aguerries, et l'autre, parce qu'il est ruineux. Nous partageons entièrement son opinion. Mais, nous croyons que cette juste réprobation, ne préjuge rien contre la mesure moyenne qui serait d'avoir une armée permanente proportionnée à la situation géographique et politique du pays, et une force auxiliaire, prête à s'y joindre au besoin.

nous,

Le second chapitre est destiné à prouver par des calculs, dont personne ne peut contester l'exactitude, sa disproportion des forces militaires de la France; c'est-à-dire, de son armée permanente, avec celles de l'Allemagne et la Russie. Cette dernière est portée à 800,000 hommes; c'est effectivement ce que toutle monde dit, et ce qu'il importe à la Russie qu'on croye. Mais témoins oculaires de la force réelle de l'armée russe, qui, en 1812, présentait des états de situation et des revues de solde, pour 916,000 hommes, nous nous permettrons de la réduire à moitié. L'Allemagne offre une force totale moins disproportionnée à sa population qui est égale à la nôtre, et encore voit-on en ce momeut, tous les souverains de la confédération germanique disposés à réduire une force, trop coûteuse pour leur finances. L'Autriche a déjà opéré cette réduction. Il ne reste donc que la Prusse. Mais cet état ne formerait-il pas par son système politique, une exception, et, ne peut-il pas être considéré comme étant organisé dans un système d'agrandissement? Quoi qu'il en soit, nous convenons volontiers avec le colonel Marbot, que les forces militaires actuelles de la France, ne sont pas en mesure de résister à celles de ses voisins réunis. Mais nous croyons que l'augmentation nécessaire ne saurait porter sur l'armée permanente seule, sans risquer de tomber dans de grands inconvéniens. En admettant, comme l'expose l'auteur, que l'Allemagne pourrait se présenter sur nos fron tières avec 6 à 700,000 hommes, il en résulte évidemment que ce n'est pas une armée permånente seulement, que nous pouvons penser à lui opposer avec succès. Car, il n'est

pas possible

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